LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE SECTION, A RENDU L’ARRÊT SUIVANT :
Sur demande des héritiers de feu Jean Léonard Cantave savoir Estève Cantave, Pierre Yves Cantave, Guy Cantave, Joseph Cantave, Jean Lifranc Cantave, Mathurin Cantave, Jean Évenson Cantave, Bossuet Cantave, Jean Venet Cantave, Jean Joseph, Marie Ulna Cantave, Bertide Cantave, Frida Cantave, tous propriétaires, demeurant et domiciliés à la Croix-des-Bouquets dûment identifés aux nos suivants…………………, poursuites et diligences des leurs mandataires, les sieurs Jean Walson Vertus et Osnel Michel, propriétaires, demeurant et domiciliés à la Croix-des-Bouquets identifiés aux nos 003-395-917-6 et 005-038-654-4 ayant pour avocats Mes James Dorismar et Jean Ronès Brun du barreau de la Croix-des-Bouquets avec élection de domicile au cabinet de Me Edwin Coq, Port-au-Prince, Rue Chériez # 141 et au greffe de la Cour de cassation
En récusation ou de renvoi en masse de tous les juges du Tribunal de première instance de la Croix-des Bouquets dans l’affaire les opposant aux héritiers de feu Constantin Mayard Paul désignés par Grégory et Thierry Mayard Paul ayant pour mandataire et cohéritier le sieur Clifford Mayard Paul ;
OUÏ à l’audience ordinaire et publique du lundi 21 mai 2012, en l’absence des parties à la barre, le substitut François Fouchard Bergrome en la lecture des conclusions du commissaire du gouvernement Thiers Malette tendant au rejet pur et simple de la demande en renvoi pour cause de suspicion légitime et des autres demandes formulées dans la requête ;
VU la déclaration de récusation, la requête avec pièces à l’appui, le récépissé de l’amende consignée, les conclusions du ministère public, les textes de loi invoqués ;
ET APRÈS EN AVOIR DÉLIBÉRÉ EN LA CHAMBRE DU CONSEIL, CONFORMÉMENT À LA LOI.
ATTENDU QUE le cinq (5) juillet deux mille onze (2011), les héritiers
Constantin Mayard Paul représentés par leur cohéritiers et mandataire Clifford Mayard Paul ont introduit une action en revendication du droit de propriété par-devant le Tribunal de première instance de la Croix-des-Bouquets contre les héritiers de feu Jean Leonard Cantave.
QUE, doutant de l’impartialité des juges dudit tribunal, les assignés ont fait, via leur avocat dument mandaté Me Jean Ronès Brien, une déclaration de récusation ou de renvoi en masse de tous les juges au greffe du Tribunal de première instance de cette juridiction.
OUÏ à l’appui de leur requête adressée à la Cour et signifée aux parties adverses, les récusant exposent les causes de leur action non combattues par les parties adverses:
a) le trafic d’influence et l’abus de position dominante liée à la fonction politique de Grégory et Thierry Mayard Paul ;
b) Antécédents avec les juges du Tribunal de première instance de la Croix-des-Bouquets ;
ATTENDU QU’IL est de règle que les juridictions sont d’ordre public, elles ne peuvent être dessaisies de la connaissance des affaires que pour des causes graves, précises et sérieuses ;
Les consorts Cantave évoquent la position politique dominante actuelle de Grégory et Thierry Mayard Paul comme première cause de leur récusation ;
ATTENDU QUE la position politique occupée par un citoyen ne doit aucunement influencer un Juge voire toute une juridiction, et ce en vertu même du principe de l’indépendance des trois pouvoirs qui caractérisent l’État. Il faut donc que le pouvoir arrête le pouvoir ;
ATTENDU QUE les récusants n’ont pas prouvé en quoi et comment les héritiers Mayard Paul ont abusé de leur position politique dominante pour infuencer tous les juges de la juridiction de la Croix-des-Bouquets au point de faire naitre et justifer des appréhensions dans leurs esprit ;
QUE CETTE CAUSE NON FONDÉE SERA ÉCARTÉE.
Les récusants parlent des antécédents avec les juges du Tribunal de première instance de la Croix-des-Bouquets et justifent leurs appréhensions en s’appuyant sur le refus du Juge des référés Marie Rosie Degand Nicolas de rendre son ordonnance du fait d’une récusation du sieur Osnel Michel, l’un
de leurs mandataires ;
QUE, pour être agréée, une demande de récusation ou de renvoi en masse de tout un tribunal doit être basée sur une cause de nature à faire suspecter l’impartialité des juges de cette juridiction ;
QUE, donc c’est l’impartialité de tout le tribunal qui ne doit être l’objet d’aucun doute non celle d’un juge ;
QUE, s’agissant de récusation d’un juge à partir de la communication de l’exploit de récusation, il sera sursis à tout jugement ou opérations jusqu’à la décision inadmissible ou admissible ladite récusation ;
Le refus du juge susdit n’est pas de nature à soulever des appréhensions fondées, et susceptibles de faire naître une suspicion légitime pouvant agréer une demande en dessaisissement d’un tribunal ni un motif de renvoi d’un tribunal à un autre ;
Quant à l’amitié qui lie le juge Jean Wilner Morin d’avec l’avocat des héritiers Mayard-Paul Me Jean Renel Sénatus, elle est loin d’être une cause de suspicion légitime non seulement le juge Jean Wilner Morin n’avait pas la charge du dossier, il est actuellement juge au Tribunal de première instance de Port-au-Prince et Me Jean Renel Sénatus, commissaire du gouvernement près ledit tribunal ;
Il s’ensuit que, même lorsqu’un arrêt de renvoi à un autre tribunal a été ordonné, il peut être rapporté lorsque les causes qui l’avaient ordonné ont cessé d’exister par suite des changements survenus dans la composition du premier tribunal.
ATTENDU QU’EN produisant pareille demande, les récusants n’ont pas apporté à leur appui des preuves directes du moins des indices et des présomptions graves, des faits de nature à faire douter de l’impartialité des magistrats de la Croix-des-Bouquets et susceptibles de justifier la suspicion légitime soulevée contre ledit tribunal ;
PAR CES MOTIFS, la Cour, sur les conclusions conformes du ministère public, rejette la demande de récusation ou de renvoi en masse de tous les juges du Tribunal de première instance de la Croix-des-Bouquets proposée par les héritiers de feu Jean Léonard Cantave dans l’affaire qui les oppose aux héritiers de feu Constantin Mayard Paul, Dit acquise à l’État l’amende consignée.
AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PAR NOUS , Anel Alexis Joseph, président, Jean MEDTZGHER Théodore, Bien-Aimé Jean, Frantzi Philémon, Louis Pressoir Jean Pierre, juges en audience publique du mercredi trente mai deux mille douze (30 mai 2012) en présence de Me Jean Sinclair Joassaint, substitut, représentant du ministère public avec l’assistance de Silien Pluviose, greffier du siège.
IL EST ORDONNÉ à tous huissier sur ce requis de mettre le présent arrêt à exécution, aux officiers du ministère public prés les tribunaux civils d’y tenir la main, à tous commandants et autres officiers de la force publique d’y prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
EN FOI DE QUOI la minute du présent arrêt est signé du président, des juges et du greffer susdits.
AINSI SIGNÉ: ANEL ALEXIS JOSEPH – JEAN MEDTZGHER THÉODORE – BIEN-AIMÉ JEAN – FRANTZI PHILÉMON - LOUIS PRESSOIR JEAN PIERRE – ET SILIEN PLUVIOSE.