LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE SECTION, A RENDU L’ARRÊT SUIVANT :
SUR LE POURVOI des dame et sieur veuve Micheline Denis Rampuy et Pierre Énick Claude Denis, tous deux propriétaires, demeurant et domiciliés à Pétion-Ville ; respectivement identifiés aux nos 003-008-134-6 et 001-932-732-3, procédant par Mes Pierre C. Labissière, Wilson Estimé et Henry Jean Louis, avocats du barreau de Port-au-Prince, tous dûment identifiés patentés et imposés avec élection de domicile en leur cabinet sis à la rue de la Montagne, #11 (Pacot), Port-au-Prince ;
CONTRE un arrêt de la Cour d’appel de Port-au-Prince, rendu le mercredi quinze mai deux mille treize entre eux et le sieur Jean Mossanto Petit, propriétaire, demeurant et domicilié à Pétion-Ville, identifié au no.003-058-112-3, ayant pour avocat constitué Me Jean Renaud Romélus du barreau de Port-au-Prince, dûment identifié, patenté et imposé avec élection de domicile en son cabinet sis à l’ave Lamartinière, #54, 3 niveau ;
OUÏ à l’audience ordinaire et publique du lundi trente-et-un mars deux mille quatorze, les demandeurs représentés par Me Wilson Estimé, ont produit leurs observations, le défendeur n’a pas comparu ni personne pour lui, le substitut Me François Fouchard Bergrome en la lecture de ses conclusions de son confrère Me Patrick H.C.Pierre-Fils, tendant au maintien de l’arrêt attaqué dans toute sa forme et teneur ;
VU aux dossiers : l’arrêt querellé, la déclaration de pourvoi, les requêtes des parties ensemble leurs exploits de signification, les autres pièces à l’appui, le récépissé attestant le paiement de l’amende consignée, les conclusions du ministère public et les textes de loi invoqués ;
Et après avoir délibéré en chambre du conseil conformément à loi ; Il ressort des faits de la cause que suite à une action en revendication de droit de propriété introduite au Tribunal de première instance (TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE) de Port-au-Prince par les Denis, est sortie le quatorze mai deux mille neuf une décision, dont le dispositif est ainsi libellé : « PAR CES MOTIFS, le tribunal, après en avoir délibéré au veau de la loi le ministère public entendu, maintient le défaut octroyé ; dit et déclare le sieur Fritz Denis agissant pour lui que pour Pierre Émile Claude Denis, celui-ci aux droits de Roger Denis, propriétaires exclusifs tant par titre que par prescription des seize carreaux trente- huit centièmes de carreaux de terre bornés au Nord par Morigène Fortuné Alexis Exantus et Aurélus St-Félix, au Sud par le Dr Villard et les héritiers Antoinette Pierre, à l’Est par le Docteur Villard et Elia Noutas et à l’Ouest par le docteur Villard ; dit que le sieur Jean Mosanto Petit est sans droit ni qualité ; ordonne le déguerpissement du sieur Jean Mossanto Petit des seize carreaux et 38/100 et de toute partie des seize carreaux et trente- huit centièmes de carreaux de terre litigieux et la démolition de toutes constructions y érigées pendant l’indue jouissance ; accorde du chef du déguerpissement l’exécution provisoire sans caution ; reconnaît la faute de l’assigné et les préjudices causés à la partie demanderesse par cette faute, condamne le sieur Jean Mossanto Petit à « un million de gourdes en réparation des préjudices causés et aux frais et dépens de la procédure ; commet l’huissier Nicolas Roosevelt de ce tribunal pour la signifcation du jugement. »
Contre ce jugement, le sieur Jean Mossanto Petit a formé opposition. Mécontents, les Denis ont produit par-de- vant le tribunal de l’opposition une requête déclarant que l’action en opposition de Jean Mossanto Petit est irrecevable puisqu’il s’agit d’un jugement contradictoire. Ledit tribunal, après son transport sur les lieux, a rendu un avant-dire droit ordonnant une expertise pour mieux localiser la portion de terre litigieuse. C’est contre ce jugement avant-dire droit que les Denis ont interjeté appel par acte en disant que « le premier juge, en recevant l’opposition de Mossanto Petit, a admis une voie de recours que le législateur n’a pas indiquée contre toute décision qui n’est pas par défaut » (sic). La Cour d’appel de Port-au-Prince, en date du quinze mai deux mille treize, a prononcé un arrêt confirmant la décision du juge de l’opposition. Contre cet arrêt, les demandeurs se sont pourvus en Cassation et pour le faire casser ils ont excipé d’un seul moyen basé sur la violation des articles 287, 282, 236 du CPC ; moyen combattu par le défendeur.
SUR L’UNIQUE MOYEN DES POURVOYANTS. ATTENDU QUE les pourvoyants soutiennent que le jugement du quatorze (14) mai deux mille neuf (2009) est un jugement contradictoire, en considérant que le sieur Jean Mossanto Petit avait comparu au Tribunal de première instance de Port-au-Prince. Que, de plus, la nature d’un jugement ne dépend pas de l’appréciation personnelle du juge ni de la convention des parties et que ce jugement étant la suite du jugement contradictoire du trente (30) avril mille neuf cent quatre-vingt-dix- huit (1998), qui apporte la preuve que Jean Mossanto Petit avait conclu au fond ;
ATTENDU QUE les pourvoyants ont déclaré que c’est le sieur Jean Mossanto Petit qui avait de- mandé au tribunal d’ordonner une mesure d’expertise, ayant acquiescé, le tribunal a fait droit à cette demande par avant-dire droit le trente avril mille neuf cent quatre- vingt-dix-huit. En toute logique, il n’y a jusqu’ici aucune conclusion de fond ;
ATTENDU QU’il est à noter dans le jugement du 14 mai 2009 : « réévoqué à l’audience du jeudi six (6) novembre deux mille huit(2008), Me Wilson Estimé l’a retenue et demande au tribunal de faire appeler la partie adverse. Appelés à trois reprises, Mossanto Petit et avocat n’ont pas comparu. Me Estimé sur la non-comparution de la partie adverse requiert au tribunal de faire droit aux fins, moyens, conclusions pris pour le sieur Fritz Denis après la réalisation de la mesure d’instruction ainsi réinsérer dans l’assignation en date du 12 février 97,tout en rejetant les fins, moyens et conclusions non fondés de la part des avocats de Jean Mossanto Petit et requérir défaut contrepartie et avocat. Ce sera droit » (Sic) ;
ATTENDU QUE le juge a fait droit aux demandes de Me Estimé dans le jugement du 14 mai 2009 en déclarant : maintient le défaut octroyé à l’audience, déclare les Denis propriétaires exclusifs tant par titre que par prescription du terrain litigieux et en même temps commet un huissier pour la signification du jugement. D’où le caractère de défaut ;
ATTENDU QU’un jugement a le caractère de jugement par défaut, soit qu’il ait été rendu contre un individu qui ne s’est pas présenté, soit qu’il ait été rendu contre un individu qui, s’étant présenté, n’a pris aucune conclusion au fond ni effectué le dépôt de ses pièces sur ce qui a été jugé. Dans l’un comme dans l’autre cas, il est légalement réputé n’avoir comparu.
ATTENDU QUE l’unique moyen des pourvoyants n’étant pas fondé, il convient de le rejeter ; en conséquence reconnaît que l’arrêt de la Cour d’appel de Port-au-Prince ne mérite pas les reproches adressés ;
PAR CES MOTIFS, la Cour, sur les conclusions conformes du ministère public, rejette l’unique moyen ensemble le pourvoi des demandeurs en cassation contre l’arrêt de la Cour d’appel de Port- au-Prince rendu le quinze mai deux mille treize entre lesdits pourvoyants et Jean Mossanto Petit ; dit acquise à l’État l’amende consignée ; condamne les dame et sieur Micheline Denis Rampy et Pierre Emile Clause Denis aux frais et dépens de la procédure liquidés à la somme de ….gourdes, en ce non compris le coût du présent arrêt.
AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PAR NOUS , Anel Alexis Joseph, président, Jean Medtzgher Théodore, Windelle Coq Thélot, Franzi Philémon, Louis Pressoir Jean Pierre, juges, à l’audience ordinaire et publique du mercredi quatre (4) juin deux mille quatorze en présence du substitut commissaire du gouvernement près la Cour, Me Jean Sainclair Joassaint, représentant le ministère public, avec l’assistance du greffer du siège, Me, Pluviose Silien.
IL EST ORDONNÉ à tous huissier sur ce requis de mettre le présent arrêt à exécution, aux officiers du ministère public près les tribunaux civils d’y tenir la main, à tous commandants et autres officiers de la force publique d’y prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
EN FOI DE QUOI la minute du présent arrêt est signée du président, des juges et du greffier sus- dits. AINSI SIGNÉ : ANEL ALEXIS JOSEPH – JEAN MEDTZGHER THÉODORE – WINDELLE COQ THÉLOT – FRANZI PHILÉMON – LOUIS PRESSOIR JEAN PIERRE – ET PLUVIOSE SILIEN.