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24/04/1972 | MONACO | N°25034

Monaco | Cour d'appel, 24 avril 1972, Dame G. Veuve M. c/ O.


Abstract

Prescription civile

Intérêts - Prescription quinquennale - Convention d'anatocisme - Prescription trentenaire.

Résumé

La « clause de capitalisation » ayant pour effet licite de convertir en capital des intérêts impayés à l'échéance quelle que soit leur périodicité, la prescription quinquennale devient dans ce cas inapplicable ; en effet, cette prescription, qui est la peine prévue contre le créancier négligent, ne peut atteindre celui qui, d'avance, a préservé son droit au moyen d'une condition autorisée par la loi et acceptée par le

débiteur.

Motifs

La Cour,

Statuant sur l'appel interjeté par M.-L. G., Veuve M., d'un jugem...

Abstract

Prescription civile

Intérêts - Prescription quinquennale - Convention d'anatocisme - Prescription trentenaire.

Résumé

La « clause de capitalisation » ayant pour effet licite de convertir en capital des intérêts impayés à l'échéance quelle que soit leur périodicité, la prescription quinquennale devient dans ce cas inapplicable ; en effet, cette prescription, qui est la peine prévue contre le créancier négligent, ne peut atteindre celui qui, d'avance, a préservé son droit au moyen d'une condition autorisée par la loi et acceptée par le débiteur.

Motifs

La Cour,

Statuant sur l'appel interjeté par M.-L. G., Veuve M., d'un jugement rendu le vingt-et-un mai mil neuf cent soixante et onze, par le Tribunal de Première Instance de Monaco, lequel a mis à néant l'opposition à commandement signifiée à O., par dame G. Veuve M. et M. épouse G., a mis cette dernière hors de cause ; a débouté dame G. Veuve M. de sa demande ; a dit que la créance d'O., à l'encontre de dame G., Veuve M. s'élevait à cent cinquante quatre mille sept cent soixante-treize francs, et condamné celle-ci à payer cette somme à O.;

Statuant également sur l'appel de L. O.;

Considérant que ces appels sont réguliers en la forme et qu'il y a lieu de les joindre ;

Considérant que dame G., Veuve M. fait grief à la décision entreprise d'avoir estimé que les intérêts de la créance se prescrivaient par trente ans, - et non par cinq ans - en raison de la convention des parties, selon laquelle les intérêts à échoir se capitaliseront et produiront eux-mêmes des intérêts ; que sans contester la validité de cette convention, elle soutient que, si la jurisprudence française à laquelle s'est référé le jugement, admet qu'il y a substitution de la prescription trentenaire à la prescription quinquennale, c'est seulement dans le cas où les intérêts se capitalisent en fin d'année ; qu'au contraire, la convention intervenue entre les parties prévoit que jusqu'au remboursement du capital, celui-ci produira des intérêts au taux de douze pour cent l'an, payables par trimestre anticipés et que, dans le cas où les intérêts ne seraient pas payés à leur échéance, ils produiraient eux-mêmes d'autres intérêts ; qu'elle prétend que les intérêts prévus à la convention sont trimestriels et non pas annuels, et qu'ainsi en l'état d'un texte précis, sans équivoque et d'ordre public, comme celui de l'article 2097 du Code civil, il ne peut être fait état d'une jurisprudence étrangère ;

Qu'elle reproche encore au jugement d'avoir rejeté la demande d'expertise qui était formulée expressément par l'une et l'autre des parties, pour établir leurs comptes, sans motiver ce refus et alors que le montant de la somme réclamée par O. était nettement supérieur à celle qui était réellement due ;

Qu'elle demande, d'une part, de juger que la prescription de cinq ans s'appliquera aux intérêts réclamés par O., d'autre part, d'ordonner une expertise aux fins d'établir le compte des parties, et de réformer ainsi la décision entreprise ;

Considérant que, dans ses écritures O. fait grief au jugement d'avoir à tort ordonné la mise hors de cause de dame M., épouse G., au motif qu'elle avait accepté, sous bénéfice d'inventaire, la succession de son père, feu J. M. ; qu'il soutient que la mise hors de cause de l'intimée, pour ce seul motif n'est pas fondée ; qu'en effet, dans l'hypothèse où elle accepterait ensuite la succession, il ne pourrait plus alors, exercer aucun recours contre elle ;

Qu'il conclut à la réformation du jugement en ce qu'il a mis dame M. épouse G. hors de cause et à sa confirmation dans ses autres dispositions, sauf à y ajouter le montant des intérêts échus depuis le jugement ; qu'il demande, en définitive, la condamnation des intimées au paiement du capital et des intérêts échus au quinze janvier mil neuf cent soixante-douze, et de la pénalité de retard, soit au total la somme de cent cinquante cinq mille neuf cent quatre-vingt-dix-sept francs ;

Qu'il reconnaît cependant, en dernier lieu dans ses observations orales, au cours des débats, qu'en raison de la renonciation actuellement acquise de dame M. épouse G. à la succession de son père, son appel est devenu sans objet ;

Considérant que dame M. épouse G. justifie que par acte reçu au greffe général le cinq novembre mil neuf cent soixante et onze, elle a renoncé purement et simplement à la succession de feu J. M., son père ; qu'il convient, dans ces conditions de confirmer la décision des premiers juges qui l'ont mise hors de cause ;

Considérant que dame G., Veuve M. ne conteste pas qu'aux termes de l'acte intervenu entre les époux M. et dame R., aux droits respectifs desquels se trouvent les parties, il a été convenu que, dans le cas où les intérêts ne seraient pas payés à leur échéance exacte, les intérêts échus produiraient eux-mêmes d'autres intérêts ; qu'une telle stipulation n'est d'ailleurs contraire ni à l'esprit ni à la lettre de l'article 1009 du Code Civil, qui, à la différence de l'article 1154 du Code Civil français ne soumet l'accord des parties à aucune condition particulière ;

Considérant que la « clause de capitalisation » ayant pour effet licite de convertir en capital les intérêts impayés à l'échéance quelle que soit leur périodicité, la prescription quinquennale de l'article 2097 du Code Civil, qui règle le sort des intérêts des sommes prêtées devient dans ce cas inapplicable ; qu'en effet, cette prescription, qui est la peine prévue contre le créancier négligent, ne peut atteindre celui qui, d'avance, a préservé son droit au moyen d'une condition autorisée par la loi et acceptée par le débiteur ;

Que les premiers juges ont, par conséquent, justement décidé que les intérêts capitalisés dus par la dame Veuve M. se prescrivaient non par cinq ans, mais par trente ans ;

Considérant qu'O. ne justifie pas, en l'état, de la date à laquelle il a acquis les huit grosses fractionnelles, ni de sa propriété sur sept d'entre elles, qui ne sont pas présentées ; qu'il y a également lieu, en raison du désaccord des parties, de faire calculer le montant des sommes dues en application de la convention du treize mai mil neuf cent cinquante-neuf ;

Qu'il convient donc de désigner un expert à ces fins, lequel aura également pour mission de concilier les parties si faire se peut ;

Considérant qu'il n'est par ailleurs apporté aucun élément de preuve satisfaisant en ce qui concerne tous autres moyens ou arguments présentés par les parties ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

En la forme, reçoit dame G., Veuve M. et L. O. en leur appel ;

Au fond, dit mal fondé l'appel d'O. et l'en déboute ;

Dit partiellement fondé l'appel de dame Veuve M. ;

Met dame M. épouse G., hors de cause ;

Avant dire droit,

Désigne M. Matas, 5 avenue Edouard VII à Menton, lequel, serment prêté, aura pour mission de déterminer la date à laquelle O. est devenu propriétaire des grosses fractionnelles de l'acte du treize mai mil neuf cent cinquante-neuf, de faire le compte des parties, à partir de cette date, conformément aux stipulations de l'acte, concilier les parties si faire se peut,

Dit qu'il déposera son rapport dans le délai de trois mois à compter de sa saisine et qu'en cas de retard ou de refus de sa part, il pourra être pourvu à son remplacement à la requête des parties, ou même d'office, par simple ordonnance ;

Dit que l'expert, sauf dispense régulière des parties, prêtera serment devant M. le premier Président, ou le magistrat par lui désigné, à qui délégation est donnée pour le recevoir ;

Et rejetant en tant que de besoin comme inutiles ou mal fondées toutes conclusions plus amples ou contraires des parties ;

Composition

MM. Cannat, prem. prés., François, subst. proc. gén., MMe Clérissi et Boisson, av. déf., Barallelo, av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25034
Date de la décision : 24/04/1972

Analyses

Procédure civile ; Contrats bancaires


Parties
Demandeurs : Dame G. Veuve M.
Défendeurs : O.

Références :

article 1009 du Code Civil
article 2097 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;1972-04-24;25034 ?

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