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14/05/2019 | MONACO | N°18166

Monaco | Cour d'appel, 14 mai 2019, La SCI ANNONCIADE B c/ le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « CHÂTEAU PÉRIGORD »


Motifs

COUR D'APPEL

R.

ARRÊT DU 14 MAI 2019

En la cause de :

- La SCI ANNONCIADE B, Société Civile Particulière de droit monégasque, inscrite au Répertoire Spécial des Sociétés Civiles de Monaco sous le n° 82 SC 04620, dont le siège social est sis 1, avenue des Citronniers, Monaco, agissant poursuites et diligences de sa gérante en exercice, Madame d. B. demeurant es-qualité audit siège et domiciliée à titre personnel à 98000 Monaco - X1;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d

'appel de Monaco, et plaidant par Maître André JACQUIN, avocat au barreau de Paris, Maître Agnès LEBATTEUX...

Motifs

COUR D'APPEL

R.

ARRÊT DU 14 MAI 2019

En la cause de :

- La SCI ANNONCIADE B, Société Civile Particulière de droit monégasque, inscrite au Répertoire Spécial des Sociétés Civiles de Monaco sous le n° 82 SC 04620, dont le siège social est sis 1, avenue des Citronniers, Monaco, agissant poursuites et diligences de sa gérante en exercice, Madame d. B. demeurant es-qualité audit siège et domiciliée à titre personnel à 98000 Monaco - X1;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître André JACQUIN, avocat au barreau de Paris, Maître Agnès LEBATTEUX, avocat au barreau de Paris, substituant Maître Patrice LEBATTEUX, avocat en ce même barreau et Maître Elie COHEN, avocat au barreau de Nice ;

APPELANTE,

d'une part,

contre :

- Le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « CHÂTEAU PÉRIGORD », sis 6, Lacets Saint Léon à Monaco 98000, pris en la personne de son syndic en exercice, Monsieur Michel GRAMAGLIA, demeurant en cette qualité 14, boulevard des Moulins - BP 153 - Monte-Carlo - MC 98003 Monaco Cedex ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Geoffroy LE NOBLE, avocat au barreau de Paris ;

INTIMÉ,

d'autre part,

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 11 janvier 2018 (R. 2307) ;

Vu l'exploit d'appel parte in qua et d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 13 mars 2018 (enrôlé sous le numéro 2018/000102) ;

Vu les conclusions déposées les 19 avril 2018, 22 novembre 2018 et 31 janvier 2019 par Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, au nom du Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « CHÂTEAU PÉRIGORD » ;

Vu les conclusions déposées les 2 octobre 2018 et 15 janvier 2019 par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de la SCI ANNONCIADE B ;

À l'audience du 5 février 2019, ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel parte in qua relevé par la SCI ANNONCIADE B à l'encontre d'un jugement du Tribunal de première instance du 11 janvier 2018.

Considérant les faits suivants :

La société ANNONCIADE B a acquis, le 24 novembre 1982, une parcelle sise Quartiers Saint-Léon et de la Rousse à Monte-Carlo, auprès de la SCI PÉRIGORD ANNONCIADE, parcelle qui avait fait l'objet d'un apport par la SCI SAINT LEON, laquelle l'avait acquise de la SCI ANTINEA au mois de mars 1965 dans le cadre du plan de coordination du quartier Saint Léon.

Cette parcelle faisait partie de la propriété acquise par cette société en 1958. Ce fonds était alors grevé de servitudes au profit de parcelles contiguës appartenant à la SCI SAINT LEON.

En 1969, la SCI ANTINEA et la SCI SAINT LEON avaient constitué des servitudes complémentaires et réciproques entre leurs fonds respectifs.

La construction de l'ensemble immobilier « Résidence Saint Georges », après autorisation ministérielle obtenue en 2003, a donné naissance à un litige entre la SCI ANNONCIADE B, propriétaire de la parcelle de terrain où a été édifiée cette résidence, et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble voisin CHATEAU PÉRIGORD.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier CHATEAU PÉRIGORD, arguant de violations des servitudes conventionnelles établies par acte des 29 janvier et 3 mars 1958, suite à la construction litigieuse par la société ANNONCIADE B a saisi le Tribunal de première instance d'une action visant à la mise en conformité des édifices construits.

Suivant jugement en date du 14 juin 2012, le Tribunal de première instance a accueilli le syndicat des copropriétaires dans sa demande de mise en conformité de la résidence Saint Georges et a ordonné une mesure d'expertise pour décrire les irrégularités présentées au regard des servitudes et déterminer, le cas échéant, la nature, le coût et la durée des travaux de mise en conformité de l'immeuble.

Par arrêt du 11 février 2014, la Cour d'appel a confirmé ce jugement.

Le pourvoi formé par la SCI ANNONCIADE B a été rejeté le 15 octobre 2014 par la Cour de révision.

Après dépôt du rapport d'expertise et par jugement du 11 janvier 2018, le Tribunal de première instance a statué ainsi qu'il suit :

« Déclare irrecevable le moyen nouveau développé par la SCI ANNONCIADE B pour voir rejeter les demandes du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier CHATEAU PÉRIGORD comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée ;

Dit que l'obligation de la SCI ANNONCIADE B de mettre sa propriété en conformité avec l'ensemble des contraintes résultant des servitudes figurant à l'acte authentique du 24 novembre 1983 passé en l'étude de Maître REY, porte sur la totalité de l'immeuble, et non seulement sur la parcelle cadastrée sous le n° 213 de la section E ;

En conséquence,

Condamne la SCI ANNONCIADE B à :

* exécuter ou faire exécuter l'ensemble des travaux de démolition et de reconstruction en façade de la totalité de son immeuble tels que retenus par l'expert et détaillés aux pages 81 et 82 de son rapport,

* réaliser ou faire réaliser l'étanchéité de la terrasse supérieure si elle s'avère fuyarde, et remplacer l'isolant thermique de la terrasse s'il a été dégradé par l'eau ;

Dit que ces condamnations seront assorties d'une astreinte provisoire de 5.000 euros par jour de retard dans l'exécution des travaux commençant à courir à l'issue d'un délai de dix mois après la signification de la présente décision ;

Réserve la faculté pour le syndicat des copropriétaires de la résidence CHATEAU PÉRIGORD de formuler ultérieurement des demandes de dommages et intérêts à l'encontre de la SCI ANNONCIADE B, dans l'hypothèse où cette dernière ne ferait pas procéder aux travaux de mise en conformité qui sont ordonnés par le tribunal ;

Déboute le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD de sa demande visant à faire réaliser par la SCI ANNONCIADE B une dalle de béton brut ayant une cote altimétrique exactement identique, au centimètre près, à celle de la dalle de béton brut située au même niveau dans le bâtiment CHATEAU PÉRIGORD ;

Déboute le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD de sa demande de suppression par la SCI ANNONCIADE B des lanterneaux de désenfumage, des évents de chutes et des débouchés des ventilations hautes des circulations protégées des étages affleurant sur la toiture terrasse de son bâtiment ;

Déboute la SCI ANNONCIADE B de sa demande reconventionnelle tendant à la conversion de la démolition des ouvrages litigieux en paiement par le fonds servant de dommages et intérêts au fonds dominant ;

Déboute la SCI ANNONCIADE B de sa demande reconventionnelle tendant à ce qu'il lui soit donné acte de ses réserves quant à l'obligation souscrite par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD de raccordement au réseau d'eau chaude et de chauffage dudit ensemble immobilier à son immeuble ;

Condamne la SCI ANNONCIADE B à verser au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision ;

Condamne la SCI ANNONCIADE B aux entiers dépens de l'instance, en ce compris ceux réservés par jugement du 14 juin 2012 et les frais d'expertise, dont distraction au profit de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ».

Pour déclarer irrecevable le moyen nouveau soulevé par la SCI ANNONCIADE B, les premiers juges ont rappelé qu'il avait été définitivement jugé que la demande de mise en conformité formulée par la copropriété CHATEAU PÉRIGORD était fondée sans aucune restriction ou réserve.

Qu'en l'état des transgressions à certaines servitudes mises en évidence par le rapport d'expertise, ils ont ordonné les travaux nécessaires à la remise en état après avoir écarté la sanction en dommages-intérêts au motif que la sanction de la transgression d'un droit réel est l'exécution en nature.

Par exploit en date du 13 mars 2018, la SCI ANNONCIADE B a interjeté appel partiel du jugement susvisé et a assigné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « CHATEAU PÉRIGORD »,

ci-après le syndicat.

Aux termes de cet exploit et des conclusions en date des 2 octobre 2018 et 15 janvier 2019, elle entend être reçue en son appel, déclarée bien fondée, et voir :

* confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

débouté le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD de sa demande visant à faire réaliser par la SCI ANNONCIADE B une dalle de béton brut ayant une cote altimétrique exactement identique, au centimètre près, à celle de la dalle de béton brut située au même niveau dans le bâtiment CHATEAU PÉRIGORD,

débouté le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD de sa demande de suppression par la SCI ANNONCIADE B des lanterneaux de désenfumage, des évents de chutes et des débouchés des ventilations hautes des circulations protégées des étages affleurant sur la toiture terrasse de son bâtiment,

débouté la SCI ANNONCIADE B de sa demande reconventionnelle tendant à la conversion de la démolition des ouvrages litigieux en paiement par le fonds servant de dommages et intérêts au fonds dominant,

débouté la SCI ANNONCIADE B de sa demande reconventionnelle tendant à ce qu'il lui soit donné acte de ses réserves quant à l'obligation souscrite par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD de raccordement au réseau d'eau chaude et de chauffage dudit ensemble immobilier à son immeuble,

* réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* déclaré irrecevable le moyen nouveau développé par la SCI ANNONCIADE B pour voir rejeter les demandes du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier CHATEAU PÉRIGORD comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée,

dit que l'obligation de la SCI ANNONCIADE B de mettre la propriété en conformité avec l'ensemble des contraintes résultant des servitudes figurant à l'acte authentique du 24 novembre 1983 (lire 1982) passé en l'étude de Maître REY, porte sur la totalité de l'immeuble et non seulement sur la parcelle cadastrée sous le n°213 de la section E.

* condamné la SCI ANNONCIADE B à :

exécuter ou faire exécuter l'ensemble des travaux de démolition et de reconstruction en façade de la totalité de son immeuble tels que retenus par l'expert et détaillés aux pages 81 et 82 de son rapport, réaliser ou faire réaliser l'étanchéité de la terrasse supérieure si elle s'avère fuyarde, et remplacer l'isolant thermique de la terrasse s'il a été dégradé par l'eau,

dit que ces condamnations seront assorties d'une astreinte provisoire de 5.000 euros par jour de retard dans l'exécution des travaux commençant à courir à l'issue d'un délai de dix mois après la signification de la présente décision.

* réservé la faculté pour le syndicat des copropriétaires de la Résidence CHATEAU PÉRIGORD de formuler ultérieurement des demandes de dommages et intérêts à l'encontre de la SCI ANNONCIADE B, dans l'hypothèse où cette dernière ne ferait pas procéder aux travaux de mise en conformité qui sont ordonnés par le Tribunal.

* condamné la SCI ANNONCIADE B à verser au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts.

* condamné la SCI ANNONCIADE B aux entiers dépens de l'instance.

Statuant à nouveau,

* juger que l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement rendu le 14 juin 2012, confirmé par arrêt du 11 février 2014, n'empêche pas l'examen de la demande formulée par la SCI L'ANNONCIADE B tendant à une mise en conformité en équivalent de la partie de la façade de la « Résidence Saint-Georges » édifiée sur la parcelle cadastrée sous le n° 231 P de la section E,

En conséquence,

* dire et juger que l'obligation de la SCI ANNONCIADE B de mettre la propriété en conformité avec l'ensemble des contraintes résultant des servitudes figurant à l'acte authentique du 24 novembre 1982 porte seulement sur la parcelle cadastrée sous le n° 231 P de la section E ayant fait l'objet de l'acte de vente reçu par Me Jean-Charles REY le 24 novembre 1982 intervenu entre les parties litigantes,

* constater l'inapplicabilité de cette mise en œuvre,

* convertir en dommages et intérêts, calculés sur la base du préjudice qu'il appartient au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD d'évaluer sous réserves des réponses qu'apportera à cet égard la SCI ANNONCIADE B et mettre à la charge de la SCI ANNONCIADE B la somme arbitrée par la Cour d'Appel,

* donner acte à la SCI ANNONCIADE B de ses réserves quant à l'obligation souscrite par le Syndicat des Copropriétaires de l'Ensemble Immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD de raccordement au réseau d'eau chaude et de chauffage de l'Ensemble Immobilier CHATEAU PÉRIGORD à l'Immeuble de la SCI ANNONCIADE B, dénommée « Résidence Saint-Georges » aux mêmes conditions que celles pratiquées pour les copropriétaires de la Résidence Château Périgord,

* débouter le Syndicat des Copropriétaires de l'Ensemble Immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD de l'ensemble de ses demandes dont sa demande de dommages et intérêts,

Subsidiairement,

Si la Cour d'appel devait ordonner une astreinte, bien vouloir la faire courir à compter d'un délai de dix mois à compter :

* de l'autorisation de démolir et de construire délivrée par le Gouvernement Princier d'effectuer les travaux requis,

* de la libération de l'ensemble du bâtiment par ses occupants,

* condamner le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD en tous les dépens.

Aux termes de ses écrits, l'appelante, fait principalement observer que :

* la Résidence Saint Georges est construite sur trois parcelles contiguës : les lots 1182 et 1183 acquis en 1982, une parcelle de terrain complémentaire acquise le 17 octobre 1988 et enfin des parcelles cédées par l'État,

* le permis de construire qui lui a été délivré a été dûment affiché et n'a suscité aucune objection de la part des tiers,

* l'immeuble a été achevé en 2009 et est aujourd'hui totalement habité,

* l'expert a déposé son rapport le 28 juillet 2016,

* l'application de la servitude est acquise mais il convient d'en déterminer l'étendue au titre de la parcelle A2, ce qui n'a pas été tranchée judiciairement, et ce qui explique que le Tribunal en 2012 a fait droit à la demande subsidiaire du syndicat et missionné un expert aux fins qu'il détermine « le cas échéant » le coût et la durée des travaux de mise en conformité,

* admettre le contraire méconnaitrait le principe de hiérarchie des moyens, le Tribunal de Première Instance ayant fait droit à la demande principale mais ordonné une expertise dans le cadre de la demande subsidiaire,

* l'autorité de la chose jugée résulte des dispositions du seul dispositif, en application de l'article 423 du Code de procédure civile, et ne comporte aucun chef rejetant une demande tendant à faire juger l'assiette de la servitude,

* l'autorité de la chose jugée concernant uniquement la disposition qui a déclaré fondée la demande de mise en conformité, c'est donc à tort que les premiers juges ont considéré qu'il a été jugé que la mise en conformité s'appliquait à la totalité de la façade de l'immeuble,

* le principe de concentration des moyens est inapplicable aux demandes,

* est recevable la demande nouvelle fondée sur la même situation juridique formée lors d'une instance ultérieure si son objet est différent de celui de la demande initiale,

* en l'espèce, la demande est formée en conséquence d'une décision de justice qui a consacré l'application d'une servitude et d'une expertise qui constitue un élément nouveau en ce qu'elle constate un défaut de conformité,

* il ne s'agit pas d'un moyen nouveau, le moyen de défense étant destiné à paralyser la prétention de l'adversaire,

* la servitude stipulée au profit de la copropriété CHATEAU PÉRIGORD pèse exclusivement sur la parcelle 231 P et ne peut s'imposer à des tiers propriétaires de parcelles voisines, de sorte que l'obligation de mise en conformité ne porte que sur cette parcelle et ne saurait être étendue aux parcelles limitrophes,

* les charges qui pèsent sur la SCI ANNONCIADE B sont des obligations personnelles exclusives d'une qualification de servitudes,

* en présence d'obligations personnelles de faire, la sanction du non-respect de l'obligation peut se résoudre en dommages-intérêts et l'exécution forcée ne s'impose pas au juge en application de l'article 997 du Code civil,

* ce d'autant que le syndicat n'a pas demandé la démolition d'ouvrages mais la mise en conformité de l'immeuble, se plaçant ce faisant sur le terrain de la réparation en nature d'un manquement contractuel à une obligation de faire,

* l'exécution en nature doit être écartée en cas d'impossibilité matérielle ou juridique d'exécuter l'obligation,

* en l'espèce la mise en conformité par des travaux de démolition/construction emporte selon l'expert un risque très grand de générer des désordres structurels compromettant la stabilité de l'immeuble,

* l'exécution en nature doit également être écartée lorsqu'elle constitue une sanction disproportionnée ; ainsi, un véritable pouvoir d'appréciation du caractère adéquat de l'exécution forcée est reconnu au juge qui doit s'assurer que la mise en œuvre en nature ne fait pas peser sur le débiteur une charge excessive par rapport à l'utilité qu'en retire le créancier,

* la disproportion invoquée résulte du rapport d'expertise en sorte que l'autorité de la chose jugée ne saurait s'opposer à son examen,

* en tout état de cause, quelle que soit la qualification juridique donnée à l'obligation du débiteur, le juge doit se livrer à un contrôle de proportionnalité de la sanction, y compris entre deux intérêts privés en cas d'atteinte à un droit fondamental, comme au cas présent celui de propriété, et ce même en dehors de toute référence à un droit protégé par la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme,

* ce principe s'applique à Monaco qui est signataire de la CESDH,

* en l'espèce il est porté atteinte au droit fondamental de propriété de la SCI ANNONCIADE B, tandis que le syndicat du CHATEAU PÉRIGORD n'est pour sa part victime que d'un manquement contractuel à une obligation de faire,

* la même solution doit être retenue en présence d'une servitude non utile au plein exercice de droit de propriété mais conférant un droit accessoire de pur agrément,

* la sanction consistant en la démolition/reconstruction représente une atteinte excessive au droit de propriété de la société ANNONCIADE B au regard du manquement de cette dernière, des conséquences de la mise en conformité et du faible préjudice de l'intimé,

* à titre subsidiaire, si la démolition était confirmée, le point de départ de l'astreinte sera fixé au jour de l'obtention de démolir et de construire délivrée par le gouvernement princier d'effectuer les travaux requis et de la libération du bâtiment de l'ensemble de ses occupants,

* le jugement sera confirmé sur le surplus, l'expert ayant d'une part conclu que la cote altimétrique a été respectée, d'autre part affirmé que les ouvrages techniques doivent nécessairement demeurer sur le toit de la Résidence Saint Georges sans que cela soit une gêne à la jouissance exclusive de la terrasse par la copropriété du CHATEAU PÉRIGORD, enfin pris en compte dans son estimation des aléas et imprévus,

* le syndicat des copropriétaires ne rapportant la preuve ni de son préjudice de jouissance, ni du préjudice résultant du non-respect de l'harmonie des façades entres les deux bâtiments sera débouté de sa demande de dommages-intérêts.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Château Périgord s'oppose aux prétentions de la société ANNONCIADE B et forme un appel incident partiel.

Aux termes de ses conclusions des 19 avril et 22 novembre 2018 et 31 janvier 2019, il sollicite de la Cour d'appel qu'elle déclare la SCI ANNONCIADE B irrecevable et mal fondée en son appel principal, et l'en déboute purement et simplement, puis le déclare recevable et bien fondé en son appel incident, et y faisant droit :

* confirme le jugement entrepris, sauf en ce que celui-ci n'a pas prononcé une condamnation sous astreinte à l'encontre de la SCI ANNONCIADE B au titre des travaux de mise à nu de la toiture terrasse de son immeuble, de la réalisation d'une dalle exactement au même niveau altimétrique que celle située au même endroit de la copropriété CHATEAU PÉRIGORD, de la suppression des divers ouvrages techniques implantés en toiture terrasse et limité les dommages-intérêts alloués au concluant à la somme de 20.000 euros,

Et statuant à nouveau :

* dire et juger que le jugement mixte rendu le 14 juin 2012 et l'arrêt confirmatif rendu par la Cour d'appel le 11 février 2014 ont définitivement tranché sur le fond le principe de l'obligation de la SCI ANNONCIADE B de mettre la totalité de son immeuble en conformité en nature avec l'ensemble des contraintes résultant des servitudes figurant à l'acte authentique du 24 novembre 1982, passé en l'étude de Maître Jean-Charles REY à l'occasion de la cession de la parcelle cadastrée sous le n° 231 P de la section E, intervenue entre la SCI PÉRIGORD ANNONCIADE et la SCI ANNONCIADE B,

* dire et juger que lesdites décisions, aujourd'hui définitives, ont en effet déclaré fondée, sans aucune restriction ou réserve, la demande de mise en conformité en nature formulée par la copropriété CHATEAU PÉRIGORD,

* dire et juger qu'en l'espèce cette demande portait bien sur la totalité de l'immeuble appartenant à la SCI ANNONCIADE B et sur l'ensemble des servitudes visées à l'acte authentique susvisé,

* dire et juger que dans le cadre de la procédure antérieure, ayant abouti à ces décisions la SCI ANNONCIADE B n'avait d'ailleurs formulé, même à titre subsidiaire, aucun moyen de droit tendant à obtenir que les servitudes ne s'appliquent qu'à une partie de son immeuble en fonction de son emprise foncière, et qu'elle est aujourd'hui irrecevable à invoquer ce nouveau moyen de droit,

* dire et juger qu'elle n'avait pas non plus invoqué comme moyen de défense le principe de proportionnalité pour réduire son obligation, ou encore solliciter qu'elle soit convertie en de simples dommages et intérêts, et qu'elle est aujourd'hui irrecevable à invoquer ce nouveau moyen de droit,

* dire et juger à titre principal qu'une demande de la SCI ANNONCIADE B tendant à ce que la mise en conformité avec les servitudes susvisées ne porte que sur une partie seulement de son immeuble, ou encore que celle-ci soit convertie en de simples dommages et intérêts, se heurte à l'autorité de la chose jugée à titre définitif,

* dire et juger subsidiairement que, dans la commune intention des parties, la servitude créée implique comme accessoire qu'elle porte sur toutes les parcelles servant d'assise au bâtiment construit, et plus subsidiairement qu'une telle mise en conformité partielle n'est pas possible concrètement.

En conséquence, condamner la SCI ANNONCIADE B, sous astreinte définitive de 5.000 euros par jour de retard, passé le délai de 10 mois après la signification de l'arrêt à intervenir :

1. à exécuter ou faire exécuter l'ensemble des travaux de démolition et de reconstruction en façade et en toiture terrasse tels que retenus par Monsieur Jacques ROMAN dans son rapport d'expertise judiciaire du 28 juillet 2016 pour la totalité de l'immeuble lui appartenant,

2. à réaliser ou faire réaliser une dalle de béton brut munie de son étanchéité sur la toiture terrasse de son bâtiment ayant une cote altimétrique exactement identique, au centimètre près, à celle de la dalle de béton brut munie de son étanchéité du couloir de circulation situé au même niveau dans le bâtiment CHATEAU PÉRIGORD,

3. à procéder ou faire procéder à la réfection de l'étanchéité de la toiture terrasse si celle-ci devait se révéler fuyarde après enlèvement des ouvrages édifiés sur celle-ci,

4. à supprimer ou faire supprimer tous les édicules, ouvrages ou autres aspérités architecturales, existants sur la toiture terrasse de son bâtiment, et notamment les exutoires de désenfumage, les excroissances techniques, les gaines de ventilation et les acrotères, la servitude prévoyant une jouissance exclusive de celle-ci au profit de la copropriété CHATEAU PÉRIGORD, et ne réservant en aucun cas la faculté pour le fonds servant de l'utiliser à ce titre, étant relevé que leur présence ou leur fonctionnement sont susceptibles d'avoir des incidences préjudiciables pour les usagers,

* et réserver expressément à la Cour d'Appel le pouvoir de procéder à la liquidation de ladite astreinte définitive sur simple demande du syndicat des copropriétaires de la Résidence CHATEAU PÉRIGORD,

* réserver expressément la faculté pour le syndicat des copropriétaires de la résidence CHATEAU PÉRIGORD de formuler ultérieurement des demandes de dommages-intérêts à l'encontre de la SCI ANNONCIADE B dans l'hypothèse où cette dernière ne ferait pas procéder aux travaux de mise en conformité qui seront ordonnés sous astreinte par la Cour,

* condamner la SCI ANNONCIADE B à payer au Syndicat des Copropriétaires « CHATEAU PÉRIGORD » la somme de 150.000 euros (cent cinquante mille euros) à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et en raison des frais exposés en justice par lui à l'occasion de la présente procédure,

* condamner enfin la SCI ANNONCIADE B aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris tous frais et accessoires, tels que frais d'Huissier, procès-verbaux de constat, sommation, frais d'expertise et de traduction éventuels, dont distraction au profit de Monsieur le Bâtonnier Alexis MARQUET.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD rappelle que la parcelle n° 231P de la section E a été cédée gratuitement et en pleine propriété dans tous les actes en cause (vente du 8 mars 1965, constitution de servitudes réciproques du 3 juillet 1969, apport du 7 novembre1969 de la parcelle au profit de la SCI PÉRIGORD ANNONCIADE, vente du 24 novembre 1982 à la SCI ANNONCIADE B).

Il soutient pour l'essentiel que :

* le jugement mixte rendu le 14 juin 2012 par le Tribunal de première instance, confirmé par l'arrêt de la Cour d'appel du 11 février 2014, a définitivement tranché sur le fond le principe de l'obligation de la SCI ANNONCIADE B de mettre la totalité de l'immeuble en conformité avec l'ensemble des contraintes résultant des servitudes figurant à l'acte authentique du 24 novembre 1982,

* il n'a en effet pas pu statuer sur une mise en conformité partielle de l'immeuble, ce moyen de défense n'étant pas invoqué,

* l'expertise ne tendait qu'à déterminer la nature et le coût des travaux de mise en conformité, pour permettre ensuite au Tribunal d'en ordonner l'exécution sous astreinte,

* l'étendue de l'assiette matérielle de la servitude et l'invocation du principe de proportionnalité par la SCI ANNONCIADE B constituent des moyens de défense au fond car ils consistent à soutenir que le droit allégué par l'adversaire n'existe pas, n'existe plus ou n'existe pas encore, ou n'a pas l'ampleur prétendue, et ils ont pour objet de faire partiellement échec aux demandes principales, contrairement à une demande autonome,

* ces moyens qui n'ont pas été développés dès l'origine se heurtent à l'autorité de la chose jugée,

* l'autorité de chose jugée a lieu à l'égard de ce qui a fait le jugement,

* la portée du dispositif ayant autorité de chose jugée peut être déterminée en se référant aux motifs qui en sont le soutien nécessaire,

* le principe de concentration des moyens, qui s'applique à toutes les parties de la procédure, fait échec à ce qu'une partie puisse invoquer un moyen nouveau tendant aux mêmes fins,

* le rapport d'expertise judiciaire, qui a validé l'exécution en nature des travaux, ne constitue pas un fait nouveau susceptible de remettre en cause l'autorité de la chose jugée, dès lors que la SCI ANNONCIADE B n'ignorait pas que son immeuble n'avait pas été édifié en totalité sur la parcelle de terrain cadastrée n° 231 P,

* l'expertise ne tendait qu'à déterminer les travaux nécessaires à la mise en conformité : de démolition ou modificatifs,

* le principe de la mise en conformité en nature a donc l'autorité de chose jugée à titre définitif et ne peut par conséquent être remis en cause,

* l'emploi de la locution « le cas échéant » concerne l'existence même d'irrégularités mais nullement l'étendue des irrégularités, l'expert n'ayant pas vocation à dire le droit.

À titre subsidiaire, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD fait valoir que la commune intention des parties lors de l'acte de vente du 24 novembre 1982 stipulant les servitudes était d'assurer une continuité architecturale totale entre l'ancien bâtiment et le nouveau, et que les parties ne pouvaient prévoir les cessions postérieures qui ont permis à la société ANNONCIADE B de construire un immeuble plus grand.

Il ajoute :

* qu'un tel objectif ne serait pas atteint par une mise en conformité simplement partielle de la façade, impossible à réaliser sur le plan technique et esthétique,

* que pour déterminer la portée d'une servitude conventionnelle, le juge doit apprécier la commune intention des parties et définir les servitudes accessoires nécessaires pour en assurer le bénéfice, en l'espèce de ne construire sur les parcelles contiguës supplémentaires qu'un immeuble intégrant les mêmes obligations, la finalité première de la servitude étant au cas d'espèce de préserver une similitude architecturale entre le Château Périgord et la voie publique,

* que la SCI ANNONCIADE B ne peut se prévaloir de son propre fait fautif pour prétendre être déliée de ses obligations contractuelles et doit donc mettre en conformité la totalité de son immeuble, en ce compris la partie de celui-ci non édifiée sur la parcelle de terrain grevées des servitudes.

Sur la demande de démolition et de reconstruction, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD prétend que :

* la sanction du non-respect de la servitude au profit du fonds dominant ne peut être que la démolition, quelle que soit la gravité des conséquences pour le fonds servant,

* le moyen tiré du contrôle et du principe de proportionnalité invoqué pour la première fois devant la Cour d'appel est irrecevable pour heurter le principe de concentration des moyens et celui de l'autorité de la chose jugée,

* le moyen est infondé car la sanction du non-respect d'une servitude de droit réel est la démolition des ouvrages construits en violation de cette servitude, et ce indépendamment de l'existence d'un préjudice subi,

* cette sanction résultant de l'atteinte préalable du droit d'un tiers ne heurte pas le principe de proportionnalité,

* l'argument tenant à une violation du protocole additionnel n° 1 de la CESDH non applicable en Principauté faute de ratification est inopérant, alors qu'en toutes hypothèses la reconstruction modificative demandée sur la base de critères esthétiques est admise par la Cour Européenne des Droits de l'Homme pour ordonner une démolition,

* la faisabilité technique de travaux en nature a été admise par l'expert. Par ailleurs le syndicat du Château Périgord justifie :

* son refus de subordonner le point de départ de l'astreinte au départ des locataires, par le fait que la mesure doit présenter un caractère suffisamment contraignant pour la bonne exécution par le débiteur de sa condamnation,

* sa demande de dommages-intérêts par la résistance abusive de son adversaire, la perte de jouissance de la terrasse depuis l'achèvement de l'immeuble, le non-respect de l'harmonie des façades entre les deux bâtiments et les frais irrépétibles.

Enfin, s'agissant de son appel incident, le syndicat des copropriétaires expose essentiellement que :

* le jugement sera réformé en ce qu'il a oublié de viser les travaux de démolition et de reconstruction en toiture terrasse,

* la mise à niveau de la dalle de la toiture terrasse entre au nombre des travaux à exécuter compte tenu d'une différence de cote altimétrique de 4 cm,

* la présence d'édicules sur la toiture terrasse constitue une atteinte à la servitude qui ne peut être justifiée par une nécessité ou une facilité technique, la société ANNONCIADE SCI devant rechercher des solutions pour les implanter ailleurs.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que les appels principal et incident du jugement entrepris du 11 janvier 2018, signifié le 14 février 2018, régularisés dans les formes et délai imposés par la loi sont recevables ;

Attendu que la disposition relative au rejet de la demande reconventionnelle de la SCI ANNONCIADE B tendant à la conversion de la démolition des ouvrages litigieux en paiement de dommages-intérêts n'est pas appelée par elle en l'état du dispositif de ses écrits judiciaires postérieurs à l'assignation ; que toutefois elle sollicite dans le corps de ses écrits qu'il y soit fait droit sur le fondement d'un nouveau moyen ;

Que de même si le dispositif de ses écrits d'appel contient des dispositions contradictoires sur sa demande reconventionnelle tendant à ce qu'il lui soit donné acte de ses réserves quant à l'obligation souscrite par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD de raccordement au réseau d'eau chaude et de chauffage dudit ensemble immobilier à son immeuble, la demande est expressément reprise dans le corps de ses écrits ;

Que par suite il convient de statuer sur lesdites prétentions ;

Attendu qu'il ne saurait être « donné acte » à la SCI ANNONCIADE B de ses réserves, une telle demande ne constituant pas une prétention et n'emportant aucune conséquence juridique de plein droit ;

Que la décision doit être confirmée de ce chef ;

Que pour le même motif, il ne sera pas davantage fait droit à la demande du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé CHATEAU PÉRIGORD tendant de voir acter ses propres réserves de formuler ultérieurement des demandes de dommages-intérêts à l'encontre de la SCI ANNONCIADE B, dans l'hypothèse où cette dernière ne ferait pas procéder aux travaux de mise en conformité ordonnés, le jugement étant réformé sur ce point ;

Attendu que les servitudes dues par la SCI ANNONCIADE sont les suivantes :

* se conformer à l'ensemble architectural formé par les parties basses de l'immeuble CHATEAU PÉRIGORD et réaliser une façade, une galerie publique en bordure de rue, absolument identiques à celles qui existent déjà,

* respecter pour la terrasse supérieure de son immeuble exactement la même cote altimétrique que celle qui est déjà adoptée pour la galerie de circulation de l'immeuble CHATEAU PÉRIGORD et de permettre son aménagement en terrasse jardin par le bénéficiaire des servitudes qui a également la charge de la mise en place du garde-corps bordant cette terrasse,

* laisser la jouissance exclusive de cette toiture terrasse aux seuls propriétaires ou occupants de la Résidence CHATEAU PÉRIGORD et pour ce faire supprimer tout accès entre l'immeuble par elle construit et sa terrasse,

* s'abstenir de construire une chaufferie et se raccorder sur le réseau d'eau chaude et de chauffage du Château Périgord ;

Que la SCI ANNONCIADE B n'a jamais prétendu ignorer l'existence des charges conventionnelles grevant la parcelle acquise par ses soins sur laquelle elle a fait édifier la Résidence SAINT-GEORGES ;

Qu'en exécution du jugement définitif du 14 juin 2012, l'expert Jacques ROMAN, missionné afin de décrire les irrégularités présentées par ladite résidence au regard des contraintes architecturales imposées par les servitudes figurant à l'acte authentique, et déterminer, le cas échéant, la nature, le coût et la durée des travaux de mise en conformité de l'immeuble, a déposé son rapport le 29 juillet 2016 ;

Qu'en préambule l'expert a précisé que la construction du garde-corps et d'une voie d'accès entre la garde de circulation haute de la Résidence CHATEAU PÉRIGORD et la terrasse située sur la toiture du bâtiment de la Résidence SAINT-GEORGES ne peut être mise à la charge de la SCI ANNONCIADE B, en application de l'alinéa 8 de la liste des servitudes ;

Que ses conclusions sont les suivantes :

* il n'y a aucune identité entre la façade de la Résidence CHATEAU PÉRIGORD et celle de la Résidence SAINT-GEORGES, de conception totalement différente, sur toute la hauteur de la construction, tant pour les 2 niveaux bas (absence de continuité de la galerie publique entre les 2 résidences) que pour les 5 niveaux hauts, le bâtiment de la Résidence SAINT-GEORGES ne s'intègre pas dans l'ensemble immobilier de la copropriété CHATEAU PÉRIGORD, il n'y a aucune unité architecturale entre ces 2 constructions, ni avec le bâtiment de la copropriété Résidences DE L'ANNONCIADE situé à l'autre extrémité,

* la façade de l'immeuble de la Résidence SAINT- GEORGES ne respecte pas l'identité architecturale prévue à l'alinéa 5 des servitudes,

* la cote altimétrique du bâtiment ANNONCIADE B (imposée par le 6) de l'acte authentique a été respectée, l'immeuble étant au même niveau que celui de la dalle de béton du bâtiment de la Résidence SAINT-GEORGES, à un centimètre près, cet écart pouvant être absorbé lors des travaux ultérieurs d'aménagement de la toiture terrasse et entrant très largement dans la tolérance admissible pour ce type d'ouvrage,

* les exutoires de désenfumage, les excroissances techniques, les gaines de ventilation et les acrotères du bâtiment de la Résidence SAINT-GEORGES, éléments constructifs indispensables de tout bâtiment au demeurant non interdits par les servitudes doivent être conservés,

* la servitude technique s'agissant de la chaufferie et des réseaux d'eau chaude et de chauffage (4° des servitudes) n'a pas non plus été respectée par la SCI ANNONCIADE B,

* la durée globale des travaux de la façade pourrait être de 8 à 10 mois et 8 mois au moins, sans compter la période estivale,

* les travaux en terrasse devraient être réalisés en 2 à 3 mois, à savoir la démolition des aménagements réalisés en terrasse supérieure, avec éventuel remplacement de l'étanchéité si elle s'avère fuyarde, par les défendeurs, avant l'intervention des demandeurs,

* les travaux de mise en conformité de la façade (galerie publique sur les 2 niveaux bas et les étages hauts) sont estimés à la somme de 6.017.789,81 euros hors taxe (HT),

* le coût des travaux de dépose des ouvrages en terrasse est estimé à la somme de 326.250 euros HT ;

Que l'expert a également fait part de ses plus grandes craintes, lors de « l'éventration » à venir du bâtiment et son « amputation » en partie basse (pour création de la galerie sur la Place de la Rousse), bâtiment dont les structures principales ont une fonction essentielle de reprise des poussées des terres, de voir apparaître des désordres dans les structures existantes et principalement dans les ouvrages de second œuvre ;

Qu'il a fait part en outre de réflexions personnelles quant à la mise en œuvre des travaux de construction/reconstruction qui s'imposent pour non-respect des servitudes, travaux qui selon lui, seront un échec, « un traumatisme, la mort annoncée d'un type de bâtiment tourné vers l'extérieur et pendant les travaux, une source de gros désagréments pour les demandeurs eux-mêmes directement au-dessus, les riverains contigus, les voisins immédiats, les utilisateurs de la voie publique en général » ;

Sur l'autorité de chose jugée

Attendu en droit que l'objet du litige est circonscrit aux demandes dont les parties ont saisi le juge ;

Qu'au cas présent, les propriétaires du fonds dominant reprochaient à la SCI ANNONCIADE B, propriétaire du fonds servant, d'avoir édifié une construction en violation de servitudes conventionnelles ;

Que le litige tendait au constat de l'opposabilité, contestée par la SCI ANNONCIADE B, des servitudes grevant la parcelle acquise par elle et au prononcé d'une obligation de faire au profit de la copropriété du CHATEAU PÉRIGORD, soit en l'espèce la mise en conformité des édifices construits avec l'ensemble des contraintes résultant desdites servitudes ;

Que le Tribunal de première instance par jugement du 14 juin 2012 a d'une part accueilli le syndicat des copropriétaires dans sa demande de mise en conformité de la Résidence SAINT-GEORGES après avoir retenu que les servitudes invoquées étaient bien opposables à la société propriétaire de l'immeuble, d'autre part ordonné une expertise ;

Que cette décision mixte, qui renferme une disposition définitive et ordonne par ailleurs une expertise en fixant le cadre juridique de la mission de l'expert, a pour effet de limiter les débats après expertise à ce cadre, le juge se trouvant lié par ce qui a été définitivement jugé ;

Que la société ANNONCIADE B sollicite désormais de voir limiter son obligation de mise en conformité à la seule parcelle acquise en 1982, au motif que la résidence a été construite sur plusieurs parcelles et que seule la parcelle n° 231 P est concernée par les servitudes, et reproche aux premiers juges d'avoir déclaré irrecevable sa demande en conformité en équivalent en considérant à tort que la question de l'étendue de la servitude avait été judiciairement tranchée ;

Que le syndicat des copropriétaires du CHATEAU PÉRIGORD en soulève l'irrecevabilité ;

Que pour fonder la recevabilité de cette prétention nouvelle, l'appelante soutient que le Tribunal n'a jamais eu à statuer sur l'assiette des servitudes dont elle est redevable, et se prévaut de l'absence de disposition expresse sur ce point dans le dispositif de son jugement ;

Qu'aux termes des dispositions de l'article 1198 du Code civil : « l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait le jugement » ;

Qu'il y a autorité de chose jugée lorsque la même question litigieuse oppose les mêmes parties et procède de la même cause que la précédente sans que ne soient invoqués des faits nouveaux ayant modifié la situation juridique des parties ;

Attendu en l'espèce que le dispositif du jugement du 14 juin 2012 est le suivant : « Déclare fondée la demande de mise en conformité de la Résidence SAINT-GEORGES formée par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier CHATEAU PÉRIGORD » ;

Attendu que si l'autorité de chose jugée s'attache seulement au dispositif de la décision et non aux motifs, celle-ci s'étend à ce qui est implicitement contenu dans le dispositif, et contrairement à ce que soutient l'appelante, il est manifeste en l'espèce, ainsi que l'ont pertinemment relevé les premiers juges, que la demande initiale soutenue par le syndicat portait sur la totalité de l'immeuble et que faute pour l'appelante d'avoir soumis au débat une discussion sur l'assiette des servitudes, même à titre subsidiaire, l'obligation de remise en état des lieux mise à la charge de l'appelante sans restriction concerne nécessairement l'ensemble de la Résidence SAINT-GEORGES ;

Qu'à cet égard, il n'est pas démontré par la société ANNONCIADE B qu'elle se soit trouvée, lors de la discussion au fond, dans une situation d'impossibilité totale de pouvoir demander au juge d'appliquer les servitudes sur une partie seulement de son immeuble, alors même qu'elle n'ignorait pas dès l'origine de la construction de l'immeuble, et en conséquence dès avant le dépôt de l'expertise ordonnée par le juge en vertu de son pouvoir en la matière, que la résidence avait été édifiée sur plusieurs parcelles dont certaines n'étaient pas grevées desdites servitudes au profit de la copropriété du CHATEAU PÉRIGORD ;

Que l'emploi de la locution « le cas échéant » dans la mission de l'expert ne concerne pas l'étendue des irrégularités mais leur existence par rapport aux contraintes architecturales résultant des servitudes ;

Qu'il suit que la question de la mise en conformité du bâtiment avec les servitudes grevant la parcelle sur partie de laquelle il a été édifié a été débattue entre les parties et qu'ainsi le jugement précité apparaît incontestablement revêtu de l'autorité de la chose jugée sur le principe de la mise en conformité de l'ensemble de l'immeuble ;

Que par suite, en l'absence de fait nouveau venu modifier la situation antérieurement reconnue judiciairement, la demande présentée par la SCI ANNONCIADE B aux fins de voir limiter l'exécution des travaux à une partie seulement de l'immeuble se heurte à l'autorité de la chose jugée en ce qu'elle ne tend qu'à remettre en cause des dispositions irrévocables prononcées à son encontre ;

Qu'en conséquence, le jugement déféré sera confirmé sur ce point, l'irrecevabilité consacrée rendant dès lors parfaitement inutile l'examen de l'argumentation subsidiaire du syndicat sur ce point ;

Attendu que la SCI ANNONCIADE B prétend par ailleurs en cause d'appel que la sanction du non-respect de son obligation personnelle, et non réelle, de faire doit se résoudre en dommages-intérêts dès lors que l'exécution forcée compromettrait en l'espèce la stabilité de l'immeuble et que cette exécution en nature apparaît disproportionnée en l'état de l'atteinte portée à son droit de propriété au regard des conséquences de la mise en conformité et du faible préjudice ;

Que le syndicat du CHATEAU PÉRIGORD s'oppose à ce nouveau moyen de défense qu'il estime irrecevable pour avoir été soulevé tardivement et en toutes hypothèses infondé au double motif que le non-respect d'une servitude de droit réel est sanctionné par la démolition des ouvrages construits en violation de cette servitude et que la faisabilité technique des travaux a été admise par l'expert ;

Attendu à cet égard, que ce faisant l'appelante prétend remettre en cause la qualification juridique de son obligation ;

Que dans la mesure où elle aurait pu à l'occasion du débat judiciaire entre les parties sur la demande de mise en conformité discuter juridiquement la nature des charges pesant sur elle, ce d'autant que le Château Périgord soutenait qu'il ne pouvait s'agir de simples obligations personnelles, la société appelante est également irrecevable à remettre en cause la disposition sur le fond devenue définitive ;

Qu'ainsi, le débat ne portant plus désormais que sur les conclusions de l'expertise, le moyen de défense de l'appelante, qui se heurte à l'autorité de la chose jugée de la décision qui a accueilli le syndicat de copropriétaires dans sa demande de mise en conformité sur le fondement de servitudes réelles opposables à son adversaire, ne sera pas examiné ;

Sur l'expertise

Que la sanction de la méconnaissance d'une servitude est la démolition de la construction qui contrarie le libre exercice, même de pur agrément, de la servitude, le juge ne pouvant en matière de droit réel préférer l'allocation de dommages et intérêts à la réparation en nature qui lui est demandée ;

Attendu que l'expert judiciaire a mis en évidence dans son rapport le défaut de continuité architecturale totale entre l'ancien bâtiment et le nouveau ainsi que le non-respect par la société ANNONCIADE B de la servitude relative à la chaufferie ;

Que les parties ne contestent pas qu'il y a eu violation de certaines des servitudes conventionnelles détaillées dans l'acte de cession en date du 24 novembre 1982 ; que seule est en discussion la question des servitudes concernées ;

Que le jugement sera confirmé sur ce point en ce qu'il a débouté la SCI ANNONCIADE B de sa demande reconventionnelle de conversion de la démolition des ouvrages litigieux en paiement par le fonds servant de dommages et intérêts ;

Que ce droit à démolition cesse néanmoins lorsque son exécution est impossible ;

Qu'à cet égard, force est de constater que l'expert judiciaire a considéré que l'exécution en nature, bien que non dénuée de tout risque de voir apparaître des désordres dans les structures existantes et principalement dans les ouvrages de second œuvre, était réalisable ;

Que la SCI ANNONCIADE B s'oppose à l'exécution forcée demandée au motif qu'elle emporte un risque grave de fragiliser la structure de l'immeuble et d'en compromettre la stabilité ;

Qu'aucune pièce complémentaire, telle qu'étude, expertise, analyse technique, venant objectivement établir l'existence d'une telle menace et contredire les conclusions expertales, n'a été versée par l'appelante au soutien de ses dires ;

Attendu, sur les travaux de démolition et de reconstruction en façade, que le syndicat du CHATEAU PÉRIGORD sollicite la réformation partielle du jugement d'une part en ce qu'il a omis de viser les travaux de démolition et de reconstruction en toiture terrasse, d'autre part en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de réalisation d'une dalle de béton et de suppression des édicules techniques, sur la terrasse ;

Que la société ANNONCIADE B a quant à elle conclu à la confirmation ; 1/Sur les travaux de mise à nu de la toiture terrasse

Attendu que le syndicat reproche aux premiers juges de ne pas avoir fait mention desdits travaux dans le dispositif de leur décision ;

Qu'en premier lieu, c'est de manière erronée que la société ANNONCIADE B considère qu'il a été débouté de cette demande en se fondant sur les dispositions relatives aux édicules techniques ;

Qu'en second lieu, le dispositif comporte la disposition suivante : « Condamne la SCI ANNONCIADE B à réaliser ou à faire réaliser l'étanchéité de la terrasse supérieure si elle s'avère fuyarde, et remplacer l'isolant thermique de la terrasse s'il a été dégradé par l'eau » ;

Que cette obligation est ainsi précisée dans les motifs du jugement par l'indication : « après enlèvement par la défenderesse des aménagements qu'elle y a réalisés » ;

Que le dispositif s'interprétant à la lumière des motifs qui en sont le soutien, le syndicat sera en conséquence débouté de sa demande de réformation de ce chef ;

Sur la réalisation d'une dalle de béton en toiture terrasse

Attendu que la servitude relative à la terrasse impose au cessionnaire de respecter exactement la même cote que celle qui est adoptée pour la partie déjà construite ;

Que par une motivation pertinente, non démentie par les éléments de la cause, et plus particulièrement par des pièces qui viendraient objectivement démontrer que la cote altimétrique relevée par l'expert dans son rapport serait erronée, les premiers juges ont retenu à la suite de l'expert que la différence minime de cote (1 cm) permettait d'affirmer que la cote imposée avait été respectée par la SCI ANNONCIADE B ;

Que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur la suppression des édicules sur le toit-terrasse

Attendu que l'expert a rapporté l'existence d'exutoires de désenfumage, d'excroissances techniques, de gaines de ventilation, d'acrotères... sur la terrasse, en les qualifiant d'éléments techniques incontournables d'un bâtiment qui ne peuvent être qu'en superstructure ;

Que le syndicat fonde sa demande de démolition sur la servitude prévoyant la jouissance exclusive de la terrasse au profit des locataires et propriétaires du CHATEAU PÉRIGORD ;

Que s'il ne conteste pas être tenu quant à lui de mettre réciproquement à la disposition du fonds servant une partie de ses propres locaux techniques pour abriter certaines installations de ce dernier, il assure avoir proposé d'offrir ce service ;

Attendu que force est de constater que cette allégation de mise en œuvre de cette charge par le syndicat n'est corroborée par aucun élément objectif ; que l'expert lui-même n'a pas évoqué cette possibilité et n'a pas fait état d'une possible implantation des éléments concernés ailleurs que sur le toit-terrasse, affirmant au contraire que les ouvrages litigieux ne peuvent être situés que sur le toit du bâtiment Résidence SAINT-GEORGES, ce qui n'est pas utilement combattu par le syndicat ;

Qu'en outre l'intimé ne conteste pas la nécessité pour le fonds servant d'avoir des ouvrages indispensables à la sécurité de l'immeuble ;

Que par ailleurs les premiers juges, après avoir rappelé qu'aux termes de l'article 586 du Code civil le propriétaire du fonds débiteur d'une servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage ou à le rendre plus incommode et qu'il appartient au juge de rechercher la commune intention des parties quant à l'étendue des droits des servitudes, en tenant compte notamment de la situation des lieux, se sont livrés à bon droit à une interprétation restrictive de l'étendue de cette servitude, dès lors que s'agissant d'un empiètement sur la propriété d'autrui, la jouissance doit être conforme à l'usage de l'immeuble et que les éléments incriminés sont manifestement indispensables au maintien de la sécurité de l'immeuble constituant le fonds servant, en sorte qu'ils ont retenu à bon droit que leur présence ne pouvait être considérée comme diminuant l'usage de la servitude ou le rendant plus incommode ;

Que la circonstance que la cession de la parcelle a été à l'origine cédée gratuitement apparaît indifférente au regard des éléments ci-dessus relevés ;

Qu'enfin aucune des servitudes n'interdisait expressément au fonds servant d'avoir de tels éléments constructifs, qualifiés d'incontournables par l'expert, dépassant du toit-terrasse donné en jouissance exclusive au fonds dominant, d'autant qu'il n'est pas démontré que leur présence serait de nature à empêcher la jouissance consacrée ;

Que dès lors le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires du CHATEAU PÉRIGORD de sa demande à ce titre ;

Sur le point de départ de l'astreinte

Attendu que la circonstance, non au demeurant établie concrètement, que les échéances des baux consentis sont différentes les unes des autres, n'est pas de nature à justifier de différer le point de départ de l'astreinte à la date de libération totale de l'immeuble, en ce que d'une part il appartient à la SCI ANNONCIADE B de tirer les conséquences de la condamnation mise à sa charge sans pénaliser le bénéficiaire des servitudes violées, que d'autre part elle caractérise une condition potestative qui fait au cas d'espèce dépendre l'exécution des travaux à l'échéance de la dernière location alors que rien ne l'empêche d'en conclure de nouvelles ;

Que le même raisonnement s'applique au délai d'obtention de l'autorisation de construire ;

Qu'au regard des démarches qu'il incombe à la société appelante d'accomplir, le délai octroyé par les premiers juges apparaît tout à fait satisfaisant, de sorte qu'elle sera déboutée de sa demande de ce chef et le jugement confirmé ;

Sur les dommages et intérêts

Attendu que tout non-respect d'une servitude ou d'un règlement de droit privé constitue un trouble de jouissance dont il peut être demandé réparation ;

Qu'au cas d'espèce la violation des servitudes par la SCI ANNONCIADE B depuis l'achèvement de l'immeuble est judiciairement consacrée et le trouble de jouissance en résultant n'est plus contesté par l'appelante ;

Qu'en revanche, la démonstration d'une résistance abusive par la SCI ANNONCIADE B n'est en l'espèce pas faite, l'intimé se contentant de faire état d'éléments extérieurs à la présente instance (résistance abusive consacrée par le jugement du 14 juin 2012, appel de ce jugement, longueur de l'expertise judiciaire, patrimoine considérable de l'appelante) qui ne permettent nullement de caractériser un abus dans le droit pour son adversaire de se défendre ;

Qu'enfin la notion de frais irrépétibles ne connait pas d'équivalent en droit monégasque et ne peut en conséquence donner lieu à indemnisation ;

Attendu sur le montant de l'indemnisation du trouble de jouissance, qu'eu égard aux éléments de la cause, tenant non seulement à la méconnaissance volontaire des charges pesant sur elle par la SCI ANNONCIADE B, mais aussi à la durée de la violation desdites contraintes (plus de 10 années), il sera alloué au syndicat des copropriétaires de l'immeuble CHATEAU PÉRIGORD la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts, la décision étant confirmée sur le quantum ;

Attendu en définitive qu'il convient de confirmer la décision de ce chef ;

Et attendu que la SCI ANNONCIADE B qui succombe intégralement en son appel doit supporter les dépens de l'instance, par application de l'article 231 du Code de procédure civile ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit les appels,

Réforme le jugement du Tribunal de première instance du 11 janvier 2018 en ce qu'il a réservé la faculté pour le syndicat des copropriétaires du CHATEAU PÉRIGORD de formuler ultérieurement des demandes de dommages-intérêts à l'encontre de la SCI ANNONCIADE B, dans l'hypothèse où cette dernière ne ferait pas procéder aux travaux de mise en conformité ordonnés,

Dit n'y avoir lieu à donner acte au syndicat des copropriétaires du CHATEAU PÉRIGORD de ses réserves,

Confirme le jugement en ses autres dispositions,

Y ajoutant,

Déclare la SCI ANNONCIADE B irrecevable à venir remettre en cause les dispositions définitives du jugement du 14 juin 2012,

Condamne la SCI ANNONCIADE B aux dépens d'appel, distraits au profit de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Françoise CARRACHA, Conseiller, Madame Claire GHERA, Conseiller, assistées de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 14 MAI 2019, par Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint, en présence de Mademoiselle Cyrielle COLLE, Premier Substitut du Procureur Général.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 18166
Date de la décision : 14/05/2019

Analyses

L'objet du litige est circonscrit aux demandes dont les parties ont saisi le juge. Aux termes des dispositions de l'article 1198 du Code civil : « l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait le jugement ». Il y a autorité de chose jugée lorsque la même question litigieuse oppose les mêmes parties et procède de la même cause que la précédente sans que ne soient invoqués des faits nouveaux ayant modifié la situation juridique des parties. Si l'autorité de chose jugée s'attache seulement au dispositif de la décision et non aux motifs, celle-ci s'étend à ce qui est implicitement contenu dans le dispositif.La sanction de la méconnaissance d'une servitude est la démolition de la construction qui contrarie le libre exercice, même de pur agrément, de la servitude, le juge ne pouvant en matière de droit réel préférer l'allocation de dommages-intérêts à la réparation en nature qui lui est demandée. Le droit à démolition cesse néanmoins lorsque son exécution est impossible.Les premiers juges, après avoir rappelé qu'aux termes de l'article 586 du Code civil le propriétaire du fonds débiteur d'une servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage ou à le rendre plus incommode et qu'il appartient au juge de rechercher la commune intention des parties quant à l'étendue des droits des servitudes, en tenant compte notamment de la situation des lieux, se sont livrés à bon droit à une interprétation restrictive de l'étendue de cette servitude, dès lors que s'agissant d'un empiètement sur la propriété d'autrui, la jouissance doit être conforme à l'usage de l'immeuble et que les éléments incriminés sont manifestement indispensables au maintien de la sécurité de l'immeuble constituant le fonds servant, en sorte qu'ils ont retenu à bon droit que leur présence ne pouvait être considérée comme diminuant l'usage de la servitude ou le rendant plus incommode.S'agissant du point de départ de l'astreinte, la circonstance que les échéances des baux consentis sont différentes les unes des autres n'est pas de nature à justifier de différer le point de départ de l'astreinte à la date de libération totale de l'immeuble.S'agissant de la demande de dommages-intérêts, tout non-respect d'une servitude ou d'un règlement de droit privé constitue un trouble de jouissance dont il peut être demandé réparation.

Baux  - Copropriété  - Procédure civile.

Autorité de chose jugée - Conditions - Étendue - Servitude - Non-respect - Démolition - Trouble de jouissance - Dommages-intérêts - Astreinte - Point de départ.


Parties
Demandeurs : La SCI ANNONCIADE B
Défendeurs : le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « CHÂTEAU PÉRIGORD »

Références :

article 586 du Code civil
article 997 du Code civil
article 1198 du Code civil
article 423 du Code de procédure civile
article 231 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2019-05-14;18166 ?

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