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LA COUR,
Vu l'ordonnance de référé rendue par le juge des référés, le 13 mars 2020 (R. 3280) ;
Vu l'arrêt avant-dire-droit du 30 septembre 2021 ;
Vu l'exploit de réassignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 29 octobre 2021 (enrôlé sous le numéro 2020/000127) ;
Vu les conclusions déposées le 7 décembre 2021 par Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, au nom de la U., de la SAS U., de la SAS U. en son établissement secondaire, de la Z. et de la Z. en son établissement secondaire ;
Vu les conclusions déposées les 7 décembre 2021 et 28 octobre 2022 par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de la J., de Monsieur f.C et de la J. ;
Vu les conclusions déposées le 21 février 2022 par Maître Christophe BALLERIO, avocat-défenseur, au nom de la M. (E&G) ;
Vu les conclusions déposées le 22 février 2022 par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de la P. et de la société de droit italien P. ;
Vu les conclusions déposées le 20 avril 2022 par Maître Bernard BENSA, avocat-défenseur, au nom de la N. « N. » ;
Vu les conclusions déposées le 20 avril 2022 par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de la SAM AA., en abrégé (AA.) ;
Vu les conclusions déposées le 25 avril 2022 par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de la Compagnie d'assurances de droit italien Y.. ;
Vu les conclusions déposées le 26 avril 2022 par Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, au nom de la société R. et de la société R. prise en son établissement secondaire ;
Vu les conclusions déposées les 27 avril 2022 et 13 juillet 2022 par Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur, au nom de la Société Anonyme Monégasque dénommée F., de la Société par Actions Simplifiée à associé unique G., et de la L. (L.) ;
Vu les conclusions déposées les 11 juillet 2022 et 31 janvier 2023 par Maître Xavier-Alexandre BOYER, avocat-défenseur, au nom de la AB., de la Société Anonyme MonégasqueH. et de la société AC. ;
Vu les conclusions déposées le 11 juillet 2022 par Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de la Société par Actions Simplifiée V., en abrégé (V.) ;
Vu les conclusions déposées le 25 octobre 2022 par Maître Jean-Charles GARDETTO, avocat-défenseur, au nom de la Société par Actions Simplifiée T. ;
Vu les conclusions déposées le 9 mars 2023 par Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de la N. et de la O. ;
Vu les conclusions déposées le 20 mars 2023 par Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, au nom de Monsieur t.E ;
Vu l'ordonnance de jonction des instances n° 2020/000127 et n° 2023/000044 sous le seul numéro de rôle n° 2020/000127 en date du 14 mars 2023 ;
Vu l'ordonnance de clôture du 15 mars 2023 ;
À l'audience du 21 mars 2023, vu la production de leurs pièces par les conseils des parties et en leurs plaidoiries ;
Motifs
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
La Cour statue sur la réassignation relevée par la SAM F. et la SAS G. à l'encontre d'une ordonnance de référé rendue par le juge des référés le 13 mars 2020.
Considérant les faits suivants :
La société N. (ci-après N.) est entreprise générale d'une opération immobilière se déroulant x34 à Monaco « x35 ».
Cette opération est décomposée en deux parties :
* un « bloc A » dont le maître de l'ouvrage est la sociétéH., pour des constructions de logements, surfaces tertiaires et stationnements,
* un « bloc B », dont le maître d'ouvrage est l'ÉTAT DE MONACO, représenté par la société AD. (ci-après AD.), pour des constructions notamment de parkings, local de stockage bureaux/logistique.
Les travaux ont débuté le 22 juillet 2017 et le 30 mai 2019, une grue identifiée comme « G2 » s'est effondrée sur le chantier, causant des blessures à un grutier, t.E ainsi que des dégâts matériels, ce qui a entrainé l'interruption du chantier.
Une information judiciaire a été ouverte par le Parquet Général de Monaco et dans ce cadre le magistrat instructeur a diligenté une expertise confiée à p.KL..
Par acte en date du 16 septembre 2019, la SAM N. a assigné les intervenants de cette opération immobilière devant le juge des référés du Tribunal de Première Instance de Monaco, aux fins d'obtenir la désignation d'un expert. Ont ainsi été présents aux débats :
* 1/ la société AD., opérateur pour le compte de l'ÉTAT DE MONACO,
* 2/ la sociétéH., maître d'ouvrage privé pour le projet immobilier formant le bloc A,
* 3/ f.C, architecte,
* 4,5/ les sociétés AE. France et AE. Monaco, qui sont intervenues en qualité de maître d'œuvre sur l'aspect géotechnique et structure du gros œuvre,
* 6/ la AF. qui est intervenue en qualité de bureau de contrôle,
* 7,8/ la société de droit italien P., propriétaire et loueur de la grue « G2 », également sous-traitante d'N. pour le lot terrassement, jusqu'à sa substitution par la société AG., créée en cours d'exécution du contrat de sous-traitance,
* 9,10/ les sociétés R., fabriquant de la grue G2 et SAS R.,
* 11/ la société AH. (AH.), bureau d'études technique sur les structures, intervenue en qualité de prestataire de l'entreprise générale pour les calculs et pour les plans d'exécution des fondations des grues G1/G2 ainsi que pour les études d'exécution du gros œuvre. Elle est également intervenue en qualité de prestataire de la sociétéAI., elle-même sous-traitante de la société N. pour le lot soutènement,
* 12/ la SAM F., qui est intervenue en qualité de prestataire pour le compte d'N., pour l'exécution des missions dénommées M1 et M2 sur la grue G2, qui avait notamment pour objet pour la première la « vérification de l'adéquation liée à la prévention du risque de renversement des grues à tour sous l'effet du vent » et pour la seconde la vérification de la stabilité du massif sur lequel repose la grue G2,
* 13/ la société G.,
* 14/ la société de droit français T., en qualité d'installateur de la grue G2 pour le compte de l'entreprise générale,
* 15/ La Société par Actions Simplifiée de droit français dénommée AJ., qui est intervenue en qualité de prestataire pour le compte de la société T., pour l'exécution de la mission dite « M3 », qui a eu pour objet la vérification de la grue G2 avant sa mise en service,
* 16/ la U., qui est intervenue pour le compte de la société AG. pour la vérification générale périodique (VGP) semestrielle de la grue G2,
* 17,18/ La Société par Actions Simplifiée de droit français dénommée U., prise en la personne de son Président et d'un Directeur,
* 19,20/ La société par Actions Simplifiée de droit français dénommée AK., prise en la personne de son Président et d'un Directeur,
* 21/ La Société Anonyme Monégasque dénommée AA. (AA.), qui est intervenue en qualité de société d'intérim employant le grutier t.E,
* 22/ La société par Actions Simplifiée à associé unique de droit français dénommée V. (V.), qui est intervenue en qualité de fournisseur d'N. pour les aciers d'armatures des quatre massifs de la grue G2,
* 23/ La Société Anonyme Monégasque dénommée W., (W.) qui est intervenue en qualité de fournisseur d'N. pour le béton des quatre massifs de la grue G2,
* 24/ La Société Anonyme Monégasque dénommée J.,
* 25/ la Société Mutuelle de droit français dénommée L. (L.), assureur multirisque travaux de l'entreprise générale N.,
* 26/ t.E, exerçant la profession de Grutier.
Aux termes d'une ordonnance en date du 13 mars 2020, rendue par défaut s'agissant des sociétés anonymes monégasques SAMH. et AF. et contradictoirement à l'égard de toutes les autres parties, le Président du Tribunal de Première Instance a statué comme suit :
« - ordonnons une mesure d'expertise qui obéira aux dispositions des articles 344 à 368 du Code de procédure civile et ce aux frais avancés de la Société Anonyme Monégasque dénommée N. « N. » et des sociétés AG. et P. (Italie),
* désignons pour y procéder p.KL Expert en bâtiment, Ingénieur des Arts et Métiers, Expert Judiciaire près la Cour d'Appel d'Aix en Provence, Expert Judiciaire près la Cour Administrative de Marseille, exerçant x36-06300 Nice, assisté, le cas échéant, par tout sapiteur de son choix, lequel serment préalablement prêté, aura pour mission de :
* décrire, analyser et valider les travaux et moyens nécessaires, ou qui ont été rendus nécessaires, pour remédier aux dommages et remettre les lieux dans l'état dans lequel ils se trouvaient avant ladite chute,
* dire que l'Expert pourra s'adjoindre si nécessaire tout sapiteur afin de procéder au chiffrage des travaux et à l'estimation de leur durée,
* donner tous éléments permettant de déterminer et chiffrer les préjudices subis pour la Société N. tant en termes de surcoût, qu'en termes de retard dans l'exécution de ses obligations,
* fournir tous éléments pour déterminer un préjudice matériel ou immatériel subi par les sociétés AG. et P. (Italie) et, dans l'affirmative, chiffrer lesdits préjudices,
* indiquer la période pendant laquelle le chantier a été immobilisé par la chute de la grue et par l'exécution des travaux réparatoires et de remise en état,
* plus généralement, faire toutes constatations et formuler toutes observations utiles en vue de permettre ultérieurement la solution du litige […],
* accueillons la compagnie d'assurances Y., en son intervention volontaire aux débats,
* rejetons le surplus des demandes des parties,
* réservons les dépens ».
Pour statuer ainsi le premier juge a indiqué qu'en application de l'article 177 alinéa 2 du Code de procédure pénale, il avait demandé communication du dossier d'instruction afin de pouvoir comparer le périmètre de la mission déjà confiée à l'expert et celui demandé dans la présente instance et, ce, dans un souci de bonne administration de la justice.
En l'espèce, par les éléments produits aux débats, et par comparaison des missions expertales, il apparaissait que la société N. justifiait à la présente instance d'une urgence à déterminer uniquement les conséquences liées à l'immobilisation du chantier et à l'exécution des travaux réparatoires et de remise en état et qu'il serait donc fait partiellement droit à sa demande d'expertise.
Suivant acte en date du 26 mai 2020, la société anonyme monégasque AH. (AH.) a relevé appel parte in qua de l'ordonnance du 13 mars 2020, en sollicitant sa confirmation en ce qu'elle a désigné un expert et son infirmation pour le surplus tant sur la personne de l'expert que sur la mission qui lui a été confiée.
Le 3 juillet 2020, les sociétés G. et F. ont conclu en formant appel incident et sollicitent que la Cour, infirmant partiellement l'ordonnance du 13 mars 2020 et statuant à nouveau ordonne une mission complétée à l'expert.
Cinq intimées n'ont pas comparu : la SAMH., la AF. la SAS AJ., la J. et la L..
En l'état de ce défaut, constaté à l'audience de la Cour d'appel du 6 octobre 2020, la Cour a ordonné la réassignation de ces dernières pour l'audience du 24 novembre 2020.
Le Greffier en chef a délivré l'attestation prévue par l'article 210 alinéa 2 du Code de procédure civile.
Aucune réassignation n'a été délivrée pour cette date du 24 novembre 2020.
Par arrêt avant dire droit en date du 30 septembre 2021, la Cour a :
* ordonné la réassignation de la SAMH., la AF. la SAS AJ., la J. et la L., défaillantes, pour l'audience du MARDI 7 DÉCEMBRE 2021 à 9 h 00,
* dit que cette réassignation pourra intervenir à l'initiative de la partie la plus diligente,
* dit qu'à défaut l'affaire sera provisoirement retirée du rôle de la Cour et y sera rétablie sur simple demande de l'une des parties sur justification de la diligence attendue,
* réservé l'examen du surplus des demandes et les dépens en fin de cause.
Par acte en date du 29 octobre 2021, la SAM F. et la société par actions simplifiée G. ont fait procéder à cette réassignation.
Par conclusions en date du 21 février 2022, la société AH. a sollicité d'être reçue en son appel, la confirmation de l'ordonnance de référé du 13 mars 2020 en ce qu'elle a désigné un expert judiciaire, mais son infirmation pour le surplus, tant sur la personne de l'expert que sur la mission qui lui a été confiée.
Elle sollicite que la Cour, statuant à nouveau, désigne un nouvel expert ayant pour mission de :
* se rendre sur les lieux, x34 à Monaco, sur le chantier dénommé « Opération Entrée de Ville Monaco » en présence des parties ou celles-ci régulièrement convoquées,
* prendre connaissance des différents constats d'ores et déjà établis,
* recueillir les explications des parties et se faire communiquer par elles tous les documents et pièces qu'il estimera nécessaires à l'accomplissement de sa mission,
* entendre tous sachants,
* constater la réalité de la chute de la grue G2 et décrire les dommages consécutifs à ladite chute,
* rechercher la ou les causes et origines de la chute de ladite grue, en indiquer la nature, l'importance, la date d'apparition,
* fournir tous éléments permettant à la juridiction saisie de statuer sur les éventuelles responsabilités encourues,
* fournir tout élément permettant à la juridiction saisie de déterminer et chiffrer les préjudices matériels et immatériels subis par le demandeur, en relation avec la chute de la grue.
En fonction de l'état d'avancement du chantier au jour de la désignation de l'expert judiciaire :
* décrire, analyser et valider les travaux et moyens nécessaires, ou qui ont été rendus nécessaires, pour remédier aux dommages et remettre les lieux dans l'état dans lequel ils se trouvaient avant ladite chute,
* chiffrer le coût des travaux et préciser leur durée d'exécution, sur la base de tous devis ou factures qui seront produits par les parties, et qui seront annexés par l'Expert à son rapport,
* dire que l'expert pourra s'adjoindre si nécessaire tout sapiteur afin de procéder au chiffrage des travaux et à l'estimation de leur durée,
* indiquer la période pendant laquelle le chantier a été immobilisé par la chute de la grue G2 et par l'exécution des travaux réparatoires et de remise en état,
* plus généralement faire toutes les constatations et formuler toutes observations utiles en vue de permettre ultérieurement la solution du litige.
À l'appui de ses demandes, la société AH. fait valoir que la Présidente du Tribunal a pu seule avoir communication du dossier d'information judiciaire, qu'elle a méconnu le principe essentiel du contradictoire en n'en informant pas les parties à la présente instance et en les privant de la possibilité de débattre des éléments sur lesquels elle s'est fondée pour prendre sa décision, certaines parties à l'instance en référé n'étant pas constituées parties civiles dans le cadre de l'information judiciaire. L'appelante estime que la mission complète sollicitée par la demanderesse initiale N. était au demeurant parfaitement justifiée et que le fait de l'avoir tronquée serait en outre source de difficulté, si l'information judiciaire devait se conclure par un non-lieu ou qu'une relaxe au fond soit prononcée in fine.
Enfin, la désignation d'un autre expert que celui primitivement nommé éviterait toute interférence entre l'instance pénale et la présente procédure.
Par conclusions en date du 13 juillet 2022, la SAM F. et la SAS G. ont conclu à la confirmation de l'ordonnance du 13 mars 2020 en ce qu'elle a ordonné une expertise et à sa réformation quant à l'étendue de la mission de l'expert, la Cour statuant à nouveau devant ordonner à l'expert :
* d'établir une chronologie des faits à partir des pièces du marché,
* de déterminer les causes de l'accident du 30 mai 2019,
* de fournir tous éléments techniques permettant de déterminer les imputabilités.
Les appelantes incidentes estiment que la mission confiée à l'expert par le juge des référés sera insuffisante et en outre les réunions contradictoires qui ont eu lieu n'ont eu qu'un objet extrêmement limité. Le contexte procédural créerait en outre une situation d'inégalité entre les parties, les opérations menées dans le champ de l'information judiciaire concernant certaines des parties présentes à l'instance civile, mais pas toutes. L'ordonnance querellée nécessiterait l'infirmation pour permettre à l'expert KL. de fournir des éléments techniques permettant de déterminer les imputabilités.
Par conclusions en date du 20 avril 2022, la société N., appelante incidente, a sollicité la réformation partielle de l'ordonnance de référé du 13 mars 2020 en ajoutant à la mission de l'expert KL. des chefs aux fins de déterminer les causes de l'accident du 30 mai 2019 et de fournir les éléments techniques de nature à permettre à la juridiction qui sera saisie de déterminer les responsabilités encourues.
Cette société estime qu'il est impératif que soient déterminées, dans le cadre procédural civil, les causes de l'accident du 30 mai 2019 et les conséquences pécuniaires de l'effondrement de la grue.
Elle rappelle qu'elle n'est pas partie à la procédure pénale qui est en cours et ne pourrait se voir opposer des éléments recueillis dans ce cadre qui ne serait pas à son contradictoire.
Par conclusions en date du 22 février 2022, la société P. et la société AG. ont conclu à la confirmation de l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a ordonné une expertise et désigné p.KL. en qualité d'expert, mais à son infirmation sur l'étendue de la mission confiée, en sollicitant d'ajouter les mêmes chefs que ceux sollicités par la SAM N..
Aucune raison objective à son sens ne militerait pour la désignation d'un nouvel expert et ce d'autant moins que l'expert KL. a déjà une connaissance du dossier.
Par conclusions en date du 26 avril 2022, la société R. sollicite que la société AH. soit déclarée mal fondée en son appel principal et que les sociétés G. et SAM F. le soient également en leur appel incident.
Elles considèrent que les opérations expertales ont débuté depuis le 10 juillet 2020, du fait de l'exécution provisoire de plein droit de l'ordonnance de référé, que plusieurs réunions se sont déjà tenues, au cours desquelles les parties, dont les appelantes incidentes, ont pu faire valoir leur position, notamment sur la détermination des intervenants, leurs missions et rôles sur le chantier.
Il serait de bonne administration de la justice, afin d'assurer la célérité des opérations d'expertise et afin d'éviter toute contrariété de solutions que l'expertise civile soit conduite par la même personne que celle désignée dans le cadre de l'instruction pénale.
Elles estiment enfin que les appelantes avaient la possibilité, après avoir pris connaissance du dossier d'instruction, de faire valoir des contestations, ou de solliciter une contre-expertise.
Par conclusions en date du 7 décembre 2021, la U., la SAS U. et la Z. ont sollicité leur mise hors de cause aux motifs que, s'agissant de la société AK., aucune mission ne lui aurait été confiée et que s'agissant de la U., elle a été chargée d'une mission de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé des travailleurs en 2015, ce qui ne pourrait être en rapport avec le sinistre du 30 mai 2019.
La I. n'a pas constitué avocat.
Les autres parties à l'instance s'en sont rapportées à justice.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 mars 2023.
SUR CE,
* 1/ Attendu que les appels, principal et incidents, relevés dans les formes et délais prescrits par le Code de procédure civile, doivent être déclaré recevables ;
Que la SAM AH., qui a conclu comM. I.diqué le 21 février 2022, suite à la réassignation ne s'est nullement désistée de son appel ;
* 2/ Attendu que la I., réassignée, n'a pas été citée à personne et n'a pas comparu, ni personne pour elle, qu'il sera en conséquence statué par arrêt réputé contradictoire à l'égard de tous par application combinée des articles 217 et 435 du Code de procédure civile ;
* 3/ Attendu que le litige en cause d'appel ne porte pas sur le principe de l'organisation d'opérations d'expertise civile, sur le fondement pertinent de l'article 414 du Code de procédure civile, suite à l'accident intervenu le 30 mai 2019 sur le chantier sis x34 à Monaco, consistant dans la chute d'une grue dite « G2 », mais sur la personne de l'expert et l'étendue de sa mission ;
* 3.1/ Attendu en premier lieu sur le choix de l'expert KL., qu'aucune raison objective ne vient justifier la demande relative à son remplacement présentée par la société AH., aucune critique étayée et appuyée sur ses capacités techniques, ses connaissances, ses compétences concrètes et leur mise en œuvre ou encore son impartialité n'étant développée ;
Que l'ordonnance entreprise sera donc confirmée sur ce point ;
* 3.2/Attendu que pour refuser de confier à l'expert une mission complète telle que sollicitée initialement par la demanderesse en référé la société N., le juge des référés a indiqué s'être fait communiquer le dossier d'information judiciaire en cours, sur le fondement de l'article 177 du Code de procédure pénale et a ajouté que dans le cadre de l'instruction, une expertise avait été ordonnée notamment pour déterminer les causes et les responsabilités de l'accident ;
Qu'il a estimé en comparant le périmètre des missions, sans soumettre les éléments du dossier pénal aux débats, qu'il y avait lieu de circonscrire la mission de l'expert aux seules conséquences liées à l'immobilisation du chantier et à l'exécution des travaux réparatoires de remise en état ;
Attendu que l'article 177 du Code de procédure pénale dispose :
* « Le procureur général peut, à toute époque de l'instruction, requérir communication de la procédure qu'il ne pourra conserver au-delà de quarante-huit heures.
* Le président du tribunal de première instance peut également se faire communiquer la procédure pour la même durée.
* À défaut de communication immédiate du dossier, le procureur général ou le président du tribunal peut saisir le premier président de la cour d'appel sur simple requête » ;
Attendu qu'en statuant comme I. l'a fait, le juge des référés a méconnu le sens et la portée de ce texte, qui confère une attribution en matière de procédure pénale au Président du Tribunal de première instance, strictement limitée à cette matière et uniquement en lien avec les attributions en matière d'instruction confiées au chef de la juridiction de première instance ;
Que ce texte et les principes généraux du droit monégasque que constituent le respect du secret de l'instruction et du contradictoire en matière civile, prohibent que la connaissance tirée du dossier d'information judiciaire puisse être utilisée par un magistrat pour motiver une décision civile, sans que sa substance ne puisse être communiquée aux parties en la cause et ce d'autant moins dans des cas, comme en l'espèce où les parties à l'instance en référé ne sont pas forcément toutes constituées parties civiles ou inculpés dans le cadre de l'information judiciaire ;
Attendu en conséquence, que ces motifs erronés ne peuvent fonder une décision de refus d'une mission telle que sollicitée initialement par la société N. ;
* 3.3/ Attendu que le déroulé d'une instance pénale et d'une information judiciaire en cours répond à une procédure et des finalités distinctes d'une procédure civile de référé aux fins d'expertise qui doit posséder sa cohérence propre ;
Attendu en conséquence que l'ordonnance déférée sera donc infirmée en ce qu'elle a rejeté le surplus des demandes de chefs de mission et que statuant à nouveau la Cour entend conférer à l'expert des chefs aux fins de détermination des causes de l'accident, dans les termes du dispositif du présent arrêt ;
* 4/ Attendu enfin que la mise hors de cause de la U., de la SAS U. et de la Z. apparait en conséquence prématurée et qu'il est au contraire crucial que les opérations d'expertise se déroulent à leur contradictoire pour que leur rôle respectif soit décrit ;
* 5/ Attendu enfin que chaque partie succombant, au moins partiellement, sur un chef et au regard de la nature de l'instance, il y a lieu de dire que chacune des parties conservera la charge de ses dépens, de première instance et d'appel, en application des dispositions de l'article 233 du Code de procédure civile ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,
statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
par mise à disposition au greffe,
Déclare la société anonyme monégasque AM. recevable en son appel principal et les sociétés F., G. et N. (N.) recevables en leur appel incident à l'encontre de l'ordonnance de référé en date du 13 mars 2020,
Confirme cette ordonnance en ce qu'elle a désigné p.KL. en qualité d'expert, avec les chefs de mission indiqués dans son dispositif,
L'infirme en ce qu'elle a rejeté le surplus des demandes des parties,
Statuant à nouveau de ces chefs :
Dit que l'expert p.KL. aura également pour mission, assisté le cas échéant de tout sapiteur de son choix de :
* établir les circonstances de l'accident survenu le 30 mai 2019 sur le chantier sis x34 à Monaco,
* se faire remettre par les parties tous documents nécessaires ou utiles à l'accomplissement de sa mission,
* rechercher la ou les causes et les origines de la chute de la grue dite G2 selon toute méthode appropriée,
* fournir tout renseignement permettant à la juridiction de fond qui serait saisie de déterminer les responsabilités encourues,
Rejette le surplus des demandes des parties,
Y ajoutant,
Ordonne la compensation totale des dépens de première instance et d'appel, y compris ceux réservés par arrêt du 30 septembre 2021,
Composition
Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,
Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, et qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement,
Ainsi jugé et rendu au Palais de Justice, à Monaco, le 28 SEPTEMBRE 2023, par Madame Claire GHERA, Conseiller, faisant fonction de Président, Monsieur Sébastien BIANCHERI, Conseiller, Madame Magali GHENASSIA, Conseiller, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint, en présence de Monsieur Morgan RAYMOND, Procureur général adjoint.
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