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02/11/1976 | MONACO | N°25838

Monaco | Cour de révision, 2 novembre 1976, Procureur Général c/ Maire de Monaco, dame T., Sté Halles du Midi, M. et Sté E. (Affaire dite des Halles et Marchés).


Abstract

Appel civil

Biens en litige - Domanialité privée - Ministère Public - Appel - Irrecevabilité - Plaideur - Rapport à justice - Appel aux fins d'infirmation - Irrecevabilité

Résumé

Si un litige concernant les biens du domaine public intéresse l'ordre public, par contre, lorsqu'une décision devenue irrévocable a décidé que les biens litigieux ne dépendaient pas du domaine public de la Commune, il en résulte nécessairement que le Procureur Général n'avait pas qualité pour interjeter appel.

Un plaideur ne peut se faire un grief, à l'en

contre d'une décision de justice, de ce que les juges ont entériné ses propres conclusions ; ains...

Abstract

Appel civil

Biens en litige - Domanialité privée - Ministère Public - Appel - Irrecevabilité - Plaideur - Rapport à justice - Appel aux fins d'infirmation - Irrecevabilité

Résumé

Si un litige concernant les biens du domaine public intéresse l'ordre public, par contre, lorsqu'une décision devenue irrévocable a décidé que les biens litigieux ne dépendaient pas du domaine public de la Commune, il en résulte nécessairement que le Procureur Général n'avait pas qualité pour interjeter appel.

Un plaideur ne peut se faire un grief, à l'encontre d'une décision de justice, de ce que les juges ont entériné ses propres conclusions ; ainsi lorsqu'en qualité de défendeur il s'en est rapporté à justice devant toutes les juridictions saisies, il ne saurait être admis à conclure à l'infirmation des jugements déférés.

Motifs

La Cour de révision

Attendu que, saisie par le Maire de Monaco de demandes en majoration du loyer des magasins loués par la Commune, aux Établissements M., à dame T., à M. P. et à la Société E., la Commission Arbitrale, par quatre jugements du 23 juin 1969, a fixé les loyers afférents aux dits locaux, à compter du 1er juillet 1968 ;

Attendu que le Procureur Général a interjeté appel de ces jugements, en soutenant que les magasins faisaient partie du domaine public de la Commune, que les locataires ne pouvaient se prévaloir de baux commerciaux valables et que la Commission Arbitrale était incompétente pour connaître des demandes ;

Attendu que la Cour d'Appel ayant, par arrêt du 22 juin 1970 déclaré irrecevables les appels du Procureur Général, la Cour de Révision a, le 3 mai 1971, cassé ledit arrêt et, statuant sur renvoi a, le 19 octobre 1971, sursis à statuer sur les appels du Procureur Général jusqu'à ce que ce dernier ait fait trancher, par les juridictions compétentes, la question préjudicielle de domanialité publique des biens loués ;

Attendu que la question préjudicielle ayant été réglée par un arrêt de la Cour d'Appel du 14 mai 1974 devenu définitif, le Procureur Général, par exploits du 15 septembre 1975 a fait assigner les commerçants sus nommés, ainsi que le Maire de Monaco, devant la Cour de Révision, afin « de faire juger que la Commune, se fondant sur les seuls droits tirés de son domaine privé, n'avait pas qualité pour agir devant la Commission Arbitrale des baux commerciaux et qu'ainsi l'action du Maire était irrecevable » ;

Sur la recevabilité,

Attendu que les commerçants intimés soutiennent qu'étant établi que les magasins en litige ne font pas partie du domaine public, la contestation porte désormais sur des intérêts purement privés, en sorte que l'intervention du Procureur Général ne se justifierait pas et serait irrecevable ;

Attendu, en effet, qu'aux termes de l'article 67, 2e alinéa de l'Ordonnance du 10 juin 1859, modifiée par l'article 73 de la Loi du 15 juillet 1965 « les officiers du Ministère Public agissent d'office lorsque l'ordre public le commande » ;

Attendu que, par son arrêt du 15 juillet 1971, la Cour de Révision, après avoir énoncé qu'un litige concernant les biens du domaine public intéresse l'ordre public, a sursis à statuer afin de faire juger la question préjudicielle de domanialité publique des magasins litigieux ;

Attendu que par l'arrêt sus visé du 14 mai 1974, devenu irrévocable, la Cour d'Appel a décidé que lesdits magasins ne dépendaient pas du domaine public de la Commune ; qu'il en résulte nécessairement que le Procureur Général n'avait pas qualité pour interjeter appel des décisions de la Commission arbitrale ;

En quoi ces appels ne peuvent qu'être déclarés irrecevables ;

Sur les conclusions du Maire,

Attendu que, par des conclusions déposées les 23 février et 6 octobre 1976, le Maire demande à la Cour de Révision de « dire et juger que les magasins dont s'agit, qui font partie du domaine privé de la Commune, doivent être considérés, de par leur situation, comme occupant nécessairement une dépendance du domaine public, et ce avec toutes les conséquences de droit » ;

Mais attendu qu'un plaideur ne peut se faire un grief, à l'encontre d'une décision de justice, de ce que les juges ont entériné ses propres conclusions ; que le Maire, qui a assigné les commerçants devant la Commission Arbitrale en vue d'obtenir une majoration des loyers, qui n'a pas interjeté appel des jugements rendus par cette Commission conformément à ses conclusions et qui, en qualité de défendeur, s'en est rapporté à justice devant toutes les juridictions saisies des procédures engagées par le Procureur Général, ne saurait être admis à conclure à l'infirmation des jugements déférés ;

D'où il suit que ces conclusions sont irrecevables ;

Commentaire

des décisions juridictionnelles rendues, entre le 23 juin 1969 et le 2 novembre 1976, à propos du régime juridique applicable à différents locaux à usage de commerces, situés en sous-sol des halles et marchés communaux

- décisions, en date du 23 juin 1969, de la Commission Arbitrale des loyers commerciaux ;

- arrêt, en date du 22 juin 1970, de la Cour d'appel ;

- arrêt, en date du 3 mai 1971, de la Cour de révision ;

- arrêt, en date du 19 octobre 1971, de la Cour de révision ;

- jugement, en date du 7 juin 1973, du Tribunal de première instance ;

- arrêt, en date du 14 mai 1974, de la Cour d'appel ;

- arrêt, en date du 17 avril 1975, de la Cour de révision ;

- arrêt, en date du 2 novembre 1976, de la Cour de révision.

Audience du 17 avril 1975

La Cour de révision

Vu :

le pourvoi formé au Greffe Général, le 19 août 1974 par Monsieur le Procureur Général, contre un arrêt contradictoirement rendu par la Cour d'appel de Monaco, le 14 mai 1974,

Sur le premier moyen :

Attendu qu'ayant à statuer sur la question préjudicielle de domanialité publique soulevée par le Procureur Général au cours des instances en révision de loyers commerciaux engagées par le Maire de Monaco, respectivement contre J. M., dame T., la Société Halle du Midi et la Société E., titulaires de baux portant sur des magasins situés en sous-sol de marchés publics, l'arrêt confirmatif attaqué, après avoir relevé la situation extérieure et indépendante desdits magasins, leur régime spécial aux points de vue administratif, fiscal et locatif, et l'objet même de leur exploitation, a décidé qu'ils n'étaient point affectés au Service Communal des Halles et Marchés et qu'ils ne faisaient pas partie du domaine public de la commune ;

Attendu que le pourvoi reproche à la Cour d'appel d'avoir, en se référant au critère d'affectation à un service public, faussement appliqué l'article 149 de la loi n° 30 du 3 mai 1920, portant organisation municipale, cette disposition édictant sans qu'il y ait lieu de faire appel à aucune autre considération, que font partie du domaine public de la commune par prélèvement sur le domaine privé du Prince... les marchés, à l'expiration de la concession en cours, et d'avoir dénaturé l'acte de concession du 25 juin 1894, du cahier des charges du 10 juin de la même année et de l'avenant du 9 octobre 1952, prévoyant qu'à la fin de la concession, l'ensemble constitué par le terrain et les constructions appartiendrait en toute propriété au domaine privé du Prince ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant rappelé que la loi précitée avait défini les biens communaux en distinguant, dans son article 149, le domaine public comprenant « tous les biens affectés à un service public municipal », et dans son article 152, le domaine privé comprenant « les biens... non affectés à un service public », l'arrêt a justement admis qu'à défaut d'une disposition expresse de la loi, le critère essentiel de la domanialité publique résidait dans la destination donnée aux biens et leur affectation à un service public ;

Et attendu, d'autre part, qu'analysant les stipulations de l'acte de concession du cahier des charges et de l'avenant, l'arrêt relève les différences nombreuses prévues dans ces actes et ayant existé dès l'origine de la convention entre les marchés proprement dits et les magasins litigieux, concernant l'indépendance matérielle des locaux, sans communication intérieure et ouvrant sur des voies situées à des niveaux différents, le fait qu'ils étaient soumis à des régimes administratifs, fiscal et locatif distincts ainsi que la nature de leur exploitation et conclut que les magasins en cause, extérieurs aux marchés publics, n'étaient point affectés au service public communal des Halles et Marchés et ne pouvaient, dès lors, être considérés comme faisant partie du domaine public de la commune ;

D'où il suit qu'en se déterminant par de tels motifs, qui ne dénaturent aucun document, la Cour d'appel, loin de violer le texte de loi invoqué, en a fait, au contraire, une exacte application ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il est vainement allégué que l'arrêt aurait omis de répondre à des conclusions soutenant que les magasins constituaient des éléments de l'organisation d'ensemble qui forme les marchés et que, par leur aménagement dans un même immeuble, ils contribuaient, avec les commerces exploités sous le régime des droits de place, à la satisfaction des besoins de la population ; qu'en effet, l'arrêt, qui s'est notamment référé à l'objet de l'exploitation des magasins, en précisant que certains seulement se rapportaient à l'alimentation et dans des conditions ne permettant pas toujours la satisfaction des besoins des particuliers, telle la vente de vins en gros, et qui a relevé qu'ils n'avaient pas reçu d'aménagements propres à les adapter au service communal des Halles et Marchés, a, par l'ensemble de ses motifs, écarté l'argumentation proposée et ainsi répondu aux conclusions prétendument délaissées ;

Que le moyen ne saurait donc être accueilli ;PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi :

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Donne acte à G. de ce qu'il intervient volontairement aux lieu et place de la Société Halles du Midi, défenderesse, et qu'il déclare se substituer à cette dernière pour y exercer ses droits et actions, notamment dans la présente instance ;

Déclare irrecevables les appels interjetés par le Procureur Général des quatre jugements sus visés rendus le 23 juin 1969 par la Commission arbitrale ;

Déclare irrecevables les conclusions précitées du Maire de Monaco ;

Dit que les dépens resteront à la charge de l'État ;

Composition

M. Burgalat pr., Me Raybaudi av. déf., Me Coudurier (du barreau de Nice) av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25838
Date de la décision : 02/11/1976

Analyses

Public - Général ; Propriété des personnes publiques et domaine public


Parties
Demandeurs : Procureur Général
Défendeurs : Maire de Monaco, dame T., Sté Halles du Midi, M. et Sté E. (Affaire dite des Halles et Marchés).

Références :

article 73 de la Loi du 15 juillet 1965
Ordonnance du 10 juin 1859
article 149 de la loi n° 30 du 3 mai 1920


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;1976-11-02;25838 ?

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