Motifs
Pourvoi N° 2020-39
en session civile
COUR DE RÉVISION
ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2020
En la cause de :
- Monsieur b. M., né le 15 janvier 1954 à Nice, de nationalité française, neurochirurgien, demeurant « X1», X1 à Nice ;
Ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, substituée par Maître b. BENSA, avocat-défenseur près la même Cour et plaidant par Maître Pauline GADD, avocat au barreau de Nice ;
DEMANDEUR EN RÉVISION,
d'une part,
Contre :
- La société anonyme monégasque dénommée IM2S CONCEPT, dont le siège social est sis 11 avenue d'Ostende à Monaco (98000), agissant poursuites et diligences de son Président Délégué en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;
Ayant élu domicile en l'étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
DÉFENDERESSE EN RÉVISION,
d'autre part,
LA COUR DE RÉVISION,
VU :
- l'arrêt rendu le 18 février 2020 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 6 mars 2020 ;
- la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 2 avril 2020, par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de b. M.;
- la requête déposée le 18 mai 2020 au Greffe général, par Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de b. M. accompagnée de 14 pièces, signifiée le même jour ;
- la contre-requête déposée le 17 juin 2020 au Greffe général, par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de la société anonyme monégasque dénommée IM2S CONCEPT, accompagnée de 37 pièces, signifiée le même jour ;
- les conclusions du Ministère public en date du 25 juin 2020 ;
- le certificat de clôture établi le 3 août 2020 par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;
Ensemble le dossier de la procédure,
À l'audience du 8 octobre 2020 sur le rapport de Monsieur Laurent LE MESLE, Conseiller,
Après avoir entendu les conseils des parties ;
Ouï Madame le Procureur général ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Attendu, selon l'arrêt critiqué, que M. M. neurochirurgien de nationalité française, exerçait depuis 2007 à la SAM Institut Monégasque de Médecine et Chirurgie Sportive - IM2S concept - (ci-après IM2S) ; qu'à la suite d'un incident avec un patient, cette société lui a notifié le 14 mars 2017 la rupture du contrat qui les liait ; que par acte du 7 juin 2017 M M. a assigné l'IM2S devant le tribunal de première instance en réparation du préjudice résultant de cette rupture ; qu'à cette occasion, M M. a également demandé, dans le cadre d'un conflit les opposant depuis plusieurs années, la condamnation de l'IM2S au remboursement de cotisations versées au titre de son assurance professionnelle et de trop perçu dans les prélèvements effectués contractuellement sur les honoraires devant lui être rétrocédés ; que par arrêt du 18 février 2020 la Cour d'appel a débouté M. M. de sa demande indemnitaire pour résiliation abusive, a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de rétrocession d'honoraires au titre de l'assurance professionnelle et au titre des redevances perçues antérieurement au mois de mai 2012, et a confirmé le jugement du tribunal de première instance en ce qu'il l'avait débouté de sa demande en paiement d'un complément de rétrocession d'honoraires au titre des redevances perçues à compter du mois de mai 2012 ; que M. M. a formé un pourvoi en révision contre cette décision ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M M. fait grief à l'arrêt critiqué de confirmer le jugement entrepris en ce que celui-ci l'a débouté de sa demande en paiement d'un complément de rétrocession d'honoraires au titre des redevances perçues par l'IM2S à compter du mois de mai 2012 alors selon le moyen que : 1/ « tout jugement doit être motivé ; qu'en affirmant que les parties s'étaient initialement accordées, sans contrat écrit, sur un pourcentage de 30 % appliqué au reversement des honoraires, sans indiquer l'élément sur lequel elle se fondait pour retenir l'existence d'un tel accord, la Cour d'appel a statué par voie de simple affirmation et violé l'article 199 du Code de procédure civile ; 2/ en adoptant éventuellement le motif du Tribunal de première instance suivant lequel il résulterait de la lecture des conclusions des parties que celles-ci s'étaient initialement accordées sur un pourcentage de reversement d'honoraires de 30 % cependant que les conclusions de première instance de M. M. ne comportaient aucune reconnaissance d'un tel accord, la Cour d'appel a dénaturé ces conclusions en violation de l'article 989 du Code civil ; 3/ nul ne peut se constituer de titre à lui-même pour rapporter la preuve d'un acte juridique ; qu'en énonçant, pour retenir l'existence d'un accord entre des parties sur un taux de redevance de 30 %, que par courrier du 27 novembre 2012, l'IM2S avait indiqué au conseil de b. M. que ce dernier avait accepté de verser mensuellement une redevance à hauteur de 30 % des honoraires perçus, quand ce courrier, émanant de la clinique, ne pouvait être retenu comme élément de preuve de l'acte juridique dont cette dernière se prévalait, la Cour d'appel a violé les articles 1162 et 1178 du Code civil ; 4/ le silence ne vaut pas, à lui seul, acceptation sauf circonstances particulières qui permettraient de conférer à ce silence la signification d'une acceptation et qu'il incombe aux juges du fond de caractériser ; qu'en se fondant, pour retenir l'existence d'un accord des parties sur un taux de redevance de 30 %, que M. M. n'avait pas mis de contestation ou d'observation en réponse au courrier adressé par l'IM2S à son conseil, sans caractériser les circonstances permettant de conférer à ce silence la signification d'une acceptation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 963 et 989 du Code civil ; 5/ l'avenant signé par les parties le 5 juillet 2013 indiquait que M. M. exerçait à temps partiel au sein de la clinique ; qu'en retenant pourtant que M. M. avait exercé à temps plein au sein de l'IM2S jusqu'au 30 avril 2014, la Cour d'appel a dénaturé par omission l'avenant du 5 juillet 2013 et violé l'article 989 du Code civil ; 6/ l'IM2S soutenait lui-même dans ses écritures que M. M. avait exercé à temps partiel au sein de l'institut du 20 juillet 2007 au 1er août 2010, puis à dater du 1er juillet 2013 ; qu'en retenant que ce n'est qu'à compter du 30 avril 2014 que M. M. avait exercé son activité à temps partiel au sein de l'institut, la Cour d'appel a modifié les termes du litige, en violation des articles 199, 427 et 431 du Code de procédure civile ; 7 / il était constant que M. M. avait - au minimum - travaillé à temps partiel à la clinique du 20 juillet 2007 au 1er août 2010, puis à compter du 1er juillet 2013 ; qu'il résulte en outre des constatations des juges du fond que le taux conventionnellement prévu pour les médecins n'exerçant pas à temps complet au sein de la clinique était de 15 %, mais que le taux de la redevance perçue sur les honoraires de M. M. n'a été ramené à 15 % qu'à compter de l'année 2014 ; qu'en, déboutant pourtant M. M. de son action en répétition de l'indu au titre du trop perçu par la clinique à l'occasion du prélèvement de ses redevances, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 1223 du Code civil » ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que M. M. sur lequel reposait la charge de la preuve, ne produisait aucun élément de nature à établir son éventuel désaccord quant au montant des prélèvements effectués, ni ne contestait la notification qui lui avait été faite de ce montant par courrier de l'IM2S, la Cour d'appel a pu, abstraction faite du motif surabondant critiqué par les cinquième et sixième branches, confirmer le jugement en ce qu'il avait débouté l'intéressé de sa demande de remboursement des redevances perçues par l'IM2S à compter du mois de mai 2012 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1223 du Code civil, et l'article 2082 du même code dans sa rédaction antérieure à la loi n° 1401 du 5 décembre 2013 ;
Attendu que pour déclarer irrecevables comme prescrites les demandes en paiement présentées par M. M. à raison des prélèvements effectués sur les honoraires lui revenant antérieurement au mois de mai 2012, la Cour d'appel a retenu qu'elles concernaient des sommes payables à des termes périodiques qui, en application des dispositions de l'article 2097 du Code civil dans sa rédaction applicable, se prescrivaient par cinq ans ;
Qu'en statuant ainsi,
alors que l'action en répétition de redevances indûment prélevées qui ne constitue pas une action en paiement de sommes payables à termes périodiques, se prescrit, quel que soit le motif de ces prélèvements, selon le délai de droit commun applicable aux quasi-contrats, la Cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
Casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'appel le 18 février 2020, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable comme étant prescrite la demande en paiement de M. b. M. au titre des cotisations d'assurance et des redevances perçues par l'IM2S antérieurement au mois de mai 2012,
Renvoie la cause et les parties à la prochaine session utile de la Cour de révision autrement composée,
Réserve les dépens,
Composition
Ainsi jugé et prononcé le douze octobre deux mille vingt, par la Cour de révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Jean-Pierre GRIDEL, faisant fonction de Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Monsieur Jacques RAYBAUD, Conseiller, et Monsieur Laurent LE MESLE, Conseiller, rapporteur, en présence du Ministère Public, assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.
Le Greffier en Chef, Le Président.
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