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18/03/2024 | MONACO | N°30454

Monaco | Cour de révision, 18 mars 2024, m. c. A. et autres c/ f. B. et autres


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LA COUR DE RÉVISION,

VU :

* l'arrêt rendu le 4 avril 2023 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 11 mai 2023 ;

* la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 9 juin 2023, par Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, au nom de l'hoirie A. ;

* la requête déposée le 7 juillet 2023 au Greffe général, par Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, au nom de l'hoirie A., accompagnée de 7 pièces, signifiée le même jour ;

* la contre-requête déposée le 4 août 2023 au Greffe général, par Maître Charles

LECUYER, avocat-défenseur, au nom de l'hoirie B., accompagnée de 35 pièces, signifiée le même jour ;

* les co...

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LA COUR DE RÉVISION,

VU :

* l'arrêt rendu le 4 avril 2023 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 11 mai 2023 ;

* la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 9 juin 2023, par Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, au nom de l'hoirie A. ;

* la requête déposée le 7 juillet 2023 au Greffe général, par Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, au nom de l'hoirie A., accompagnée de 7 pièces, signifiée le même jour ;

* la contre-requête déposée le 4 août 2023 au Greffe général, par Maître Charles LECUYER, avocat-défenseur, au nom de l'hoirie B., accompagnée de 35 pièces, signifiée le même jour ;

* les conclusions du Ministère public en date du 12 septembre 2023 ;

* le certificat de clôture établi le 18 septembre 2023 par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 12 mars 2023 sur le rapport de Mme Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président,

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï le Ministère public ;

Motifs

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme g. A. veuve C., demeurant de son vivant en Principauté de Monaco, et propriétaire notamment de divers biens immobiliers situés dans l'immeuble « x11. » ainsi que x12., est décédée le jma à Nuoro (Italie) ne laissant ni ascendant, ni descendant ; qu'aux termes d'un testament olographe du 9 avril 2002, remis le 5 octobre 2006 à Maître REY, notaire à Monaco, elle a désigné comme légataires universels de ses biens situés à Monaco, une partie de ses neveux et nièces, à savoir f. B., c. B., a. B., p. B., g. B., a. B. et m. B. ; que ses autres neveux, m. c. A., v. A., m. l. A., n. a. A., f. A., g. A. et g. a. A. ont été écartés de la succession ; que ces derniers se sont opposés à l'exécution de la succession, alléguant qu'il y aurait un doute sur l'authenticité du testament ; qu'après diverses procédures diligentées par les parties, les consorts B. ont assigné les consorts A. le 16 juin 2015 pour solliciter la désignation d'un expert en graphologie et ordonner à Maître REY de suspendre les opérations de partage de la succession dans l'attente des conclusions de l'expert ; que par arrêt du 12 décembre 2017, la Cour d'appel a confirmé le jugement du 14 juillet 2016 ayant débouté les consorts A. de leurs demandes sauf en ce qui concerne l'expertise graphologique sollicitée ; que, parallèlement, ces derniers ont fait assigner devant le Tribunal de première instance les consorts B. et Maître REY, notaire, aux fins à titre principal : de dire et juger que le testament de feu g. A. en date du 9 avril 2002 est nul et non avenu ; ordonner à Maître REY de ne procéder à aucun partage de l'actif successoral sur la base du testament querellé, et à titre subsidiaire, faire procéder par un expert judiciaire à une analyse graphologique du testament afin d'en déterminer l'authenticité ; qu'ils ont également déposé une plainte avec constitution de partie civile entre les mains du juge d'instruction à l'encontre des consorts B. des chefs d'escroquerie, faux, usage de faux, recel et complicité ; que par ordonnance du 2 mai 2018, confirmée par la chambre de l'instruction de la Cour d'appel, le juge d'instruction, après avoir commis M. g. D. en qualité d'expert, a rendu une ordonnance de non-lieu le 20 août 2020 considérant que la fausseté du testament n'était pas suffisamment établie et qu'à le supposer faux, les investigations n'avaient pu déterminer l'identité du faussaire ; que dans le cadre de l'instance civile, par jugement du 24 février 2022, le tribunal a, notamment : rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la chambre d'instruction du 28 janvier 2021, prononcé la nullité du testament olographe du 9 avril 2002 attribué à g. A., dit que Maître REY, notaire, reprendra les opérations de liquidation et partage en excluant le testament olographe du 9 avril 2002 attribué à la de cujus, débouté les consorts B. de leur demande de dommages et intérêts ; que sur appel des consorts B., la Cour d'appel a confirmé le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la chambre de l'instruction du 28 janvier 2021, l'infirmant pour le surplus, elle a débouté les consorts A. de leurs demandes de nullité du testament olographe, dit que Maître REY reprendra les opérations de liquidation partage de la succession de feu g. A. conformément au testament olographe du 9 avril 2002, déboutant les parties de leurs demandes de dommages et intérêts ; que l'hoirie A. a déclaré se pourvoir en révision ;

* Sur la recevabilité du pourvoi contestée par les consorts B. :

Attendu que les consorts B. sollicitent à titre liminaire et principal l'irrecevabilité du pourvoi formé par les consorts A. pour violation des articles 447 et 448 du Code de procédure civile, dès lors que le moyen formulé à l'appui de leur requête serait un moyen nouveau puisqu'ils ne contestent plus la validité même du testament olographe mais affirment désormais que la date apposée par le de cujus serait fausse, équivalant à son absence ; que de même, serait nouveau le moyen, mélangé de fait et de droit, développé par les consorts A. suivant lequel le testament aurait été rédigé à une date différente de celle apposée par la de cujus ;

Mais attendu que lorsqu'un moyen est en corrélation étroite et directe avec les motifs et le dispositif de l'arrêt attaqué, ce moyen n'est pas nouveau et peut être déclaré recevable ;

Qu'en l'espèce, la procédure opposant les consorts A. aux consorts B. a pour objet de faire reconnaître la nullité du testament de Mme g. A. en date du 9 avril 2002 ; que la validité de la date de ce testament a expressément été débattue devant les juges du fond ainsi qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué qui, a relevé, après avoir analysé les différentes expertises graphologiques, qu'il n'était pas contesté que si le testament était daté du 9 avril 2002, il avait été déposé entre les mains du notaire le 5 octobre 2006 et que les critiques relatives à l'adresse des consorts B. à cette période n'étaient pas probantes, retenant qu'aucun élément ne permettait d'établir que le testament daté et signé de la main de la testatrice n'avait pas été écrit de la main de la de cujus, même s'il a probablement été écrit en deux temps, cette constatation ne permettant pas de préjuger de sa fausseté ni même de sa régularité ;

Que le moyen unique qui n'est pas nouveau est recevable et que dès lors, le pourvoi est recevable ;

* Sur le moyen unique en ses deux branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de débouter Mmes m. c. A., v. A., m. l. A., n. a. A., g. A. et g. a. A. et M. f. A. de leur demande de nullité du testament olographe du 9 avril 2002 ; 1° alors que « la date d'un testament olographe est une condition de sa validité et sa fausseté équivaut à son absence et entraîne la nullité de l'acte ; qu'en considérant que les différents sachants s'accordaient à dire que le testament olographe litigieux avait probablement été écrit en deux temps, mais que cette constatation ne permettrait pas de préjuger de sa régularité, et que le testament daté du 9 avril 2022 était valable et devrait recouvrir son plein et entier effet, après avoir constaté que l'adresse de MM. g., m. et p. B. avait pu être renseignée par la testatrice après la rédaction des dispositions testamentaires, que l'expert M. E. avait suggéré que le testament pouvait à l'origine présenter une liste différente de bénéficiaires, que l'expert M. F. avait relevé un anachronisme apparent entre la partie centrale du document et la partie initiale et finale, ce qui constituait un élément établissant la possibilité que la liste des héritiers ait été insérée postérieurement, et que les deux lignes sur lesquelles figuraient les dates, lieu, identité du testateur et signature avaient pu être écrites à un âge plus avancé que le reste du document, ce dont il résultait nécessairement que la date du 9 avril 2002 apposée sur le testament était fausse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 836 du Code civil » ; 2° alors, subsidiairement, que « la fausseté de la date énoncée dans un testament olographe équivaut à son absence et entraîne la nullité de l'acte ; que si la date d'un testament olographe est inexacte, elle ne peut être rectifiée qu'à l'aide d'éléments intrinsèques de l'acte, éventuellement complétés par des éléments extrinsèques tirés des circonstances de l'espèce ; qu'en considérant que la preuve de la nullité du testament litigieux n'aurait pas été rapportée, et que ce testament était valable et devait recouvrir son plein et entier effet, après avoir relevé que le testament olographe litigieux avait probablement été écrit en deux temps, sans constater que la date à laquelle il avait été achevé pouvait être reconstituée à l'aide d'éléments intrinsèques, éventuellement complétés d'éléments extrinsèques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 836 du Code civil » ;

Mais attendu qu'un testament olographe n'encourt pas la nullité dès lors que les éléments intrinsèques à l'acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période, le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible ;

Qu'en l'espèce, c'est sans violer les dispositions de l'article 836 du Code civil, que la Cour d'appel, après avoir analysé l'ensemble des rapports d'expertise versés aux débats, a constaté que le contexte familial tel qu'il ressortait des éléments communiqués par les parties expliquait le choix de la défunte, qu'aucun élément probant ne permettait d'établir que le testament, daté et signé de la main de la testatrice et qui procédait d'un raisonnement normal et logique, n'avait pas été écrit de sa main et que, si les différents sachants s'accordaient à dire qu'il avait probablement été écrit en deux temps, cette constatation ne permettait pas de préjuger de sa fausseté, ni même de sa régularité ; qu'elle a enfin retenu qu'aucun élément ne permettait d'établir que la défunte, qui avait remis elle-même le document au notaire le 5 octobre 2006, n'avait pas fait pas preuve d'une volonté libre et consciente ;

Qu'elle a exactement déduit de ces éléments que le testament était régulier ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

* Sur la demande des consorts A. au titre des frais irrépétibles :

Attendu que les consorts A. sollicitent la condamnation des consorts B. au paiement de la somme de 7.000 euros au titre des frais irrépétibles et ce, avec toutes conséquences de droit ;

Mais attendu que ces derniers qui succombent ne peuvent se voir allouer aucune somme sur ce fondement ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne les consorts A. aux entiers dépens, avec distraction au profit de Maître Charles LECUYER, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que les dépens distraits seront liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable ;

Composition

Ainsi jugé et prononcé le dix-huit mars deux mille vingt-quatre, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Madame Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président, rapporteur, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, Monsieur Serge PETIT, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles et Madame Martine VALDES-BOULOUQUE, Conseiller, en présence du Ministère public, assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, Le Premier Président.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 30454
Date de la décision : 18/03/2024

Analyses

Droit des successions - Successions et libéralités


Parties
Demandeurs : m. c. A. et autres
Défendeurs : f. B. et autres

Références :

article 836 du Code civil
articles 447 et 448 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2024
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2024-03-18;30454 ?

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