Abstract
Sentence arbitrale
Compétence du collège arbitral qui a rendu la sentence pour interpréter ladite sentence (oui). Effet à cet égard d'un pourvoi rejeté par la Cour supérieure d'arbitrage (sans effet).
Résumé
Le moyen contestant pour la première fois devant la Cour supérieure d'arbitrage la compétence des arbitres est irrecevable.
L'interprétation d'une décision de justice appartient, sauf impossibilité absolue, à la juridiction qui l'a rendue et cette décision demeure intacte à du rejet du recours formé à son encontre.
Motifs
La Cour supérieure d'arbitrage,
Vu la sentence arbitrale en date du 3 mai 1977, notifiée le 6 mai, relative au conflit opposant le Syndicat Patronal de la Métallurgie au Syndicat Ouvrier des Métaux, sentence rendue par MM. L.-C. C., R. O. et A. S., désignés par l'Arrêté Ministériel n° 76-517 du 12 novembre 1976 et qui, saisis d'une demande d'interprétation de leur précédente sentence du 18 février 1975, intervenue entre les mêmes parties disent que celle-ci a fixé à 12 le nombre de jours fériés indemnisables auquel a droit le personnel mensualisé ;
Vu le procès-verbal de non-conciliation en date du 13 octobre 1976, qui constate que la requête présentée par le Syndicat Patronal tend à « l'interprétation de la sentence arbitrale du 18 février 1975 en ce qui concerne le nombre de jours fériés indemnisables auquel a droit le personnel mensualisé » et qui précise les prétentions des parties : le Syndicat Patronal estime qu'en disant que « le nombre de jours fériés indemnisables auquel a droit le personnel mensualisé sera identique à celui du personnel mensuel soumis aux prescriptions des lois n° 798 et 800 du 18 février 1966 », les arbitres ont entendu lui attribuer les 12 jours fixés par la première de ces lois ;
Le Syndicat Ouvrier revendique 14 jours, par l'addition à ces 12 jours des journées des 14 juillet et 3 septembre attribuées par la Convention Collective Générale au personnel mensuel ;
Vu la requête formant recours contre la sentence, déposée le 16 mai 1977, par Me Sbarrato, Avocat au nom du Syndicat Ouvrier, tendant à l'annulation de ladite sentence, au triple motif :
* de l'incompétence des arbitres pour interpréter une décision rendue par la Cour Supérieure d'Arbitrage,
* de l'excès de pouvoir commis par la modification de la première décision, sous prétexte de l'interprétation,
* de la violation de la loi : articles 1197 et 1198 du Code civil, en ce que l'excès de pouvoir s'accompagne d'une atteinte à l'autorité de la chose jugée ;
Vu le mémoire en réponse, en date du 25 mai 1977, du Syndicat Patronal de la Métallurgie qui conclut au rejet du recours, les moyens invoqués étant irrecevables ou mal fondés ;
En la forme :
Considérant que le pourvoi est recevable, ayant été formé avant l'expiration du délai légal suivant la notification de la sentence ;
Sur le premier moyen :
Considérant que nulle exception d'incompétence des arbitres n'a été soulevée devant la Commission de Conciliation du 13 octobre 1976, où le Syndicat Ouvrier insistait au contraire pour la désignation du même collège arbitral ; qu'il n'en a pas davantage été formé devant les arbitres et que l'incompétence de ceux-ci ne peut être proposée pour la première fois devant la Cour Supérieure d'Arbitrage ;
Que, cependant, la compétence des juridictions étant d'ordre public et pouvant être examinée même d'office, il convient de retenir que le principe est de soumettre l'interprétation d'une décision à la juridiction qui l'a rendue, sauf impossibilité absolue qui n'existe pas en l'espèce ;
Considérant que l'arrêt du 24 mars 1975 a rejeté les deux moyens de cassation soulevés à l'encontre de la sentence du 18 février sans aborder le fond ; qu'il ne constituait donc pas une décision autonome se substituant à la sentence qui est demeurée intacte et dont les auteurs sont seuls compétents pour l'interpréter ;
Que le moyen tiré de la prétendue incompétence des arbitres est donc à la fois irrecevable et mal fondé ; qu'il doit être rejeté ;
Sur les deuxième et troisième moyens pris ensemble :
Considérant que la sentence arbitrale du 18 février 1975 avait adopté un principe d'assimilation entre ouvriers mensuels et mensualisés, pour les jours fériés indemnisables, mais sans en préciser la conséquence quant au nombre de ces jours ;
Que les arbitres à nouveau saisis, n'ont pas excédé leur pouvoir en donnant l'interprétation qui leur était demandée, la motivant sur les termes qu'ils avaient employés, et en précisant la portée qu'ils avaient entendu donner à l'assimilation par la référence qu'ils avaient « clairement énoncée à la seule législation monégasque » et non à la convention collective dont les effets ne peuvent « être étendus à des catégories de personnel que ces accords ne prévoient pas » ;
Considérant que la détermination du nombre de jours fériés indemnisables ne peut davantage porter atteinte à l'autorité de la chose jugée, dès lors que la précédente sentence n'avait pas fixé ce nombre, ce qui a entraîné la demande d'interprétation ;
Que ce serait tenir pour résolue la question soumise à interprétation que de soutenir qu'elle aurait déjà été nécessairement et définitivement jugée, et ce dans un sens déterminé d'autant moins admissible :
1° qu'en 1975 il n'avait pas été fait allusion à la Convention collective, la discussion n'ayant porté que sur l'application des législations française ou monégasque, cette dernière ayant été retenue avec une référence aux lois n° 798 et 800 ;
2° qu'à l'origine des pourparlers sur la mensualisation, le représentant du Syndicat Ouvrier revendiquait pour les mensualisés « 12 jours, les deux jours conventionnels, 3 septembre et 14 juillet, pouvant être le cas échéant l'objet d'une modification de la Convention collective » ;
Qu'il ne peut donc être admis que les arbitres aient modifié radicalement leur première décision en y substituant une nouvelle sentence sur le fond ; que les deuxième et troisième moyens, basés sur cette affirmation, sont infondés et doivent être également rejetés ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS
Déclare le pourvoi recevable en la forme, - le rejette quant au fond.
Composition
MM. J. de Monseignat prés., R. Bellando de Castro, rapp., Mes Clerissi et Sbarrato, av.
^