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04/03/2014 | NIGER | N°14-046/CC/Civ

Niger | Niger, Cour de cassation, Chambre civile et commerciale, 04 mars 2014, 14-046/CC/Civ


Texte (pseudonymisé)
La Cour de Cassation, Chambre Civile et Commerciale, statuant pour les affaires civiles en son audience publique ordinaire du mardi quatre mars deux mil quatorze, tenue au Palais de ladite Cour, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :

ENTRE

B Ac X, architecte demeurant à Ae, assistée de Me Illo Issoufou, Avocat au Barreau de Ae;
Demanderesse
D’une part ;

ET
A Ab C, commerçant demeurant à Ae, assisté de la SCPA MANDELA, avocats associés au Barreau de Ae; r>Défendeur
D’autre Part ;

LA COUR

Après la lecture du rapport par Monsieur Moussa Idé...

La Cour de Cassation, Chambre Civile et Commerciale, statuant pour les affaires civiles en son audience publique ordinaire du mardi quatre mars deux mil quatorze, tenue au Palais de ladite Cour, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :

ENTRE

B Ac X, architecte demeurant à Ae, assistée de Me Illo Issoufou, Avocat au Barreau de Ae;
Demanderesse
D’une part ;

ET
A Ab C, commerçant demeurant à Ae, assisté de la SCPA MANDELA, avocats associés au Barreau de Ae;
Défendeur
D’autre Part ;

LA COUR

Après la lecture du rapport par Monsieur Moussa Idé, conseiller rapporteur, les conclusions du Ministère Public et en avoir délibéré conformément à la loi ;

Statuant sur le pourvoi de Maître Illo Issoufou, Avocat au barreau de Ae, conseil constitué de Dame Ac X déposé au greffe de la Cour d’Appel de Ae le 08 juillet 2011, puis enregistré au greffe de la Cour de céans le 13 juillet 2011 sous le n° 0216, contre l’arrêt n° 50 du 16 mai 2011 de la Cour d’Appel de Ae qui a reçu A Ab C en son appel régulier en la forme ; annulé le jugement attaqué pour violation de la loi ; évoqué et statué à nouveau ; reçu A Ab C en sa demande ; l’a déclaré propriétaire de la parcelle A1 de l’îlot 3533 du lotissement nord-stade à Ae ; mis hors de cause l’Etat du Niger ; condamné Dame Ac X aux dépens ;

Vu l’ordonnance n° 2010-16 du 15 Avril 2010 sur la Cour d’Etat ;
Vu la loi organique n° 2013-03 du 23 janvier 2013 déterminant la composition, l’organisation, les attributions et le fonctionnement de la Cour de Cassation ;
Vu la loi organique n° 2004-50 du 22 juillet 2004 fixant l’organisation et la compétence des juridictions en République du Niger ;
Vu l’ordonnance n° 59-113/PCN du 11 juillet 1959 portant réglementation du domaine privé de la République du Niger ;
Vu la requête de pourvoi, ensemble les pièces du dossier ;
Vu les conclusions du Ministère Public ;

Sur la recevabilité du pourvoi

Attendu que dans son mémoire en défense en date du 08 févier 2013, A Ab C assisté de la SCPA MANDELA, avocats associés à la Cour, soulève IN LIMINE LITIS l’irrecevabilité du pourvoi pour forclusion en ce que Dame B Ac X a formé son pourvoi plus d’un mois après la signification à elle de l’arrêt de la Cour d’Appel de Ae ;

Attendu que de l’examen des pièces du dossier, il ressort que la demanderesse a formé son pourvoi le 08 juillet 2011, date du dépôt de la requête au greffe de la Cour d’Appel de Ae, contrairement aux assertions du défendeur au pourvoi qui affirme que le pourvoi a été fait le 10 juillet 2011 ; que le pourvoi dont objet parce qu’étant intervenu dans les forme et délai prévus par la loi doit être déclaré recevable ;

Au fond

Sur le premier moyen pris de l’absence de motifs

Attendu que la demanderesse au pourvoi soutient que les juges d’appel affirment que l’ordonnance n° 59-113/PCN du 11.07.1959 portant réglementation du domaine privé de la République du Niger fait interdiction en l’espèce à toute attribution au profit des particuliers, alors même qu’il résulte expressément du même texte en ses articles 15 et 17 que les particuliers peuvent introduire des demandes d’attribution ;

Qu’elle dit que c’est à tort que la décision querellée a annulé la décision du premier juge, motif pris de ce que celui-ci ne décrit pas matériellement le terrain ;

Qu’elle explique que c’est en vertu de l’arrêté n° 047/ME du 19 novembre 1990 en son article IV qu’il a été procédé à l’affectation de terrain à des particuliers, notamment à Dame Ac X de sorte que dire que l’attribution qui lui a été faite manque de base légale est tout à fait spécieuse ;

Qu’elle dit que la démarche des juges d’appel est d’autant plus spécieuse qu’ils affirment que l’affectation à son profit ne porte pas sur la parcelle A1 îlot 3533, alors même qu’ils savent très bien que c’est bien l’espace affecté par l’arrêté n° 047/ME du 19/11/1990 à elle qui a fait l’objet d’un morcellement partiel et identifié parcelle A1 îlot 3533 par la Communauté Urbaine de Ae pour y être vendu au requis ;

Qu’elle allègue que la Communauté Urbaine de Ae n’a, dans aucune des dispositions de l’arrêté invoqué par les juges d’appel reçu affectation et attribution de l’espace Nord Stade Général Aa Af et ne peut à l’absolu procéder au morcellement de l’espace à elle attribuée pour établir par la suite un acte de cession à Ab C ;

Qu’elle soutient également que l’appréciation de la régularité de l’acte querellé échappe aux juges d’appel s’agissant d’un acte administratif de surcroît créatif de droit dont les conditions de retrait ou d’annulation sont limitativement énumérées ;

Qu’elle dit qu’il ressort des dispositions de l’article 71 de l’ordonnance n° 59-113/PCN du 11 juillet 1959 que « les concessions provisoires urbaines des centres lotis définies à l’article 2 ci-dessus sont suivant les zones dans lesquelles elles se trouvent soi mises en adjudication, soit accordées de gré à gré, soit affectées aux différents services suivant arrêté pris par le Président de la République sur rapport du Ministère des Finances (services des domaines) » ;

Qu’elle précise que c’est justement en application de cette disposition que l’Etat du Niger, Maître absolu de son domaine, lui a concédé la parcelle sur laquelle elle a entrepris des travaux de mise en valeur conformément à l’article 19 de l’ordonnance ;

Attendu que Ab C dit que la décision querellée ne dit point que l’ordonnance fait interdiction, de toutes attributions des terres du domaine privé de l’Etat au profit des particuliers mais relève plutôt que l’ordonnance de 1959 ne prévoit l’affectation des terres qu’au profit des services publics ou des collectivités publiques ;

Qu’il précise que l’ordonnance de 1959 est versée au dossier, et que nulle part elle ne prévoit des attributions à des personnes physiques des terres domaniales, la pratique ne pouvant pas primer sur le droit ;

Qu’il affirme que c’est à bon droit qu’après avoir constaté qu’au regard de la loi, la concession est délivrée par le ministère en charge des finances dans une motivation qui force le respect, la Cour d’Appel a retenu que l’acte pris par une autorité incompétente ne saurait être opposable car c’est un principe élémentaire découlant de la théorie de l’existence et qu’en retenant cela, les juges d’appel ne font point intrusion dans le contrôle de la régularité de l’acte ;

Qu’il dit que la lecture de l’arrêté n° 047/ME du 19 novembre 1990 permet aisément de savoir qu’il a été attribué un terrain Nord stade sans aucune précision à Dame Ac X et ce que ce terrain ne saurait être la parcelle A1 îlot 3533 car l’arrêté ne le dit point ;

Attendu que pour accorder le droit de propriété du terrain litigieux à A Ab C, la décision attaquée énonce « Attendu qu’il résulte des dispositions des articles 1er et 95 de l’ordonnance précitée portant réglementation des terres du domaine privé de la République du Niger, que l’affectation des terres domaniales n’est faite qu’au profit des services publics ou qu’elles sont attribuées à des collectivités publiques ;

Attendu que l’arrêté n° 047/ME du 19.11.1990 dans ses dispositions relatives à l’affectation des terres à des particuliers et notamment à Dame Ac X qui n’est ni un service public, ni une collectivité publique, afin de construire un cabinet privé d’architecture, n’est pas conforme à la dite ordonnance ;

Attendu que cet acte du Ministère de l’Equipement auteur dudit arrêté, agissant en des matières pour lesquelles, il n’a pas reçu compétence est illégal et ne peut être validé par ratification et la nullité qui l’entache d’ordre public pourra être soulevé d’office à tous les stades de la procédure même par le juge judiciaire, sans que l’on puisse opérer d’exception de forclusion ;

Attendu que Dame B Ac X ne peut donc se prévaloir de cette affectation à laquelle elle n’a droit, qui dans tous les cas et de surcroît même à la supposer régulière ne porte pas précisément et spécialement sur la parcelle A1 îlot 3533 morcellement nord stade ;

Attendu qu’il ressort dans nombre de dispositions de l’arrêté n° 047/ME du 19.11.1990 (article IV) que la communauté urbaine de Ae a déjà reçu affectation et attribution du morcellement nord stade Général Aa Af notamment conformément au plan n° 4956/MTP/M-DU SCU ;

Attendu qu’il ne peut lui être reproché d’avoir vendu à A Ab C la parcelle A1 îlot 3533 issue de ce morcellement nord stade qui n’est pas totalement compris et concerné, encore moins compromis par le remodelage de 1994 qu’invoque l’Etat du Niger, la Dame B Ac X n’ayant rien entrepris pour conforter et faire préciser et matérialiser les droits dont elle se prévaut et dont rien ne permet de dire qu’ils se confondent à ceux de A Ab C » ;

Attendu qu’il est indéniable, comme le prévoit les dispositions de l’ordonnance n° 59-113/PCN du 11 juillet 1959, portant règlement du domaine privé de la République du Niger qu’il est dévolu en principe au Ministère des Finances la gestion du patrimoine immobilier de l’Etat ;

Que toutefois, il est également incontestable que selon une règle coutumière administrative passée en force de principe général de droit ayant valeur de loi applicable même en l’absence d’un texte, que chaque Ministre a compétence sur le patrimoine immobilier, les meubles et matériels divers qu’il utilise et est à ce titre responsable de la gestion desdits biens ;

Qu’au Niger, les terres non bâties du domaine privé de l’Etat étant assimilées comme éléments faisant partie intégrante de l’équipement, le Ministre en charge de ce domaine a toujours pris les actes portant affectation des terrains de cette nature aussi bien à des particuliers qu’aux services, qu’aux collectivités publiques ;

Que cette pratique fondée sur la règle de droit susvisée est également devenue règle coutumière administrative qui est un principe général du droit ayant valeur de loi ;

Qu’il importe de relever que l’ordonnance susvisée en son article 71 comporte les règles qui régissent aussi bien les affectations des terrains à des services publics ou des collectivités, que les aliénations par adjudication publique (enchères publiques) et les cessions amiables (gré à gré) à des particuliers ;

Que c’est ainsi que les cessions amiables sont autorisées concernant les cessions d’immeuble qui ont pour objectif de favoriser la construction dans une opération d’urbanisme ou de construction ou dans le cadre d’une opération d’utilité publique ; que cette cession est gratuite (pour des motifs d’intérêt général) ou onéreuse ;

Que l’affectation de terrains par l’Etat à des particuliers n’est pas prévue par ce texte ;

Que c’est donc la règle administrative coutumière qui justifie la compétence du Ministre en charge de l’urbanisme et de l’équipement à édicter des actes portant affectation des terres du domaine privé de l’Etat à des particuliers, aux services publics et aux collectivités publiques ;
Qu’elle constitue donc le fondement légal de l’arrêté n° 049 du 19 novembre 1990, donc son assise légale ;

Attendu qu’il résulte de l’examen de ce moyen que sous couvert d’arguments d’annulation pour absence des motifs, la demanderesse au pourvoi entend en réalité soulever un moyen pris d’insuffisance de motifs ;

Qu’il y a lieu donc de lui restituer sa véritable qualification ;

Attendu qu’en énonçant que « l’affectation des terres domaniales n’est faite qu’au profit des services publics ou qu’elles sont octroyées à des collectivités publiques » alors que de telles affirmations ne sont nullement contenues dans les dispositions des articles 1er et 95 de l’ordonnance, les juges d’appel se basent sur des considérations de fait et de droit, justificatives de leurs décisions erronées et inexactes ;

Qu’il est de règle que l’existence de motifs de droit inexacts est constitutive d’un défaut de base légale qui équivaut à une insuffisance de motifs, lui-même assimilé à un défaut de motif qui entache la décision qu’il infecte, conformément à l’article 2 alinéa 2 de la loi 2004-50 du 26 juillet 2004, de nullité ;

Attendu que cette même remarque est valable lorsque les juges d’appel énoncent « il ressort d’un nombre de dispositions de l’arrêté n°047/ME du 19-11-1990 (article IV) que la communauté Urbaine de Ae a déjà reçu affectation et attribution de morcellement Nord Stade Général Aa Af conformément au plan n°4946/MTP/H-DU-SCU, alors que de telles allégations n’émanent d’aucune disposition de l’arrêté visé par eux ;

Qu’il est de principe qu’en matière civile le juge judiciaire ne peut pas apprécier la légalité des actes administratifs surtout lorsque ledit acte est individuel ;

Attendu que les juges d’appel en qualifiant l’arrêté du ministre de l’équipement d’illégal en ce qu’il a été pris dans une matière pour laquelle cette autorité est incompétente, se sont prononcés et ont apprécié la régularité de la décision individuelle d’affectation d’un terrain émanant dudit Ministre ;

Ce faisant, ils violent le principe de la séparation des pouvoirs ;

Qu’il s’ensuit que ce premier doit être accueilli comme étant bien fondé ;

SUR LE DEUXIEME MOYEN TIRE DU MANQUE DE BASE LEGALE

Attendu que Dame B Ac X fait grief à la décision entreprise d’avoir déclaré l’arrêté du Ministre de l’équipement illégal et déclaré A Ab C propriétaire de la parcelle litigieuse ;

Qu’elle dit que l’acte illégal ne peut en principe créer de droits et précise que les juges d’appel affirment que le Ministre de l’équipement a agi dans des matières pour lesquelles il n’a pas reçu compétence, et reconnaissent par ailleurs la propriété de A Ab C, propriété tirée de la cession que la Communauté Urbaine de Ae lui a faite en vertu de l’arrêté n° 003/ME du 24 janvier 1995 ;

Qu’elle affirme que de cet arrêté pris dans les mêmes conditions et par le même auteur que l’arrêté n° 047 du 19 novembre 1990 qui lui a affecté le terrain litigieux, il ne ressort nulle part que ce dernier a été réaffecté à la Communauté Urbaine de Ae pour que celle-ci puisse le céder à A Ab C ;

Qu’elle dit que la communauté urbaine de Ae affirme dans son exploit d’appel avoir cédé la parcelle en cause en vertu de l’arrêté n° 003 du 24 janvier 1995 alors même que l’arrêté sur lequel se fonde la communauté urbaine de Ae n’était pas encore pris ;

Attendu que A Ab C dit qu’en droit le défaut de base légale suppose que l’arrêt querellé comporte des motifs de faits incorporels ou imprécis ; Qu’il ajoute que le défaut de base légale se caractérise par deux traits :
-une insuffisance de constatation de faits ;
- un moyen de fond et non un moyen de forme ;

Qu’il affirme que la Cour d’Appel a justement relevé que Ac X n’étant pas une collectivité publique, ne peut obtenir une attribution à titre gracieux d’un immeuble, ce que ne peut être le cas de la mairie qui est une collectivité de laquelle il tient son droit ;

Qu’il soutient que s’agissant de l’intervention du juge civil dans l’affaire de l’acte administratif, la Cour n’a pas annulé l’arrêté car elle se borne à constater son illégalité manifeste et à en écarter son application ; Qu’il dit que la jurisprudence à travers un arrêt du 17 octobre 2011 reconnaît au juge civil la compétence lorsque l’illégalité est manifeste et qu’il y a lieu de relever et d’écarter l’application d’un acte administratif même non réglementaire ;

Attendu qu’il y a défaut de base légale lorsque la motivation de la décision ne permet pas à la Cour d’exercer un contrôle de la conformité du jugement aux règles de droit ;

Qu’il est également constitué lorsque les constatations de fait sont insuffisantes pour justifier l’application de la règle de droit ; que l’examen du contenu du moyen relève que la demanderesse au pourvoi soulève comme il l’a sollicité dans les dispositifs de ces conclusions qui font foi, une contrariété de motifs, donc une contradiction entre les motifs de la même décision querellée ;

Attendu que la décision entreprise après avoir énoncé que l’arrêté n° 047 du 19 novembre 1990 est illégal parce que le ministre qui l’a pris n’a pas compétence pour l’édicter dit également que A Ab C tient son droit de propriété de la Communauté Urbaine de Ae déjà affectataire depuis 1990 du morcellement de 1990 nord Stade Général Aa Af ;

Que la Cour d’Appel de Ae ayant fondé l’illégalité de l’arrêté n° 047 du 19 novembre 1990 sur l’incompétence de son auteur qui l’affecte s’est à l’évidence contredite dans la motivation en reconnaissant à la Communauté Urbaine de Ae un droit acquis tiré du même acte qu’elle estime entaché d’irrégularités ;

Qu’elle énonce ainsi des motifs contradictoires parce qu’ils se détruisent et s’annihilent réciproquement, aucun d’eux ne pouvant être retenu comme fondement de la décision ; que ce n’est pas la qualité des affectataires dont il s’agit mais plutôt la compétence de l’auteur de l’acte d’affectation ;

Que la contradiction dont objet est une contradiction réelle, profonde en ce qu’il y a manifestement incompatibilité entre les deux motifs, laquelle affecte le raisonnement des juges d’appel qui disent une chose et son contraire ;

Que outre cette contradiction dont est entachée, la décision querellée, il importe de relever que les juges qui affirment de manière péremptoire que même régulière l’affectation à la Dame B Ac X ne porte pas précisément et spécialement sur la parcelle A1 îlot 3533 alors qu’ils n’indiquent pas les considérations techniques notamment par le biais d’une expertise qui les ont conduit à réfuter l’identification faite par l’Etat du Niger par la voie du Ministre de l’équipement selon laquelle le terrain objet de l’affectation à la demanderesse au pourvoi est l’îlot 3533 ;

Que par ailleurs, la matérialisation de ce terrain ne pouvait n’avoir pas été effectuée parce que l’affectation est intervenue conformément au plan n° 4956/MTP/H-DU-SCU qui figure au dossier de la procédure ; qu’au demeurant cette identification n’est pas contestée par les techniciens de la Communauté Urbaine de Ae ;

Que les juges d’appel disent également que A Ab C est acquéreur de la parcelle litigieuse auprès de la Communauté Urbaine de Ae déjà affectataire depuis 1990 du morcellement nord Stade qui n’a pas été remis en cause par le remodelage de 1994 ;

Que cependant, ils n’expliquent pas comment dans une même décision c'est-à-dire l’arrêté n° 047 du 19 novembre 1990, la demanderesse et la Communauté Urbaine de Ae ont été affectataires du même îlot 3533 ;

Que cet évènement circonstanciel est si invraisemblable que la Communauté Urbaine de Ae ne l’a pas défendu mais a plutôt invoqué l’affectation qu’elle tient de l’arrêté 003 du 24 janvier 1995 ;

Attendu que le dictionnaire juridique de Ad Ag définit l’affectation comme étant « la détermination d’une finalité en vue de laquelle un bien sera utilisé », alors que l’acquisition est « l’opération par laquelle on devient propriétaire » ;

Que l’affectation ne confère donc qu’un droit de jouissance alors que l’acquisition comporte droit de jouissance et de disposition ;

Qu’en vain donc les juges d’appel relèvent l’inexistence d’un acte de cession dont les traces n’auraient pas été découvertes dans les archives de l’administration ;

Attendu que c’est l’arrêté portant affectation qui tient lieu de titre de jouissance et de concession et le terrain ne peut être affecté à une autre personne physique ou morale qu’après qu’un arrêté portant déclassement et réaffectation ait été pris par le ministre de l’équipement ;

Que les juges d’appel ne démontrent pas l’existence d’un tel arrêté ;

Attendu que, comme le fait ressortir l’arrêté n° 047 du Ministre de l’Equipement, pour des motifs tenant à l’intérêt général, le ministre en charge dudit département est habilité à prendre, en vertu de la règle coutumière administrative susvisée, les arrêtés portant affectation des terrains à titres gratuits en vue d’édification des bâtiments servant des lieux de cultes (mosquée, église) d’établissements privés, de centres médicaux privés, de cabinets professionnels etc ;

Que dans le cas d’espèce, l’affectation du terrain litigieux a été faite à la demanderesse au pourvoi en vue de favoriser la construction dans une opération d’urbanisme et de construction ; Qu’il ne s’est pas agi d’une cession ;

Que le droit de jouissance qui en découle bien que concédé à titre précaire et révocable ne peut sauf cause d’utilité publique à justifier, être remis en cause tant que l’usage auquel le terrain a été destiné n’en n’a pas été détourné ;

Que la crise de l’habitat étant une préoccupation nationale, c’est certainement ce souci qui a présidé à l’affectation du terrain litigieux à Dame Ac X pour la construction ;

Qu’il résulte de ce qui précède que la décision attaquée n’es pas seulement affectée d’une contradiction entre les motifs, mais d’une exposition incomplète des faits, c'est-à-dire d’une insuffisance dans les constatations de ces faits ;

Qu’elle est également émaillée de motifs de droits inexacts et incomplets, le tout justifiant amplement son annulation pour manque de base légale ;

Qu’il échet donc de retenir le second moyen comme étant fondé ;

Attendu que des considérations qui précèdent, il y a lieu de casser et annuler l’arrêt n° 50 du 16 mai 2011de la Cour d’Appel de Ae ; renvoyer la cause et les parties devant la même juridiction autrement composée ;

Attendu qu’il convient de condamner A Ab C aux dépens ; celui-ci ayant succombé à l’instance ;

Par ces motifs

LA COUR

-Déclare le pourvoi de Mme B Ac X recevable en la forme ;
-Au fond, casse et annule l’arrêt n° 050 du 16 mars 2011 de la Cour d’Appel de Ae ;
-Renvoie la cause et les parties devant la même juridiction autrement composée ;
-Condamne le défendeur aux dépens ;

Ainsi fait, jugé et prononcé, les jour, mois et an que dessus ;

ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER

PRESENTS
Mr Issaka Dan Déla Président
Mahamadou Albachir Nouhou Diallo et Moussa Idé Conseillers
Ibrahim M. Moussa Ministère Public
Mme Adamou Habbi Adoum Greffière
RAPPORTEUR Moussa Idé


Synthèse
Formation : Chambre civile et commerciale
Numéro d'arrêt : 14-046/CC/Civ
Date de la décision : 04/03/2014

Parties
Demandeurs : DIALLO RAYA LOUTOU Ayant pour conseil Me ILLO ISSOUFOU
Défendeurs : ELHADJI BAGUE DAOUDA Ayant pour conseil LA SCPA MANDELA

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ne;cour.cassation;arret;2014-03-04;14.046.cc.civ ?
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