ARRET N°21-021/Cout Du 04-03-2021
MATIERE :
coutumière
DEMANDEUR
M.C
DEFENDEUR :
S.Frep. par S.F
Mahamadou A. N. Diallo Président
Issa Bouro
Ibrahim Moumouni
Conseillers
Sanoussi Mamane
Moumouni Mounkaila
Assesseurs
Emilien A. Bankolé
Ministère Public
Mme Aboubacar
Zeïnabou
Greffière
RAPPORTEUR
Ibrahim Moumouni
REPUBLIQUE DU NIGER
COUR DE CASSATION
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES COUTUMIERES
La Cour de Cassation, Chambre Sociale et des Affaires Coutumières, statuant pour les affaires coutumières, en son audience publique ordinaire du jeudi quatre mars deux mille vinet-un, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
M. C, 49 ans, Eleveur demeurant à Ifrikawane, coutume
Touareg ;
Demandeur D’une
S. F, 65 ans, cultivateur demeurant à Foura guirké,
représenté par S. F, coutume Haoussa ;
Défendeur
D'autre part ; LA COUR
Après lecture du rapport par Monsieur I. M conseiller rapporteur, les conclusions du Ministère Public et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant sur le pourvoi formé le 14 août 2013 au greffe du tribunal de grande instance de Konni, par Mr M. C, pourvoi enregistré au greffe de la cour de cassation le 05 mai 2020 sous le N°20-115/COUT, contre le jugement N°12 du 31 juillet 2013 rendu par ledit tribunal qui a, déclaré recevable l’appel de M. C, confirmé le jugement N°15 du 14 juin 2012 du tribunal coutumier de Konni qui a débouté le demandeur à l’instance, a dit que le champ litigieux tel que délimité par S. Aa, est sa propriété ;
Vu la loi N°63-18 du 22 février 1963 fixant les règles de procédure à suivre devant les justices de paix statuant en matière civile et commerciale ;
Vu la loi N°2018-37 du 1“ juin 2018 fixant l’organisation et la compétence des juridictions en république du Niger ;
Vu la loi N°2013-03 du 23 janvier 2013 sur la cour de cassation ;
Vu la déclaration de pourvoi, ensemble les pièces du dossier ;
Vu les conclusions du ministère public ;
SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI
Attendu que le pourvoi de M. C est intervenu conformément aux prescriptions des articles 66 et 68 de la loi N°2013-03 du 23 janvier 2013 sur la cour de cassation ; il est donc recevable ;
AU FOND
Attendu, selon le jugement attaqué, que le 19 juin 2012 M. C a interjeté appel contre le jugement coutumier N°15 du 14 juin 2012 du tribunal de Konni qui a reçu M. A en sa demande et l’a débouté et, a déclaré que le champ litigieux tel que délimité par S. Aa est sa propriété ; que statuant sur cet appel par jugement N°12 du 31 juillet 2013, le tribunal a confirmé la décision attaquée ; que, c’est contre cette décision que M. C a formé pourvoi en cassation ;
Attendu que le demandeur au pourvoi déclare, que le champ objet du litige qui l’oppose aux ayants droit S
. Aa, est sa propriété pour l’avoir hérité de son père, qui lui- même l’a hérité de son père M.W, le 1” à le défricher ; il récuse les témoins produits par son adversaire, qui ne sont, selon lui, que ses parents, ce qui constitue, soutient-il, un obstacle à la manifestation de la vérité, car ces derniers n’ont toujours affirmé que ce qui arrange leur
Attendu que le défendeur pourvoi soutient lui aussi, que le champ litigieux est la propriété de leur grand-père M, fondateur du village de Tounga-Maïssabé ; que, c’est ce dernier qui l’a défriché le 1° avant que leur père Aa l’ait hérité de lui ; il ajoute, qu’à aucun moment M. C n’a possédé ce champ à un quelconque titre ;
Attendu qu’en évoquant la récusation des témoins de son adversaire et, en soutenant qu’ils sont les parents de celui-ci et que cela constitue un obstacle à la manifestation de la vérité, le demandeur au pourvoi met en doute la sincérité de leur témoignage ;
Mais attendu qu’en matière coutumière, la seule condition de la validité d’un témoignage, est qu’il provienne d’une personne ’ADL”, et le frère ayant cette qualité peut témoigner pour son frère, que seuls
ne peuvent témoigner l’un en faveur de l’autre, le fils pour ses parents, ni eux pour lui, ni l’époux pour l’épouse, ni elle pour lui ;
Attendu qu’en application de cette règle coutumière, le juge d’appel qui a relevé, avant de confirmer la décision soumise à sa censure, que le 1“ juge a, d’abord, énoncé que les parties ont produit les mêmes témoins qu’en 1° instance et n’ont pas varié dans leurs dépositions respectives, puis, qu’en application de la coutume Haoussa du défendeur, il revient à celui qui détient l’objet litigieux de prêter serment coranique pour prouver sa propriété, que suite au refus de M. C de laisser S. Aa prêter ledit serment, celui-ci a tiré les conséquences de droit, que l’ensemble des témoignages s’accorde que le champ est exploité par S. F depuis des décennies, et que, par ailleurs, il ressort des énonciations de la décision du 1“ juge que tous les témoins des parties ont déposé sous serment à l’exception de H. B et A. Dj pour le demandeur et K. A pour le défendeur ; qu’ainsi, au vu de ces énonciations portant sur des éléments de preuve rapportés et discutés contradictoirement par les parties, souverainement appréciés par les juges du fond, le grief porté contre le jugement attaqué par le demandeur au pourvoi n’est pas établi ;
Mais attend, cependant, que l’examen de la décision attaquée suggère de relever d’office un moyen de cassation tiré de ce qu’elle ne comporte pas la délimitation précise de l’objet du litige au sens des dispositions de l’article 102 de la loi N°2018-37 du 1“ juin 2018 fixant l’organisation et la compétence des juridictions en république du Niger, aux termes desquelles, que sous peine de nullité, les décisions rendues en matière foncière doivent comporter la délimitation précise de l’objet du litige ; qu’en application de ces dispositions le jugement attaqué encourt cassation et annulation de ce chef ;
PAR CES MOTIFS
-Déclare le pourvoi de M. C, recevable en la
forme ;
-Au fond, casse et annule le jugement N°12 du 31 juillet
2013 du ribunal de grande instance de Konni ;
-Renvoie la cause et les parties devant la même juridiction autrement composée ;
-Dit n’y avoir lieu à dépens ;
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique les jour, mois et an que dessus ;
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LA GREFFIERE./.