REPUBLIQUE DU NIGER
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Cour Suprême
Chambre Judiciaire
La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires civiles en son audience publique ordinaire du jeudi trente juin deux mille cinq, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
Ac Ad, fonctionnaire au Ministère de l'Intérieur demeurant à Ae, assisté de Maître De Campos Desiré Anastase, avocat à la Cour ;
D'une part
ET :
Ali Ab, commerçant au Grand marché de Ae, assisté de Maître Mounkaila Yayé, avocat à la Cour ;
D'autre part
Après lecture du rapport de Monsieur Nouhou Mounkaila, conseiller rapporteur, les conclusions de Monsieur le Procureur Général et après en avoir délibéré conformément à la loi :
Statuant sur le pourvoi formé par requête en date du 22-4-2004 enregistrée sous le n° 0010 du 23-4-2004 du greffe de la Cour d'appel de Ae, de Maître De Campos, avocat à la Cour conseil constitué de Ac Ad, contre l'arrêt n° 25 du 10-3-2004 de la Cour d'appel de Ae qui a:
Reçu l'appel de Ali Ab régulier en la forme;
Infirmé la décision attaquée;
Retenu sa compétence et ordonné l'expulsion de Ac Ad et de tous occupants de son chef de l'immeuble litigieux sous astreinte de 50000 francs par jour de retard;
Vu la loi 2000-10 du 14-8-2000 sur la Cour Suprême;
Vu le Code de Procédure Civile en son article 809;
Vu le Code Civil en son article 1319;
Vu la requête de pourvoi et les mémoires produits, ensemble les pièces du dossier;
Vu les conclusions du Procureur Général;
EN LA FORME
Attendu que la requête de pourvoi enregistrée le 23-4-2004 a été signifiée le 26-4-2004;
Attendu qu'elle est intervenue dans les forme et délai prévus par la loi; qu'il y a lieu de la déclarer recevable;
AU FOND
Attendu que le requérant invoque 2 moyens à l'appui de son pourvoi:
Sur le 1er moyen pris de la violation de l'article 809 du Code de Procédure Civile, en ce que le juge d'appel s'est déclaré compétent alors qu'aux termes de cet article «les ordonnances de référé ne feront aucun préjudice au principal», que cette prescription est d'ordre public;
Attendu que le requérant soutient qu'il y a contestation sérieuse au fond, ce qui l'a amené à assigner en annulation de la vente et à solliciter l'autorisation de soulever un faux incident civil contre cet acte de vente qui dissimule un contrat de prêt; que ces procédures sont encore pendantes;
Attendu que le défendeur dans son mémoire en défense du 5 juillet 2004 rétorque que l'introduction d'une instance au fond n'entraîne pas automatiquement l'incompétence du juge des référés et qu'il ne suffit pas qu'une contestation touche au fond du droit pour être considérée comme sérieuse; qu'il faut encore qu'elle n'apparaisse pas à l'évidence comme infondée ou purement dilatoire;
Qu'il soutient qu'il n'y a pas contestation sérieuse en l'espèce car il est simplement demandé au juge de constater une évidence notamment l'acte notarié établi le 10 juin 2003; qu'il n'y a pas violation de l'article 809 du Code de Procédure Civile à constater son caractère incontestable ainsi que les droits qui en découlent; que d'ailleurs il est admis par la jurisprudence que le juge des référés pourra passer outre la contestation soulevée lorsque le caractère peu sérieux de celle-ci apparaîtra à un examen superficiel;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt querellé que:
Attendu que l'introduction d'une instance au fond n'entraîne pas automatiquement l'incompétence du juge des référés; qu'en l'espèce, Ac Ad ne produit aucune pièce attestant la fausseté de l'acte et ne prouve pas non plus avoir introduit une procédure d'inscription en faux contre l'acte de vente immobilière; qu'au contraire, il a déclaré ne pas contester sa signature apposée sur ledit acte; qu'en outre, lors de la sommation de déguerpir en date du 27 octobre 2003 à lui servie, Ac Ad, fonctionnaire au Ministère de l'Intérieur, a déclaré: «je n'ai pas refusé de quitter l'immeuble. J'ai déjà pris service à Aa, mon lieu d'affectation. J'attends du Ministère de l'Intérieur un véhicule pour m'en aller. C'est une question de peu de temps»; qu'il y a donc lieu de dire que la contestation élevée par Ac Ad n'est pas sérieuse et que c'est à tort que le premier juge s'est déclaré incompétent;
Attendu que la propriété de Ali Ab n'est pas sérieusement contestée; qu'il y a lieu d'ordonner l'expulsion de Ac Ad, occupant sans titre de l'immeuble objet du litige et pour assurer l'exécution de la décision de l'assortir d'une astreinte de 50000 francs par jour de retard;
Que ce faisant les juges d'appel ont apprécié la régularité formelle des preuves qui sous-tendent la demande en expulsion de Ac Ad, qui a signé un acte authentique dont il n'a pas rapporté la preuve de la fausseté, et en ont tiré les conséquences, c'est-à-dire l'absence de contestation sérieuse. D'où il suit que le moyen n'est pas fondé;
Sur le deuxième moyen pris de la violation de l'article 1319 al 2 du Code Civil et l'insuffisance de motif, en ce que le juge de référé a soutenu que l'acte de vente immobilière du 10 juin 2003, qui est un acte authentique «ne saurait être contesté que par la procédure d'inscription en faux principal alors qu'il ressort de l'article susvisé que «en cas de plainte en faux principal, l'exécution de l'acte argué de faux, sera suspendue par la mise en accusation; et en cas d'inscription de faux faite incidemment, les tribunaux pourront, suivant les circonstances, suspendre provisoirement l'exécution de l'acte.»;
Il est ainsi reproché au juge d'appel d'avoir exclu du champ d'application de l'article 1319 la procédure de faux incident;
Attendu qu'en réalité l'arrêt n'a pas exclu la possibilité du recours en faux incident si l'on se réfère à la suite de sa motivation où il dit que le requérant «ne produit aucune pièce attestant la fausseté de l'acte et ne prouve pas non plus avoir introduit une procédure d'inscription en faux contre l'acte de vente immobilièreet a déclaré ne pas contester sa signature apposée sur ledit acte »;
Qu'il y a lieu de rejeter ce moyen comme étant mal fondé;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme le pourvoi de Ac Ad;
Au fond le rejette;
Condamne Ac Ad aux dépens;
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.
ARRÊT N° 05-173/C
Du 30 juin 2005
MATIERE : Civile
DEMANDEUR :
Ac Ad
Me De Campos Desiré Anastase
A :
Ali Ab
Me Mounkaila Yayé
PRESENTS :
Bouba Mahamane
Président
Nouhou Mounkaila ; Adamou Amadou
Conseillers
Ousmane Oumarou
Ministère Public
Me Gado Fati Founou
Greffier
RAPPORTEUR
Nouhou Mounkaila