REPUBLIQUE DU NIGER
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Cour Suprême
Chambre Judiciaire
ENTRE :
MINISTERE PUBLIC,
D'une part
ET :
A B,, assisté de Maîtres Salao Manou et Alio Amadou, Avocats à la cour,
D'autre part
Statuant sur les déclarations de pourvoi en cassation en dates des 19 et 21 février 2005 de Maîtres Amadou Alio et Mano Salaou, avocats à la Cour d'Appel de Niamey, conseils du sieur A B, d'une part et de Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel de Niamey d'autre part contre l'arrêt n°13 du 19 février 2005 de la Cour d'Assises de Niamey qui a:
condamné A B à la peine de vingt (20) ans d'emprisonnement et cinq millions (5.000.000) francs d'amende pour détournement des deniers publics;
condamné par défaut Aa Af à cinq (5) ans d'emprisonnement et 80.000 Frs d'amende pour le délit de recel de sommes d'argent provenant du détournement des deniers publics;
constaté l'extinction de l'action publique à l'égard de B Ab dit Ac décédé le 5 février 2004 et à l'égard de Ad Ae décédé le 18 juillet 2004;
condamné l'accusé A B à payer vingt et un million six cent vingt six mille quatre cent quatre vingt seize (21.626.496) francs de dommages-intérêts à la partie civile S.N.T.N;
Vu la loi 2000-10 du 14 août 2000 sur la Cour Suprême;
Vu les articles 265, 341, 347 du Code de Procédure Pénale;
Vu l'arrêt n°13 du 19 février 2005 de la Cour d'Assises de Niamey;
Vu les autres pièces du dossier;
EN LA FORME
Attendu que les pourvois sont déjà déclarés recevables par arrêt n°05-186/P du 11/8/2005 de la Chambre Judiciaire de la Cour de céans à l'occasion du sursis à statuer pour permettre à la Cour Constitutionnelle de se prononcer sur le recours en exception d'inconstitutionnalité des ordonnances n°92-003 du 26/02/1992 portant interprétation de l'article 1er de l'Acte Fondamental n°06/CN de la Conférence Nationale abrogeant les Ordonnances n°85-26 du 26 septembre 1985 et n°88-34 du 9 juin 1988 portant création de la Cour Spéciale de Justice et des articles 23 et 36 de l'Ordonnance n°85-26 du 12 septembre 1988;
SUR LE FOND
Attendu que le pourvoi contre l'arrêt de la Cour d'Assises invoque trois moyens de cassation;
Sur le premier moyen: violation de l'article 265 al.1 du Code de Procédure Pénale
Attendu qu'aux termes de l'article 265 al.1 du CPP «les débats ne peuvent s'ouvrir moins de 15 jours après l'interrogatoire de l'accusé par le Président de la Cour d'Assises. L'accusé et son conseil peuvent renoncer à ce délai.»;
Attendu que dans la présente affaire, la décision en Cour d'Assises est intervenu le 19 février 2005. L'accusé a été interrogé par le Président de la Cour d'Assises le 15 février 2005, soit seulement trois (3) jours avant l'audience;
Qu'ainsi, le délai prévu par l'article 265 al.1 du CPP n'a pas été respecté. L'accusé et son conseil n'ont pas renoncé à ce délai; qu'il résulte en effet des pièces de la procédure que l'accusé a été interrogé le 15 février 2005 suivant procès-verbal d'interrogatoire versé au dossier par le Président de la Cour d'Assises en application de l'article 265 al.1 du Code de Procédure Pénale; que ce procès-verbal ne fait pas état du renoncement au délai prescrit;
Que cette disposition est d'ordre public et concerne les droits de la défense; sa violation entraîne la cassation de l'arrêt attaqué;
Sur le second moyen de cassation, tiré de la violation des articles 341 et 347 du Code de Procédure Pénale
Attendu que le pourvoi fait grief à à l'arrêt attaqué de contenir à la fois la condamnation sur l'action publique et celle sur l'action civile alors même que cette dernière doit non seulement être prise sans l'assistance des jurés mais aussi et surtout après le prononcé de l'arrêt de condamnation tel qu'il résulte des dispositions des articles susvisés au moyen;
Attendu que le fait pour la Cour de statuer comme en l'espèce dans un seul et même arrêt sur l'action publique et sur l'action civile constitue une violation des dispositions des articles 341 et 347 du code de procédure pénale visés au moyen aux termes desquels la décision sur l'action civile ne peut intervenir qu'après le prononcé de l'arrêt de condamnation (article 341 CPP) d'une part, la Cour statue sur les intérêts civils sans l'assistance du jury, après s'être prononcée sur l'action publique (article 347 CPP) d'autre part; qu'au sens de ces dispositions, la décision sur l'action civile doit obligatoirement être séparée de l'arrêt de condamnation, ce qui n'est pas le cas en l'espèce; que le fait de déclarer statuer hors la présence du jury ne saurait constituer la séparation prévue au sens des dispositions des articles 341 et 347 du CPP. D'où ce moyen est également fondé et la décision mérite cassation;
Attendu que sans qu'il soit besoin d'examiner le troisième moyen, il y a lieu de casser et annuler ledit arrêt;
PAR CES MOTIFS
Casse et annule l'arrêt n°12 du 19 février 2005 de la Cour d'Assises de Niamey; renvoie la cause et les parties devant la Cour d'Assises de Niamey autrement composée;
Met les dépens à la charge de l'Etat.
ARRÊT N° 05-208/P
Du 22 décembre 2005
MATIERE : pénale
DEMANDEUR :
MINISTERE PUBLIC
DEFENDEUR :
A B
Me Salao Manou et Alio Amadou
PRESENTS :
Dillé Rabo
Président
Issaka Dan Déla ; Abdourahamane Ghousmane
Conseillers
Mahamadou Aminou Aouta
Ministère Public
Me Illiassou Amadou
Greffier
RAPPORTEUR
Issaka Dan Déla