ARRÊT N° 06-170 Du 15 juin 2006 MATIERE : coutumière DEMANDEUR : OUMAROU MOUMOUNI Me Harouna Abdou DEFENDEUR : YACOUBA BILAN PRESENTS : Dillé Rabo Président Hassane Hodi ; Moussa Idé Conseillers Ali Karmazi ; Adamou Harouna Assesseurs Mahamadou Aminou Aouta Ministère Public Me Illiassou Amadou Greffier RAPPORTEUR Moussa Idé République du Niger
Cour Suprême Chambre Judiciaire
La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires coutumières en son audience publique ordinaire du jeudi quinze juin deux mille six, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit : ENTRE : OUMAROU MOUMOUNI, cultivateur demeurant à Gatagarbey-Filingué, assisté de Maître Harouna Abdou, Avocat à la Cour D'une part ET : YACOUBA BILAN, chef de village de Gatagarbey-Koarazéno (Filingué) ; D'autre part Après lecture du rapport de Monsieur Moussa Idé, conseiller rapporteur, les conclusions de Monsieur le Procureur Général et après en avoir délibéré conformément à la loi :
Statuant sur le pourvoi formé par déclaration au greffe du Tribunal Régional de Niamey en date du 6 mai 2004 et enregistré au greffe de la Cour de céans le 18/10/2004 par Maître Harouna Abdou, avocat au barreau du Niger, conseil du sieur Oumarou Moumouni contre le jugement n°33 du 27/4/2004 dudit Tribunal qui a reçu en la forme l’appel de Oumarou Moumouni ; infirmé le jugement attaqué ; évoqué et statué à nouveau ; dit que le champ litigieux est la propriété des héritiers de Bilan ;
Vu la loi n°2000-10 du 14 août 2000 sur la Cour Suprême ; Vu les articles 64 de la loi 2000-10 du 14/8/2000 ; 2 al.2 de la loi n°62-&& du 16/3/1962 ; Vu l’acte de pourvoi, ensemble les pièces du dossier ; Vu les conclusions de Monsieur le Procureur Général ;
EN LA FORME
Attendu que le pourvoi dont s’agit a été introduit dans les forme et délai prescrits par la loi ; qu’il échet de le déclarer recevable ;
AU FOND
Attendu que le requérant soulève deux (2) moyens de cassation :
Que sur le premier moyen pris de la violation de l’article 2 alinéa 2 de la loi n°2004-50 du 22 juillet 2004 fixant l’organisation et la compétence des juridictions en République du Niger , le sieur Oumarou Moumouni reproche au juge d’appel de n’avoir par effectué la délimitation précise de l’objet litigieux ; Qu’en réplique, le défendeur allègue que le jugement attaqué qui a été rendu le 27/4/2004 est antérieur à la loi invoquée et celle-ci n’a point d’effet rétroactif ; Attendu que l’article 92 de la loi susvisée édicte que « sous peine de nullité, les décisions rendues en matière foncière doivent comporter la délimitation précise de l’objet » ; Que l’on constate que cette loi étant postérieure au jugement querellé, elle ne peut régir une situation antérieure car elle ne dispose que pour l’avenir ; que par voie de conséquence, il ne peut être fait grief au juge d’appel d’avoir violé un texte qui n’existait pas au moment où il a statué ; qu’en raison de ces énonciations, ce moyen doit être écarté comme étant mal fondé ;
Attendu que sur le deuxième moyen tiré de la violation de l’article 2 alinéa 2 de la loi n°2004-50 du 22 juillet 2004 pour insuffisance de motifs, défaut de motifs, omission de statuer et manque de base légale , le requérant fait grief au jugement entrepris de n’être pas suffisamment motivé ; Attendu que compte tenu des raisons susdites ce moyen est inopérant ; Que cependant il s’avère nécessaire de relever d’office deux moyens dont l’un pris de la violation de l’article 2 al.2 de la loi du 16 mars 1962 au terme duquel « les jugements doivent être motivés à peine de nullité » et l’autre tiré de la décision d’infirmation du premier jugement qui encourt plutôt annulation ; Qu’il ressort des pièces du dossier que le requérant a déféré le serment coranique à Yacouba Bilan qui a refusé de jurer et le juge d’appel non seulement n’en a tiré aucune conséquence de droit mais en outre a passé sous silence ce point ; qu’en s’abstenant de statuer sur cette demande, le juge d’appel n’a pas donné de motifs à la décision par lui rendue qui est ainsi dépourvue de base légale ; Qu’en infirmant le jugement de la première instance au lieu de l’annuler, il a également enfreint la loi n°62-11 du 16 mars 1962 ; Qu’en raison des énonciations qui précèdent, il y a lieu de casser et annuler le jugement n°033 du 27/4/2004 du Tribunal Régional de Niamey ; renvoyer la cause et les parties devant la même juridiction autrement composée ; Attendu qu’il échet de dire qu’il n’y a pas lieu aux dépens, s’agissant d’une matière coutumière ;
Par ces motifs
- Déclare le pourvoi de OUMAROU MOUMOUNI recevable ; - Casse et annule le jugement n°033 du 27/4/2004 du Tribunal Régional de Niamey ; - Renvoie la cause et les parties devant la même juridiction autrement composée ; - Dit qu’il n’y a pas lieu aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.