REPUBLIQUE DU NIGER
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Cour Suprême
Chambre Judiciaire
La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires coutumières en son audience publique ordinaire du jeudi vingt sept juillet deux mille six, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
SUCCESSION FEU A B demeurant à Ac ;
D'une part
ET :
DAME Z X, fondatrice ACOMTEC demeurant à Arlit ;
D'autre part
Après lecture du rapport de Monsieur Abdourahamane Ghousmane, conseiller rapporteur, les conclusions de Monsieur le Procureur Général et après en avoir délibéré conformément à la loi :
Statuant sur le pourvoi en cassation enregistré au greffe du Tribunal Régional d'Agadez en date du 13/02/2006 et formé par déclaration au greffe par les héritiers de feu A B à savoir Ad A B, Aa A B et Ab A B contre le jugement n°18 du 23/6/2005 rendu par le Tribunal Régional d'Agadez, statuant en cause d'appel en matière coutumière et qui a déclaré irrecevable l'action de Z X;
Vu la loi n°2000-10 du 14/8/2000 sur la Cour Suprême;
Vu la déclaration de pourvoi, avec l'ensemble des pièces du dossier;
Vu les conclusions de Monsieur le Procureur Général;
EN LA FORME
Le pourvoi étant intervenu dans les forme et délai prévus par la loi; il y a lieu de le déclarer recevable;
AU FOND
Attendu que les demandeurs au pourvoi ont produit un mémoire en défense en date du 14/02/2006 dans lequel ils ne soulèvent aucun moyen de droit; qu'ils se bornent à relater les faits de la cause qui relèvent de l'appréciation souveraine des juges du fond;
Attendu qu'en revanche, la Cour soulève deux moyens d'office de cassation;
Sur le premier relevé d'office pris de la violation de l'article 5 al.4 de la loi n°2004-50 du 22/7/2004 en ce que le juge d'appel, statuant en matière coutumière ne s'est pas adjoint deux assesseurs de la coutume des parties;
Attendu qu'aux termes de l'article 5 alinéa 4 de la loi n°2004-50 du 22/7/2004, «en matière coutumière, des assesseurs avec voix consultative complètent la Cour de cassation, le Tribunal de Grande Instance, le Tribunal d'instance et le Tribunal du Foncier Rural»; qu'en l'espèce, il résulte du jugement attaqué que le juge d'appel après avoir écrit «statuant en appel et en matière coutumière» ne s'est pas adjoint deux assesseurs coutumiers prévus au texte susvisé;
Attendu qu'il a déjà été jugé (arrêt du 26/3/70 Cour Suprême du Niger) que les questions qui ont trait à la composition des cours et Tribunaux et au mode de jugement des causes, touchent essentiellement à l'ordre public; qu'ainsi, dès lors qu'un juge déclare statuer en matière coutumière, il est tenu de compléter la juridiction qu'il entend présider en faisant appel à deux assesseurs de la coutume qu'il entend appliquer; qu'il s'ensuit que le moyen soulevé d'office doit être accueilli;
Sur le deuxième moyen relevé d'office pris de la violation de l'article 2 al.2 de la loi n°2004-50 du 22/7/2004 en ce que le jugement attaqué n'est pas motivé et manque de base légale
Attendu que le juge d'appel a déclaré irrecevable l'acte de dame Mariama en relevant «que la mesure ordonnée est tout juste un acte préparatoire destiné à mettre en ouvre des actes préalables permettant de régler ladite succession»;
Attendu que cette motivation est insuffisante et ne repose sur aucun texte de loi justifiant l'irrecevabilité de l'appel interjeté par dame Z X qui recherche par cette voie de recours l'annulation de la décision du premier juge;
Qu'ainsi, pour le juge d'appel, s'agissant d'un jugement avant-dire-droit, celui-ci n'est pas susceptible d'appel sans apprécier en fait et en droit la décision du premier juge qu'il qualifie abusivement d'un acte préparatoire;
Mais attendu qu'en décidant de faire vendre des immeubles du défunt A B pour rembourser des dettes dont l'existence n'est pas prouvée et dont le règlement n'est pas demandé, le juge d'appel touche au fond du litige;
Qu'il s'ensuit que ce deuxième moyen relevé d'office doit être accueilli;
PAR CES MOTIFS
Déclare le pourvoi recevable;
Casse et annule le jugement018 du 23/6/2005 du Tribunal Régional d'Agadez;
Renvoie la cause et les parties devant la même juridiction autrement composée;
Dit qu'il n'y a pas lieu aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.
ARRÊT N° 06-209/COUT
Du 27 juillet 2006
MATIERE : Coutumière
DEMANDEUR :
SUCCESSION FEU A B demeurant à Ac ;
Y :
DAME Z X
PRESENTS :
Dillé Rabo
Président
Moussa Idé ; Abdourahamane Ghousmane
Conseillers
Ali Karmazi ; Adamou Harouna
Assesseurs
Ousmane Oumarou
Ministère Public
Me Illiassou Amadou
Greffier
RAPPORTEUR
Abdourahamane Ghousmane