REPUBLIQUE DU NIGER
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Cour Suprême
Chambre Administrative
La Cour Suprême , Chambre Administrative statuant en matière de recours pour excès de pouvoir en son audience publique ordinaire du mercredi quinze novembre deux mille six, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
Statuant sur la requête en date du 3 mars 2006, enregistrée au greffe de la Cour Suprême le 3 mars 2006 sous le n° 0132 introduite par les Sociétés Ac Aa Ab 'EH GM), Société Nigérienne des Transports de Voyageurs (S.N.T.V), Rimbo Transports Voyageurs (R.T.V), Air Transport, représentés par leurs directeurs généraux respectifs, ayant pour Conseils Maître Tanimoune Baoua Souleymane et Maître Oumarou Sanda Kadri, tous avocats au barreau du Niger, tendant à l'annnulation de l'arrêté n° 005/CUT du 10 novembre 2005 du Maire de la Commune de Tessaoua.
Vu la loi 2000-10 du 14 Août 2000 sur la Cour Suprême;
Vu la requête;
Vu les conclusions de Monsieur le Procureur Général;
SUR LA RECEVABILITE
Attendu que la Commune Urbaine de Tessaoua soulève l'irrecevabilité de la requête des requérantes pour non respect des articles 101, 102 et 103 de la loi 2000-10 du 14 août 2000; en ce que la requête est dépourvue de timbre, qu'elle n'est pas accompagnée de pièces justifiant l'exercice effectif du recours préalable et enfin que les copies accompagnant la requête ne sont pas certifiées conformes;
Mais considérant que l'original de la requête est affranchie d'un timbre de 5000 F comme le prescrit l'article 101 susvisé;
Considérant que la défenderesse qui prétend qu'aucune pièce justifiant l'exercice effectif du recours préalable n'est produite au dossier fait portant cas d'une correspondance adressée au Gouverneur de la Région de Maradi par les requérantes, qu'elle admet donc la réalité du recours hiérarchique;
Que concernant l'absence des pièces certifiées conformes, puisqu'elle ne dénie pas aux documents produits par les demanderesses leur authenticité, en vain, elle argue cette prétendue irrégularité.
Que dès lors, le recours en annulation dont s'agit, parce qu'étant intervenu dans les formes et délai prévus par la loi, doit être déclaré recevable;
AU FOND
Considérant que par arrêté n° 005/CUT/ du 10/11/2005 le Maire de Tessaoua, après délibération du Conseil Municipal a institué au titre des impôts indirects une taxe de droit de sortie sur les véhicules de transport de personnes ou de marchandises sortant du territoire Communal lorsqu'ils ont été chargés dans la Commune.
Considérant qu'à l'appui de leur requête, les Sociétés demanderesses invoquent trois (3) moyens:
Sur le premier moyen pris de la violation de l'article 10 B 10 de la loi n° 2002-017 du 11 juin 2002 déterminant le régime financier des régions, départements et communes;
Considérant que les requérantes soutiennent que le chargement est celui opéré au départ de la ligne concernée par le déplacement; que leur activité est d'envergure nationale et qu'elles assurent un service public obligatoire mis à leur charge par l'Etat: que sur une ligne, les bus déjà chargés traversent une trentaine de Commune où ils ne font qu'embarquer et débarquer quelques passagers dans les gares privées, qu'ils ne serait pas raisonnable de demander le paiement de ladite taxe par chaque Commune traversée;
Considérant que la Commune Urbaine de Tessaoua, en réplique, affirme que le chargement en question désigne tout chargement et que si le législateur n'a pas opéré une distinction, c'est qu'il n' y a pas matière à la faire;
Considérant qu'aux termes de l'article 10 B 10 de la loi 2002-017 «les ressources financières de la Commune comprennent . . . la taxe sur le droit de sortie sur les véhicules de transport public de personnes ou de marchandises sortant du territoire de la Commune lorsqu'ils ont été chargés dans la Commune».
Attendu que de la détermination de la signification précise du mot chargement dépend en substance la pertinence des arguments développés par l'une ou l'autre des parties;
Qu'en effet, la nature juridique des transports publics réside dans une libéralisation de droit et une pratique dite de ligne, fait que l'essentiel des droits de sortie est perçu au départ initial; que par chargement, il faut entendre celui effectué au départ de la ligne; que si le législateur a voulu lui donner un autre sens, il allait utiliser les termes d'embarquement et de débarquement.
Qu'il s'ensuit donc que ce moyen est fondé.
Sur le deuxième moyen tiré de la violation de l'article 4 de la loi 2002-017 du 11 juin 2002
Attendu que selon les allégations des requérantes, la fixation de tout impôt et de toute taxe est subordonnée à l'avènement d'une loi des finances qui prévoit un minimum et un maximum; qu'elles disent également qu'aucun texte n'a déterminé les conditions et les modalités d'application de la loi n° 2002-017 du 11 juin 2002.
Que la Commune Urbaine de Tessaoua rétorque que les arguments des requérantes ignorent l'esprit de la loi 2002-017 et celui de la loi 2002-013 du 11 juin 2002 relative au transfert de compétences aux régions, départements et Communes, qui a énuméré les ressources propres aux collectivités. Qu'elle allègue que les Sociétés font une lecture partielle du texte car l'article 5 de la loi 2002-017 supplée l'absence de délibération par l'application de l'assiette des tarifs et barèmes de l'année précédente.
Attendu que l'article 4 de la loi 2002-017 du 11 juin 2002 dispose que «le taux des impôts et taxes de la région, du département et de la commune sont fixés chaque année après délibération du Conseil régional, départemental, communal conformément à la loi des finances;
Qu'il est loisible de constater que le texte ne requiert pas l'intervention d'une loi de finances qui fixe une fourchette; que c'est une conformité à la loi des finances de l'année en cours qui est exigée.
Que c'est plutôt l'article 165 de la loi 2002-012 du 11 juin 2002 déterminant les principes fondamentaux de la libre administration des régions, des départements et des communes ainsi que leurs compétences et leurs ressources qui prévoit que «la loi définit les matières sur lesquelles peuvent porter les taxes fiscales et impôts des régions, départements ou communes et fixe leur taux minimal..
Dans ces limites, le Conseil régional, le Conseil départemental ou le Conseil communal peut créer tout impôt ou taxe».
Que c'est la loi 2002-017 qui détermine le régime financier des entités décentralisées; que donc ce moyen doit être écarter comme étant mal fondé;
Sur le troisième moyen pris de la violation de l'article 20 de la loi 2002-017 du 11 juin 2002
Attendu que les requérantes soutiennent que l'arrêté querellé a été pris alors même que les recettes tirées des droits de sortie des véhicules de transports n'ont pas été prévus par un budget.
Attendu cependant qu'il résulte de plusieurs correspondances que des délibérations du Conseil municipal ont précédé l'institution de la taxe; que le budget de la commune a certainement été adopté lors de cette session; qu'en conséquence, le moyen soulevé doit être rejeté comme étant mal fondé.
Attendu qu'en raison des énonciations articulées lors de l'examen du premier moyen; qu'il y a lieu d'annuler l'arrêté n° 005/CUT du 10 novembre 2005 du Maire de la Commune de Tessaoua.
Attendu qu'il convient de mettre les dépens à la charge de la Commune de Tessaoua.
PAR CES MOTIFS
LA COUR DECIDE
Article 1er: Le recours en annulation formée le 3 mars 2006 par les Sociétés S.N.T.V, EH.G.M, Air Transports, R.T.V est recevable;
Article 2: L'arrêté n° 005/CUT du 10 novembre 2005 du Maire de la Commune de Tessaoua est annulé;
Article 3: Les dépens sont mis à la charge de la Commune de Tessaoua.
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour Suprême , Chambre Administrative, les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.
ARRÊT N° 06-26
Du 15 novembre 2006
Administrative
DEMANDEUR :
Les Sociétés SNTV
Me Me Oumarou Sanda Kadri et Me Tanimoune Baoua Souleylemene
A :
Commune Urbaine de Tessaoua
Me Boubacar Oumarou
PRESENTS :
Bouba Mahamane
Président
Hassane Hodi ; Moussa Idé
Conseillers
Ousmane Oumarou
Ministère Public
Me Nouhou Souley
Greffier
RAPPORTEUR
Moussa Idé