REPUBLIQUE DU NIGER
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Cour Suprême
Chambre Judiciaire
La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires pénales en son audience publique ordinaire du jeudi premier mars deux mille sept, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
Y B C, Berger à Inkalafan (Mali), assisté de Maître Liman Malick Mohamed, Avocat à la Cour et 3 autres
D'une part
ET :
MP
D'autre part
Après lecture du rapport de Monsieur Albachir Nouhou Diallo, conseiller rapporteur, les conclusions de Monsieur le Procureur Général et après en avoir délibéré conformément à la loi :
Statuant sur le pourvoi formé par déclaration au greffe de la Cour d'Appel de Niamey en date du 02 mars 2006 par Me Liman Malick, Avocat à la Cour conseil des inculpés Y B C, Ab Ab, Ac A et Aa Ad tous détenus à la maison d'arrêt de Filingué, contre l'arrêt n°45 du 1er mars 2006 rendu par la chambre d'accusation de ladite cour qui a confirmé les ordonnances de refus de mise en liberté provisoire desdits inculpés en date du 27 janvier 2006;
Vu la loi 2000-10 du 14 août 2000 sur la Cour Suprême;
Vu l'acte de pourvoi n°10/06 du 02 mars 2006;
Vu le mémoire de Me Liman Malick reçu au greffe le 9/06/2006;
Vu le procès verbal de notification faite au Procureur Général;
Vu les conclusions du Procureur Général;
Vu les pièces du dossier;
EN LA FORME
Attendu que le pourvoi a été régulièrement formé; qu'il y a lieu de le déclarer recevable;
AU FOND:
Attendu que le demandeur a relevé un seul moyen de cassation tiré de la violation de la loi qu'il a présenté en quatre (4) branches;
1°) sur la première branche tirée de la violation de l'article 2 al 2 de la loi du 16 mars 1962 fixant l'organisation et la compétence des juridictions de la République du Niger;
Attendu que le demandeur au pourvoi invoque la violation d'un texte abrogé par la loi organique n°2004-50 du 22 juillet 2004 portant organisation et compétence des juridictions en république du Niger (art 97) et qui était déjà en vigueur au moment des faits de la cause; que par conséquent cette branche est inopérante;
2°) Sur la deuxième branche tirée de la violation de l'article 646 du CPP
Attendu que le requérant, après avoir cité l'article 646 CPP qui dispose «est réputé commise sur le territoire de la République toute infraction dont un acte caractérisant un de ses éléments constitutifs a été accompli au Niger» , soutient que «les actes incriminés et l'arrestation des 3 inculpés ont été opérés à la mare d'Aboungoulou, lieu où a été constaté l'infraction par la patrouille nigérienne spécifiquement chargée d'y procéder»; qu'il en déduit que la mare d'Aboungoulou étant située en territoire malien et comme aucun acte constitutif de l'infraction n'a été commis en territoire nigérien, l'arrêt attaqué n'a pas fait une bonne application de la loi pour avoir ignoré son incompétence territoriale;
Attendu que l'appréciation des faits pouvant démontrer que l'un des actes constitutif de l'infraction a été commis au Niger échappent au contrôle de la Cour de Céans, il n'en demeure pas moins que la question de la compétence territoriale relevant du contrôle de ladite Cour est tranchée de manière non équivoque par l'article 642-1 CPP(loi 2003-026 du 13/06/2003) et l'article 644 CPP qui disposent que «tout étranger qui, hors du territoire de la République s'est rendu coupable d'un crime, soit comme auteur, soit comme complice, peut être poursuivi et jugé d'après les dispositions des lois nigérienne, lorsque la victime est de nationalité nigérienne» que dans le cas d'espèce les victimes de nationalité nigérienne représentées par leur chef de tribu peulh ont saisi l'autorité militaire territorialement compétent qui a procédé à la poursuite des suspects et à leur remise à la délégation judiciaire de Filingué qui a ouvert une information judiciaire à leur encontre (art 644 CPP);
Attendu dès lors, qu'en statuant tel qu'ils l'ont fait, les juges d'appel on fait une application de la loi sur la compétence qu'en conséquence cette deuxième branche doit être rejetée comme étant mal fondée;
3°) Sur la troisième branche tirée de la violation de l'article 209 CPP
Attendu que le demandeur au pourvoi soutient que les pièces justificatives de l'incompétence territoriale des juridictions nigériennes n'ont pas été mentionnées par l'arrêt attaqué; qu'il considère cela comme une omission de nature à entamer le contrôle régulier de la Cour;
Mais attendu qu'à la lecture de l'arrêt attaqué, on constate que le mémoire en appel de Me Liman Malick en date du 26 février 2006 qui invoque l'extra-territorialité de l'infraction sur la base des attestation des autorités administratives maliennes est bien visé; que le fait pour les juges d'appel de ne pas les citer spécifiquement et nommément ne signifie pas qu'il n'en a pas été tenu compte;
Attendu en effet que l'arrêt querellé, en visant ledit mémoire, a considéré celui-ci dans son ensemble, c'est-à-dire avec toutes les pièces sur lesquelles il s'appuie; que dès lors, il ne peut être soutenu qu'il y a eu omission de nature à entamer le contrôle de la Cour de Céans; qu'en conséquence cette troisième branche doit être également rejetée;
4°) Sur la quatrième branche tirée de la violation des art 131 et 132 CPP
Attendu que le demandeur au pourvoi soutient que les conditions de l'article 132 CPP sont remplies en ce que l'expiration du délai maximum de la détention préventive est acquise sans qu'il y ait eu renouvellement du titre de détention initial, encore que la chambre d'accusation aurait pu faire application de l'article 135 al 5 CPP pour assigner aux détenus de nationalité étrangère un lieu de résidence dont ils ne devraient pas s'éloigner en attendant d'être jugées au fond, sous peine de sanction pénales; que pourtant elle n'a pas disposé ainsi;
Attendu que les inculpés correctionnels sont en détention en vertu de mandats en date du 10 juin 2005; qu'autrement dit, ils sont incarcérés préventivement depuis cette date sans renouvellement du titre de détention et sans que cette situation soit légalement justifiée; que dès lors il y a violation de l'article 132 CPP entraînant la cassation de l'arrêt;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Déclare le pourvoi recevable;
Casse et annule l'arrêt n°45 du 1er mars 2006 de la chambre d'accusation de la Cour d'appel de Niamey;
Renvoie la cause et les parties devant la même chambre autrement composée;
Met les dépens à la charge du Trésor public;
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.
ARRÊT N° 07-052
Du 01 mars 2007
MATIERE : pénale
DEMANDEUR :
Y B C
Me Liman Malick Mohamed
X :
MP
PRESENTS :
Dillé Rabo
Président
Nouhou Hamani Mounkaila ; Albachir Nouhou Diallo
Conseillers
Ousmane Oumarou
Ministère Public
Me Hamadal Moumine ISSOUFOU
Greffier
RAPPORTEUR
Albachir Nouhou Diallo