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01/03/2007 | NIGER | N°07-054

Niger | Niger, Cour suprême, Chambre judiciaire, 01 mars 2007, 07-054


Texte (pseudonymisé)
REPUBLIQUE DU NIGER

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Cour Suprême
Chambre Judiciaire

La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires sociales en son audience publique ordinaire du jeudi premier mars deux mille sept, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

ENTRE :
Société Nationale des Transports Nigériens (SNTN), représentée par son Directeur Général, assistée de Maître Gourmou Asmane, avocat à la Cour
D'une part

ET A
B Ab, Cadre Supérieur de la SNTN demeurant à Niamey, assisté de Maître Sirfi Ali Ma

iga, avocat à la Cour
D'autre part
Après lecture du rapport de Monsieur Nouhou Mounkaila, conseiller ra...

REPUBLIQUE DU NIGER

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Cour Suprême
Chambre Judiciaire

La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires sociales en son audience publique ordinaire du jeudi premier mars deux mille sept, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

ENTRE :
Société Nationale des Transports Nigériens (SNTN), représentée par son Directeur Général, assistée de Maître Gourmou Asmane, avocat à la Cour
D'une part

ET A
B Ab, Cadre Supérieur de la SNTN demeurant à Niamey, assisté de Maître Sirfi Ali Maiga, avocat à la Cour
D'autre part
Après lecture du rapport de Monsieur Nouhou Mounkaila, conseiller rapporteur, les conclusions de Monsieur le Procureur Général et après en avoir délibéré conformément à la loi :

Statuant sur la requête en date du 19 septembre 2005 signifiée le 29 du même mois par laquelle la SNTN s'est pourvue en cassation contre l'arrêt n°111 du vingt juin deux mil cinq de la Cour d'appel de Niamey, chambre sociale qui a statué ainsi qu'il suit:

Reçoit les appels de B Ab et de la SNTN réguliers en la forme;
Au fond: Infirme le jugement attaqué sur le quantum de la réparation:
Condamne la SNTN à verser à B Ab les sommes de:
600707 F CFA au titre de complément de salaire et avantages;
4486866 F CFA au titre d'indemnité compensatrice de préavis;
17872680 F CFA au titre d'indemnité de licenciement;
35894928 F CFA à titre d'indemnité de dommages intérêts (2 ans de salaires) soit la somme globale de 58.855.181 F CFA;
Confirme la décision attaquée dans toutes ses autres dispositions;
Dit que s'agissant de la matière sociale il n'y a pas lieu à dépens;

Vu la loi 2000-10 du 14 août 2000 sur la Cour suprême;
Vu la loi organique n°2004-50 du 22 juillet 2004 sur l'organisation et la compétence des juridictions;
Vu le Code Civil en ses articles 1101 et 1134 notamment;
Vu le Code du Travail en ses articles 75, 76, 89, 278 notamment;
Vu la requête de pourvoi, ensemble les pièces du dossier;
Vu les conclusions du Procureur Général;

EN LA FORME

Attendu que le pourvoi est intervenu dans les forme et délai prévus par la loi; qu'il y a lieu de le déclarer recevable;

AU FOND

Attendu que la requérante invoque deux moyens à l'appui de son pourvoi:

Premier moyen de cassation: violation de l'article 2 al 2 de la loi n°2004-50 du 22 juillet 2004 fixant l'organisation et la compétence des juridictions en République du Niger pour insuffisance de motifs;
Deuxième moyen de cassation: violation des articles 89 du Code du Travail, 1101 et 1134 du code civil et du protocole du 1er février 2000;

Sur le premier moyen de cassation: violation de l'article 2 al 2 de la loi n°2004-50 du 22 juillet 2004 fixant l'organisation et la compétence des juridiction en république du Niger pour insuffisance de motifs:

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué l'absence de concordance entre la motivation de l'arrêt et son dispositif en ce qui concerne la déduction du montant de trente huit millions deux cent cinquante quatre mille soixante douze (38.254.072 F) Francs versé par la SNTN dans le compte de B Ab au titre des droits légaux;

Attendu que la requérante précise que cette déduction ne figure pas au dispositif alors qu'elle ressort de la motivation et du délibéré portés sur la chemise de la Cour;

Attendu qu'elle relève dans le même moyen que la Cour d'Appel, pour rejeter son premier moyen aux termes duquel elle demandait l'annulation du jugement attaqué pour défaut de réponse à un chef de conclusion a estimé qu'elle n'a pas apporté la preuve de ce qu'elle déclare, alors qu'elle avait demandé au premier chef au Juge d'instance de déclarer l'action de B Ab irrecevable par application du protocole d'accord du 1er février 2000 aux termes duquel «les parties s'engagent à ne plus faire état de ce départ ou de ses conséquences dans un recours ultérieur, notamment juridique»; que le premier juge étant tenu de répondre à cette demande ne serait-ce que pour la rejeter et ne l'ayant pas fait, la Cour d'Appel était tenue d'annuler son jugement pour insuffisance de motifs conformément à l'article 2 al 2 de la loi n°2004-50 du 22 juillet 2004 sur l'organisation judiciaire au Niger et conformément à la jurisprudence suffisamment établie de la Cour suprême;

Attendu que dans son mémoire en défense du 8 novembre 2005 B Ab soutient:
Qu'il n' y a aucune discordance entre la motivation de l'arrêt et son dispositif car ce dispositif doit être complété avec les éléments confirmés du jugement n°85 du 23/10/2003 du Tribunal de travail de Aa qui a rendu la décision suivante:
«Reçoit B Ab en sa requête;
Déclare son licenciement abusif;
Condamne en conséquence la SNTN à lui payer les sommes suivantes:
13 156 000 F CFA au titre d'indemnité de licenciement;
8.973 000 f CFA à titre d'indemnité de préavis;
16122000 F CFA à titre de dommages intérêts;
Déboute le requérant du surplus de sa demande;
Dit qu'il y a lieu de déduire de ces montants alloués la somme de 38.254 071 F cfa versé à son profit par la SNTN»;

Qu'il n'y a en l'espèce aucune insuffisance de motifs comme le prétend la SNTN car le premier juge et les juges d'appel ont statué sur la demande la SNTN tendant à l'irrecevabilité de l'action de B Ab mais l'ont rejeté parce que non fondé;

Attendu qu'il précise que d'une part la Cour d'appel a énoncé dans son arrêt que de «l'examen du jugement attaqué il ne ressort aucun défaut de réponse aux conclusions ou en tout cas un défaut de motifs», que d'autre part, par rapport à la recevabilité de la demande de B Ab, le juge d'appel de Niamey l'a, comme le juge de première instance, déclarée recevable en se fondant sur le fait que le protocole d'accord du 1er février 2000 ne lui était pas opposable en ce qu'il n'a jamais été partie à ladite convention, que c'est pour cette raison d'ailleurs que le licenciement dont il a été victime a été déclaré abusif;

Attendu que de ce qui précède il y a lieu de relever d'une part qu'effectivement un arrêt confirmatif adopte les dispositions du jugement qui est soumis à sa censure et d'autre part que les juges du fond ont déclaré la demande B Ab recevable ce qui constitue une réponse à la conclusion de la SNTN tendant à la voir déclarée irrecevable;

Attendu que l'arrêt attaqué est suffisamment motivé; le premier moyen est donc mal fondé;

Sur le deuxième moyen de cassation: violation des articles 89 du code de travail, 1101 et 1134 du code civil et du protocole d'accord du 1er février 2000:

Attendu que la requérante reproche à la Cour d'avoir écarté l'application des articles 89 du code du travail, 1101 et 1134 du code civil en décidant que le protocole ne s'applique pas à B Ab alors qu'il y est stipulé que «la réduction des effectifs se fera sous forme de départ ciblé; en tout état de cause la SNTN se réserve le droit de désigner le personnel à déflater»;
Attendu que le défendeur soutient:
Qu'il n'y a pas de violation de l'article 89 du code du travail en ce sens:
que le premier juge comme les juges d'appel ont rappelé que si, en vertu de l'article 89 al 2 les parties ont la faculté de convenir de ruptures négociées du contrat de travail, en l'espèce il n'existe aucun acte consacrant un quelconque accord entre B Ab et la SNTN sur les modalités de son départ négocié;
que même si B Ab a adressé une correspondance au Directeur général de la SNTN pour lui faire part de son désir de négocier un départ volontaire moyennant une indemnité correcte qui tiendra compte de son ancienneté et des hautes fonctions qu'il occupait, il reste constant que la SNTN a agit unilatéralement en portant son nom sur la liste des agents à licencier alors même qu'aucun accord n'a été signé entre eux;

Qu'aucune négociation n'a été menée dans le sens des articles 75 et 76 du code de travail auxquels fait référence l'article 89 al 3; que c'est pour cette raison que l'arrêt attaqué a clairement énoncé que « le premier juge a déclaré que le départ de B Ab a constitué un licenciement abusif car la SNTN a violé les articles 89, 75 et 76 du code du travail, tout en motivant suffisamment sa décision»;

Attendu que l'arrêt attaqué est principalement motivé ainsi qu'il suit:
«Attendu que la SNTN allègue la violation par le premier juge des articles 1101 et 1134 du code civil relatifs à la formation des contrats et à leur exécution en ne faisant pas application du protocole d'accord du 01/02/2000, alors que si l'article 1134 fait des conventions légalement formées la loi des parties, il n'en demeure pas moins que les conventions doivent être formées en respectant les prescriptions légales, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, car B Ab n'a nullement été contacté pour une quelconque négociation concernant son départ et le protocole d'accord du 01-02-2000 ne peut lui être opposé; qu'en conséquence de tout ce qui précède, il y a lieu de déclarer recevable l'action de B Ab;

Attendu que la SNTN soutient que B Ab a fait l'objet d'un départ volontaire;
Mais attendu qu'il résulte des faits de la cause que le protocole dont se prévaut la SNTN ne concerne guère B Ab, mais plutôt les 248 agents qui étaient sous ses ordres en tant que Directeur Général Adjoint; que dès lors en application de l'article 1165 du code civil, le protocole d'accord ne peut lui être opposé, et la rupture de son contrat intervenue sur cette base est dépourvue de base légale; c'est donc à bon droit que le premier juge a déclaré cette rupture abusive;

Attendu que de ce qui précède il y a lieu de relever que l'article 89 de l'ordonnance n°96-039 du 29 juin 1996 portant code du travail dispose que: « les parties ne peuvent renoncer à l'avance au droit éventuel de demander des dommages intérêts en vertu des dispositions ci-dessus;

Néanmoins, les parties ont la faculté de convenir de ruptures négociées du contrat de travail qui sous réserve des dispositions de l'alinéa ci-dessous ne peuvent être remises en cause que dans les conditions du droit civil;

Lorsque ces ruptures font partie d'une opération de réduction des effectifs pour motif économique elles doivent être, au même titre que les licenciements annoncés et discutés dans les conditions prévues aux articles 75 et 76 ci-dessus» ;

Attendu que l'interprétation qu'il convient de donner à ce texte est qu'en cas de ruptures négociées du contrat de travail intervenues pour motif économique si la procédure prévue aux article 75 et 76 a été respectée, l'accord commun des parties ne peut être remis en cause que sur la base du droit civil, qu'il s'agit alors pour le juge de voir si les conditions essentielles prévues aux articles 1108 et suivants du code civil pour la validité des conventions ont été respectées notamment les questions liées à la notion de consentement valable, le tribunal compétent restant le tribunal du travail car non seulement il s'agit d'un litige entre employeur et employé (compétence dévolue par l'article 278 du code du travail) mais aussi avant de recourir au code civil il aura fallu examiner et décider que les conditions du licenciement pour motif économique ont été respectées;

Attendu que de la substance de ces textes il ressort qu'une série de rencontres multipartites doivent être organisées; que les critères retenus pour le licenciement doivent être connus ainsi que la liste prévisionnelle des salariés susceptibles d'être concernés;

Attendu qu'à l'évidence B Ab n'est pas sur la liste prévisionnelle;

Que dès lors les dispositions du code du travail étant d'ordre public l'employeur qui ne prouve pas qu'il a rempli les conditions de forme de licenciement est mal fondé à soutenir la validité de la convention de rupture en s'appuyant sur l'article 1134 du code civil; qu'il y a donc lieu de rejeter ce deuxième moyen comme étant mal fondé;

PAR CES MOTIFS
LA COUR

Déclare le pourvoi de la SNTN recevable;
Rejette ledit pourvoi;

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.

ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.

ARRÊT N° 07-054
Du 01 mars 2007

MATIERE : Sociale

DEMANDEUR :
Société Nationale des Transports Nigériens (SNTN)
Me Gourmou Asmane

C A
B Ab
Me Sirfi Ali Maiga

PRESENTS :
Dillé Rabo
Président
Nouhou Mounkaila ; Nouhou Diallo Mahamadou Albachir
Conseillers
Ousmane Oumarou
Ministère Public
Me Hamadal Moumine Issoufou
Greffier

RAPPORTEUR
Nouhou Mounkaila


Synthèse
Formation : Chambre judiciaire
Numéro d'arrêt : 07-054
Date de la décision : 01/03/2007
Sociale

Parties
Demandeurs : Société Nationale des Transports Nigériens (SNTN) Me Gourmou Asmane
Défendeurs : KASSOUM IBRAHIM Me Sirfi Ali Maiga

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ne;cour.supreme;arret;2007-03-01;07.054 ?
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