L’article 27.1 prétendument violé du Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ne prescrit aucune sanction ; il appert par ailleurs de ses statuts, que la requérante est « une société anonyme régie par les lois en vigueur en République du Cameroun, et en particulier l’Acte uniforme relatif au droit des société commerciales et du groupement d’intérêt économique en date du 17 avril 1997 … » dans laquelle la société AES Cameroon Holdings SA est actionnaire ; il n’est donc nulle part fait état de l’existence d’une société d’économie mixte invoquée par le défendeur au pourvoi dans son argumentaire et qui, selon lui, serait juridiquement inexistante ; dès lors, il reste que même si AES SONEL n’avait pas harmonisé ses statuts conformément aux dispositions de l’article 908 de l’Acte uniforme précité, celles-ci ne prévoient également aucune sanction, sauf à mettre en œuvre l’article 75 dudit Acte uniforme ; que n’ayant pas exercé une telle action, le défendeur au pourvoi est mal fondé de contester l’attestation d’immatriculation au registre du commerce délivrée par le Greffier en chef du Tribunal de Première Instance de Douala Bonanjo, laquelle, relative en tout état de cause à la société AES SONEL, dénomination statutaire exacte de la requérante, prouve la personnalité juridique de celle-ci, conformément aux articles 97 et suivants de l’Acte uniforme précité ; qu’il suit que les exceptions soulevées par le défendeur au pourvoi ne sont pas fondées et doivent être rejetées.
L’examen de l’exploit de dénonciation du 29 mars 2005 de la saisie-attribution des créances pratiquée le 28 mars 2005 à la diligence de Maître TCHIMDOU MEKIAGE Micheline, Huissier de justice à Yaoundé, au profit et pour le compte de Monsieur NANKOUA Joseph à l’encontre de la société requérante, révèle que cet exploit comporte des carences ou des omissions relatives à la mention précise soit du siège social de ladite société, soit de la juridiction territorialement compétente, au regard des textes internes cam6erounais, devant laquelle les contestations pourront être portées ; ces mentions étant prescrites à peine de nullité par les articles 157-1) et 160-2) de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, doit en conséquence être cassé, l’arrêt attaqué, qui a occulté ces nullités alors qu’il se devait de les relever et sanctionner.
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A), Arrêt N° 035/2009 du 30 juin 2009, Audience publique du 30 juin 2009, Pourvoi n° 003/2006/PC du 02 février 2006 – Affaire : Société AES SONEL SA (Conseil : Maître AYATOU Gaston, Avocat à la Cour) contre NANKOUA Joseph (Conseil : Maître YOSSAKAMGA Claude Aimé, Avocat à la Cour).- Recueil de Jurisprudence n° 13, Janvier–Juin 2009, p. 144.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A.), Deuxième Chambre, a rendu l’arrêt suivant en son audience publique du 30 juin 2009, où étaient présents :
Messieurs Antoine Joachim OLIVEIRA, Président Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge Boubacar DICKO, Juge, rapporteur
Et Maître MONBLE Jean Bosco, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans, le 02 février 2006 sous le n° 003/2006/PC et formé par Maître AYATOU Gaston, Avocat au Barreau du Cameroun, demeurant à Douala, 81, boulevard de la Liberté, immeuble ex-LABOREX, agissant au nom et pour le compte de la société AES SONEL SA, dont le siège social est sis à Douala, avenue du Général de Gaulle, BP 4077, dans la cause l’opposant à Monsieur NANKOUA Joseph, domicilié à Yaoundé, BP 151, ayant pour Conseil Maître YOSSA KAMGA Claude Aimé, Avocat au Barreau du Cameroun, demeurant à Yaoundé, BP 2152,
en cassation de l’arrêt n° 86/CIV/04-05 rendu le 18 novembre 2005 par la Cour d’Appel du Centre à Yaoundé, et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement contradictoirement en matière de référé, en appel et en dernier ressort ;
En la forme : - Reçoit l’appel interjeté ;
Au fond : - L’y dit mal fondée ; - Confirme en conséquence, l’ordonnance entreprise ; - Condamne la société AES SONEL aux dépens distraits au profit de Maître YOSSA
KAMGA, Avocat aux offres de droit. » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Boubacar DICKO :
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces du dossier de la procédure, que par jugement [n° illisible] en date du 20 décembre 2004 du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi à Yaoundé, statuant en matière sociale, la société AES SONEL SA a été condamnée à payer à Monsieur NANKOUA Joseph, la somme de 57.373.255 francs CFA avec exécution provisoire partielle de celle-ci ; que par procès-verbal en date du 28 mars 2005, Monsieur NANKOUA Joseph initiait une procédure de saisie-attribution des créances contre ladite société ; que le 26 avril 2005, celle-ci assignait en référé Monsieur NANKOUA Joseph à l’effet d’obtenir la nullité et la mainlevée de la saisie pratiquée, pour violation des articles 157 et 160 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies
d’exécution ; que statuant sur cette demande, le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé, Centre administratif, l’en déboutait par ordonnance de référé n° 601 du 10 mai 2005 ; qu’ayant relevé appel de ladite ordonnance devant la Cour d’Appel du Centre à Yaoundé, celle-ci rendait l’arrêt confirmatif n° 86/CIV/04-05 du 18 novembre 2005, objet du présent pourvoi en cassation formé par la société AES SONEL SA ;
Sur les exceptions soulevées par le défendeur au pourvoi
Attendu que dans son mémoire en réponse reçu à la Cour de céans, le 14 juin 2006, le défendeur au pourvoi, Monsieur NANKOUA Joseph, sous la plume de son Conseil Maître YOSSA KAMGA Claude Aimé, Avocat au Barreau du Cameroun, énonce deux exceptions d’irrecevabilité du pourvoi, fondées respectivement sur la violation de l’article 27 du Règlement de Procédure de la CCJA et sur la non-harmonisation des statuts de la société AES SONEL SA ; que sur le premier point, le défendeur au pourvoi énonce « qu’en dépouillant les pièces versées au dossier, il échet de constater qu’elles n’ont pas été certifiées par le Conseil de AES SONEL, violant manifestement les dispositions de l’article 27 » précité ; que sur le second point, le défendeur au pourvoi soutient que de l’examen des pièces versées par la requérante, il ressort que l’attestation d’immatriculation au registre de commerce versée au dossier est celle de la société AES SONEL SA au capital de 43.903.690.000 francs CFA, alors que la copie des statuts certifiés par le notaire, en date du 26 janvier 2006, atteste que AES SONEL SA, avec le même capital susmentionné, est une société d’économie mixte où l’Etat du Cameroun détient 46 % des actions, et AES SONEL Cameroun Holding SA et la société FIDAFRICA SARL en sont des coactionnaires ; que le recours exercé par une société juridiquement inexistante, étant donné que AES SONEL est une société d’économie mixte, doit être déclaré irrecevable ;
Mais attendu que l’article 27.1 prétendument violé du Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, aux termes duquel « l’original de tout acte de procédure doit être signé par l’avocat de la partie. Cet acte, accompagné de toutes les annexes qui y sont mentionnées, est présenté avec sept copies pour la Cour et autant de copies qu’il y a de parties en cause. Ces copies sont certifiées conformes par la partie qui les dépose. » ne prescrit aucune sanction ; qu’il appert par ailleurs de ses statuts, que la requérante est « une société anonyme régie par les lois en vigueur en République du Cameroun, et en particulier l’Acte uniforme relatif au droit des société commerciales et du groupement d’intérêt économique en date du 17 avril 1997 … », dans laquelle la société AES Cameroon Holdings SA est actionnaire ; qu’il n’est donc nulle part fait état de l’existence d’une société d’économie mixte invoquée par le défendeur au pourvoi dans son argumentaire et qui, selon lui, serait juridiquement inexistante ; que dès lors, il reste que même si AES SONEL n’avait pas harmonisé ses statuts conformément aux dispositions de l’article 908 de l’Acte uniforme précité, celles-ci ne prévoient également aucune sanction, sauf à mettre en œuvre l’article 75 dudit Acte uniforme, aux termes duquel « si les statuts ne contiennent pas toutes les énonciations exigées par le présent Acte uniforme, ou si une formalité prescrite par celui-ci pour la constitution de la société a été omise ou irrégulièrement accomplie, tout intéressé peut demander à la juridiction compétente, dans le ressort de laquelle est situé le siège social, que soit ordonnée, sous astreinte, la régularisation de la constitution ... » ; que n’ayant pas exercé une telle action, le défendeur au pourvoi est mal fondé de contester l’attestation d’immatriculation au registre du commerce délivrée par le Greffier en chef du Tribunal de Première Instance de Douala Bonanjo, laquelle, relative en tout état de cause à la société AES SONEL, dénomination statutaire exacte de la requérante, prouve la personnalité juridique de celle-ci, conformément aux articles 97 et suivant de l’Acte uniforme précité ; qu’il suit que les
exceptions soulevées par le défendeur au pourvoi ne sont pas fondées et doivent être rejetées ;
Sur le premier moyen et la seconde branche du deuxième moyen réunis
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, d’avoir violé l’article 157 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, ainsi que les articles 2, 25 et 465 de l’Acte uniforme portant sur le droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, en ce que dans la dénonciation du procès-verbal de saisie faite à l’exposante, « il est vaguement indiqué que le siège de AES SONEL est situé à Douala, sans aucune autre précision » ; qu’une telle mention viole les articles 157 alinéas 2 et 25 visés au moyen, dès lors que faute de localisation géographique de son siège social, il est possible de se « fourvoyer », compte tenu des agences de ladite société dans la ville de Douala ; qu’en plus de la prescription à peine de nullité de l’article 157 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, l’article 2 de l’Acte uniforme relatif aux sociétés commerciales précise que les dispositions de celui-ci sont d’ordre public ; que dès lors, aucune autre possibilité n’est laissée au juge que d’annuler l’exploit de dénonciation, et partant de la saisie pratiquée en violation de ces textes ; que le juge, dans cette circonstance précise, n’a donc aucun pouvoir d’appréciation sur la nullité qui s’impose de plein droit ; qu’il a compétence liée pour annuler l’exploit vicié ; que les nullités invoquées ayant été soulevées en temps opportun, il appartenait tant au premier juge qu’à la Cour d’Appel du Centre à Yaoundé, d’ordonner la nullité de la saisie-attribution des créances pratiquée le 28 mars 2005 au préjudice de l’exposante ; que ladite Cour d’Appel ne l’ayant pas fait, a exposé son arrêt à la cassation ; qu’il est également reproché audit arrêt d’avoir violé l’article 160 alinéa 2 du même Acte uniforme, en ce que dans le cas d’espèce, l’exploit de dénonciation signifié à l’exposante indique vaguement que les contestations doivent être portées au plus tard le 29 avril 2005 par devant le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé, alors que depuis le décret n° 2001/361 du 14 novembre 2001 pris par le Chef de l’Etat camerounais, il a été ouvert deux Tribunaux de première instance dans la ville de Yaoundé Ekounou ; que l’exploit de dénonciation concerné aurait dû indiquer avec précision, devant laquelle de ces deux juridictions les contestations devraient être portées, une telle précision étant d’autant plus importante qu’elle indique la compétence territoriale de chacune desdites juridictions ; que pour n’avoir pas constaté cette autre irrégularité dudit exploit et de ne l’avoir pas annulé et ordonné la mainlevée de la saisie pratiquée, l’arrêt attaqué encourt la cassation ;
Attendu en effet, que l’examen de l’exploit de dénonciation du 29 mars 2005 de la saisie-attribution des créances pratiquée le 28 mars 2005 à la diligence de Maître TCHIMDOU MEKIAGE Micheline, Huissier de justice à Yaoundé, au profit et pour le compte de Monsieur NANKOUA Joseph à l’encontre de la société requérante, révèle que cet exploit comporte des carences ou des omissions relatives à la mention précise soit du siège social de ladite société, soit de la juridiction territorialement compétente, au regard des textes internes camerounais, devant laquelle les contestations pourront être portées ; que ces mentions étant prescrites à peine de nullité par les articles 157-1) et 160-2) de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, doit en conséquence être cassé, l’arrêt attaqué qui a occulté ces nullités, alors qu’il se devait de les relever et sanctionner ; qu’il échet d’évoquer sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens ;
Sur l’évocation
Vu l’appel interjeté le 1er juin 2005 par la société AES SONEL SA contre l’ordonnance de
référé n° 601 rendue le 10 mai 2005 par le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé, Centre administratif ;
Attendu que dans le dispositif de son « mémoire ampliatif emportant recours en cassation » reçu à la Cour de céans le 02 févier 2006, la requérante demande à ladite Cour, « évoquant et statuant à nouveau », de « recevoir la société anonyme AES SONEL en son action en contestation de la saisie-attribution pratiquée à son préjudice le 28 mars 2005 suivant procès-verbal de Maître TCHIMDOU MEKIAGE Micheline, Huissier de justice à Yaoundé ; dire et juger que l’exploit de dénonciation du 29 mars 2005 de la saisie-attribution pratiquée au préjudice du recourant viole manifestement les articles 157, 160 et 153 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, 2, 25 et 465 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique ; en conséquence, dire et juger nulle et de nul effet, la saisie-attribution des créances pratiquée au préjudice de AES SONEL le 28 mars 2005 suivant procès-verbal de Maître TCHIMDOU MEKIAGE Micheline, Huissier de justice à Yaoundé ; bien vouloir donner par voie de conséquence, mainlevée de ladite saisie » ;
Attendu que dans son « mémoire en réponse » reçu à la Cour de céans le 14 juin 2006, le défendeur au pourvoi, Monsieur NANKOUA Joseph, sous la plume de son Conseil, Maître YOSSA KAMGA Claude A., Avocat à la Cour, indique « qu’il est superfétatoire de constater que la société AES SONEL demande la mainlevée de la saisie-attribution qui a déjà été levée depuis belle lurette » ; qu’il est versé à cet égard, en preuve, un « procès-verbal de mainlevée de saisie-attribution des créances » établi le 29 décembre 2005 par l’huissier suscité ;
Attendu que s’il y a lieu, en l’occurrence, de constater l’effectivité de la mainlevée volontaire et unilatérale de la saisie opérée par le créancier poursuivant, il convient toutefois de relever, en droit, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés lors de l’examen des moyens de cassation ci-dessus retenus, il échet d’infirmer l’ordonnance de référé n° 601 rendue le 10 mai 2005 par le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé, Centre Administratif, dont appel, qui a à tort, débouté la société AES SONEL SA de sa demande tendant à la nullité de ladite saisie et d’en ordonner, par voie de conséquence, la mainlevée ;
Attendu que Monsieur NANKOUA Joseph ayant succombé, doit être condamné aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
- Rejette les exceptions soulevées par le défendeur au pourvoi ;
- Casse l’arrêt n° 86/CIV/04-05 rendu le 18 novembre 2005 par la Cour d’Appel du Centre à Yaoundé ;
Evoquant et statuant sur le fond,
- Infirme l’ordonnance de référé n° 601 rendue le 10 mai 2005 par le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé ;
- Dit que la saisie-attribution des créances pratiquée le 28 mars 2005 par Monsieur NANKOUA Joseph au préjudice de la société AES SONEL SA est nulle et de nul effet ;
- Constate que mainlevée de ladite saisie avait été unilatéralement opérée par le créancier saisissant, le 29 décembre 2005 ;
- Condamne Monsieur NANKOUA Joseph aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus, et ont signé :
Le Président Le Greffier
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