MISE A PRIX DE L’IMMEUBLE A PLUS DU QUART DE SA VALEUR – RESPECT DE L’ARTICLE 267 DE L’AUPSRVE – REJET DU MOYEN
CONTESTATION DE LA MISE A PRIX - DESIGNATION D’UN EXPERT – JURIDICTION COMPETENTE – JUGE DES CRIEES : NON – PRESIDENT DE LA JURIDICTION COMPETENTE : OUI
Il résulte de l’article 28 du Règlement de procédure de la CCJA que le délai du recours court à compter de la signification en bonne et due forme de la décision attaquée ; en l’espèce, le pourvoi reçu au greffe le 31 décembre 2009 est recevable, dès lors qu’il résulte de l’exploit d’huissier en date du 30 octobre 2009, régulièrement produit, que ce n’est qu’à cette date que le jugement a été signifié à la requérante. Est irrecevable, le pourvoi formé contre un jugement d’adjudication qui n’a statué sur aucune contestation. C’est à tort qu’il est reproché à un juge d’avoir rejeté les contestations portant sur le montant de la mise à prix, dès lors que contrairement à ce que soutiennent les requérants, il résulte des pièces de la procédure, notamment du rapport d’expertise immobilière que l’estimation de la valeur de l’immeuble litigieux a été faite à dire d’expert à la somme de 567.567.500 F CFA , et qu’en fixant la mise à prix dudit immeuble à la somme de 145.000.000 F CFA, soit plus du quart de la valeur de l’immeuble, le créancier poursuivant s’est conformé à l’article 267 alinéa 10 invoqué. Il résulte de l’article 272-2 de l’AUPSRVE que la désignation de l’expert relève de la compétence du Président de la juridiction compétente et non du juge des criées ; ainsi, en rejetant la demande de désignation d’un expert au motif qu’elle relève de la compétence de la juridiction des criées, le tribunal n’a violé en rien les dispositions invoquées au moyen, qui doit être rejeté.
ARTICLE 28 REGLEMENT DE PROCEDURE DE LA CCJA ARTICLE 267 AUPSRVE ARTICLE 272 AUPSRVE ARTICLE 293 AUPSRVE
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CCJA, 1ère ch., n° 158/2015 du 17 décembre 2015 ; P. n° 131/2009/PC du 31/12/2009 : Alimatou Sadiya GUEYE DIA c/ Société Nationale de Recouvrement dite SNR. Arrêt N° 158/2015 du 17 décembre 2015
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), Première Chambre, de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), a rendu l’arrêt suivant en son audience publique du 17 décembre 2015 où étaient présents :
Messieurs Marcel SEREKOÏSSE-SAMBA, Président, rapporteur
Mamadou DEME, Juge
Vincent Diehi KOUA, Juge
César Apollinaire ONDO MVE, Juge
Robert SAFARI ZIHALIRWA, Juge
Et Maître Acka ASSIEHUE, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans sous le n°131/2009/PC en date du 31 décembre 2009 et formé par la SCPA TALL & Associés, Avocats à la Cour, 192 avenue du Président Lamine GUEYE x Rue Emile Zola à Dakar, agissant pour le compte de Madame Alimatou Sadiya GUEYE DIA, demeurant à Dakar au Complexe dit «SADIYA» route des Mamelles à Ouakam, dans la cause qui l’oppose à la SOCIETE NATIONALE DE RECOUVREMENT dite SNR dont le siège social est à Dakar, 7 Avenue Léopold SEDAR SENGHOR représentée par son Directeur Général et ayant pour Conseil Maître Saër LO THIAM, Avocat à la Cour, 01 Place de l’Indépendance, Immeuble des Allumettes, Porte G à Dakar ; domicile élu en l’étude de Maître NGOAN-ASMAN & Associés SCPA, 37 rue de la Canebière- Cocody, 01 BP 3361 Abidjan 01 (Côte d’Ivoire),
en cassation du jugement n° 002 bis rendu le 06 janvier 2009 par le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar, dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort ; En la forme : Reçoit les dires ; Au fond : Les déclare mal fondés ; Renvoie la cause et les parties à l’audience d’adjudication du 10 février 2009 ; » et du jugement n°1974 rendu le 11 août 2009 par lequel le même tribunal a donné suite au
jugement précité, en statuant en ces termes : « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de Criées et en dernier ressort ; Vu l’extinction des feux voulus par la loi ;
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Adjuge à la Société Nationale de Recouvrement dite SNR au prix de 320.000.000 F le droit au bail inscrit sur le lot n°8 du TF N° 4.407/DG devenu le n°350/GRD saisi sur Alimatou Sadya GUEYE épouse DIA, sous réserve de la déclaration de command, aux clauses et conditions du cahier des charges … » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Marcel SEREKOÏSSE-SAMBA, Président ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que la Société Nationale de Recouvrement a pris une inscription hypothécaire sur le droit au bail grevant le lot n°8 du titre foncier n° 4407 des Communes de Dakar et Gorée (DG) appartenant à Madame Gueye Alimatou Sadiya épouse DIA en garantie du paiement de sa créance de 320.492.504 FCFA ;
Que poursuivant le recouvrement de sa créance, la SNR a réalisé la garantie en servant le 27 août 2008 à dame Alimatou Sadiya Gueye un commandement valant saisie réelle et a déposé le cahier de charges, sommant dame Gueye Alimatou Sadiya d’en prendre connaissance aux fins d’y insérer ses dires ;
Que par les dires de la débitrice Gueye reçus au greffe du Tribunal Régional Hors Classe de Dakar le 30 décembre 2008, celle-ci soulève la nullité du commandement valant saisie réelle, la nullité du cahier des charges et des contestations sur le rapport de l’Expert désigné par le Tribunal aux fins d’évaluer l’immeuble saisi ;
Que par décision n°002 bis du 06 janvier 2009, le tribunal a déclaré les dires mal fondés et a renvoyé la cause et les parties à l’audience d’adjudication ;
Que sur appel de dame Gueye, la Cour d’appel de Dakar a rendu le 09 juin 2009 une ordonnance d’irrecevabilité du recours ;
Que suivant procès-verbal n°1974 du 11 août 2009, le tribunal a adjugé l’immeuble saisi à la somme de 320.000.000 FCFA au profit de la SNR ;
Que c’est contre le jugement n°002 bis du 06 juin 2009 et le procès-verbal n°1974 du 11 août 2009, pris ensemble, que dame Gueye a formé le présent pourvoi devant la Cour de céans ;
Sur la recevabilité du recours
Attendu que suivant mémoire en réponse en date du 12 juillet 2010, la SNR soulève l’irrecevabilité du pourvoi, aux motifs, d’une part, qu’en tant que dirigé contre le jugement n° 002 bis du le 06 janvier 2009, il est tardif, et que, d’autre part, le jugement n°1974 du le 11 août 2009, qui n’a statué sur aucune contestation, ne peut faire l’objet d’aucun recours ;
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Attendu, sur la recevabilité du pourvoi dirigé contre le jugement n°1974 du 11 août 2009, qu’ il échet de faire droit à l’exception en application des dispositions de l’article 293 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, desquelles il résulte que « La décision judiciaire ou le procès-verbal d’adjudication établi par le notaire ne peut faire l’objet d’aucune voie de recours, sans préjudice des dispositions de l’article 313 ci-dessous. » ;
Attendu, sur la recevabilité du pourvoi dirigé contre le jugement n° 002 bis du 06 janvier 2009, qu’il résulte des dispositions de l’article 28 alinéa 1er du Règlement de procédure que « Lorsque la Cour est saisie par l’une des Parties à l’instance par la voie du recours en cassation prévu au troisième ou quatrième alinéa de l’article 14 du traité, le recours est présenté au greffe dans les deux mois de la signification de la décision attaquée par l’avocat du requérant dans les conditions fixées à l’article 23 ci-dessus » ; qu’il résulte de ce texte que le délai du recours court à compter de la signification en bonne et due forme de la décision attaquée ; qu’en l’espèce, il résulte de l’exploit d’huissier en date du 30 octobre 2009, régulièrement produit, que ce n’est qu’à cette date que le jugement a été signifié à la requérante ; que le pourvoi reçu au greffe le 31 décembre 2009 est donc recevable ;
Sur le premier moyen pris de la violation de l’article 267 alinéa 10 et 272- 2 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution
Vu les dispositions de l’article 267 alinéa 10 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
Attendu qu’il est reproché au premier juge d’avoir rejeté les contestations de la requérante portant sur le montant de la mise à prix, alors que l’immeuble valant plus d’un milliard de FCFA, la mise à prix fixée par le poursuivant à la somme de 145.000.000 F CFA est de loin inférieure au quart de la valeur de l’immeuble, montant minimum prévu à l’article 267 alinéa 10 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
Attendu qu’aux termes de l’article 267.10) de l’Acte uniforme susvisé, « la mise à prix fixée par le poursuivant, laquelle ne peut être inférieure au quart de la valeur vénale de l’immeuble. La valeur de l’immeuble doit être appréciée, soit au regard de l’évaluation faite par les parties lors de la conclusion de l’hypothèque conventionnelle, soit, à défaut, par comparaison avec les transactions portant sur des immeubles de nature et de situation semblables.» ;
Attendu, en l’espèce, que contrairement à ce que soutiennent les requérants, il résulte de l’examen des pièces du dossier de la procédure, notamment du rapport d’expertise immobilière établi le 27 mai 2008 par El Hadji Falou TOURE, expert immobilier, que l’estimation de la valeur de l’immeuble litigieux a été faite à dire d’expert à la somme de 567.567.500 F CFA ; qu’ainsi, en fixant la mise à prix dudit immeuble à la somme de 145.000.000 F CFA, soit plus du quart de la valeur de l’immeuble, le créancier poursuivant s’est conformé à l’article 267 alinéa 10 invoqué ; qu’il échet de rejeter le moyen comme mal fondé ;
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Sur le deuxième moyen pris de la violation de l’article 272-2 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution
Attendu qu’il est reproché à la Cour d’appel d’avoir violé ce texte en ce que Alimatou Sadiya GUEYE ayant demandé par voie de conclusions écrites au juge des criées la désignation d’un expert, le tribunal a répondu de façon laconique ;
Mais attendu qu’il résulte du texte dont la violation est alléguée que « Lorsque le montant de la mise à prix est contesté, il appartient à celui qui formule cette contestation de rapporter la preuve du bien fondé de celle-ci. Il peut demander au Président de la juridiction compétente la désignation d’un expert à ses frais avancés » ; qu’il résulte de ce texte que la désignation de l’expert relève de la compétence du Président de la juridiction compétente et non du juge des crées ; qu’ainsi, en rejetant la demande de désignation d’un expert au motif qu’elle relève de la compétence de la juridiction des criées, le tribunal n’a violé en rien les dispositions invoquées au moyen ;
Qu’il échet de rejeter également ce moyen comme mal fondé ;
Attendu que la requérante qui a succombé doit être condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Déclare le pourvoi dirigé contre le jugement n°1974 du 11 août 2009 irrecevable ; Déclare le pourvoi dirigé contre le jugement n° 002 bis du le 06 janvier 2009 recevable en
la forme ; Au fond, le rejette ; Condamne Alimatou Sadiya GUEYE épouse DIA aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier