Arrêt N°164/2015 du 17 décembre 2015
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), Première Chambre, de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), a rendu l’arrêt suivant en son audience publique du 17 décembre 2015 où étaient présents :
Messieurs Marcel SEREKOÏSSE-SAMBA, Président
Mamadou DEME, Juge, rapporteur
Vincent Diehi KOUA, Juge
César Apollinaire ONDO MVE, Juge
Robert SAFARI ZIHALIRWA, Juge
Et Maître ASSIEHUE Acka, Greffier ;
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour le 14 juin 2012 sous le numéro
071/2012/PC, formé par la Société des Transports Abidjanais dite SOTRA, société anonyme dont le siège est à Abidjan-Vridi, 01 B.P 2009 Abidjan 01, ayant pour conseils la SCPA DOGUE-Abbé YAO et Associés, avocats à la Cour, 01 B.P 174 Abidjan 01, dans la cause qui l’oppose à la Société de Transformation d’Hévéas, dite SOTHEV Sa, société anonyme dont le siège est à Abidjan, 01 B.P : 178 Abidjan 01,
en cassation de l’arrêt numéro 403 rendu le 9 décembre 2011 par la Cour d’appel
d’Abidjan, dont le dispositif est le suivant : « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ; En la forme :
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Déclare la SOTRA recevable en son appel relevé du jugement civil contradictoire n°1665 rendu le 10 juin 2010 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan ;
Au fond : L’y dit mal fondé ; L’en déboute ; Confirme le jugement querellé en toutes ses dispositions ; Met les dépens à la charge de la SOTRA » ; La société demanderesse invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de
cassation tels qu’ils figurent à sa requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de Monsieur Mamadou DEME, Juge ; Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en
Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA ; Attendu que suivant correspondance numéro 423/2012/G2 en date du 20 juin 2012,
reçue le 26 juin 2012, le Greffier en chef de la Cour a signifié le pourvoi à la défenderesse, qui n’a cependant ni comparu ni été représentée ; qu’il échet d’examiner le pourvoi ;
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que suivant ordonnance
d’injonction de payer n°293/2010 du 22 janvier 2010, la SOTHEV a obtenu la condamnation de la SOTRA au paiement de la somme de 1.458.000.000 F CFA, représentant le prix d’une livraison de matériels de construction et de pièces mécaniques ; que l’opposition formée par la SOTRA a été rejetée par le Tribunal de première instance d’Abidjan, suivant jugement n°1665 du 10 juin 2010 ; que par l’arrêt entrepris, la Cour d’appel d’Abidjan a confirmé ledit jugement ;
Sur les deux moyens de cassation réunis pris de la violation de la loi, notamment
l’article 219 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général et du défaut de base légale résultant de l’insuffisance de motifs
Attendu qu’il est fait grief à la Cour d’appel d’avoir, pour confirmer le jugement
entrepris et conclure que la SOTHEV détient sur la SOTRA une créance certaine, liquide et exigible, retenu « qu’en l’état des pièces versées aux débats notamment des courriers des 19 juin 2009 et 19 mars 2010, il apparait expressément, de façon non équivoque, que la SOTRA se reconnait débitrice vis-à-vis de la SOTHEV », sans dire en quoi ces pièces suffisent à prouver la dette de la SOTRA, alors que :
-d’une part, l’article 219 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général
dispose que "Le vendeur s’oblige, dans les conditions prévues au contrat et au présent livre, à livrer les marchandises et à remettre, s’il y a lieu les documents s’y rapportant, à s’assurer de leur conformité à la commande et à accorder sa garantie » ; qu’il résulte de ces dispositions que la preuve de la vente commerciale doit résulter de la production de bons de commande suffisamment clairs, précis et sans équivoque, et qu’en l’espèce, les seuls extraits de son grand livre comptable ainsi que les correspondances produits par la SOTHEV sont insuffisants pour établir la créance, en l’absence de la production de bons de commande et de livraison, et que,
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-d’autre part, il résulte de la correspondance du 19 juin 2009 susvisée que la SOTRA a simplement accepté une proposition de remise sur le prix futur qui lui a été faite par la SOTHEV et non un engagement ferme à payer un prix arrêté d’accord parties, et qu’il appartenait en conséquence au juge d’appel de rechercher si les négociations entre les parties ont abouti à un prix final, dont les modalités de paiement ont été contractuellement arrêtées ; qu’en s’abstenant de procéder à cette recherche, la Cour d’appel n’aurait pas donné de base légale à sa décision ;
Mais attendu que la preuve des obligations entre commerçants est libre ; que les
moyens ne tendent qu’à remettre en discussions les éléments de preuve de la certitude, de la liquidité et de l’exigibilité de la créance réclamée, souverainement appréciés par les juges du fond ; qu’il échet de les déclarer irrecevables ;
Attendu qu’il convient de condamner la SOTRA qui a succombé aux entiers dépens ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, après en avoir délibéré, Déclare le pourvoi recevable en la forme ; Au fond, le rejette ; Condamne la SOTRA aux entiers dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé
Le Président
Le Greffier