ARRET N°003/2016 du 21 janvier 2016
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 21 janvier 2016 où étaient présents :
Messieurs Abdoulaye Issoufi TOURE, Président, rapporteur Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge
Djimasna N’DONINGAR, Juge
et Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier,
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 08 janvier 2013 sous le n°002/2013/PC et formé par la SCPA DOGUE-Abbé YAO & Associés, Avocats à la Cour demeurant 29, boulevard Clozel 01 BP 174 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de la Banque Internationale pour le Commerce et l’Industrie de la Côte d’Ivoire dite BICICI, société anonyme dont le siège est à Abidjan Plateau, Avenue Franchet d’Esperey, Tour BICICI, 01 BP 1298 Abidjan 01, dans la cause l’opposant à FOLDAH-KOUASSI Yolande, Notaire, demeurant à Abidjan-Plateau, Résidence Bellerive, 01 BP 387, ayant pour conseil Maître NIAMKEY Marie- Irène, Avocat à la Cour, demeurant Immeuble les Acacias 20-22 Boulevard Clozel, 01 BP 5081 Abidjan 01,
en cassation de l’Arrêt n°302 rendu le 20 avril 2012 par la Cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort ;
En la forme :
Déclare Maître FOLDAH KOUASSI Yolande recevable en son appel ;
Au fond L’y dit bien fondée ; Infirme le jugement rendu ;
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Statuant à nouveau :
Déclare la BICICI irrecevable en sa demande de recouvrement de créance initiée contre Maître FOLDAH KOUASSI Yolande ;
La condamne aux dépens. » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation, tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Abdoulaye Issoufi TOURE, Premier vice-président ; Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des
affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’arbitrage de
l’OHADA ; Attendu qu’il résulte de l’examen des pièces de la procédure que le 1er avril 2009, la BICICI
se prévalant d’un contrat de crédit-bail en date du 10 novembre 1998, sollicitait et obtenait une ordonnance faisant injonction à Maître FOLDAH KOUASSI Yolande, de lui payer la somme de 8.580.112 francs outre les intérêts, frais et dépens ; que statuant sur l’opposition, le tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau a, par jugement n°284 du 10 février 2010, déclaré Foldah Kouassi Yolande mal fondée ; que la Cour d’appel d’Abidjan par arrêt dont pourvoi, a infirmé le jugement et déclaré la BICICI irrecevable en sa demande de recouvrement ;
Attendu que le recours a été signifié à Maître NIAMKEY Marie-Irène, Conseil de Maître
FOLDAH KOUASSI Yolande par lettre n°080 du greffier en chef en date du 11 février 2013 ; que cette lettre reçue le 15 février 2013 est demeurée sans suite ; que le principe du contradictoire ayant été respecté, il echet de statuer ;
Sur le second moyen, en sa première branche, tiré du défaut de base légale résultant
de l’absence de motifs Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt déféré une absence de motifs en ce qu’il a affirmé que
« la créance poursuivie à son égard (l’égard de Foldah Kouassi) n’est pas certaine…. qu’il y a lieu d’infirmer le jugement rendu et statuant à nouveau de déclarer irrecevable la BICICI en sa demande de recouvrement de créance initiée contre Maître Foldah-Kouassi Yolande… », sans dire en quoi la recevabilité de l’action de la BICICI était mise en cause en l’espèce ; que la discussion du caractère certain ou non de la créance ne participe pas de la recevabilité de l’action en recouvrement par la voie de la procédure d’injonction de payer ;
Attendu qu’en retenant dans la même motivation le caractère incertain de la créance et
l’irrecevabilité de l’action, l’arrêt querellé a manifestement usé de motifs contraires équivalant à une absence de motifs ; qu’il y a donc lieu de le casser et d’évoquer sans qu’il soit nécessaire d’examiner le premier moyen ;
Sur l’évocation Attendu que par exploit en date du 10 mars 2010, Maître FOLDA KOUASSI Yolande a
relevé appel du jugement n°284 rendu le 10 février 2010 par le Tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau ;
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Attendu qu’au soutien de son appel, Maître FOLDA KOUASSI Yolande par l’organe de
son conseil Maître NIAMKEY Marie-Irène a, in limine litis demandé qu’il soit sursis à statuer au civil en attendant la décision de la juridiction correctionnelle saisie d’une plainte avec constitution de partie civile pour faux ; que la convention de crédit a été signée en son nom par son ex- époux qui ne disposait ni d’un mandat ni d’une procuration émanant d’elle ; qu’elle n’a ni signé la convention ni pris livraison du véhicule et ne saurait être tenue des engagements consécutifs à cette convention ;
Attendu que pour le compte de la BICICI, la SCPA DOGUE, Abbé YAO & Associés a
sollicité que l’appelante soit déclarée irrecevable en sa demande de sursis à statuer s’agissant d’une nouvelle demande ; qu’au regard de la plainte devant la juridiction correctionnelle, la preuve de l’exercice de l’action publique n’est pas rapportée ; qu’en tout état de cause, le sursis ne peut être ordonné que si le civil ne peut être jugé indépendamment de la pièce arguée de faux ; qu’en droit des obligations la validité du contrat résulte entre autres du consentement de la partie qui s’engage et que ce consentement peut être tacite lorsqu’il résulte d’un comportement d’où l’on peut raisonnablement induire la volonté de contracter ; qu’en l’espèce plusieurs éléments attestent de cette volonté de Maître FOLDAH KOUASSI Yolande de s’engager à l’égard de la BICICI ; d’une part les états financiers présentés à la BICICI ainsi que le bilan et le compte de résultats pour l’exercice de 1997 ; et d’autre part elle a signé le procès-verbal du 10 décembre 1998 que le locataire présente au concessionnaire pour la livraison de la voiture ainsi que l’avenant de nantissement d’assurance par lequel le locataire délègue l’indemnité d’assurance au crédit bailleur ; que la BICICI conclut à la confirmation du jugement entrepris ;
Attendu que la mise en œuvre de la procédure d’injonction de payer suppose non seulement
l’existence d’une créance certaine liquide et exigible mais aussi et surtout que cette créance ait une cause contractuelle ou qu’elle résulte de l’émission ou de l’acceptation de tout effet de commerce ou d’un chèque dont la provision s’est révélée inexistante ou insuffisante ; qu’en l’espèce si la première condition est remplie, la seconde ne résulte formellement d’aucune pièce à l’égard de Maître FOLDAH KOUASSI Yolande ; que dès lors en infirmant le jugement querellé, il echet de renvoyer la requérante à mieux se pourvoir ;
Attendu que la BICICI succombant sera condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS Statuant publiquement après en avoir délibéré ; Casse l’arrêt n°302 rendu le 20 avril 2012 par la Cour d’appel d’Abidjan ; Evoquant et statuant sur le fond ; Infirme le jugement querellé et statuant à nouveau ; Dit qu’il n’y a pas lieu à mise en œuvre de la procédure d’injonction de payer ; Renvoie la requérante à mieux se pourvoir ; Condamne la BICICI aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
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Le Président
Le Greffier