Ohadata J-16-215 POURVOI EN CASSATION – VIOLATION DE LA LOI - CASSATION
SAISIE CONSERVATOIRE – RETRACTATION DU TITRE EXECUTOIRE AYANT FONDE LA SAISIE – NON RECHERCHE D’UN AUTRE TITRE EXECUTOIRE DANS LE DELAI IMPARTI : CADUCITE – MAINLEVEE DE LA SAISIE
Constitue une violation de l’article 61 de l’AUPSRVE, pouvant être relevée d’office et donner lieu à cassation, le fait pour une cour d’appel de s’être abstenue de constater la caducité d’une saisie pratiquée le 17 novembre 2010, alors qu’au 20 novembre 2012, date de l’arrêt querellé, le saisissant n'avait pas encore accompli les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire, la seule procédure engagée ayant été l’ordonnance rendue le 13 décembre 2010 mais rétractée par un jugement du 30 mars 2012. Sur l’évocation, il y a lieu de dire que la saisie est caduque et sa mainlevée doit être ordonnée, lorsque, les ordonnances d'injonction de payer l’ayant fondée ont été rétractées sans qu’aucune autre procédure ultérieure n’ait été engagée en vue de l'obtention d'un titre exécutoire pour la conversion de la saisie-conservatoire.
ARTICLE 28 BIS REGLEMENT DE PROCEDURE DE LA CCJA ARTICLE 61 AUPSRVE CCJA, 2ème ch., n° 006/2016 du 21 janvier 2016 ; P. n° 018/2013/PC du 08/02/2013 : Cote d’Ivoire TELECOM c/ Société Groupe Darats, Société Ivoirienne de Banques dite SIB.
ARRET N°006/2016 du 21 janvier 2016
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 21 janvier 2016 où étaient présents :
Messieurs Abdoulaye Issoufi TOURE, Président Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge, rapporteur Djimasna N’DONINGAR, Juge
Et Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier,
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 08 février 2013 sous le n°018/2013/PC et formé par Maître Mireille LOLO, Avocat à la Cour, demeurant, Cocody 2 Plateaux Vallon, résidence VANDA, 3ème étage porte 11, 04 BP 2257 Abidjan 04, agissant au nom et pour le compte de la Société Côte d’Ivoire TELECOM S.A dont le siège social est sis à l’immeuble Postel 2001, Rue le cœur, 17 BP 275 Abidjan 17, dans la cause l’opposant à la Société Groupe DARATS SARL dont le siège est à Abidjan 01 BP 3471 Abidjan 01, ayant pour conseil Maître BLE Martin Avocat à la Cour ? d’Appel d’Abidjan, l0, Avenue du Docteur Crozet, face Ecole Notre Dame Plateau 2ème escalier, 4ème étage,
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en cassation de l’arrêt n°1134/Civ/4ème rendu le 20 novembre 2012 par la Cour d’appel d’Abidjan, dont le dispositif est le suivant :
« ... Statuant publiquement en matière civile et en dernier ressort ; - Déclare recevable l’appel de Cote d’Ivoire Telecom ; - Dit cet appel mal fondé ; - L'en déboute ; - Confirme l’Ordonnance attaquée ; - Met les dépens à la charge de l’appelante ... » ; La requérante invoque à l’appui de son pourvoi le moyen unique de cassation tel qu’il
figure dans sa requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA ;
Attendu qu'il résulte des pièces du dossier de la procédure que la société DARATS, s'estimant créancière de Côte d'Ivoire TELECOM après de vaines procédures d'injonction de payer, pratiquait le 17 novembre 2010 une saisie conservatoire de créances entre les mains de la Société Ivoirienne de Banques pour sûreté de la somme de 68.257.358 FCFA ; que Côte d'ivoire TELECOM excipant de la nullité de l’acte de dénonciation, assignait DARATS aux fins de mainlevée de cette saisie ; que par ordonnance n°378 du 17 mars 2011 Côte d'Ivoire TELECOM sera déboutée ; que sur appel, cette ordonnance sera confirmée par l'arrêt n°1134 du 20 novembre 2012 de la Cour d'appel d'Abidjan, arrêt objet du présent pourvoi ;
Sur le moyen soulevé d'office, tiré de la violation de l'article 61 de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution.
Attendu que cet article stipule que « si ce n'est dans le cas où la saisie a été pratiquée avec un titre exécutoire, le créancier doit, dans le mois qui suit ladite saisie, à peine de caducité, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire... » ; qu'en l'espèce la saisie ayant été pratiquée le 17 novembre 2010, le saisissant n'avait pas encore le 20 novembre 2012, date de l'arrêt querellé, accompli les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire ; que la seule procédure engagée a été l’ordonnance n°137/2010 rendue le 13 décembre 2010 mais rétractée par le jugement n°254 rendu le 30 mars 2012 ; que dès lors l’arrêt querellé se devait de constater la caducité de la saisie ; qu’ il échet donc de le casser et d'évoquer ;
Sur l'évocation
Attendu que par exploit en date du 25 mars 2011, la Société Côte d'Ivoire TELECOM a interjeté appel de l'ordonnance n°378 du 17 mars 2011, l'ayant déboutée de sa demande de mainlevée de la saisie conservatoire ;
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Attendu qu'au soutien de l'appel Côte d'ivoire TELECOM expose d'une part que la saisie est caduque et d'autre part que la créance de 68.257.358 F n'est pas fondée ; qu'en effet l'acte de dénonciation ne comporte pas les mentions de l'article 79 de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution qui sont prescrites à peine de nullité ; que par rapport à la créance elle-même, le tribunal a, par jugement n°4953 du 28 janvier 2009, déclaré l'opposition contre une ordonnance d'injonction de payer bien fondée et rétracté ladite ordonnance au motif que la créance ne remplissait pas les caractères de certitude, de liquidité et d'exigibilité ; qu’elle conclut à l'infirmation de la décision attaquée ;
Attendu qu'en réplique DARATS a exposé que la créance a fait l'objet d'une ordonnance d'injonction de payer signifiée le 19 janvier 2011 qui n'a jamais fait l’objet d'une opposition ; que la créance est incontestable même si la résistance abusive de sa cocontractante a empêché l'établissement d'un avenant ;
Attendu qu'il ressort des pièces, contrairement aux allégations de l’intimé, que par des jugements n°4953 et 254 en date des 28 janvier 2009 et 30 mars 2012, les ordonnances d'injonction de payer rendues en faveur de DARATS ont été rétractées ; qu'après ces procédures, aucune autre n'a été engagée en vue de l'obtention d'un titre exécutoire pour la conversion de la saisie-conservatoire ; que dès lors il échet de dire que la saisie du 17 novembre 2010 est caduque et mainlevée doit en être ordonnée, par l’infirmation de l'ordonnance querellée ;
Attendu que la Société DARATS ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
Casse l'arrêt n°1134 du 20 novembre 2012 de la Cour d'appel d'Abidjan ;
Evoquant et statuant au fond,
Infirme l’ordonnance n°378 du 17 mars 2011 ;
Statuant à nouveau,
Déclare la saisie-conservatoire du 20 novembre 2010 caduque, en ordonne la mainlevée ;
Condamne la Société DARATS aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier