Pourvoi : n° 140/2016/ PC du 04/07/2016
Arrêt N° 091/2018 du 26 avril 2018
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), première chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 26 avril 2018 où étaient présents :
Madame Flora DALMEIDA MELE, Présidente, rapporteur
Messieurs Marcel SEREKOISSE SAMBA, Juge
Robert SAFARI ZIHALIRWA, Juge
et Maître Edmond Acka ASSIEHUE, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 04 juillet 2016 sous n°140/2016/ PC et formé par Maître Roch-Joachim KOMENGUE, Avocat à la Cour, rue de la Victoire, BP 2427 Bangui RP agissant au nom et pour le compte de la Banque Populaire Maroco-Centrafricaine SA dont le siège social est à Bangui rue Guérillot, BP 844 Bangui RP, agissant aux poursuites et diligences de son Directeur Général, dans la cause l’opposant à la société SANINE SARL, dont le siège social B. BOGANDA, BP 3027 Bangui et la société AMIGOS SA dont le siège social est à Bangui, avenue B. BOGANDA, BP 482 Bangui, Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que la société SANINE SARL est débitrice dans les livres de la Banque Populaire MarocoCentrafricaine de la somme 437.114.311 FCFA dont le remboursement est garanti par la société AMIGOS S.A qui s'est portée caution en hypothéquant son immeuble objet du Titre Foncier 1210 ; que faute de paiement de sa créance devenue exigible, la Banque a entrepris contre sa débitrice, ainsi que la caution, une procédure de saisie immobilière portant sur l’immeuble ; que le 14 avril 2014, un commandement de saisie immobilière a été servi à la société SANINE SARL dans le même acte, et le même jour, il a été fait sommation à la société AMIGOS de payer l'intégralité de la créance, en principal et intérêts ; que faute de réaction de leur part, la Banque a fait servir un commandement afin de saisie ; qu’après rédaction et dépôt du cahier des charges au greffe du Tribunal de grande instance de Bangui, la banque a sommé ses débiteurs à prendre communication du cahier de charges afin d’y insérer tous les dires et observations jusqu’au cinquième jour précédent l’audience éventuelle fixée au 18 juin 2014 sous peine de déchéance ; qu’à la date de l’audience éventuelle, les dires et observations n’ont pas été déposés et la date de l’audience d’adjudication a été fixée au 30 juillet 2014 ; qu’à l’audience d’adjudication tenue le 1er octobre 2014, la banque a été déclarée adjudicataire de l’immeuble hypothéqué ; que sur appel formé par les deux sociétés contre le jugement d’adjudication, la Cour d’appel de Bangui a , par arrêt du 12 décembre 2014, déclaré irrecevable ledit appel ; qu’entretemps, la société SANINE SARL et la société AMIGOS SA ont saisi, le 20 mai 2014, le Tribunal de grande instance de Bangui, statuant en référé, respectivement d'une requête aux fins d'annulation de l'exploit du commandement de saisie immobilière et d’une requête en annulation de l’acte de sommation de prendre communication du cahier des charges ; que par deux ordonnances de référé rendues le 23 Juin 2014, le Juge de référé a débouté les deux sociétés de leur demande ; que sur les appels distincts des deux sociétés, la Cour d'appel de Bangui, statuant en matière de référé, a ordonné la jonction des deux procédures par arrêt avant dire droit n°112 du 15 mars 2016 et, statuant en matière de référé sur celles-ci, a rendu le 12 avril 2016, l’arrêt N°090 ; que le recours est dirigé contre les deux arrêts précités ;
Sur le moyen soulevé d’office tiré de la violation de l’article 299 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution
Attendu que l’article 299 de l’Acte uniforme sus indiqué dispose : « les contestations ou demandes incidentes doivent, à peine de déchéance, être soulevées avant l’audience éventuelle. Toutefois, les demandes fondées sur un fait ou acte survenu ou révélé postérieurement à cette audience et celles tendant à faire prononcer la distraction de tout ou partie des biens saisis, la nullité de tout ou partie de la procédure suivie à l’audience éventuelle ou la radiation de la saisie, peuvent encore être présentées après l’audience éventuelle, mais seulement, à peine de déchéance, jusqu’au huitième jour avant l’adjudication. » ; qu’il résulte de cet article que seul le juge de l’audience éventuelle est compétent pour connaître des incidents ou demandes en matière de saisie immobilière formulés avant ladite audience, et que les demandes sur des faits intervenus après l’audience éventuelle doivent être présentées à peine de déchéance, huit jours avant l’audience d’adjudication ;
Attendu que les arrêts n°112 du 15 mars 2016 et N°090 du 12 avril 2016 contre lesquels un recours est formé devant la Cour de céans ont été rendus par le juge d’appel statuant en référés à la suite des requêtes introduites auprès du Tribunal de grande instance de Bangui, statuant en référé, aux fins d'annulation de l'exploit du commandement de saisie immobilière d’une part, et , d’autre part, d’annulation de l’acte de sommation de prendre communication du cahier des charges ; que ces demandes sont des contestations ou incidents en matière de saisie immobilière et doivent être présentées au juge de l’audience éventuelle, s’agissant des faits ou actes intervenus à partir du commandement jusqu’à l’audience éventuelle et, pour ceux intervenus à partir de l’audience éventuelle, ils doivent être présentés au juge huit jours avant l’audience d’adjudication ; que par ailleurs, l’adjudication intervenue a purgé toutes les irrégularités qui n’ont pu être invoquées en leur temps devant le juge compétent ; qu’en l’espèce, les décisions rendus en première instance par le juge des référés et en appel par le juge d’appel statuant en référé l’ont été par des juridictions incompétentes et encourent en conséquence annulation ;
Attendu qu’ayant succombé, les sociétés SANINE SARL et AMIGOS SA doivent être condamnées aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Déclare incompétent le juge des référés ;
Annule par conséquent les arrêts n°112 du 15 mars 2016 et N°090 du 12 avril 2016 rendus par la Cour d'appel de Bangui, statuant en matière de référé ;
Condamne les sociétés SANINE SARL et AMIGOS SA aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
La Présidente
Le Greffier