Audience publique du 13 décembre 2018
Pourvoi:n°118/2015/PC du 13/07/2015
Affaire: Monsieur Ismaël BAKARY
(Conseil : Maître Cyprien F. Koffi HOUNKANRIN, Avocat à la Cour)
Contre
1-La Société Central Park
(Conseils : SCPA KONE-N’GUESSAN-KIGNELMAN, Avocats à la Cour)
2-Monsieur GUEYE Aliou
3-Monsieur BAH Abdoulaye
Arrêt N° 252/2018 du 13 décembre 2018
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du13 décembre 2018 où étaient présents:
Messieurs:
Mamadou DEME, Président
Idrissa YAYE, Juge
Fodé KANTE, Juge, rapporteur
Madame Afiwa-Kindéna HOHOUETO, Juge
Monsieur Arsène Jean Bruno MINIME, Juge
et Maître Jean-Bosco MONBLE, Greffier,
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 13juillet 2015 sous le n°118/2015/PC et formé par Maître Cyprien F. Koffi HOUNKANRIN, Avocat à la Cour, demeurant, Boulevard de la République-Angle, 2 Avenue LAMBLIN, Immeuble «LE SIGNAL», 2ème étage, Abidjan Plateau, 04 B.P 386 Abidjan 04, agissant au nom et pour le compte de Monsieur Ismaël BAKARY, de nationalité nigériane, commerçant domicilié à Abidjan, Commune de Koumassi, quartier Remblais, 05 BP 830 Abidjan 05,
dans la cause l’opposant à la Société Central Park, SA dont le siège social est au 18, Boulevard de la République, Angle Avenue Franchet d’Esperey, 01 BP 498 Abidjan 01, représentée par Madame Roselin FAWAZ, sa Directrice générale, ayant pour Conseils la SCPA KONE-N’GUESSAN-KIGNELMAN, Avocatsà la Cour, dont l’étude est sise au Plateau, Avenue Lamblin, Immeuble Bellerive, 4ème étage, Appartement 16, 01 BP 6421 Abidjan 01,
Monsieur GUEYE Aliou, commerçant de nationalité sénégalaise, domicilié à Abidjan, Commune de Treichville et exerçant à l’immeuble Central Park, et Monsieur BAH Abdoulaye, commerçant de nationalité guinéenne, domicilié à Abidjan, Commune de Yopougon et exerçant à l’immeuble Central Park, en cassation du Jugement RGn°2047/2014 rendu le 24 décembre 2014 par le Tribunal de commerce d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant:
«PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement, en premier et dernier ressort; Déclare la société CENTRAL PARK recevable en son action; Déclare Monsieur GUEYE ALIOU recevable en sa demande reconventionnelle;
Constate la non conciliation des parties;
Dit la société CENTRAL PARK partiellement fondée en son action;
Prononce la résiliation du contrat de bail liant les parties;
Ordonne l’expulsion des défendeurs des lieux qu’ils occupent tant de leurs personnes, de leurs biens que de tous occupants de leurs chefs;
Condamne monsieur GUEYE ALIOU à payer la somme de deux millions de francs (2.000.000F) CFA et monsieur ISAMAEL BAKARY à payer la somme sept million huit cent quarante-quatre mille quatre cent quarante cinq francs (7.844.445 F) CFA à titre de loyers échus et impayés à la société CENTRAL PARK;
La déboute du surplus de ses demandes;
Dit monsieur GUEYE ALIOU mal fondé en sa demande reconventionnelle;
L’en déboute;
Dit qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire de la présente décision;
Condamne les défendeurs aux dépens.»;
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi le moyen unique de cassation, tel qu’il figure dans sa requête annexée au présent arrêt;
Sur le rapport de Monsieur Fodé KANTE, Juge;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que courant année 2004, la société Central Park a consenti à Monsieur Ismaël BAKARY, un bail à usage commercial sur un local appelé «centre commercial Grâce Divine» sis à l’Immeuble Central Park, 18, Boulevard de la République, Angle Avenue Franchet d’Esperey, Abidjan, moyennant un loyer trimestriel de 2.000.000 FCFA ; qu’estimant que ce locataire lui restait devoir la somme de 11000000 F CFA représentant plusieurs termes de loyers échus et impayés, et soutenant aussi que le dit locataire avait sous-loué une partie des lieux loués à des tiers, sans son autorisation, la bailleresse a signifié à celui-ci, ainsi qu’à d’autres locataires se trouvant dans la même situation, par exploit du 20 mai 2014, une mise en demeure d’avoir à respecter les clauses et conditions du contrat de bail commercial les liant; que cette mise en demeure étant restée sans suite, la bailleresse a assigné Monsieur Ismaël BAKARY et deux autres par devant le Tribunal de commerce d’Abidjan aux fins de résiliation des contrats de bail commercial les liant, aux fins de résiliation et d’expulsion des locaux qu’ils occupent tant de leurs personnes, de leurs biens que de tous occupants de leur chef, et en paiement des arriérés de loyers échus et non payés ; qu’à la date du 24 décembre 2014, le Tribunal de commerce d’Abidjan a rendu le jugement RGn°2047/2014 dont pourvoi;
Attendu que par lettres n°943/2015/G2 du 04 août 2015, reçue le 27 août 2015 par Maître YAPI KOTCHI Pascal, Conseil de Monsieur GUEYE Aliou, défendeur au pourvoi, et n°944/2015/G2 du 04 août 2015,reçue le 19 août 2015par Maître COULIBALY Tiémogo, Conseil de Monsieur BAH Abdoulaye, défendeur au pourvoi, le greffier en chef de la Cour de céans a notifié le recours auxdits défendeurs qui n’ont pas déposé de mémoire en réponse dans le délai de trois mois qui leur était imparti; que le principe du contradictoire ayant ainsi été respecté, il y a lieu d’examiner le présent recours; Sur l’exception d’irrecevabilité de la première branche du moyen unique de cassation tirée de l’incompétence du Tribunal de commerce d’Abidjan
Attendu que dans son mémoire en réponse reçu le 16 octobre 2015 au greffe de la Cour de céans, la Société Central Park soulève l’irrecevabilité de la première branche du moyen unique de cassation tirée de l’incompétence du juge du fond à ordonner la résiliation d’un bail et l’expulsion du preneur, motif pris de ce que ce moyen n’a ni été soulevé devant le Tribunal de commerce d’Abidjan ni été débattu devant ce tribunal; qu’il s’agit donc, selon le recourant, d’un moyen nouveau qui ne peut être soulevé pour la première fois en cassation;
Attendu en effet, que cette incompétence matérielle du Tribunal de commerce d’Abidjan aurait même dû être soulevée devant celui-ci avant toute défense au fond, à peine d’irrecevabilité ; qu’étant soulevé pour la première fois en cassation, il s’ensuit que cette première branche du moyen unique de cassation doit être déclarée irrecevable ;
Deuxième branche
Attendu que la deuxième branche du moyen unique de cassation est tirée de l’absence des conditions prescrites par l’article 133 précité pour ordonner l’expulsion, notamment du défaut d’arriérés de loyers, en ce que les loyers réclamés portent d’une part, sur une période d’occupation effective du local par le locataire, couvrant les quatre trimestres de 2013 et les trois trimestres de 2014, dont une partie des loyers dus a servi au paiement entre les mains de l’Administration fiscale suite à la notification d’un Avis à Tiers Détenteur, le reliquat ayant été apuré au jour du prononcé du jugement, de sorte qu’à cette date, selon le moyen, le recourant ne devait plus rien à Central Park, et d’autre part, sur la période non occupée par ledit locataire allant du 23 octobre 2013 au 02 janvier 2014 correspondant à son expulsion des lieux jugée définitivement irrégulière et abusive par la cour d’appel ; que sur ce point, selon le moyen, « le Tribunal de Commerce a bien jugé en retranchant des loyers réclamés le montant couvrant une période au cours de laquelle le preneur n’avait pas occupé les lieux du fait de son expulsion irrégulière par la bailleresse ;
Que cependant, le Tribunal de commerce a fondé sa décision sur les réclamations de la bailleresse qui réclamait 17.000.000 F CFA au titre des arriérés de loyers alors que cette somme n’était nullement due et ne correspondait pas, de surcroit, à la période considérée à savoir les quatre trimestres de 2013 et les trois trimestres de 2014 dont le total, en termes de loyers, devrait faire 14.000.000 F CFA en raison de 2.000.000 F CFA par trimestre ; » ;
Attendu qu’il apparaît des développements ci-avant, que le recourant sollicite le réexamen en cause de cassation, des faits souverainement appréciés par le premier juge dans la décision attaquée ; que le juge de cassation ne pouvant exercer son contrôle sur de telles appréciations, il y a lieu de rejeter le moyen unique en sa deuxième branche ;
Attendu que Monsieur Ismaël BAKARY ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Déclare le recours recevable en la forme ;
Au fond, le rejette comme étant mal fondé ;
Condamne le requérant aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier