ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Première chambre
Audience publique du 27 mai 2021
Pourvoi : n°183/2020/PC du 15/07/2020
Affaire : Messieurs Ae A et Ab B
(Conseil : Maître N’DJELLE Abby Edah, Avocat à la Cour)
Contre
Société Coris Bank International Togo SA
(Conseils : Maître AGBEKPONOU KOUEVI et FOLI Jean DOSSEY, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 106/2021 du 27 mai 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour
l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première chambre,
Deuxième formation, présidée par Monsieur Sabiou MAMANE NAÏSSA, assisté
de Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier, a rendu en son audience publique
ordinaire du 27 mai 2021 l’Arrêt dont la teneur suit, après délibération du collège
de juges composé de :
Messieurs : Ac Ad X MVE Président,
Fodé KANTE Juge, rapporteur,
Sabiou MAMANE NAÏSSA, Juge,
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans sous le n°183/2020/PC du 15 juillet 2020 et formé par Maître N’DJELLE Abby Edah, Avocat à la Cour, Rue de la Gare Routière d’Agbalépedo (Immeuble jaune à étage situé à 500 mètre à droite à partir de la fin des pavés) B.P. 30 225 Lomé, agissant au nom et pour le compte de messieurs Ae A et Ab B, administrateurs, syndics, près la Cour d’appel de Lomé, tous demeurants et domiciliés à Lomé, 01 BP 771 Lomé, quartier Baguida, Route du Catimini, dans la cause qui les oppose à la société Coris Bank International Togo SA ayant son siège à Lomé, Boulevard du 13 janvier, BP : 4032 Lomé, représentée par son Directeur Général, demeurant et domicilié audit siège, ayant pour conseils Maîtres AGBEKPONOU Kouevi et Jean Foli DOSSEY,
Avocats à la Cour, demeurant respectivement à Lomé (Togo), Angle 10 Avenue du 24 janvier, 317 Rue Jeanne d’Arc, et 14, Rue des Sabliers,
en révision de l’arrêt n°122/2020 du 09 avril 2020 rendu par la Cour de céans, dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Déclare le pourvoi formé par messieurs Ae A et Ab B, irrecevable ;
Les condamne aux dépens… »
Les demandeurs invoquent au soutien de leur recours le motif unique tel qu’il figure à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de monsieur Fodé KANTE, Juge ;
Vu le Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’'OHADA ;
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure, qu’à la suite de
l’ordonnance présidentielle n°3384/2018 du Tribunal de première instance de
première classe de Lomé, en date du 10 décembre 2018, portant adjonction à
monsieur C Af Aa, déjà désigné comme syndic de la
société Nouvelle SOTOCOG S.A, de deux autres syndics, à savoir messieurs
Ae A et Ab B, le Juge commissaire a, par ordonnance
n°3411/2018 réparti les tâches des trois mandataires ; que sur opposition de la
société Coris Bank International Togo S.A, le tribunal a annulé ladite ordonnance
et les requérants ont saisi la Cour d’appel de Lomé qui a rendu le 20 juin 2019,
l’arrêt n°046/19 ; que subséquemment saisie en cassation contre cet arrêt, la Cour
de céans a rendu l’arrêt n°122/2020 du 09 avril 2020, objet du présent recours en
révision ;
Sur la recevabilité du recours
Vu l’article 49 du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice
et d’Arbitrage ;
Attendu que pour demander la révision de l’arrêt sus indiqué, les requérants
allèguent que pour donner suite au courrier en date du 05 novembre 2019,
réceptionné le 21 novembre 2019, par lequel la Cour de céans invitait leur conseil
à régulariser son pourvoi, dans un délai de 15 jours à compter de la réception dudit
courrier, en produisant le mandat spécial à lui donné par ses clients, celui-ci a bien
envoyé par DHL le 26 novembre 2019, ledit mandat spécial requis ; que contre
toute attente, ils ont reçu signification en date du 19 mai 2020, copie de l’arrêt
n°122/2020 rendu le 09 avril 2020 par la Cour de céans déclarant leur pourvoi
irrecevable « au motif que leur conseil a été invité à régulariser le recours par la production du mandat spécial qu’ils lui ont remis pour les représenter, mais ne l’a pas fait ; » ; que cependant, comme en atteste le récépissé dûment signé le 26 novembre 2019 par monsieur le Greffier en chef de cette Cour, leur conseil a bel et bien régularisé le pourvoi en envoyant par DHL le mandat spécial à lui réclamé ; qu’ainsi, pour eux, l’absence de cette pièce maîtresse dans le dossier de la Cour de céans serait due à un dysfonctionnement du Greffe de cette Cour qui aurait omis de transmettre ladite pièce à la Cour ; qu’un tel dysfonctionnement ne saurait leur être préjudiciable ; que selon eux, il ne fait l’ombre d’aucun doute que le défaut de transmission à la Cour de céans, par son Greffe, du mandat spécial donné à leur conseil pour les représenter par-devant la Cour, a eu un impact décisif sur l’arrêt n°122/2020 rendu par ladite Cour le 09 avril 2020 ; qu’il est aussi évident que ce fait n’était connu ni des demandeurs qu’ils sont, ni de la Cour de céans avant son arrêt précité ; qu’ils demandent donc à la Cour de constater l’existence d’un fait ayant les caractères qui donnent lieu à l’ouverture d’une procédure de révision et de déclarer de ce chef la demande recevable conformément à l’article 49 du Règlement de procédure de la CCJA ;
Attendu que la Coris Bank International Togo SA, défenderesse au recours, a, par mémoire en défense, invité la Cour de céans à dire ce que de droit sur la recevabilité, en la forme et au principal, mais de constater que les demandeurs n’ont pas rapporté la preuve de la réception du mandat spécial par le Greffe de la Cour de céans, et qu’il n’existe aucun fait de nature à exercer une influence décisive sur le prononcé de l’arrêt, inconnu de la Cour et donnant lieu à ouverture en révision de l’arrêt n°122/2020 du 09 avril 2020, rendu par la Cour de céans, et en conséquence, déclarer irrecevable le recours en révision, rejeter le pourvoi, et confirmer l’arrêt n°122/2020 du 09 avril 2020, en toutes ses dispositions ; qu’elle demande subsidiairement, si la Cour de céans venait à rendre un arrêt ouvrant la procédure de révision de son arrêt n°122/2020, de suborner l’ouverture de cette révision à l’exécution provisoire de l’arrêt attaqué, conformément au point 3 de l’article 49 du Règlement de procédure, de prendre en considération les moyens de fond de la défenderesse exposés dans son mémoire en réplique du 10 mars 2020 et de condamner les demandeurs aux entiers dépens distraits au profit des maîtres Kouévi AGBEKPONOU et Jean Foli DOSSEY, Avocats aux offres de droit ;
Attendu que l’article 49 du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage dispose : « 1. La révision de l’arrêt ne peut être demandée à la Cour qu’en raison de la découverte d’un fait de nature à exercer une influence décisive et qui, avant le prononcé de l’arrêt, était inconnu de la Cour et de la partie qui demande la révision.
2. La procédure de révision s’ouvre par un arrêt de la Cour constatant
expressément l’existence d’un fait nouveau, lui reconnaissant les caractères qui
donnent ouverture à la révision et déclarant de ce chef la demande recevable.
4. La Cour peut subordonner l’ouverture de la procédure en révision à
l’exécution préalable de l’arrêt. (.…) » ;
Attendu que l’article 50.1 du même Règlement de procédure précise que
«les dispositions des articles 23 et 27 du présent Règlement de procédure sont
applicables à la demande en révision. Celle-ci doit en outre contenir les
indications nécessaires pour établir que les conditions fixées à l’article 49 sont
remplies. » ;
Attendu qu’en l’espèce, les requérants versent au dossier de la procédure le reçu n°0229181 en date du 26 novembre 2019 délivré par DHL pour la prise en charge du pli contenant le mandat spécial envoyé, ainsi qu’un récépissé attestant la réception dudit pli par monsieur le Greffier en chef de la Cour de céans à la même date ; que l’existence et l’authenticité de ces documents n’étant nullement contestées, ils constituent un fait nouveau, inconnu de la Cour et des sieurs Ae A et Ab B demandeurs à la révision ; qu’il est indubitable que s’il était connu de la Cour avant le prononcé de son arrêt dont révision est sollicitée, ce fait aurait exercé une influence décisive ; que sa découverte donne donc ouverture à la procédure de révision de l’arrêt attaqué ; qu’il échet en conséquence de déclarer la demande en révision recevable ;
Sur la subordination de l’ouverture de cette révision à l’exécution
provisoire de l’arrêt attaqué
Attendu que la Coris Bank International Togo SA sollicite que l’ouverture
de la procédure de révision de l’arrêt n°122/2020 du 09 avril 2020 soit
subordonnée à l’exécution provisoire de cet arrêt ;
Mais attendu qu’à l’appui de cette demande, la défenderesse ne se prévaut
d’aucun motif permettant à la Cour de justifier une telle mesure ; qu’au
demeurant, cette Cour qui ne s’est prononcée que sur la recevabilité du pourvoi
en cassation dans l’arrêt dont la révision est sollicitée, ne saurait en trouver un,
faute d’avoir abordé le fond ; que dès lors, il échet pour la Cour de céans de rejeter
cette demande ;
Sur la prise en considération des moyens de fond de la défenderesse
exposés dans son mémoire en réplique du 10 mars 2020 et sur la
condamnation des demandeurs aux entiers dépens
Attendu qu’en l’état, il y a lieu de surseoir à l’examen de ces deux demandes
qui touchent directement le fond de la procédure de révision et, par là-même,
réserver les dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Constate l’existence d’un fait nouveau au sens des dispositions de l’article 49 du Règlement de procédure de la Cour de céans ;
En conséquence :
Déclare recevable la demande en révision formée par messieurs Ae
A et Ab B ;
Ouvre la procédure de révision de l’arrêt n°122/2020 rendu par la Cour de céans le 09 avril 2020 ;
Dit qu’en vue de l’examen au fond de la demande de révision, invite messieurs Ae A et Ab B à parfaire leur demande dans un délai de deux mois, à compter de la date de notification du présent arrêt, CORIS BANK INTERNATIONAL TOGO SA disposant du même délai pour y répliquer, à compter de la notification du mémoire des requérants ;
Rejette la demande de subordination de l’ouverture de la révision ordonnée à l’exécution provisoire de l’arrêt attaqué ;
Sursoit à statuer sur la demande de la défenderesse tendant à la prise en considération des moyens de fond exposés dans son mémoire en réplique du 10 mars 2020 et à la condamnation des demandeurs aux entiers dépens ;
Réserve les dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier