ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(O.H.A.D.A)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(C.C.J.A)
Première chambre
Audience publique du 03 juin 2021
Pourvoi : n° 305/2020/PC du 14/10/2020
Affaire : Société Ivoirienne de Concept et de Gestion (Conseils Maîtres Landry Anastase BAGUY, Jean Charles DICKO et Alain Claude KAKOU, Avocats à la Cour)
Contre
Banque Malienne de Solidarité (BMS-SA) (Conseils : Cabinet BRYSLA Conseils, Avocats à la Cour) Mali (SICG-Ma)i)
TCHIKAYA, Ah Aa Arrêt N° 115/2021 du 03 juin 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), Première chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 03 juin 2021 où étaient présents :
Monsieur : César Apollinaire ONDO MVE, Président, rapporteur
Mesdames : Afiwa-Kindéna HOHOUETO, Juge
Esther Ngo MOUTNGUI IKOUE, Juge
et Maître : Jean Bosco MONBLE, Greffier ;
Sur le recours enregistré sous le n°305/2020/PC du 14 octobre 2020 formé par Maîtres Landry Anastase BAGUY, Avocat à la Cour, demeurant à Aj Ak Ad, Riviera 2 Sogefiha, Rue Ab Ai, Villa n°525, 04 BP 1023 Abidjan 04, Maître Jean Charles TCHIKAYA, Avocat à la Cour, demeurant au 15 Cours Georges Clémenceau-33 000 Bordeaux, Maître Hamadoun DICKO, Avocat à la Cour, demeurant au 65, Rue 139, Ae X A, BP E627, et Maître Alain Claude KAKOU, Avocat à la Cour, demeurant à Abidjan, Plateau, Immeuble Eden, 12°" étage, porte 124, 04 BP 948 Abidjan 04, agissant au nom et pour le compte de la Société Ivoirienne de Concept et de Gestion Mali dite SICG-Mali, ayant son siège à Bamako, Mali, dans la cause qui l’oppose à la Banque Malienne de Solidarité, en abrégé BMS-SA, ayant son siège à Bamako, Af B 2000BP E 1280, ayant pour conseil le Cabinet BRYSLA, Avocats à la Cour, demeurant … 378, porte 1230, Ag Y, Bamako,
en cassation de l’arrêt n°46/20 rendu le 24 juin 2020 par la Cour d’appel de Bamako et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en dernier ressort ;
En la forme : reçoit l’appel par la SICG -Mali Sarl ;
Au fond : confirme e jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Met les dépens à la charge de l’appelante. » ;
La requérante invoque à l’appui de son recours les quatre moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent Arrêt ;
Sur le rapport de monsieur César Apollinaire ONDO MVE, Président ;
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’'OHADA ;
Attendu que selon la décision attaquée, par arrêt n° 068/2019 en date du 14 mars 2019, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l'OHADA condamnait la Banque Malienne de Solidarité, en abrégé la BMS, anciennement Banque de l’Habitat du Mali, à payer à la Société Ivoirienne de Concept et de Gestion Mali dite SICG-Mali, la somme de 16 007 365 960 FCFA, en réparation de divers chefs de préjudices par elle subis dans la mise en œuvre de leur contrat de partenariat daté du 6 novembre 2000 ; que postérieurement, soit le 25 juillet 2019, la BMS s’estimait aussi créancière de la SICG-Mali d’une somme de 22 448 400 046 FCFA et établissait unilatéralement une « note de compensation » en vertu de laquelle elle dégageait en sa faveur un solde de 2 145 641 330 FCFA dont elle poursuivait le paiement en assignant, par exploit du 20 août 2019, la SICG-Mali par devant le Tribunal de commerce de Bamako ; que par jugement n°0819 rendu le 30 octobre 2019, le Tribunal ordonnait la compensation entre la créance de la BMS et celle de la SICG-Mali et enjoignait à cette dernière, qu’il déclarait débitrice de la BMS la somme de 2 145 641 330 FCFA, de cesser tous actes de poursuite sur la base du titre de créance compensé ; que sur appel de la SICG- Mali, la Cour de Bamako rendait l’arrêt confirmatif dont pourvoi ;
Sur la compétence de la Cour
Attendu que la BMS-SA soulève l’incompétence de la Commune de Justice et d’Arbitrage de l’'OHADA, motif pris de ce que l’arrêt entrepris par la Cour d’appel de Bamako ne soulève aucune question relative à l’application ou à l’interprétation du Traité de l'OHADA, des règlements pris pour son application ou des actes uniformes, la décision déférée ayant statué uniquement sur des questions de droit interne relatives respectivement à la loi malienne n°08-005 du 08 février 2008 créant un privilège général pour garantir les créances de la BHM, à la loi malienne n°87-31/AN-RM du 29 août 1987 portant Régime Général des Obligations, et à la loi malienne portant livre de procédure fiscale ; qu’il en résulte selon elle que les conditions de la compétence de la CCJA, telles que fixées par l’article 14 du traité précité, ne sont pas réunies, et qu’elle doit par conséquent se déclarer incompétente pour connaitre du présent recours ;
Attendu cependant qu’aux termes de l’alinéa 3 de l’article 14 du Traité de l’OHADA précisément visé par le moyen, « saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des actes uniformes et des règlements prévus au présent Traité à l’exception des décisions appliquant les sanctions pénales » ;
Attendu qu’en l’espèce, il ressort des affirmations mêmes de la BMS-SA que la cour d’appel a, dans son arrêt déféré, statué sur des questions relatives à la loi malienne n°08-005 du 08 février 2008 créant un privilège général en faveur de la BHM pour sécuriser ses créances ; que le régime dudit privilège relève de l’Acte uniforme du 17 avril 1997 portant organisation des sûretés, applicable en la cause ; que cet Acte uniforme prévoit en son article 106 alinéa 2 que des textes spéciaux peuvent créer des privilèges généraux dont ils déterminent le rang par rapport à celui édicté par l’article 107 ; que l’arrêt entrepris ayant appliqué la loi créant le privilège général en faveur de la BHM devenue la BMS, l’affaire soulève des questions relatives à l’application de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés et relève de ce fait du champ de compétence de la CCJA telle que fixé par les dispositions de l’article 14 du Traité susvisé ; qu’il y a donc lieu pour la Cour de céans de rejeter l’exception soulevée comme non fondée et, par voie de conséquence, de se déclarer compétente ;
Sur le deuxième moyen tiré de la violation de la loi
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué la violation de l’article 235 du Régime Général des Obligations, en ce que la cour d’appel, bien qu’ayant repris ce texte, a paradoxalement ordonné la compensation qui n’est pas autorisée lorsque l’une des dettes invoquées a pour objet la restitution d’une chose dont le propriétaire a été injustement dépouillé, d’un dépôt ou des aliments légalement déclarés insaisissables ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a, selon le moyen, violé la loi et son arrêt encourt par conséquent la cassation ;
Attendu que pour ordonner valablement une compensation, la cour d’appel devait préalablement démontrer l’existence de créances réciproques entre les parties ; que cette démonstration concernait surtout la prétendue créance de la BMS SA sur la SICG Mali qui la conteste, et ne s’imposait pas relativement à la créance de la SICG-Mali sur la BMS SA résultant d’un arrêt de la CCJA ; que sans effectuer cette démarche, la cour d’appel s’est fondée sur la note de compensation et l’état exécutoire produits par la BMS SA en vertu de la loi n°08- 005 du 08 février 2008 ; que cependant, la loi précitée autorise la BMS SA à garantir ses propres créances sans pour autant la dispenser de la preuve de l’existence effective de l’obligation qu’elle invoque lorsqu’elle est, comme c’est le cas, contestée ; que le législateur malien ne pouvait, sans cautionner l’arbitraire et l’insécurité, réduire la preuve des créances de la BHM, devenue BMS SA, à la preuve de l’acte de garantie que ladite banque peut unilatéralement dresser ; qu’un acte de sureté ne saurait exclure le devoir de celui qui se prétend créancier d’établir la preuve de l’existence de la créance objet de ladite garantie ;
Attendu, à cet égard, qu’il ressort de l’arrêt n° 068/2019 de la CCJA que les sommes mises à la charge de la BMS-SA au profit de la SICG Mali, représentent des recettes, majorées d’intérêts, non reversées au titre du contrat ayant lié les parties ; qu’ainsi, cet arrêt ordonne une restitution visant à rétablir la SICG Mali dans les droits dont elle a été injustement privée ; que selon l’article 235 du Régime Général des Obligations, la compensation n’a pas lieu si l’objet de la dette est la restitution d’une chose dont le titulaire a été à tort dépouillé ; que la SICG Mali a été abusivement privée de ses droits contractuels par la BMS-SA ; que par l’effet de l’article 235 précité, sa créance n’est pas éligible à la compensation avec une quelconque créance alléguée par la BMS SA, rétentrice illégitime ;
Que de plus, d’ordre contractuel, la créance de la SICG Mali est antérieure à la loi privilège sur la base de laquelle la BMS SA a établi l’état exécutoire dont elle se prévaut ; que la Cour de céans a donné acte à la BMS SA de ce qu’elle détenait cet état exécutoire parce qu’elle n’a précisément pas entendu en tirer une quelconque conséquence juridique en faveur ou au détriment d’une partie ; que la situation eut été différente si la Cour avait pris acte de cet état exécutoire ; que dès lors, contrairement à ce qui est soutenu, l’ Arrêt n° 068/2019 de la CCJA ne saurait avoir consacré une quelconque créance au profit de la BMS SA ;
Attendu alors qu’en ne s’assurant pas que la créance de la SICG Mali était, par sa nature, éligible à la compensation d’une part et, d’autre part, en se fondant uniquement sur la note de compensation établie par la BMS SA sur la base d’un état de créance dressé toujours par cette dernière, sans vérifier que l’obligation prétendument incarnée par ces actes unilatéraux émanant de la BMS SA, était certaine liquide et exigible, ce que contestait la SICG Mali, la cour d’appel a, par mauvaise application, violé la loi ; qu’il échet, sans avoir à examiner les autres moyens, de casser l’arrêt attaqué, et d’évoquer l’affaire sur le fond, conformément aux dispositions de l’article 14 alinéa 5 du Traité de l'OHADA ;
Sur l’évocation
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier que par convention du 6 novembre 2000, la SICG Mali passait un partenariat avec la BHM-SA, devenue BMS-SA, en vue de commercialiser un ensemble immobilier dénommé « Les Halles de
Bamako » ; que dans la mise en œuvre de ce contrat, la SICG Mali réalisait, courant 2000-2001, que non seulement la banque n’honorait pas convenablement ses engagements mais avait ouvert un compte parallèle où elle logeait une partie des sommes produites des transactions effectuées par ses soins ; qu’elle assignait alors cette dernière devant le Tribunal de commerce de Bamako en reddition de comptes ; que par jugement du 11 juin 2005, ce tribunal faisait droit à la demande de la SICG Mali et nommait un expert-comptable pour ce faire ; que ce processus judiciaire était en cours lorsque le Gouvernement malien promulguait la loi n°08- 05 du 8 février créant un privilège général pour garantir les créances de la BHM ; que se fondant sur cette loi, la BHM dressait aussitôt les états de créance n°1 et 2 en date du 12 mai 2008 matérialisant à son profit des créances sur la SICG Mali respectivement de 6.866.228.420 FCFA et 1.837.128.815 FCFA ; que par arrêt n°068/2019 du 14 mars 2019, la CCJA, statuant sur le pourvoi formé contre l’arrêt confirmatif du jugement du 11 juin 2005, condamnait la BMS-SA à payer à la SICG-Mali la somme totale de 16 007 365 960 FCFA, en réparation de divers chefs de préjudices par elle subis relativement à l’exécution du contrat du 6 novembre 2000 ; que suite à cet arrêt, la BMS SA, se disant aussi créancière de la SICG-Mali de la somme totale de 22 448 400 046 FCFA, établissait, le 25 juillet 2019, une « note de compensation », par laquelle elle opérait une compensation entre sa prétendue créance susvisée et celle de la SICG-Mali arrêtée à 20 741 034 036 FCFA ; qu’elle dégageait un solde en sa faveur de 2 145 641 330 FCFA dont elle réclamait le paiement à la SICG Mali ; que par exploit du 20 août 2019, la BMS SA assignait la SICG-Mali par devant le Tribunal de commerce de Bamako pour entendre lui donner acte de la compensation intervenue le 25 juillet 2019 ; que par jugement n°0819 en date du 30 octobre 2019, le Tribunal de commerce de Bamako rendait le jugement dont le dispositif suit :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort ;
En la forme, rejette comme inopérante les exceptions d’incompétence et de sursis proposées par la défenderesse ; par contre, reçoit comme régulières les demandes, tant principale que reconventionnelle, des parties ;
Au fond, déclare l’assignation justifiée ;
En conséquence, ordonne la compensation entre la créance de la Banque Malienne de Solidarité (BMS-SA) et celle de la Société Ivoirienne de Concept et de Gestion (SICG Mali-Sarl) et, partant, déclare éteinte les dettes réciproques des parties jusqu’à due concurrence des quotités respectives conformément à la note de compensation du 27/07/2019 ;
Enjoint, par conséquent, à la SICG Mali-Sarl, demeurant encore débitrice de la BMS-SA de la somme de 2.145.641.330 FCFA au titre de solde, par l’effet de cette compensation, la cessation de tous actes e poursuites sur la base du titre de créance ainsi compensé ;
Rejette comme non justifié le chef de la demande en réparation de préjudice pour abus de droit ;
Déclare la présente décision exécutoire par provision, nonobstant l’exercice de de toutes voies de recours et met les dépens de l’instance à la charge de la défenderesse… » ;
Que, par acte n°225 du 19 novembre 2019, la SICG Mali relevait appel du jugement ci-dessus rapporté et demandait son annulation pour avoir statué ultra petita et pour n’avoir pas déclaré nulle la « note de compensation » comme violant la loi ; qu’en réplique, la BMS-SA soutenait que ledit jugement s’était contenté de répondre aux demandes soumises aux premiers juges et n’avait pas statué ultra petita ; qu’elle observait par ailleurs que la compensation mise en œuvre tendait simplement à réaffirmer le caractère exécutoire de l’arrêt n° 068/2019 contenant une obligation de paiement dans les rapports entre la BMS-SA et la SICG Mali ; qu’étant un acte de la vie privée, la compensation peut, lorsqu’elle n’est pas acceptée librement, être imposée aux parties par décision judiciaire ;
Sur la demande de compensation formulée par la BMS SA
Attendu que par un document intitulé « Note de compensation » daté du 25 juillet 2019 et signé de son Directeur Général, la BMS-SA a déclaré qu’elle « compense » ses engagements (22.448.400.046 FCFA — 1.707.365.960 FCFA) avec ceux de la SICG Mali (22.886.675.416 FCFA) et reste créancière de cette dernière de la somme de 2.145.641.330 FCFA ; que par exploit du 07 août 2019 intitulé « notification d’acte », elle a signifié ce document à la SICG Mali, en précisant qu’il s’agissait de « l’original de la correspondance en date du 25 juillet 2019 de monsieur Ac C, en sa qualité de Directeur Général de la Banque Malienne de solidarité (BMS-SA) » ; que c’est en se fondant sur ce document que la même BMA-SA a, suivant acte du 20 août 2019, assigné la SICG Mali devant le Tribunal de commerce de Bamako à l’effet de voir ladite juridiction lui donner acte de la compensation intervenue le 25 juillet 2019 ;
Mais attendu que cette « note de compensation » ne peut être considérée comme une lettre ou mise en demeure ; qu’elle n’est ni destinée ni adressée à un destinataire précis et n’est pas contresignée par la SICG Mali ; qu’elle présente toutes les apparences d’une note interne à la BMS-SA ; que d’ailleurs, la mention figurant dans la « notification d’acte », selon laquelle il s’agit de « l’original d’une correspondance », ne reflète pas le contenu de la notification ; qu’elle n’épouse non plus la quintessence dudit document et ne saurait avoir créé des obligations à la charge de SICG Mali ; que rien ne permet de l’opposer à la SICG Mali qui n’a pas participé à son élaboration et qui ne lui est pas destiné ; que cette note de compensation sera dès lors déclarée inopposable à SICG Mali ;
Attendu en outre que, s’agissant des états exécutoires de la BMS-SA, il sied de rappeler que l’arrêt n° 068/2019 du 14 mars 2019 de la CCJA établit, sur la base d’un rapport d’expertise dressé par l’homme de l’art désigné par les juridictions maliennes, que du partenariat ayant lié les parties suivant leur convention du 06 novembre 2000, la BMS-SA reste redevable de recettes perçues et non reversées, et la condamne à la restitution desdites recettes avec réparation des préjudices qui en ont résulté ; que lors de l’expertise susmentionnée, la BMS- SA a refusé toute collaboration ; que si elle s’est même opposée à cette mesure, celle-ci a, malgré tout, eu lieu, pour fournir à la CCJA les éléments qui ont éclairé sa religion sur le contexte de l’affaire pour se prononcer comme elle l’a fait ; que se fondant sur la loi n°08-005 du 08 février 2008 promulguée en cours d’instance et créant un privilège général pour garantir ses créances, la BMS SA a établi contre la SICG Mali, les états de créances n°1 d’un montant de 6.866.228.420 FCFA et n°2 d’un montant de 1.837.127.815 FCFA, tous datés du 12 mai 2008 ;
Attendu cependant que si l’article 3 alinéa 1 de la loi privilège susvisée dispose que « la BHM établit des états de créance. Ces états constituent des titres exécutoires », il n’indique pas moins que « il est créé un privilège général et une hypothèque légale pour garantir les créances consécutives aux prêts et autres concours accordés par la Banque de l’Habitat du Mali antérieurement au 30 juin 2005 » ; qu’ainsi, comme sureté, l’état de créance de la BMS-SA doit tendre à sécuriser le recouvrement des créances dont elle serait titulaire en raison des prêts et concours par elle consentis ; que cela suppose outre la preuve desdits prêts ou concours, celle des créances qui y tirent leurs sources ; qu’or, dans le cadre de l’expertise judiciairement prescrite aux fins d’établir les comptes des parties, la BMS-SA s’est toujours abstenue non seulement d’y participer mais aussi de produire la moindre documentation de nature, soit à établir sa créance sur SICG Mali, soit à remettre en cause la créance revendiquée contre elle par la SICG Mali sur la base de leur contrat ; qu’en revanche, saisissant l’occasion de l’entrée en vigueur de la loi privilège du 08 février 2008, elle s’est précipitée à établir des états de créance pour garantir le recouvrement de sommes dont elle ne rapporte ni l’existence ni la traçabilité et, encore moins, les évolutions dans le cadre du déroulement et du suivi de son partenariat avec la SICG Mali ;
Attendu en outre que selon l’article 234 du Régime Général des Obligation, « lorsque deux personnes sont respectivement créancière et débitrice l’une de l’autre, il s’opère entre elles une compensation qui éteint la dette de chacune d’elles jusqu’à concurrence de la plus faible » ; que la compensation n’a donc lieu qu’entre deux créances réciproques, de sorte qu’elle doit être exclue en l’absence de cette réciprocité ; que la BMS-SA n’administrant aucune preuve irréfutable de la créance qu’elle prétend avoir sur la SICG Mail, dont le recouvrement serait garanti par les états exécutoires unilatéralement établis par elle-même, rien, en l’état, ne permet à la Cour de soumettre la créance de SICG Mali issue de l’arrêt exécutoire n°068/2019 du 14 mars 2019 à la compensation demandée par la BMS- SA ; que cette demande ne pouvant prospérer en droit, il convient dès lors d’infirmer le jugement déféré ayant décidé du contraire et, statuant de nouveau, débouter la BMS-SA de sa demande de compensation comme mal fondée ;
Sur les dépens
Attendu que la BMS SA succombant, sera condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Se déclare compétente ;
Casse et annule l’Arrêt attaqué rendu par le Cour d’appel de Bamako ;
Evoquant et statuant sur le fond :
Infirme le jugement entrepris par le Tribunal de commerce de Bamako ;
Statuant à nouveau :
Déboute la BMS-SA de sa demande de compensation ;
La condamne aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier