ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Deuxième chambre
Audience publique du 24 juin 2021
Pourvoi : n° 214/2017/PC du 22/11/2017
Affaire : Société Commerciale des Ad Ab
(Conseil : Maître FOUEGOUM Adeline, Avocat à la Cour)
contre
- A Ac
(Conseil : Maître TTAKOUANG MELI, Avocat à la Cour)
En présence de :
- Liquidation FOPI S.A.
Arrêt N° 142/2021 du 24 juin 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour
l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 24 juin 2021 où étaient présents :
Messieurs : Djimasna N’DONINGAR, Président, rapporteur
Armand Claude DEMBA, Juge
Mounetaga DIOUF, Juge
Et Maître Koessy Alfred BADO, Greffier ;
Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, devant la Cour de céans, de l’affaire Société
Commerciale des Ad Ab dite B contre sieur A Ac et autres, par arrêt n° 360/CIV du 05 novembre 2015 de la Cour Suprême de la
République du Cameroun, saisie d’un pourvoi formé par maître Adeline FOUEGOUM YONTA DOUANLA, Avocat à la cour, demeurant à Yaoundé, BP
3765, agissant au nom et pour le compte de la Société Commerciale des Ad Ab dite SOCSUBA, SARL dont le siège social est à Yaoundé, au 333, Boulevard de l’'OCAM, BP 7868, dans la cause l’opposant à monsieur A Ac, commerçant, domicilié à Yaoundé, BP 2406, ayant pour conseil Maître TIAKOUANG MELI Hippolyte Bertin, avocat à la cour, demeurant à Yaoundé-Cité Verte, BP 34118, et à la Liquidation FOPI S.A., renvoi enregistré au greffe de la Cour de céans sous le n°214/2017/PC du 22 novembre 2017 ;
En cassation de l’arrêt n° 492/Civ rendu le 1” septembre 2006 par la cour d’appel du Centre à Ae et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties, en matière de référé et en dernier ressort ;
En la forme :
Reçoit les appels ;
Reçoit la Liquidation FOPI en son intervention volontaire et déclare l’intervention forcée de SIME dirigée contre la Standard Chartered Bank SA recevable ;
Au fond :
Annule l’ordonnance entreprise pour violation de la loi ;
Reçoit SOCSUBA en son action, l’y dit non fondée et l’en déboute ;
Déboute la Liquidation FOPI de sa demande comme non fondée ;
Condamne la SOCSUBA aux entiers dépens distraits au profit de Aa C et MELI. » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent dans la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Djimasna N’DONINGAR ;
Vu les dispositions des articles 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier qu’en date du 19 août 2004, sieur A Ac, se disant créancier de son locataire, la Société Commerciale des Ad Ab dite SOCSUBA, pratiquait une saisie conservatoire sur les avoirs bancaires de ladite société, pour garantie et paiement de ses loyers impayés, évalués à la somme de 22.887.543 francs CFA ; que sur assignation de la SOCSUBA aux fins de mainlevée, le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé- Ekounou rendait l’ordonnance n°14/6 en date du 12 octobre 2004 faisant droit à la
demande ; que sur saisine de sieur A Ac, la Cour d’appel du Centre à 2 Yaoundé infirmait cette ordonnance par Arrêt n°492/CIV du 1” septembre 2006 dont pourvoi ;
Sur la recevabilité du pourvoi
Attendu que dans son mémoire en réponse reçu au greffe de la Cour de céans le 06 août 2020, sieur A Ac demande à la Cour de déclarer irrecevable le pourvoi pour « défaut de mise en œuvre d’un cas d’ouverture à cassation », en application de l’article 28 ter du Règlement de procédure de la CCJA ;
Mais attendu que la requérante invoque, à l’appui de son pourvoi, deux moyens de cassation tirés de la violation de l’article 5 de l’ordonnance n°72/4 du 26/08/1972 portant organisation judiciaire au Cameroun et de celle des articles 54 et 55 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; que la violation de la loi figurant bien dans la nomenclature des cas d’ouverture prévu à l’article 28 bis susmentionné, il échet de déclarer le pourvoi recevable ;
Sur le premier moyen, en ses quatre branches, tiré de la violation de l’article 5 de l’ordonnance n°72/4 du 26/08/1972 portant organisation judiciaire au Cameroun
Attendu que, par la première branche du moyen, il est reproché à la cour d’appel une « non-réponse aux conclusions » de la SOCSUBA, « correspondant au cinquième cas d’ouverture à cassation de l’article 28 bis du Règlement de procédure » de la Cour de céans, en ce que plusieurs points de ses conclusions datées du 02 décembre 2004, déposées à l’audiences du 03 décembre 2004, n’ont pas trouvé réponses ; que, par la deuxième branche, il est fait grief à l’arrêt d’avoir dénaturé les faits de la procédure en affirmant, d’une part, que « la preuve des pouvoirs pour gérer les loyers n’est pas rapportée » et, d’autre part, que « SOCSUBA dit avoir payé les loyers après le renouvellement du bail le 28 octobre 2002, après avoir reçu la notification de la révocation des pouvoirs du liquidateur le 21 octobre 2002 » alors que, selon le moyen, il a été bel et bien prouvé que ces pouvoirs ont été donnés tant de manière expresse qu’à travers la liquidation amiable et que les trois derniers reçus d’encaissement des loyers par la liquidation FOPI dataient des 01 et 11 octobre 2002 ;
Attendu que, par les troisième et quatrième branches du moyen, il est reproché à l’arrêt une contrariété de motifs et une insuffisance des motifs, en ce que le juge d’appel a dit, dans un premier temps, que « la preuve d’un mandat donné au liquidateur pour gérer le loyer n’est pas rapporté », puis a affirmé dans le passage suivant que « la lettre de révocation des pouvoirs de gestion du liquidateur laisse apparaître cependant qu’il y’a eu de précédents arrangements », sans en tirer la conséquence logique qu’est l’absence des loyers impayés et des circonstances
menaçant son recouvrement ;
Mais attendu que, sur la première branche du moyen, l’article 28 bis du Règlement de procédure de la Cour de céans prescrit parmi les cas d’ouverture à cassation « l’omission ou le refus de répondre à des chefs de demandes » ; qu’assimilant la « non-réponse aux conclusions » à « l’omission ou le refus de répondre à des chefs de demandes », alors qu’il s’agit de cas d’ouverture différents, cette branche du moyen manque de clarté et de précision et doit être déclarée irrecevable ; que, s’agissant de la deuxième branche, ce moyen, sous le prétexte de dénaturation, ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation souveraine des faits par les juges de fond et est, par conséquent, également irrecevable ;
Attendu, par rapport aux deux dernières branches du moyen, que le caractère de « créance fondée en son principe» et les « circonstances menaçant son recouvrement » sont des éléments de pur fait dont l’appréciation relève du pouvoir souverain des juges du fond ; qu’en l’occurrence, ces branches du moyen ne démontrent ni en quoi la juxtaposition des deux passages de l’arrêt suscités a conduit à des conséquences juridiques contradictoires ou incompatibles ni en quoi la motivation de l’arrêt attaqué est insuffisante ;
Qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé et doit être rejeté ;
Sur le deuxième moyen tiré de la violation des articles 54 et 55 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution et du manque de base légale
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt querellé d’avoir violé les textes visés au moyen, en ce que la créance invoquée n’existait pas en soi et n’était guère fondée dans son principe, puisque monsieur A Ac savait que les loyers visés dans sa lettre de mise en demeure étaient bel et bien payés à la liquidation FOPI et qu’aucune circonstance de nature à menacer le recouvrement des sommes objet de la saisie conservatoire n’existait au niveau de la SOCSUBA ;
Mais attendu que les conditions énoncées par l’article 54 de l’Acte uniforme renvoient à des éléments de pur fait dont l’appréciation relève du pouvoir souverain du juge du fond ; qu’en retenant, pour justifier que la créance dont se prévaut le sieur A Ac est fondée en son principe, que « la preuve d’un mandat donné au liquidateur pour gérer le loyer n’est pas rapportée » et que « si la SOCSUBA a effectivement payé au liquidateur, elle a mal payé » et en constatant que le recouvrement du montant réclamé est menacé « par les éléments de fait sus développés et la collusion apparente entre le liquidateur de la société FOPI et la SOCSUBA », la Cour d’appel a fait usage de son pouvoir souverain d’appréciation du caractère apparent de la créance et de la réalité ou non des circonstances de nature à en menacer le recouvrement ; que ce faisant, elle n’a violé en rien les dispositions sus énoncées ; qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé ;
Attendu qu’il échet, en conséquence, de rejeter le pourvoi ;
Sur les dépens
Attendu que la Société Commerciale des Ad Ab dite SOCSUBA succombant, sera condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
Déclare recevable le pourvoi formé par Société Commerciale des Ad Ab dite SOCSUBA ;
Le rejette comme mal fondé ;
Condamne la SOCSUBA aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier