ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
Deuxième chambre
Audience publique du 28 octobre 2021
Pourvoi :n° 069/2021/PC du 02/03/2021
Affaire : Ad B
(Conseil : Maitre John ALIMAN, Avocat à la Cour)
Contre
Société NSIA Banque Cote d’Ivoire (ex- BIAO CI)
(Conseil : Cabinet KOUASSI Roger & Associés, Avocats à la Cour)
EDIS PRESTATIONS Sarl
Arrêt N° 169/2021 du 28 octobre 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, a rendu l’Arrêt suivant, en son audience publique du 28 octobre 2021 où étaient présents :
Messieurs Robert SAFARI ZIHALIRWA, Président
Djimasna N’DONINGAR, Juge
Birika Jean Claude BONZI, Juge
Armand Claude DEMBA, Juge, rapporteur
Mounetaga DIOUF, Juge
et Maître Koessy Alfred BADO, Greffier,
Sur le pourvoi enregistré le 02 mars 2021 au greffe de la Cour de céans sous le n° 069/2021/PC et formé par Maitre John ALIMAN, Avocat à la Cour, demeurant Cocody les II Plateaux, Boulevard des Martyrs, rue KO36 (Ae A à gauche en venant de Cocody), SICOGI Villa n°337, 28 BP 1532, Af 28, agissant au nom et pour le compte de Ad B, dans la cause l’opposant à la NSIA Banque Cote d’Ivoire (ex BIAO CI), ayant pour conseil le cabinet Cabinet KOUASSI Roger & Associés, Avocats à la Cour, SCP demeurant Rue B.13 Ab Ac, Immeuble 2, Canebière, 04 BP 1011 Af 04, et en présence de la société EDIS PRESTATIONS, Sarl sise à Af Aa, 03 BP 1658 Af 03,
en cassation de l’arrêt n°112/20 CTV 6, rendu le OS mai 2020 par la Cour d’appel d’Af, dont le dispositif est le suivant :
« PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ; En la forme :
Déclare la NSIA Banque Cote d’Ivoire recevable en son appel relevé du jugement civil n°31/CIV/6F rendu le 04 avril 2018 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau ;
Au fond :
L’y dit bien fondée ;
Infirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Déclare irrecevable l’opposition formée contre l’ordonnance d’injonction de payer n°7583 du 06 novembre 2003, rendue par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d’Af ;
Condamne Monsieur Ad B et la société EDIS PRESTATIONS aux dépens … » ;
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi l’unique moyen de cassation tel qu’il figure au pourvoi annexé au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Armand Claude DEMBA ;
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l'OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier que, le 13 septembre 2017, la NSIA Banque Cote d’Ivoire faisait pratiquer une saisie-attribution sur les avoirs de Ad B détenus par la banque COFIPA INVESTISSEMENT ; qu’en réaction, et suivant exploit d’huissier daté du 02 octobre 2017, Ad B formait opposition à l’ordonnance d’injonction de payer ayant servi à la créancière par-devant le Tribunal de Première Instance d’Af ; que le 04 avril 2018, ce tribunal rendait le jugement n°31/CIV 6eme F qui ordonnait « la rétractation de l’ordonnance d’injonction de payer n°7583/2003 en date du 06 novembre 2003 rendue par (sa) juridiction présidentielle » ; qu’insatisfaite de cette décision, la NSIA Banque Cote d’Ivoire en interjetait appel devant la Cour d’Af ; que le 05 mai 2020, cette cour vidait sa saisine par l’arrêt n°112/20 CIV 6, objet du présent pourvoi ;
Attendu que par acte n°0509/2021/GC/G4 du 18 mars 2021, la Cour a signifié la requête à la société EDIS PRESTATIONS qui n’a produit aucune écriture ; que l’affaire peut être examinée, le principe du contradictoire ayant été observé ;
Sur le moyen unique, tiré de la violation des dispositions de l’article 10 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution
Attendu que le demandeur au pourvoi reproche à la cour d’appel d’avoir violé l’article 10 de l’Acte uniforme susvisé, en ce qu’il a retenu la validité d’une signification d’ordonnance à injonction de payer faite au conseil du débiteur alors, selon le moyen, que l’huissier de justice doit s’efforcer de délivrer l’exploit à la personne même qu’il concerne ; qu’ainsi, en déclarant irrecevable l’opposition formée par Ad B qui n’a jamais reçu personnellement cette signification, la cour d’appel a violé le texte précité et exposé son arrêt à la cassation ;
Attendu qu’aux termes de l’article 10 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « l’opposition doit être formée dans les quinze jours qui suivent la signification de la décision portant injonction de payer (..). Toutefois, si le débiteur n’a pas reçu personnellement la signification de la décision portant injonction de payer, l’opposition est recevable jusqu'à l’expiration du délai de quinze jours suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens du débiteur » ;
Attendu qu’en l’espèce, il est établi, de première part, que l’ordonnance d’injonction de payer en cause avait été signifiée le 16 décembre 2003, non pas à Ad B lui-même mais plutôt à son conseil, la Société Civile Professionnelle d’Avocats AKRE & KOUYATE ; que pareille signification, qui n’équivaut en rien à une signification à personne, ne saurait faire courir le délai d’opposition de quinze jours prévu à l’article 10 susvisé; que de seconde part, la première mesure d’exécution exercée à l’encontre de monsieur Ad B, et ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie ses biens, résulte de la saisie-attribution de créances du 13 septembre 2013, saisie qui lui a été dénoncée le 20 septembre 2017; que dès lors, la date de départ pour la computation du délai de quinze jours est celle du 20 septembre 2017, ledit délai expirant le 06 octobre 2017 ; qu’il s’ensuit qu’en se prononçant comme elle l’a fait, la Cour d’appel d’Af a violé le texte visé au moyen ; qu’il échet de casser l’arrêt attaqué et d’évoquer sur le fond ;
Sur l’évocation
Attendu qu’en date du 27 avril 2018, la NSIA Banque Cote d’Ivoire a interjeté appel du jugement n°31/CIV 6eme F, rendu le 04 avril 2018 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau, dont le dispositif est ainsi conçu :
« PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort
Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la NSIA Banque Cote d’Ivoire pour opposition tardive de Ad B ;
Déclare monsieur Ad B recevable en son opposition ;
L’y dit bien fondé ;
Ordonne la rétractation de l’ordonnance d’injonction de payer n°7583/2003 en date du 06 novembre 2003, rendue par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d’Af ;
Condamne la NSIA Banque Cote d’Ivoire aux dépens » ;
Attendu qu’au soutien de son appel, la NSIA Banque Cote d’Ivoire réitère l’irrecevabilité de l’opposition de Ad B pour cause de forclusion, l’ordonnance attaquée ayant été signifiée à son conseil le 16 décembre 2003 ; qu’ainsi, cette opposition intervenue le 02 octobre 2017 est faite largement hors du délai de quinze jours prévu à l’article 10 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; qu’elle conclut à l’infirmation de la décision appelée ;
Attendu qu’en réponse, Ad B sollicite la confirmation du jugement dont appel ;
Sur la recevabilité de l’opposition
Attendu qu’en application de l’article 10 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, et-pour les mêmes motifs que ceux qui ont conduit la Cour de céans à casser l’arrêt dont pourvoi, il y a lieu de déclarer l’opposition recevable ;
Sur la rétractation de l’ordonnance n°7583/2017 datée du 06 novembre 2003
Attendu que le premier juge a retracté l’ordonnance susdite au motif que, Ad B n’étant pas personnellement débiteur de la NSIA Banque Cote d’Ivoire, c’est à tort qu’il a été solidairement condamné avec la société EDIS PRESTATIONS, dont il n’est que le gérant, au paiement de la somme de 42.057.615 FCFA ;
Attendu, en effet, que les pièces du dossier renseignent nettement que c’est en qualité de gérant de la société EDIS PRESTATIONS, société à responsabilité limitée ayant sa personnalité juridique propre, que Ad B a transigé avec la NSIA Banque Cote d’Ivoire ; que celle-ci a même écrit dans ses conclusions que « Monsieur B a pris un engagement irrévocable de rembourser … le solde débiteur d'alors, 64 000. 000 FCFA, dans le cadre des activités de la société EDIS PRESTATIONS » ; que dès lors, c’est encore à bon droit que le tribunal a décidé de la rétractation de l’ordonnance litigieuse ; qu’il y a lieu de confirmer son jugement ;
Sur les dépens
Attendu que la NSIA Banque Cote d’Ivoire, ayant succombé, sera condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Casse l’arrêt n°112/20 CIV 6 rendu le 05 mai 2020 par la Cour d’appel d’Af ;
Evoquant et statuant sur le fond ;
Confirme le jugement n° 31/CIV 6eme F rendu le 04 avril 2018 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau ;
Condamne la société NSIA Banque Cote d’Ivoire (ex BIAO CI) aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier