ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA) --------------- COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA) ------------- Troisième chambre ------------
Audience Publique du 09 mars 2023 Pourvoi : n° 083/2019/PC du 26/03/2019 Affaire : Sté Aa Ab Ac (Conseil : Maître David TAMO, Avocat à la Cour)
Contre Sté AN 2000 (Conseil : Maître Clément ANANGA, Avocat à la Cour) Arrêt N° 044/2023 du 09 mars 2023
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième Chambre, présidée par Monsieur Mahamadou BERTE, assisté de Maître Valentin N’guessan COMOE, Greffier, a rendu en son audience publique ordinaire du 09 mars 2023 l’Arrêt dont la teneur suit, après délibération du collège de juges composé de : Monsieur Mahamadou BERTE, Président Madame Afiwa-Kindéna HOHOUETO, Juge, rapporteur Monsieur Jean-Marie KAMBUMA NSULA, Juge ; Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 26 mars 2019 sous le n°083/2019/PC et formé par Maître David TAMO, Avocat au Barreau du Cameroun, BP 7761 Yaoundé, agissant au nom et pour le compte de la société Afriland First Bank représentée par son directeur général, monsieur A Ad et dont le siège social est sis à Yaoundé, 1061 Place de l’Indépendance, BP 11834, dans la cause qui l’oppose à la société AN 2000 ayant pour conseil Maître ANANGA Clément, Avocat au Barreau du Cameroun, BP 5550 Yaoundé, en cassation de l’arrêt n°372/CE rendu par la cour d’appel du Centre (Cameroun), le 04 août 2017 et dont le dispositif est le suivant : « la Cour, Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties, en chambre du contentieux de l’exécution, en appel, en collégialité et à l’unanimité des voix,
EN LA FORME Déclare l’appel recevable, AU FOND,
Annule l’ordonnance entreprise pour violation de la loi ;
Évoquant et statuant à nouveau, reçoit la société AN 2000 SARL en sa demande ; L’y dit fondée ;
Condamne la société Afriland First Bank S.A au paiement des causes de la saisie attribution de créances pratiquée par la société AN 2000 SARL entre ses mains au préjudice de la société MEDCOM SARL les 20 et 21 juin 2013 ;
La condamne en outre aux dépens dont distraction au profit de Maître ANANGA Clément, Avocat aux offres de droit ; … » ; La requérante invoque à l’appui de son recours, les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de madame Afiwa-Kindéna HOHOUETO, Juge ; Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ; Attendu que, par correspondance n°1176/2020/GC/G5 en date du 24 juin 2020, le Greffier en chef a signifié à la partie défenderesse au pourvoi le mémoire en réplique déposé par le requérant et l’invitation à demander l’autorisation de produire un mémoire en duplique, dans un délai de quinze (15) jours à compter de la date de réception de la correspondance, en application des articles 30 et 31.1 du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ; qu’aucune suite n’a été donnée à ce courrier ; que le principe du contradictoire ayant été observé, il a lieu d’examiner le présent recours ;
Attendu qu’il ressort des éléments du dossier de la procédure, que la société AN 2000 Sarl a fait pratiquer, les 20 et 21 juin 2013, une saisie-attribution des créances sur les avoirs de la société MEDCOM SARL entre les mains de la société AFRILAND FIRST BANK SA, pour avoir paiement de la somme en principal de 35.708.670 francs CFA ; qu’estimant que celle-ci a contrevenu aux dispositions de l’article 156 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, elle l’a fait assigner en paiement des causes de ladite saisie devant le juge de l’exécution du Tribunal de première instance de Yaoundé Centre Administratif ; que par ordonnance N°534/C rendue le 14 juillet 2016, le juge saisi a fait droit à la demande de la société AN 2000 SARL ; que sur appel de la banque, la Cour d’appel du Centre a rendu le 04 août 2017, l’arrêt n°372/CE dont pourvoi ; Sur le premier moyen de cassation tiré de la dénaturation des faits de la cause, ouverture à cassation prévue par l’article 35 de la loi camerounaise N°2006/016 du 29 décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement de la Cour suprême, ensemble la violation de l’article 156 de l’Acte uniforme de l’OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution
Attendu qu’il est fait grief à la Cour d’appel, d’avoir condamné le tiers saisi au paiement des causes de la saisie, sur la base d’un défaut de déclaration qu’elle n’a tiré d’aucune allégation ou pièce de la procédure alors, selon le moyen, que d’une part, le juge doit en application de l’article 35 de la loi camerounaise susvisée s’en tenir aux faits tels qu’ils résultent des allégations des parties et des pièces de la procédure et, d’autre part, qu’il résulte de l’article 156 de l’Acte uniforme précité que « seule une déclaration inexacte, incomplète ou tardive peut faire condamner le tiers saisi au paiement des causes de la saisie et non une déclaration exacte faisant état d’une absence de provision dans le compte ; que la Cour d’appel en se déterminant comme elle l’a fait, a, selon le pourvoi, violé les textes visés au moyen et exposé sa décision à la cassation ; Mais attendu qu’il ressort des dispositions de l’article 156 de l’Acte uniforme susvisé, que le tiers saisi doit faire sur le champ la déclaration sur l’étendue de ses obligations si la saisie lui a été signifiée à personne et que le manquement à cette obligation l’expose à être condamné au paiement des causes de la saisie sans préjudice d’une condamnation au paiement de dommages-intérêts ; Attendu, en l’espèce, qu’il ressort des constatations de fait des juges du fond que la société Afriland First Bank « n’a fait aucune déclaration au moment de la saisie sur le compte du saisi … » ; qu’il y a lieu de dire que c’est à bon droit que la cour d’appel, en tirant les conséquences desdites constatations, a, sans violer l’article 156 de l’Acte uniforme visé au moyen, condamné le tiers-saisi aux causes de la saisie ; qu’il y a lieu de rejeter ce moyen, ceci d’autant plus qu’il ne précise pas les faits qui auraient été dénaturés ni en quoi ils l’auraient été ;
Sur le deuxième moyen tiré de la violation de l’article 161 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution
Attendu qu’il fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir fondé la condamnation au paiement des causes de la saisie sur une situation postérieure aux effets de la saisie alors, selon le moyen, « qu’il ressort de l’article 161 de l’Acte uniforme précité que le tiers n’est tenu de déclarer la nature du ou des comptes du débiteur ainsi que leur solde qu’au jour de la saisie, et l’effet du blocage du compte ne se produit que jusqu’au quinzième jour après la saisie, autrement dit la saisie n’a pas pour effet de bloquer indéfiniment le compte du débiteur dans les livres du tiers saisi » ; qu’en fondant dans ce contexte, la condamnation du tiers saisi au paiement des causes de la saisie sur la base de son obstruction au paiement des sommes saisies au détriment du créancier, la Cour d’appel a, selon le pourvoi, violé le texte visé au moyen et exposé sa décision à la cassation ; Mais attendu qu’il ressort des dispositions de l’article 161 de l’Acte uniforme susvisé, d’une part, que la saisie attribution de créance, faite entre les mains d’un établissement bancaire, oblige celui-ci à déclarer la nature du ou des comptes du débiteur ainsi que leur solde au jour de la saisie et, d’autre part, que dans le délai de quinze jours ouvrables qui suit la saisie et pendant lequel les sommes laissées au compte sont indisponibles, le solde peut être, selon le cas, affecté à l’avantage ou au préjudice du saisissant pour des opérations dont les dates sont antérieures à la saisie ; Attendu, en l’espèce, d’une part, qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que la société Afriland First Bank n’a fait aucune déclaration au moment de la saisie et, d’autre part, qu’il n’apparait pas des énonciations dudit arrêt que la cour d’appel ait retenu que la saisie a pour effet de bloquer indéfiniment le compte du débiteur dans les livres du tiers saisi ; qu’en effet, la cour a retenu, et à bon droit, que la saisie-attribution de créances « s’apparente bien au blocage du compte dès lors que les sommes s’y trouvant sont rendues indisponibles au préjudice du débiteur en vue du paiement effectif du créancier saisissant » ; qu’en se déterminant ainsi, la cour n’a en rien violé le texte visé au moyen qui sera donc rejeté ; Attendu qu’aucun des moyens n’ayant prospéré, il y a lieu de rejeter le pourvoi ; Sur les dépens Attendu que la société Afriland First Bank SA ayant succombé, doit être condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement après en avoir délibéré, Rejette le pourvoi ; Condamne la société Afriland First Bank SA aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus, et ont signé :
Le Président
Le Greffier