ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA) ------------- COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA) ---------- Troisième Chambre -------- Audience publique du 09 mars 2023
Pourvoi : n° 418/2021/PC du 16/11/2021
Affaire : LA SOCIETE FINANCIAL HOUSE SA (Conseil : Maître Gautier ZOMBISSI NGAPDOH, Avocat à la Cour)
Contre
LES AYANTS DROIT DE A Aa, C Ac, Ad Af et B Ab (Conseil : Maître Daouda NKOUONJOM, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 046/2023 du 09 mars 2023
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième Chambre, présidée par Monsieur Mahamadou BERTE, assisté de Maître Valentin N’guessan COMOE, Greffier, a rendu en son audience publique ordinaire du 09 mars 2023 l’Arrêt dont la teneur suit, après délibération du collège de juges composé de :
Monsieur Mahamadou BERTE, Président, Rapporteur Madame Afiwa-Kindena HOHOUETO, Juge Monsieur Jean-Marie KAMBUMA NSULA, Juge ; Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 16 novembre 2021 sous le n°418/2021/PC et formé par maître ZOMBISSI NGAPDOH Gautier, avocat au barreau du Cameroun représentant le cabinet OMNILEX, société d’avocats dont le siège est à Yaoundé-Mballa II, BP 35350 Yaoundé, Cameroun, agissant au nom et pour le compte de la Société Financial House SA, établissement financier de 2e catégorie dont le siège est à Yaoundé, BP 4531, agissant par ses représentants légaux, dans la cause qui l’oppose aux ayants droit de A Aa, C Ac, Ad Af et B Ab, ayant pour conseil maître Daouda NKOUONJOM, avocat au barreau du Cameroun, BP 4324 Yaoundé, Cameroun, en cassation de l’ordonnance n° 244/CE du 06 avril 2018 rendue par la Présidente de la Cour d’appel du centre à Ae et dont teneur suit : « Statuant publiquement, contradictoirement, en audience de contentieux de l’exécution, après en avoir délibéré conformément à la loi ; EN LA FORME : Reçoit les requérants en leur assignation ; AU FOND : Ordonne le reversement entre les mains des requérants par la FINANCIAL HOUSE, de la somme de 15 407 875 francs, objet du procès-verbal de conversion de saisie conservatoire en saisie attribution du 23 mai 2017 du ministère de maître Irène Jeannette KEDI, huissier de justice à Yaoundé, ce sous astreinte de 50 000 francs par jour de retard à compter de la signification de la présente décision ; Condamne les défendeurs aux dépens distraits au profit de maître Daouda NKOUONJOM, avocat aux offres de droit ; Informons les parties des délais de recours, 15 jours à compter de la date du présent arrêt pour se pourvoir en cassation ; » ; La requérante invoque à l’appui de son recours les deux moyens de cassation contenus dans la requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de Monsieur Mahamadou BERTE, Président ; Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ; Attendu qu’en exécution de l’arrêt n° 38/COR du 13 avril 2017 rendu par la Cour d’appel du centre, les ayants droit de A Aa ont fait pratiquer une saisie conservatoire des créances de la SAMARITAN INSURANCE Inc, entre les mains de la société FINANCIAL HOUSE SA ; que cette saisie était, plus tard, convertie en saisie-attribution de créances ; que sommée de payer la somme qu’elle a reconnu devoir, la société FINANCIAL HOUSE SA s’y est refusée, au motif que la débitrice fait l’objet d’une procédure de liquidation des biens qui a pour effet d’arrêter les poursuites individuelles ; que, pour vaincre cette résistance, les poursuivants ont saisi la Présidente de la Cour d’appel du centre en qualité de juge du contentieux de l’exécution, qui a rendu l’ordonnance dont pourvoi ; Sur la recevabilité du recours Attendu que, dans leur mémoire en réponse, les défendeurs excipent de l’irrecevabilité du recours pour non-respect du délai de deux mois à partir de la signification de la décision attaquée, imparti par l’article 28.1 du Règlement de procédure de la Cour de céans pour former pourvoi devant ladite Cour ; qu’ils soutiennent que l’ordonnance dont pourvoi, a été signifiée à la société FINANCIAL HOUSE SA par exploit en date du 13 juillet 2018 ; que le pourvoi reçu au greffe de la Cour de céans le 16 novembre 2018 intervient plus de deux mois depuis cette signification et, de ce fait, est frappé par la forclusion ;
Attendu que la société FINANCIAL HOUSE SA soutient que l’exploit sur lequel les défendeurs se fondent est produit en copie non certifiée conforme ; qu’un tel document est prohibé par l’article 362 du Code général des impôts qui prescrit aux juges de le tenir pour invalide ; que d’ailleurs, en l’absence de ses visa et cachet, la copie fournie ne permet pas d’attester qu’elle a vraiment reçu la pièce dont il s’agit ; qu’elle en requiert alors l’original ; qu’elle argue, en outre, que la Cour de céans retient constamment qu’une mise en demeure en vue d’une exécution, comme c’est le cas de l’exploit excipé, ne s’assimile pas à une signification à même de faire courir le délai de saisine ; qu’elle fait valoir enfin, que cette signification n’était pas adressée à toutes les parties à l’instance, de sorte qu’elle l’a privée de l’éventualité d’exercer les voies de recours dont le délai n’y a d’ailleurs pas été indiqué ;
Attendu que l’exploit de « signification commandement contenant itérative réquisition à paiement » ne porte pas trace de la signification de la décision attaquée au sens de l’article 24 du Règlement de procédure de la Cour de céans ; qu’en effet, il a seulement servi de mise en demeure en vue de l’exécution forcée de la décision, sans indication ni de la voie de recours ouverte ni du délai dans lequel le recours doit être exercé en application de l’article 28 du même règlement ; que par conséquent le délai prescrit n’a pas couru ; qu’il échet par conséquent de déclarer recevable le pourvoi formé par la société FINANCIAL HOUSE SA à la suite de la signification qui lui a été faite le 20 septembre 2021 ;
Sur le premier moyen tiré de la violation de l’article 49 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution Attendu qu’il fait grief à la Cour d’appel du Centre à Yaoundé, saisie directement d’un contentieux de l’exécution, d’avoir retenu sa compétence alors, selon le pourvoi, qu’il ressort des dispositions de l’article 49 de l’Acte uniforme susvisé au moyen qu’un tel litige relève de la compétence préalable du juge de l’urgence établi au premier degré de juridiction et dont la décision est susceptible d’appel ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a, selon le pourvoi, violé le texte visé au moyen et exposé sa décision à la cassation ;
Attendu qu’aux termes de l’article 49 de l’Acte uniforme précité : « La juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d’exécution forcée ou une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière d’urgence ou le magistrat délégué par lui.
Sa décision est susceptible d’appel dans un délai de quinze jours à compter de son prononcé… » ;
Attendu, en l’espèce, qu’il est constant, d’une part, que le litige dont la cour d’appel a été saisie se rapporte à une saisie conservatoire convertie en saisie attribution et, d’autre part, que ladite cour, dont la décision est insusceptible d’appel, a été saisie directement par les créanciers saisissants ; que celle-ci, en retenant sa compétence dans ces conditions, a violé le texte visé au moyen ; qu’il échet par conséquent de casser la décision attaquée pour incompétence, sans qu’il y ait lieu à évocation ; Sur les dépens Attendu que les ayants droit A Aa, C Ac, Ad Af et B Ab succombant, seront condamnés aux dépens ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, après en avoir délibéré, Déclare le recours recevable ; Casse et annule l’ordonnance n°244/CE rendue le 06 avril 2018 par la Cour d’appel du Centre à Yaoundé ; Dit n’y avoir lieu à évocation ; Condamne les défendeurs aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé : Le Président
Le Greffier