ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA) -------------- COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA) --------- Troisième Chambre -------- Audience Publique du 27 avril 2023 Pourvoi : n° 0106/2020/PC du 14 /05 /2020 Affaire C X Ab (Conseils : SCPA Avocats Conseils Associés, Avocats à la cour)
Contre Z Aa A Y -OLLO (Conseils : SCPA AYIE et Associés, Avocats à la cour)
Arrêt N° 090/2023 du 27 avril 2023
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 27 avril 2023 où étaient présents : Monsie:r : Mahamadou BERTE, Président Madame Afiwa-Kindéna HOHOUETO, Juge, rapporteur Monsieur Jean-Marie KAMBUMA NSULA Juge
Et Maître Valentin N’guessan COMOE, Greffier ; Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 14 /05 /2020 sous le n° n° 0106/2020/PC et formé par la SCPA Avocats Conseils Associés, en abrégé « ACAs » Avocats à la Cour résidant à Abidjan-Cocody, villa Ad Ae à Riviera -Beach, 01 BP 4100 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de monsieur X Ab, directeur de société, domicilié à Marcory-Résidentiel, 01 BP 4937 Abidjan 01, dans la cause qui l’oppose à Z Aa A Y B demeurant à Riviera - Bonoumin ayant pour Conseil la SCPA AYIE et Associés Avocats à la Cour, étude sise à Abidjan - Plateau Bd Clozel, Avenue Marchand, immeuble GYAM, 5ème étage porte A, 06 BP 6363 Abidjan 06, en cassation de l’arrêt n°023/2019 rendu par la Cour d’appel de commerce d’Ac, le 10 avril 2019 et dont le dispositif est le suivant : « Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Déclare recevable l’appel formé par monsieur X Ab contre le jugement RG n°1883 rendu le 19 juillet 2018 par le Tribunal de Commerce d’Ac ;
L’y dit partiellement fondé ;
Infirme le jugement entrepris ; Statuant à nouveau ;
Constate que le contrat de bail liant les parties est venu à expiration le 31 mars 2019 ; déclare par conséquent sans objet la demande en réintégration formulée par l’appelant ;
Condamne en revanche, madame Z Aa épouse Y B à lui payer la somme de cinq (5) millions à titre de dommages et intérêts ;
Condamne l’intimée aux dépens ; » ; Le requérant invoque, à l’appui de son recours, deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de madame Afiwa-Kindena HOHOUETO, Juge ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ; Attendu qu’il ressort des pièces de la procédure que la SCPA AYIE et Associés, conseil de madame Aa Z épouse Y B défenderesse au pourvoi, a reçu à son étude le 10 juin 2020, par correspondance n°0968/2020/GC/G4 datée du 29 mai 2020 du Greffier en chef de la Cour, signification du recours en cassation, déposé le 14 mai 2020 par la SCPA ACA contre l’arrêt n°023/2019 rendu le 10 avril 2019 par la Cour d’appel de commerce d’Ac et invitation à se conformer aux dispositions des articles 27 et 28 du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage; qu’au terme du délai de trois mois qui lui était imparti pour produire son mémoire en réponse, elle n’a donné aucune écriture ; que le principe du contradictoire étant respecté, il échet pour la Cour d’examiner le présent recours ; Attendu que selon les indications du dossier de la procédure, madame Aa Z et monsieur X Ab ont, par acte sous-seing privé, conclu le 1er janvier 2000, un contrat de bail à usage commercial, portant sur un magasin; que ce contrat renouvelé sous la forme notariée, le 15 avril 2010, venait à expiration le 31 mars 2019 ; que le preneur installa dans les locaux, la société SN FNAC dont il est l’actionnaire principal ; que la bailleresse, estimant que ladite société occupait les lieux sans titre ni droit parce que le contrat est au nom du preneur, obtint du Tribunal de commerce d’Abidjan, le jugement n°1678/2017 qui ordonnait le déguerpissement de la société ; qu’en exécution de ce jugement, dame Z Aa a fait changer les serrures des portes des magasins ; que le preneur, monsieur X, qui ne pouvait plus accéder aux locaux, considérant que cette opération est non seulement une grave violation du droit de jouissance attaché au contrat de bail, mais constitue aussi des voies de fait à son endroit, a saisi le Tribunal de commerce d’Abidjan aux fins de réintégration et de réparation de préjudices ; que, par jugement contradictoire n°1833/2018 rendu le 19 juillet 2018, cette juridiction l’a débouté de l’ensemble de ses prétentions; que, statuant sur l’appel formé contre ce jugement, la Cour d’appel de commerce d’Abidjan a rendu le 10 avril 2019 l’arrêt n° 023/2019, dont pourvoi ; Sur le premier moyen de cassation tiré de la violation de l’article 123, alinéa 3 de l’Acte uniforme relatif au Droit commercial général
Attendu que le recourant fait grief à l’arrêt attaqué de l’avoir, en violation de l’article 123, alinéa 3 de l’Acte uniforme sus visé, débouté de sa demande de réintégration dans les locaux baillés, aux motifs d’une part, que l’arrivée du terme du contrat de bail fixé au 31 mars 2019 libère les parties de toute obligation l’une envers l’autre sauf renouvellement du contrat, de leur part, et, d’autre part, « qu’il n’est ni prouvé ni même allégué, en l’espèce, que les parties à la date d’échéance, sont demeurées dans les liens d’un contrat de bail, il conviendrait de dire que la demande en réintégration est devenue sans objet » , alors, selon le moyen, que le contrat de bail du 10 avril 2010, stipule en ce qui concerne sa durée que « le présent bail ….renouvelable par tacite reconduction sauf préavis de six (06) mois avant expiration du bail par l’une ou l’autre partie » ; qu’en l’absence de tout préavis, le bail est automatiquement renouvelé par cette tacite reconduction surtout que ledit bail n’a pas fait l’objet de dénonciation ni de demande en résiliation judiciaire par l’une quelconque des parties ; Attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 123, alinéa 3 de l’Acte uniforme visé au moyen « en cas de renouvellement pour une durée indéterminée, les parties doivent prévoir la durée de préavis de congé qui ne peut être inférieure à six mois » ; Mais attendu que s’agissant du bail à durée déterminée, l’article 124 de l’AUDCG qui est la disposition applicable, exige, pour son renouvellement, une demande expresse, à peine de déchéance, du preneur, même devant une clause de renouvellement par tacite reconduction, les dispositions des articles 123 et 124 de l’AUDCG étant d’ordre public au sens de l’article 134 du même Acte uniforme ; Attendu, en l’espèce, qu’au moment où la cour d’appel statuait le 10 avril 2019, le bail à durée déterminée qui liait les parties était effectivement arrivé à expiration depuis le 31 mars 2019, et n’avait pas fait l’objet d’une demande de renouvellement de la part du preneur ; qu’ainsi, en reprochant au juge d’appel d’avoir violé la disposition visée au moyen alors même qu’ en cette matière le texte applicable est l’article 124 de l’AUDCG, le requérant a articulé son moyen sur le fondement d’une disposition inadéquate ; qu’il échet de déclarer ce moyen irrecevable ; Sur le deuxième moyen tiré du défaut de base légale résultant de l’absence, de l’insuffisance, de l’obscurité ou de la contrariété des motifs
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir condamné madame BARUXAKIS au paiement, à titre des dommages-intérêts de la somme de 5.000.000 F CFA, laquelle serait modique et inférieure à la perte subie, en dépit de nombreuses justifications apportées par le demandeur au pourvoi pour démontrer l’importance du préjudice tant matériel que moral qu’il a souffert du fait de son expulsion du local loué ; que la cour d’appel bien que reconnaissant l’existence de la faute commise par le bailleur au regard des dispositions des articles 1147 du code civil ivoirien et 109 de l’AUDCG , n’a pas tiré toutes les conséquences pécuniaires qui en résultent ; qu’en décidant de ne lui accorder que la somme de 5.000.000 FCFA, alors que le préjudice subi du fait de la fermeture du local pendant 140 jours est estimée à 70.000.000 FCFA, et que le préjudice moral découlant de cette situation mérite un réparation à hauteur de 25.000.000 FCFA, l’arrêt de la cour d’appel a manqué de base légale et encourt cassation ; Mais attendu qu’au regard des deux dispositions invoquées à l’appui du moyen, l’inexécution par le bailleur de ses obligations contractuelles, à défaut pour le juge d’en ordonner l’exécution, ne peut se résoudre qu’en dommages-intérêts ; qu’en l’espèce, à défaut pour la cour d’appel d’ordonner la réintégration du requérant dans le local, pour le motif ci-avant relevé, c’est à bon droit qu’elle lui a alloué des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ; que le requérant ne saurait lui opposer l’absence de base légale motif pris de la modicité de la somme à lui accordée, dès lors, qu’en fixant le montant des dommages-intérêts, le juge d’appel a fait une appréciation souveraine des éléments de fait qui lui sont soumis; qu’au demeurant, le requérant ne démontre pas l’absence, l’insuffisance, l’obscurité ou la contrariété des motifs, vantées de la décision attaquée ; qu’il s’ensuit que le moyen est mal fondé ;
Attendu qu’aucun des deux moyens de cassation n’ayant prospéré, il y a lieu de rejeter le pourvoi comme étant mal fondé ; Attendu le requérant ayant succombé sera condamné aux dépens ; PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré : Déclare le pourvoi mal fondé, le rejette ; Condamne le requérant aux dépens ; Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus, et ont signé :
Le Président Le Greffier