ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA) -------- COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA) --------- Deuxième chambre ------- Audience publique du 15 juin 2023
Pourvoi :n° 252/2020/PC du 09/09/2020
Affaire :Société B.M. Technologies SARL (Conseil : Maître Kabran APPIA, Avocat à la Cour) Contre Société Gruppo Antonini (Conseil : Maître Eulalie KOLYARDO-NGANGA, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 130/2023 du 15 juin 2023
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, présidée par Monsieur Armand Claude DEMBA, assisté de Maître Louis Kouamé HOUNGBO, Greffier, a rendu en son audience publique ordinaire du 15 juin 2023 l’Arrêt dont la teneur suit, après délibération du collège de juges composé de : Messieurs : Armand Claude DEMBA, Président, rapporteur Sabiou MAMANE NAISSA,Juge Mathias NIAMBA,Juge Joachim GBILIMOU,Juge Ndodinguem Casimir BEASSOUM,Juge
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 09 septembre 2020, sous le n°252/2020/PC et formé par Maître Kabran APPIA, Avocat à la Cour, cabinet sis Commune de Cocody, Deux Plateaux, Las Palmas, Immeuble C, 20 BP 419 Abidjan 20, agissant au nom et pour le compte de la société B.M. Technologies SARL, dans la cause l’opposant à la société Gruppo Antonini, ayant pour conseil Maitre Eulalie KOLYARDO-NGANGA, Avocate à la Cour, cabinet sis BD Général de Gaulle, Immeuble nouveau Presbytère (à côté de Ac AdA, face Aa Ae Ab, BP 1072, Pointe-Noire,
en cassation de l’arrêt n° 022 du 11 juin 2019, de la Cour d’appel de Pointe-Noire, dont le dispositif est le suivant : « EN LA FORME :
Constate que l’appel de la société B.M. Technologies SARL a déjà été reçu par arrêt avant dire droit du 30 octobre 2018 ; AU FOND Infirme en toutes ses dispositions le jugement commercial rôle 156, répertoire 637 rendu par le Tribunal de Commerce de Pointe-Noire en date du 06 décembre 2017 ; STATUANT A NOUVEAU Constate la rupture abusive par la société Gruppo Antonini, du contrat passé avec la société B.M. Technologies SARL le 15 juin 2015 ; EN CONSEQUENCE Condamne la société Gruppo Antonini SPA, à payer la société B.M. Technologies SARL les sommes suivantes :
1 000 000 000 FCFA au titre du manque à gagner ;
100 000 000 FCFA au titre des investissements réalisés ;
75. 000 000 FCFA au titre du préjudice d’image ;
Soit un total de 1.175.000.000 FCFA ;
Déboute la société B.M. Technologies SARL du surplus de sa demande…» ; La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent Arrêt ; Sur le rapport de Monsieur Armand Claude DEMBA, Premier Vice-président ; Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ; Attendu qu’il résulte des pièces de la procédure que, courant l’année 2015, les sociétés B.M. Technologies B et Gruppo Antonini se liaient par un contrat d’exécution de travaux dit fire fighting project ; que par la suite, les deux parties entraient en mésintelligence relativement à l’exécution de ce contrat, et la société B.M. Technologies SARL saisissait le Tribunal de commerce de Pointe-Noire qui, le 6 décembre 2017, les renvoyait à l’exécution d’une transaction opérée entre elles ; que mécontente de ce jugement, la société B.M. Technologies SARL interjetait appel à la Cour de Pointe-Noire, laquelle vidait sa saisine par l’arrêt n°022 du 11 juin 2019 qui infirmait le jugement et condamnait la société Gruppo Antonini à payer à son adversaire d’importantes sommes d’argent au titre de divers préjudices ; qu’à son tour, la société Gruppo Antonini se pourvoyait en cassation devant la Cour suprême du Congo ; qu’en date du 9 juillet 2020, la Cour suprême cassait l’arrêt de la cour d’appel sans renvoi, « plus rien ne restant à juger » ; que la société Gruppo Antonini faisait donc signifier ce dernier arrêt à B.M. Technologies SARL ; qu’à la suite de cette signification, celle-ci décidait alors de porter le même arrêt 022 du 11 juin 2019 de la Cour d’appel de Pointe-Noire à la censure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ; Sur la compétence de la Cour
Attendu que, dans son mémoire en réponse reçu au greffe de la Cour le 06 avril 2021, la société Gruppo Antonini soulève l’incompétence de la CCJA ou l’irrecevabilité du recours, aux motifs que « l’arrêt attaqué, rendu le 11 juin 2019, avait fait l’objet d’un pourvoi en cassation devant la Cour suprême du Congo qui l’a cassé en toutes ses dispositions ; que cette décision ne saurait de nouveau être examinée par la CCJA » ; qu’à son sens, les conditions de la compétence de la CCJA, telles que fixées par le Traité de l’OHADA, ne sont donc pas remplies ; Mais attendu que l’article 14 du Traité de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires dispose, en substance, que « saisie par la voie de recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats Parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des règlements prévus au présent Traité à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales ; elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats Parties dans les mêmes contentieux ; en cas de cassation, elle évoque et statue sur le fond » ; Qu’en l’espèce, les pièces du dossier renseignent nettement que plusieurs échanges entre les parties litigantes, devant le Tribunal de commerce de Pointe -Noire et la Cour d’appel de la même circonscription judiciaire, ont porté sur des « saisies conservatoires de biens meubles corporels ou incorporels » pratiquées par un huissier de justice et ce, en application de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; qu’il s’en infère que les conditions de la compétence de la CCJA, telles que fixées par le Traité susmentionné, sont bien remplies et que l’exception d’incompétence soulevée mérite rejet ; Sur la recevabilité du pourvoi Attendu qu’il est établi, par contre, que par son arrêt n°038/GCS-2020 du 09 juillet 2020, la Cour suprême du Congo a cassé sans renvoi l’arrêt n°022 du 11 juin 2019 de la Cour d’appel de Pointe-Noire ; que ledit arrêt a donc disparu de l’ordonnancement juridique du Congo ; qu’il en résulte que, pour mieux défendre ses intérêts, la société B.M. Technologies SARL aurait dû exercer un recours en annulation contre la décision de la Cour suprême et ce, en observation des articles 18 du Traité précité et 52 du Règlement de procédure de la CCJA ; qu’ainsi, en formant un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la cour d’appel qui n’existe plus dans l’ordonnancement juridique du Congo,au lieu d’exercer un recours en annulation contre l’arrêt de la Cour suprême, la société B.M. Technologies SARL a exposé son pourvoi à l’irrecevabilité ; qu’il échet de déclarer irrecevable ledit pourvoi pour autorité de la chose jugée ; Sur les dépens
Attendu que la société B.M. Technologies SARL succombant à l’action, il y a lieu de la condamner aux dépens ; PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré, Se déclare compétente ; Déclare irrecevable le pourvoi en cassation formé par la société B.M. Technologies SARL contre l’arrêt n° 022 rendu le 11 juin 2019 par la Cour d’appel de Pointe-Noire ; Condamne la société B.M. Technologies SARL aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé : Le Président Le Greffier