ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA) -------- COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA) --------- Deuxième chambre -------
Audience publique du 29 juin 2023
Pourvoi : n° 030/2023/PC du 27/01/2023
Affaire : La Société NSIA Banque Bénin-SA (Conseils : SCPA D2A, Avocats à la Cour) Contre La Société Africaine de Distribution et de Négoce Oil dite ADN OIL (Conseil : Maître Bernard Adéyèmi PARAISO, Avocat à la Cour) Arrêt N° 156/2023 du 29 juin 2023 La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, présidée par Monsieur Armand Claude DEMBA, assisté de Maître Louis Kouamé HOUNGBO, Greffier, a rendu en son audience publique ordinaire du 29 juin 2023 l’Arrêt dont la teneur suit, après délibération du collège de juges composé de : Messieurs : Armand Claude DEMBA, Président Sabiou MAMANE NAISSA,Juge Mathias NIAMBA,Juge Joachim GBILIMOU,Juge, rapporteur Ndodinguem Casimir BEASSOUM,Juge
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans le 27 janvier 2023, sous le n° 030/2023/PC et formé par la SCPA D2A, représentée par Maîtres Olga ANASSIDE et Nicolin ASSOGBA, Avocats au Barreau du Bénin, demeurant et domiciliés ès qualités au lot 957, Ad Aa, Immeuble Af, 01 BP 4452, Cotonou, agissant au nom et pour le compte de la Société NSIA Banque Bénin SA, dont le siège est sis au quartier 76, Rue 308 Révérend Père Colineau, 01 BP 955, Ab, Bénin, représentée par son directeur général monsieur A Ac Ag, demeurant et domicilié ès qualité audit siège, dans la cause qui l’oppose à la la Société Africaine de Distribution et de Négoce Oil, en abrégé, ADN OIL, société à responsabilité limitée de droit béninois, dont le siège est sis à Abomey-Calavi, quartier GBODJO, 05 BP 1568 Cotonou, représentée par son gérant monsieur Ae Aa, demeurant et domicilié ès qualité audit siège, en rectification de l’Arrêt n° 176/2022 rendu le 24 novembre 2022 par la Cour de céans et dont le dispositif est le suivant : « Statuant publiquement, après en avoir délibéré, Casse l’arrêt N°157 CH-COM/2021 rendu le 23 juin 2021 par la Cour d’appel de Cotonou ; Evoquant : Déclare irrecevable l’appel interjeté par NSIA Banque Bénin SA ; La condamne aux dépens. » ; La requérante invoque les motifs de rectification tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent Arrêt ; Sur le rapport de Monsieur Joachim GBILIMOU, juge ; Vu les articles 13, 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ; Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure qu’en vue du paiement de sa dette de 140.334.415 FCFA, en principal et accessoires, la société NSIA Banque Bénin sollicitait et obtenait à l’encontre de la société ADN OIL l’ordonnance d’injonction de payer n°005/2017 rendue le 06 janvier 2017 par le Président du Tribunal de première instance de première classe de Cotonou ; que ce tribunal, saisi de l’opposition de la société ADN OIL formée contre cette ordonnance, la condamnait au paiement de la somme de 19.548.088 FCFA, par jugement n°03/1CH-PS/20 rendu le 15 janvier 2020 ; que sur l’appel de la société NSIA Banque Bénin, la Cour d’appel de Cotonou, par arrêt infirmatif n°157/CH-COM/2021 du 23 juin 2021, condamnait la société ADN OIL et son gérant Ae Aa à lui payer la somme de 30.000.000 FCFA ; que statuant sur le pourvoi formé contre cet arrêt par ladite société NSIA Banque, la Cour de céans rendait le 24 novembre 2022, l’arrêt n° 176/2022, objet de la présente requête en rectification d’erreurs et omissions ; Sur la recevabilité du recours en rectification Vu l’article 45 ter du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ;
Attendu qu’au soutien de son recours, la société NSIA Banque Bénin affirme que la Cour de céans a commis, dans son appréciation, une erreur entre la computation du « délai franc » et celle du « délai non franc » ; que cette interversion des deux notions a conduit à une décision préjudiciant à ses intérêts ; qu’elle explique que, selon ce que le dossier révèle, la Haute juridiction a retenu une computation erronée du délai d’appel, en déterminant le jour d’échéance dudit délai sans égard à son caractère franc, par une addition mécanique et indifférenciée des trente jours constituant ledit délai, et sans indiquer pourquoi l’article 335 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution (AUPSRVE) qui s’impose a été neutralisé, alors que, selon la requérante, la raison commandait que la Cour, ayant elle-même constaté l’applicabilité des articles 15 et 335 de l’AUPSRVE, en tire les conséquences par une application combinée de ces textes ; que les points de départ du 15 janvier 2020, le « dies a quo », et d’arrivée du 14 février 2020, le « dies ad quem » du délai, étant exclus dans la computation, en raison, d’une part, du caractère franc desdits délais et, d’autre part, du caractère de jours non ouvrés et non comptés du samedi 15 et du dimanche 16 février 2020 suivant le dernier jour, elle avait jusqu’au 17 février 2020 pour faire appel ; qu’elle estime qu’en ne rétractant pas l’arrêt objet de son recours pour préserver la sécurité juridique et la prévisibilité du droit OHADA, telles que voulues par les dispositions précitées, la Cour de céans laisserait subsister une erreur grossière rendant inapplicable l’article 335 de l’AUPSRVE ; qu’en définitive, il lui est demandé de :
« Constater (qu’elle) a visé les articles 15 et 335 de l'AUPSRVE dans l'arrêt querellé n'en a pourtant pas tiré les conséquences de droit ; Constater (qu’elle) a par erreur intégré le décompte des dies a quo et dies ad quem à la computation du délai franc de trente (30) jours ; Constater que l'arrêt querellé omet ainsi l'application de l'article 335 de l'AUPSRVE ; Constater que le dossier révèle des erreur et omission dans la vérification du délai pour interjeter appel contre le jugement sur opposition ; Constater que l'erreur grossière dans la computation du délai d'appel fait accompagner l'article 335 de l'AUPSRVE d'une interprétation dans les deux sens ; Constater que la raison commande une application combinée des articles 15 et 335 de l'AUPSRVE pour l'appréciation du délai d'appel contre le jugement sur opposition ; Constater que les 15 et 16 février 2020 sont des jours non ouvrables en République du Bénin ; Constater que l'arrêt dont la rectification est demandée présente un risque d'insécurité et d'imprévisibilité du droit OHADA ; EN CONSEQUENCE
Rétracter l’arrêt n°176/2022 du 24 novembre 2022 rendu par la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ; STATUANT A NOUVEAU, Rejeter le recours en cassation formé par la société ADN OIL Sarl contre l’arrêt n°157 CH-COM/2021 rendu par la Cour d’appel de Cotonou ; Condamner ADN OIL SARL aux dépens » ; Attendu qu’en réponse et dans ses observations déposées au greffe de la Cour de céans le 05 avril janvier 2023, la défenderesse soulève l’irrecevabilité du recours, au motif que sous le couvert d’une rectification pour erreur matérielle, fondée sur une prétendue violation de l’article 15 de l’AUPSRVE, la requérante convie en réalité la CCJA à modifier les droits qui lui sont reconnus par l’Arrêt n°157/2022 du 24 novembre 2022 et à porter atteinte à l’autorité de la chose jugée attachée audit arrêt ; que suivant une position jurisprudentielle constante de la Cour, les recours en rectification d’erreurs et omissions matérielles ne doivent toucher le fond du litige ou remettre en cause l’autorité de la chose jugée ; que la NSIA Banque Bénin n’ayant pu établir une erreur matérielle rectifiable au sens de l’article 45 ter du Règlement de procédure de la Cour, son recours sera déclaré irrecevable; Attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 45 ter du règlement de procédure de la CCJA, « les erreurs ou omissions matérielles qui affectent un arrêt de la cour peuvent toujours être réparées par elle selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, selon ce que la raison commande. La Cour est saisie par simple requête par l’une des parties ou par requête commune ; elle peut aussi se saisir d’office »; qu’il ressort de ce texte que la recevabilité d’un tel recours est tributaire essentiellement de l’existence d’erreurs ou omissions purement matérielles affectant la décision déférée aux fins de sa rectification, sans modifier la substance, le sens et la portée ou remettre en cause l’interprétation ou l’appréciation par la Cour des faits et moyens soumis à son examen ; Attendu, en l’espèce, que la requérante reproche à la Cour de céans une prétendue erreur dans son appréciation, entre la computation du « délai franc » et celle du « délai non franc », l’ayant amenée à retenir une computation erronée du délai d’appel ; que tels que spécifiés dans sa requête, les éléments sur lesquels repose le recours ne caractérisent en rien des erreurs et omissions matérielles pouvant justifier la rectification d’un Arrêt de la CCJA au sens de l’article 45 ter susvisé du Règlement de la Cour ; qu’ils constituent, en réalité, une critique et une remise en cause de l’interprétation et de l’appréciation faite par la Cour de céans de la computation du délai d’appel de l’article 15 de l’AUPSRVE ; qu’il échet, dès lors, de déclarer la requête en rectification irrecevable ; Sur les dépens
Attendu que la société NSIA Banque Bénin SA, ayant succombé, sera condamnée aux dépens ; PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré, Déclare irrecevable le recours en rectification d’erreurs ou omissions matérielles introduit par la société NSIA Banque Bénin SA contre l’Arrêt n°157/2022 du 24 novembre 2022 rendu par la Cour de céans ; Condamne ladite société aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé : Le Président Le Greffier