Est examiné le recours déclaré par le défendeur Commission Nationale de Compensation des Immeubles contre la décision n° 450/A de la date du 05 octobre 2015 de la Cour d’Appel de Bucarest – Section III civile, la cause ayant pour objet la Loi n° 10/2001.
A l’appel nominal sont présents les demandeurs M.B.F.C.T., F.E.L.A.T. et T.F.I.R., représentés par avocat A.L.M., en l’absence de la requérante.
La procédure de citation est légalement accomplie.
Le magistrat assistant fait le compte rendu de la cause et indique que le recours a été déclaré dans les délais, que ses raisons ont été communiquées et que les demandeurs ont déposé leur mémoire au terme légal communiqué.
La Haute Cour constate qu’il n’y a pas de demandes, exceptions ou questions préalables et accorde la parole sur le recours.
Le défenseur des demandeurs pose des conclusions de rejet du recours, comme étant infondé et de maintien comme légale et bien- fondée de la décision attaquée. Il indique que même si le défendeur invoquait les raisons d’illégalité prévues à l’art. 304 etc. du Code de procédure civile, elle ne faisait aucune critique concrète de la décision et se bornait à certaines précisions concernant les procédures prévues dans la législation applicables et à la modalité dont elle entendait résoudre l’affaire. En ce qui concerne l’évocation par le défendeur du terme de 60 mois prévus par l’art. 34 al.1 de la Loi n° 165/2013, il soutient, comme l’ont correctement soutenu l’instance du fond et l’instance d’appel, que ce terme n’était pas applicable dans la cause, compte tenu de la décision n° 269/2014 de la Cour Constitutionnelle, qui a constaté que les dispositions de l’art. 4 thèse II – de la Loi n° 165/2013 étaient constitutionnelles dans la mesure où les termes prévus à l’art. 34 al.1 de la même loi ne s’appliquaient pas aux causes figurant déjà au rôle des instances au moment de l’entrée en vigueur de la loi. Il estime que la présente demande pouvait être analysée exclusivement par rapport au cadre législatif applicable au moment de l’enregistrement de la demande, respectivement le 13.12.2012. Sans frais de justice.
Après délibéré,
LA HAUTE COUR,
Constate ce qui suit, sur la présente cause:
Par la demande d’appel en justice reposant sur les dispositions de la Loi n° 554/2004, de la Loi n° 10/2001 et du Titre VII de la Loi n° 247/2005, enregistrée d’abord au rôle de la Cour d’Appel de Bucarest, le 13 décembre 2012, les réclamantes M.B.F.C.T., T.F.I.R. et F.E.L.A.T. ont demandé en contradictoire avec la Commission Centrale de Fixation des Dédommagements: d’obliger le défendeur à analyser le dossier n° 50329/CC afférent aux dispositions n° 241/04.05.2010, pour vérifier la légalité du rejet de la demande de restitution en nature de l’immeuble formé d’un terrain et une construction, situés à Sinaia, str. Avram Iancu n° 43-45, département de Prahova, dans les 30 jours après que la décision soit demeurée irrévocable; de constater que le dossier administratif en cause était complet, conformément aux exigences de la Loi n° 10/2001; d’obliger, à la fin de la période de suspension des émissions de titres dédommagement, des titres de conversion et des procédures d’évaluation des immeubles pour lesquels des dédommagements sont accordés, d’obliger, donc, le défendeur à désigner un évaluateur conformément à la procédure légale et de lui remettre le dossier pour rédiger son rapport; d’obliger le défendeur à émettre la décision représentant le titre de dédommagement dans les 60 jours suivant la fin de la période de suspension.
Le défendeur - la Commission Centrale de Fixation des Dédommagements a invoqué dans un mémoire l’exception de prématurité de la demande, par rapport aux prévisions de l’OUG n° 4/2012, approuvée avec certaines modifications par la Loi n° 117/2012, sur la suspension des procédures d’évaluation et d’émission de la décision qui représente le titre de dédommagement et, pour le fond, elle a demandé le rejet de la demande, comme infondée.
Par la conclusion du 19.02.2013, rendue par la Cour d’Appel de Bucarest – VIIIe Section de Contentieux administratif et fiscal il a été disposé d’enlever la cause du rôle et de l’envoyer au Tribunal de Bucarest – Section de Contentieux Administratif et Fiscal.
Devant cette instance, selon les notes de séance déposées au dossier par le défendeur, on a invoqué l’exception de prématurité de la demande d’appel en justice, vu que par la Loi n° 165/2013, un délai de 60 mois après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi a été établi, à l’art. 34 al.1, délai dans lequel la Commission Nationale avait l’obligation de tirer au clair les dossiers de dédommagements enregistrés au Secrétariat de la Commission Centrale.
Il a été demandé, en subsidiaire, de rejeter la demande comme infondée, vu que, suite à l’entrée en vigueur de la Loi n° 165/2013, toute la procédure de solution des dossiers de dédommagement avait lieu suivant ses dispositions.
Le 09.05.2014 la Commission Centrale de Fixation des Dédommagements a formulé une demande pour introduire dans la cause la Commission Nationale de Compensation des Immeubles (CNCI).
Le 13.05.2014, les réclamantes ont formulé une demande, avec précisions et modifications, indiquant leur intention d’intenter un procès en contradiction à la Commission Nationale de Compensation des Immeubles, demandant que l’on constate que le dossier n° 50329/CC, concernant l’immeuble de Sinaia, str. Avram Iancu n° 43-45, avait déjà été nationalisé et qu’il était complet, de constater que le grief 4 de la demande était demeuré sans objet, vu que, selon la Loi n° 165/2013, la CNCI n’avait plus l’obligation de désigner un évaluateur, ce qui modifiait en même temps le grief 4 de la demande; conformément à la Loi n° 165/2013, dans le sens qu’il demandait à l’instance d’obliger le défendeur à émettre la décision de compenser les immeubles.
Par la conclusion du 10.06.2014 du Tribunal de Bucarest – Section de Contentieux Administratif et Fiscal au dossier n° 14111/3/2013 a été admise l’exception d’incompétence fonctionnelle de la Section de Contentieux Administratif et Fiscal, il a été disposé d’enlever la cause du rôle et de la présenter à la Chambre civile en vue d’une solution compétente.
Le dossier a été enregistré au rôle de la IIIe Chambre civile le 01.07.2014, au n° 22669/3/20014.
Par la sentence civile n° 1295/09.10.2014 du Tribunal de Bucarest – IIIe Chambre civile, a été admise l’exception d’incompétence matérielle, la solution de la cause a été déclinée en faveur du Tribunal de Bucarest – Section de Contentieux Administratif et Fiscal, l’on a constaté un conflit négatif de compétences et la cause a été envoyée à la Cour d’Appel de Bucarest – Chambre civile.
Par la sentence civile n° 124F/18.11.2014 la compétence pour régler la cause a été conférée à la Chambre civile du Tribunal de Bucarest.
Le Dossier a été enregistré au rôle de la IIIe Chambre civile le 03.02.2015, au n° 22669/3/2014.
Au terme du procès du 07.05.2015, l’instance a rejeté l’exception de prématurité de l’appel en justice, invoquée par le défendeur par son mémoire, comme infondée, pour les considérations exposées dans la conclusion de séance de cette date-là, tandis que par la sentence civile n° 741/4.06.2015, le Tribunal de Bucarest – IIIe Chambre civile a admis la demande d’appel en justice, précisée et modifiée, formulée par les demandeurs en contradictoire avec le défendeur Commission Nationale de Compensation des Immeubles; il a obligé le défendeur d’émettre une décision accordant des mesures réparatrices dans les conditions du III” Chapitre de la Loi n° 165/2013 pour l’immeuble comprenant un terrain de 2.227,08 m2; situé à Sinaia, str. Avram Iancu n° 43-45 et impasse de Padina, ainsi que pour la construction- logement, située à Sinaia, impasse de Padina, n° 1, département de Prahova, d’une superficie utile de 130,02 m.2 et la superficie construite de 141,92 m.2, y compris l’entrepôt d’une superficie construite 21,96 m2 et il a obligé le défendeur de payer aux demandeurs la somme de 1.500 lei au titre de frais de justice, représentant l’honoraire de l’avocat.
Il a été retenu dans les considérations de la sentence que, par la disposition n° 241/04.05. 2010, du maire de Sinaia, l’octroi de dédommagement a été proposé aux notifiants F.A., à son propre nom et en tant qu’ héritier de sa sœur F.E.N., à F.E.L.A.T. et T.F.I.R., dans les conditions du Titre VII de la Loi n° 247/2005 pour l’immeuble mentionné.
Conformément au certificat d’héritier n° 02/11.01.2012 émis par le BNP I.L.M., suite au décès du nommé F.A., l’unique héritière restée est la réclamante M.B.F.C.T..
Ultérieurement à l’émission de l’avis de légalité par l’Institution du Préfet du département de Prahova, le dossier a été présenté à la Commission Centrale de Fixation des Dédommagements, où il a été enregistré au n° 50329/ CC.
En droit, le tribunal a eu en vue les prévisions de l’art. 16 du IIIe Chapitre de la Loi n° 165/2013, concernant l’octroi de mesures compensatoires sous forme de points, par la Commission Nationale de Compensation des Immeubles.
Par rapport, aux prévisions de l’art. 21 du même document normatif, le tribunal a analysé les documents probants concernant l’immeuble en litige, ancienne propriété de l’auteur F.Mi., en vertu des documents probants représentés par: la Fiche matricule n° 2 de la ville de Sinaia, où figure au n° matricule 1144 la propriété-construction de Sinaia, str. Carol n° 39, actuellement Impasse Padina n° 2 (f.38-39,44); le permis de construire pour refaire la clôture de la propriété à la même adresse (f.41-43); les documents de passage en propriété de l’Etat – le Procès- verbal de nationalisation – dont il résulte que l’immeuble comportait un terrain d’une superficie de 2.612 m2 et un bâtiment d’une superficie construite de 121 m2 (f.81-83).
Le tribunal a encore retenu que les réclamantes prouvaient leur qualité de personnes ayant droit par les écrits suivants: certificats d’Etat civil déposés au dossier (f.127-130), certificat d’héritier n° 104/2002, délivré par le Bureau Notarial TC (f.48-49); le certificat d’attestation de la succession de la nommée F.E.N. (f.51-52); le certificat d’héritier n° 19/08.06.2005 émis par BNP ILM de la part de la nommée F.E.N. (f. 96-100); le certificat prouvant la qualité d’héritier n° 02/11.01.2012 émis par BNP ILM de la part de F.A. (f.126).
Il a été constaté par la première instance que l’immeuble est passé abusivement dans la propriété de l’Etat, par l’application du Décret n° 111/1951, suite à la Décision n° 21/914/ 26.04.1956 (f.79-80).
En même temps, on a retenu du certificat émis par le maire de la ville de Sinaia (f.40) que la rue (strada) Avram Iancu portait antérieurement le nom de rue Carol, tandis que, de l’adresse n° 10374/16.01.2002, émise par la Mairie de la ville de Sinaia (f.86), il ressort que l’immeuble-terrain, ancienne propriété des F., possédait actuellement la configuration suivante: les lots débouchant sur la rue A.Iancu ont les numéros 43 et 45, ceux situés sur l’impasse de Padina sont – au n° 1 pour l’ancien immeuble et au n° 2 pour le bâtiment – propriété de Pinta, - construit sur un terrain de la propriété susmentionnée.
Concernant la modalité de restitution, le tribunal a retenu que l’immeuble- construction a été entièrement vendu aux locataires par l’Etat roumain (f.87-92), en vertu de l’art. 9 de la Loi n° 112/1995. Il résulte du plan d’emplacement et délimitation du terrain, effectué par un expert-topographe autorisé, pour la solution partielle de la Notification n° 217/2001, que la superficie du terrain était de 2.576, 36 m.2., dont a été restitué aux notifiants F.A. et F.E.N. le terrain demeuré libre, d’une superficie de 349,28 m2, le restant du terrain ne pouvant être restitué en nature, car le terrain sous les construction avait été vendu avec les logements, une partie du terrain étant attribué par décision administrative pour la construction de logements, avant 1989 et une autre partie, aménagée en voie d’accès aux lots formés, étant actuellement la propriété publique de la ville de Sinaia.
Constatant que sont applicables, dans la cause, les dispositions de la Loi n° 165/2013 (l’art. 4 de la loi prévoyant que les dispositions de cet acte normatif étaient aussi applicables aux causes figurant au rôle des instances à la date de l’entrée en vigueur de cette loi); que selon l’art. 1 al.2 de la Loi n° 165/2013, dans la situation où la restitution en nature des immeubles abusivement confisqués sous le régime communiste n’était plus possible, les mesures réparatrices équivalentes qui seront accordées pouvaient être des compensations en biens ou en points, comme prévu au chapitre III; vu que le dossier administratif des réclamantes avait été complété par les écrits demandés par le défendeur, comme il résulte de l’adresse n° 2796/15.03.2013, émise par le Conseil départemental de Prahova (f.19 – Dossier n° 14111/3/2013), selon laquelle on n’a pas identifié d’écrits dont il ressorte que l’on eut fixé ou encaissé des dédommagements pour l’immeuble en question; le fait que les affirmations de le défendeur concernant des différences entre la construction actuelle et l’ancienne trouvent leur solution dans la nouvelle loi (dispositions de l’art. 21 de la Loi n° 165/2013 réglant y compris la situation qui ne permet plus d’établir la position ou les caractères techniques de l’immeuble pour lesquels on fixe des dédommagements), le tribunal a admis la demande d’appel en justice, précisée et modifiée.
Contre cette sentence s’est pourvue en appel la Commission Nationale de Compensation des Immeubles (CNCI), en soutenant essentiellement que l’action était prématurée par rapport aux dispositions de la Loi n° 165/2013, le terme accordé pour la solution des dossiers enregistrés à la SCCSD, conformément à l’art. 34 al.1, étant de 60 mois dès l’entrée en vigueur de la nouvelle loi; que l’instance du fond n’avait pas tenu compte des dispositions de l’art. 32 de la Loi n° 165/2013 et que le dossier de dédommagements n° 50329/CC serait résolu dans les conditions de la Loi n° 165/2013, en respectant l’ordre d’enregistrement des dossiers fixé par la Décision n° 10299 du 14.11. 2012 de la CCSD, décision faite sienne aussi par l’entité qui a pris en charge les attributions de la Commission Centrale, respectivement la Commission Nationale de Compensation des Immeubles, lors de sa séance du 14.11.2013.
Par sa décision n° 450 A du 5 octobre 2015, la Cour d’Appel de Bucarest- IIIe Chambre civile et pour les causes impliquant mineurs et famille a rejeté, comme infondé, l’appel du défendeur.
Dans les considérations de ces décisions, il a été retenu que la demande d’appel en justice a été formulée et enregistrée au rôle de l’instance le 13.12.2012, avant l’entrée en vigueur de la Loi n° 165/2013, ce qui fait que l’on ne saurait juger cette demande prématurée, par rapport à ce qui est statué par la décision n° 269/2014 de la Cour Constitutionnelle, qui retenait que l’art. 34 al. 1 de la Loi n° 165/2913 était de nature à enfreindre l’égalité des armes, comme garantie du droit à un procès équitable, dans l’hypothèse où l’on interprétait que les délais prévus par ce texte de loi étaient applicables aussi aux procès figurant au rôle des instances à la date de l’entrée en vigueur de la loi.
En ce qui concerne les normes de droit substantiel applicables à la cause, la Cour a constaté que l’instance première avait appliqué les dispositions des art. 4, art.1 al. 2 et 21 de la Loi n° 165/2013, obligeant le défendeur à émettre une décision d’octroi de mesures réparatrices dans les conditions du chap. III de la Loi n° 165/2013, analysant elle-même sur le fond la demande des demandeurs sous tous ses aspects, y compris la qualité de personne en droit, en vertu de la plénitude de compétences conférée par la loi et statuée par la décision n° XX/2007 de la Haute Cour de Cassation et Justice.
La Cour d’appel a fait de nouveau référence aux considération envisagées par la Cour Constitutionnelle; dans la décision n° 269/2014, dans le sens que les décisions des autorités administratives impliquées dans le processus de restitution/octroi de mesures réparatrices sont finalement soumises au contrôle de l’instance, la seule compétente pour se prononcer de façon définitive sur l’existence et l’étendue du droit de propriété, conformément à l’art. 35 al. (3) de la Loi n° 165/2013, pouvant disposer la restitution en nature, ou selon le cas, l’octroi de mesures réparatrices.
Les critiques concernant l’application des dispositions de l’art.32 al.1 de la Loi n° 165/2013 n’ont pas, non plus, été tenues pour fondées, le tribunal retenant que le dossier administratif avait été complété des écrits demandés par le défendeur, aspect qui résulte de l’adresse n° 2796/15.03.2013 émise par le Conseil Départemental de Prahova (page 19 - dossier n° 14111/3/2013.
En ce qui concerne l’ordre de solution des dossiers, évoqué par l’appelant, la Cour a estimé que la CNCI est tenue à respecter et exécuter les décisions de justice, comme tout autre sujet de droit, les décisions prises par les organes administratifs concernant ses propres procédures n’ayant nulle influence sur le pouvoir exécutoire d’une décision de justice.
Contre la décision n° 450/A du 5 octobre 2012 de la Cour d’Appel de Bucarest – IIIe Chambre civile, le défendeur Commission Nationale pour la Compensation des Immeubles s’est pourvue en recours, reprenant essentiellement les raisons de l’appel.
Sans indiquer expressément l’un des motifs du recours, prévus par l’art.304 du C.proc.civ., la requérante critique la solution donnée par l’instance concernant l’exception de prématurité, invoquant des arguments pouvant s’encadrer dans les raisons de recours prévues à l’art. 304 pts 4 et 9 C.proc. civ., comme suit:
- Pour ce qui est des critiques prévues par l’art. 304 pt. 9 C.proc. civ., on soutient que l’instance d’appel avait ignoré les aspects évoqués par le défendeur concernant le dossier de dédommagements des demandeurs, dans le sens que, durant la période des 15 mars 2012 – 15 mai 2013, la procédure d’évaluation et émission de décisions représentant des titres de propriété avait été suspendue, en vertu de l’OUG n° 4/2012, approuvée avec certaines modifications par la Loi n° 117/2012, le but de cette mesure étant d’appliquer la Décision de la CEDH, rendue dans la cause pilote « Maria Atanasiu et autres contre la Roumanie », de débloquer les opérations susmentionnées et de trouver les ressources financières nécessaires pour payer les dédommagements. Dans ces conditions, la pratique judiciaire a statué que les demandes d’obliger à émettre les titres de dédommagement sont prématurées, le droit à la solution du dossier de dédommagements étant affecté par un délai suspensif.
L’art. 34 al. 1 de la Loi n° 165/2013 fixe un nouveau délai de 60 mois, dans lequel la CNCI doit donner une solution aux dossiers de dédommagements. La nouvelle loi n’est pas de nature à limiter l’accès à la justice, elle n’affecte pas le droit de propriété, mais fixe les délais et les conditions de solution des demandes. Le fait d’imposer un délai ne peut qu’assurer un climat de sécurité des rapports juridiques.
La requérante fait référence à l’obligation des entités impliquées dans l’exécution de la loi de respecter les dispositions de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et celles de la jurisprudence de la CEDH portant sur la propriété et la solution des causes dans un délai raisonnable, concluant que l’obligation de respecter le délai de 60 jours était une obligation de résultat qui incombait aux institutions et entités impliquées dans le processus de solution.
- Le dossier de dédommagements des demandeurs sera résolu en respectant l’ordre d’enregistrement des dossiers, fixé par la décision n° 10299 du 14 novembre 2012 de la CCSD, décision que la CNCI a fait sienne.
La requérante estime que cette modalité de solution des dossiers reposait sur le principe de proportionnalité de l’analyse des dossiers, sur l’égalité de traitement, ainsi que sur le fait de ne pas défavoriser les personnes dont les dossiers ont été solutionnés ou qui doivent l’être par les entités investies d’un nombre plus important de dossiers que d’autres et chez qui, évidemment, le rythme de la solution est plus lent.
Obliger le défendeur à résoudre ce dossier de dédommagement avant les autres dossiers, en enfreignant l’ordre d’enregistrement serait une discrimination positive à l’égard des demandeurs, en infraction de l’art. 16 de la Constitution.
- La requérante soutient que, par la décision requise, a eu lieu une immixtion du pouvoir judiciaire dans la procédure administrative (critique qui s’inscrit dans le motif de recours prévu à l’art. 304 pt. 4 du C.proc. civ.), qui encourage les démarches en instance, dont la conséquence naturelle est l’augmentation du volume des demandes d’appel en justice, mais aussi la solution en priorité par le CNCI des dossiers de dédommagements qui ont fait l’objet de ces litiges. Le droit des demandeurs de voir régler leur dossier en priorité va jusque-là où commence le droit des autres personnes impliquées, respectivement d’autres personnes qui s’estiment justifiées à recevoir des dédommagements dans la procédure de rétrocession.
La requérante évoque la décision n° 861 du 28 novembre 2006 de la Cour Constitutionnelle, ayant retenu que la situation différente des citoyens selon la réglementation applicable ; conformément au principe tempus regit actum ne saurait être vue comme une infraction aux dispositions constitutionnelles, qui consacrent l’égalité devant la loi et l’autorité publique, sans privilèges ni discriminations.
Les intimés-demandeurs ont demandé dans leur mémoire le rejet du recours, comme infondé, estimant que la décision de l’instance d’appel avait été rendue dans le respect des dispositions légales.
Examinant la décision requise par le prisme des motifs de recours évoqués et des arguments apportés dans leur développement, la Haute Cour retient ce qui suit:
En ce qui concerne les critiques qui s’inscrivent dans le motif de recours prévu à l’art. 304 pt. 9 du C.proc. civ., on constate que l’instance d’appel a retenu correctement que le délai de 60 mois prévu par l’art. 34 al.1 de la Loi n° 165/2013 ne saurait être invoqué par le défendeur dans le soutien de l’exception de prématurité de la demande d’appel en justice, car, par la décision n° 269 du 7 mai 2014 de la Cour Constitutionnelle, publiée au „Monitorul Oficial” de la Roumanie n° 513 du 9 juillet 2014, il a été statué que les prévisions de l’art. 4 thèse II de la Loi n° 165/2013 concernant les mesures destinées à finaliser le processus de restitution en nature ou par équivalent des immeubles abusivement confisqués sous le régime communiste en Roumanie étaient constitutionnelles dans la mesure où les termes prévus à l’art. 34 al.1 de la même loi n’étaient pas appliqués aussi aux causes concernant la restitution des immeubles abusivement confisqués, figurant au rôle des instances à la date de l’entrée en vigueur de la loi.
L’évocation par la requérante des dispositions de l’OUG n° 4/2012, approuvée avec certaines modifications par la Loi n° 117/2012, ainsi que de la pratique judicaire élaborée sous l’emprise de cette réglementation, ne justifient pas une autre solution concernant l’exception de prématurité, car la période de suspension que prévoyait ce document normatif a pris fin le 15 mai 2013, date à partir de laquelle le défendeur aurait dû effectuer les opérations prévues par la loi, pour mener à bien les procédures d’octroi des mesures réparatrices dues aux demandeurs.
Les affirmations de la requérante, dans le sens que l’art. 34 al.1 de la Loi n° 165/2013 ne serait pas de nature à limiter l’accès à la justice, n’affecterait pas le droit de propriété et que le fait d’imposer un délai ne saurait qu’imposer un climat de sécurité des rapports juridiques, ne sont pas recevables, vu l’effet obligatoire de la décision de la Cour Constitutionnelle précédemment mentionné, qui visait expressément le problème du caractère constitutionnel des prévisions de loi critiquées dans la perspective des actions introduites auprès des instances avant l’entrée en vigueur de la Loi n° 165/2013, qui étaient en attente au moment de l’entrée en vigueur de la loi et sur lesquelles La Cour a constaté que l’art. 34 al 1. de la Loi n° 165/2013 risquait d’enfreindre l’égalité des armes, comme garantie du droit à un procès équitable, si on interprétait que les délais prévus étaient aussi applicables aux procès figurant déjà au rôle des instances à la date d’entrée en vigueur de la loi.
Les assertions de la requérante concernant l’obligation des entités impliquées dans l’exécution de la loi de respecter les dispositions de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et celles statuées dans la jurisprudence de la CEDH sur la propriété, ainsi que sur la solution des causes dans un délai raisonnable sont correctes, car ces affirmations ne font que confirmer la justesse et la légalité de la décision requise.
Pour ce qui est de l’argument évoqué par le-- défendeur en appel, renouvelé au recours, dans le sens que le dossier de dédommagement des demandeurs sera réglé dans le respect de l’ordre d’enregistrement des dossiers, établi par la décision ° 10299 du 14 novembre 2012 de la CCSD, décision faite sienne par le CNCI, la cour d’appel a retenu que les décisions des organes administratifs concernant leurs propres procédures n’ont aucune influence sur le pouvoir exécutoire d’une décision de justice. Au sujet de cet argument de l’instance d’appel, la requérante ne formule nulle critique dans son pourvoi.
En plus de cet argument, la Haute Cour tient compte du fait que l’institution, par décision intérieure de l’autorité accusée, de règles pour la solution des dossiers de dédommagement ne saurait se justifier que si ces règles avaient pour conséquence de rendre les procédures légales plus efficaces et pour résultat la solution des demandes dans un délai raisonnable, comme la requérante se le propose elle-même.
Ce résultat n’a cependant pas été atteint dans l’espèce présente, car depuis la date d’enregistrement du dossier de dédommagements et jusqu’à la solution du présent recours, une période de temps appréciable s’est écoulée, sans que la demande des demandeurs aie trouvé une solution, bien que, vu les preuves administrées et mises en valeur par décision de l’instance du fond, le dossier administratif eut été complété des écrits demandés par le défendeur depuis le mois de mars 2013, comme il résulte de l’adresse n° 2796/15.03. 2013 émise par le Conseil Départemental de Prahova.
La prétendue défavorisation d’autres personnes, dont les dossiers sont en cours de solution auprès de l’autorité accusée, ne saurait être évoquée comme argument pour rejeter la demande des demandeurs, car le défendeur, en sa qualité d’autorité de l’Etat investie par la loi, au niveau central, pour vérifier les dossiers du point de vue de l’existence du droit de la personne, qui s’estime avoir droit à des mesures réparatrices, investie de l’évaluation des immeubles et de l’émission des décisions de compensation par des points, doit accorder la même attention à tous les dossiers qui lui sont soumis, l’Etat ayant l’obligation de réglementer l’organisation et le fonctionnement de cette autorité de manière à assurer le respect du principe de la célérité et du terme raisonnable concernant toutes les causes placées sous l’incidence de cette procédure spéciale.
Concernant la critique à rattacher au motif de recours prévu par l’art. 304 pt. 4 du C. de proc. civ., la Haute Cour constate que l’on ne saurait qualifier d’immixtion du pouvoir judiciaire dans la procédure administrative” le fait d’obliger le défendeur à régler le dossier de dédommagements dans le sens disposé par l’instance première, comme le prétend la requérante, cette solution étant maintenue en appel; que c’était là une concrétisation du principe du libre accès à la justice, qui permet à la partie qui s’estime lésée par l’absence de solution du dossier des dédommagements, de soumettre sa demande à l’instance de jugement.
La prévision faite par la requérante, dans le sens qu’on verra croitre ainsi le nombre de demandes à l’objet similaire au rôle des instances juridiques, ne peut pourtant pas être mise au compte de la solution rendue dans ce litige, mais dans l’hypothèse où elle serait concrétisée, elle serait la conséquence du mode de fonctionnement de l’autorité requérante. Et puis, la solution rendue dans ce litige, concernant l’exception de prématurité doit reposer sur les circonstances concrètes de la cause, non pas sur des suppositions concernant le nombre de causes ayant le même objet, qui pourraient être enregistré au rôle des instances.
Pour ce qui est de l’invocation par la requérante de la décision n° 861 du 28 novembre 2006 de la Cour Constitutionnelle, la Haute Cour constate que cette décision vise l’exception d’inconstitutionnalité des dispositions de l’art. 77, art. 164 al. 3, art. 165, art. 180 al.1 et du chapitre IX de la Loi n° 19/2000 concernant le système public des retraites et autres droits concernant les assurances sociales, dispositions légales sans lien avec l’objet et la cause du présent litige.
Par rapport à ces considérations, en vertu de l’art. 312 al.1 du C.proc. civ., le recours déclaré par le défendeur a été rejeté, comme infondé.
POUR CES RAISONS
AU NOM DE LA LOI
DECIDE:
Rejette, comme infondé, le recours déclaré par le défendeur Commission Nationale de Compensation des Immeubles contre la décision n° 450/A du 05 octobre 2015 de la Cour d’Appel de Bucarest – IIIe Chambre civile.
Irrévocable.
Rendue en audience publique, en ce 18 février 2016.