Remboursement du coût des soins médicaux dispensés dans un État membre de l'UE. Relation entre la Directive 2011/24/UE et le Règlement (CE) n° 883/2004. Réglementation en droit national de la procédure et des conditions relative aux soins de santé transfrontaliers Selon l'article 2 lettre m), de la Directive 2011/24/UE - transposée en droit national par la Loi n° 95/2006 -, l'acte de l'Union s'applique sans préjudice du Règlement (CE) n° 883/2004, une disposition similaire étant inscrite à l'article 902, paragraphe (2) de la Loi n° 95/2006, selon laquelle le titre XIX (Soins de santé transfrontaliers) ne porte pas atteinte aux obligations de l'État roumain en vertu du Règlement (CE) n° 883/2004 Afin de faciliter l'accès à des soins de santé transfrontaliers sûrs et de qualité, en vertu de la compétence nationale en matière d'organisation et de prestation de services de santé et de soins de santé, la Roumanie a réglementé en droit national les procédures et conditions juridiques relatives aux soins de santé transfrontaliers dans le domaine du remboursement effectif des coûts des soins de santé dispensés dans un autre État membre après que le patient a reçu un traitement. Il s'agit du chapitre IV avec le titre marginal „Remboursement des coûts” de la Loi n° 95/2006 et du chapitre II avec le titre marginal „Méthodologie de remboursement des prix/tarifs représentant la contre-valeur des soins de santé transfrontaliers, y compris leur niveau” du contenu des Normes méthodologiques approuvées par la Décision du Gouvernement (H.G). n° 304/2014, conjointement avec les autres normes internes secondaires approuvant tant la liste des médicaments, que leurs protocoles d'administration.
Ainsi, dans le cadre de l'analyse du rapport juridique fondé sur les soins de santé transfrontaliers (au sein de l'Union européenne), dans le volet relatif au remboursement des frais de soins médicaux dispensés à l'étranger sans autorisation préalable, le juge a dû examiner, du point de vue du droit national, l'existence/non-existence d'un refus des administrateurs du système national de santé de rembourser effectivement les frais de médicaments engagés par le bénéficiaire du traitement. En effet, seul un éventuel refus administratif, qui aurait eu pour effet de permettre au patient assuré de recourir aux instruments et mécanismes de prestation de soins de santé transfrontaliers (sous la forme d'un remboursement du coût du traitement, dans le cadre de certaines procédures et conditions prescrites), aurait pu avoir la signification d'une restriction à la libre prestation des services qui, en vertu du principe de proportionnalité, remettrait en cause le critère de nécessité et d'équilibre par rapport aux objectifs légitimes déclarés en droit national.
En d'autres termes, pour que l'effet direct du règlement de l'UE soit applicable, la juridiction devait d'abord établir, d'une part, si et dans quelle mesure la législation nationale empêchait l'accès du patient à un traitement médical à l'étranger et, d'autre part, si cette limitation ou restriction était due à des actions/inactions de l'État ou, au contraire, au comportement du patient qui n'a pas respecté les procédures établies par le droit national, afin de vérifier si les conditions prévues étaient remplies conformément à la marge d'appréciation octroyée aux États membres par le droit de l'Union. ROUMANIE LA HAUTE COUR DE CASSATION ET DE JUSTICE 1 ÈRE CHAMBRE CIVILE Décision n° 888 Dossier n°x/3/2016** Audience publique du 20 avril 2021 Mis en examen des pourvois formulés par les défendeurs au pourvoi la Caisse Nationale dʼAssurance Maladie, le Ministère de la Santé et la Caisse dʼAssurance Maladie dʼIlfov, contre l’arrêt n° 674 A du 24 avril 2019, rendu par la Cour d’Appel Bucarest – 4 ème Chambre civile.
L'audience a été consignée dans le procès-verbal dʼaudition du 6 avril 2021, qui fait partie intégrante de la présente décision ; la Haute Cour ayant besoin de temps pour délibérer, elle a ajourné l'audience au 20 avril 2021, date à laquelle elle a rendu la présente décision. LA HAUTE COUR
Sur le pourvoi civil ci-présente, constate les éléments suivants:
I. Les circonstances de l'affaire 1. L'objet de l'affaire Par la demande en justice formée auprès du Tribunal Bucarest – 3ème Chambre civile, le 05 février 2016, la requérante A. a demandé, contrairement aux défendeurs Caisse Nationale dʼAssurance Maladie, Ministère de la Santé et Caisse dʼAssurance Maladie dʼIlfov, condamner ces derniers à payer la somme de 49.030,12 euros, représentant la contre-valeur du traitement - services médicaux fournis à l'étranger, à savoir en France, services qui nʼont pas pu être forunis par la Roumanie.
2. Lʼarrêt du Tribunal Bucarest en première instance Par le jugement n° 1408/07.11.2018, le Tribunal Bucarest – 3ème Chambre civile a rejeté comme mal – fondée lʼexception du défaut de qualité pour défendre en justice de la Caisse Nationale dʼAssurance Maladie; a rejeté comme mal – fondée lʼaction introduite par la requérante A., contrairement aux défendeurs Caisse Nationale dʼAssurance Maladie, Ministère de la Santé et Caisse dʼAssurance Maladie dʼIlfov. 3. La décision de déclinaison de la Cour d'appel de Bucarest – 4ème Chambre civile Par le procès-verbal dʼaudition du 28 juin 2017, la Cour d'appel de Bucarest - 4ème Chambre civile a admis l'exception d'incompétence fonctionnelle et a décliné sa compétence pour juger lʼappel formé par lʼappelante – requérante A., contre le jugement n° 1408 du 7 novembre 2016, rendu par le Tribunal de Bucarest – 3ème Chambre civile, en faveur de la Chambre du contentieux administratif de la Cour d'appel de Bucarest.
4. La décision de déclinaison de la Cour d'appel Bucarest – 8ème Chambre du contentieux administratif Par la décision n° 123 du 23 octobre 2017, la Cour d'appel de Bucarest – 8ème Chambre contentieux administratif a admis l'exception d'incompétence fonctionnelle, soulevée dʼoffice et a décliné sa compétence pour juger lʼaffaire en faveur de la Cour d'appel de Bucarest – Chambre civile. En même temps, elle a constaté l'existence d'un conflit négatif de compétence, a sursis à statuer et a ordonné la saisine de la Haute Cour de Cassation et de Justice pour la résolution du conflit.
5. La décision de la Haute Cour de Cassation et de Justice rendue en résolution du conflit de compétence Par la décision n° 873 du 2 mars 2018, la Haute Cour de Cassation et de Justice – Chambre du contentieux administratif et fiscal a établi la compétence de résoudre le conflit en faveur de la Cour d'appel de Bucarest – 4ème Chambre civile 6. La décision rendue par la Cour d'appel de Bucarest Par la décision n° 674 A du 24 avril 2019, la Cour d'appel Bucarest - 4ème Chambre civile a admis l'appel formé par la requérante A. contre le jugement n° 1408 du 07 novembre 2016, prononcé par le Tribunal de Bucarest - 3ème Chambre et a modifié le jugement attaqué dans son intégralité, en ce sens qu'elle a admis la demande et a condamné les défendeurs à payer à la requérante le montant de 49.030,12 euros en équivalent RON à la date du paiement, représentant la valeur du traitement - services médicaux effectués à l'étranger, et la somme de 8.207 RON à titre de frais de justice, représentant le droit de timbre sur le fond et l'appel. 7. Les pourvois introduites dans lʼaffaire Les défendeurs Caisse Nationale dʼAssurance Maladie, Ministère de la Santé et Caisse dʼAssurance Maladie dʼIlfov se sont pourvu contre la décision n° 674 A du 24 avril 2019, rendue par la Cour d'appel de Bucarest – Chambre civile. 7.1. La requérante au pourvoi - intimée Caisse Nationale dʼAssurance Maladie a invoqué les moyens de cassation prévus à l'article 488, paragraphe (1), points 4, 6 et 8 du Code de procédure civile et a demandé que le pourvoi soit accueilli, que l'arrêt attaqué soit cassé et que, lors du nouvel jugement, la demande soit rejetée comme non fondée. Elle a critiqué la décision de la Cour d'appel pour l'essentiel sur les points suivants :
Par son premier moyen, la requérante au pourvoi - défenderesse a fait valoir que la décision de la Cour d'appel a été fondée à tort sur la réglementation européenne suivante : l'article 20 paragraphes (1) et (2) du Règlement (CE) no 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale et le Règlement (CEE) no 1408/1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté.
La Cour d'appel n'a pas correctement interprété et appliqué les règles de droit substantiel, étant donné que, pour pouvoir établir à fond et légalement si l'intimée-requérante avait droit au remboursement du coût du médicament Ad, médicament qu'elle a reçu sur demande en France, la Cour d'appel aurait dû commencer son analyse à partir de l'interprétation et de l'application de: la Directive 2011/24/UE relative à l’application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers, directive qui a été transposée en Roumanie par la Décision du Gouvernament (H.G) n° 304/2004, telle que modifiée et complétée; la Décision du Gouvernament. n° 304/2014 concernant lʼapprobation des règles méthodologiques en matière de soins de santé transfrontaliers, tel que modifié et complété ultérieurement ; les dispositions de l'article 231 de la Loi n° 95/2006 concernant la réforme de la santé, telle que modifiée et complétée ultérieurement ; la réglementation régissant la liste des dénominations communes internationales des médicaments accessibles aux assurés, avec ou sans contribution personnelle, sur prescription médicale, à savoir la Décision du Gouvernament n° 720/20081, telle que modifiée et complétée ultérieurement, et notamment son article 3 paragraphe (3); article 3 paragraphes (1) et (2) de l'Ordre du ministre de la Santé et du Président du CNAS n° 1301/500/2008, tel que modifié et complété ; article 237 paragraphe (1) de la Loi n° 95/2006, telle que modifiée et complétée ultérieurement.
La Cour d'appel n'a pas tenu compte du fait que, dans le cas du paiement de la contrepartie des services médicaux fournis en France, ce sont les dispositions de la Décision du Gouvernament n° 304/2014 qui sont applicables, et non les dispositions de l'article 20 paragraphes (1) et (2) du Règlement (CE) n° 883/2004 et du Règlement (CEE) n° 1408/1971.
On n'a pas tenu compte du fait que les conditions expresses prévues à l'article 231 de la Loi no 95/2006, à l'article 3 paragraphes (1) et (2), Chapitre II de l'Annexe à la Décision du Gouvernament no 304/2014, ne sont pas remplies, en l'absence de la présentation par l'intimée-requérante d'un ticket d'admission délivré par un prestataire de soins de santé du système d'assurance maladie sociale en Roumanie, d'une prescription médicale délivrée par le médecin traitant en Roumanie, pour le médicament Ad, administré à l'intimée à la clinique en France, dans des circonstances où le médicament Ad ne figurait pas parmi les prestations auxquelles l'assuré avait droit dans l'État de résidence, en vertu de la législation sur l'assurance maladie sociale, étant donné que le médicament en cause, le 5 mai 2015, ne figurait pas sur la liste des médicaments remboursables, approuvée par la Décision du Gouvernament no. 720 /2008, telle que modifiée et complétée.
La requérante a également fait valoir que la Cour d'appel n'a pas tenu compte des dispositions de l'article 866 lettre e), de la Loi n° 95/2006, selon lesquelles on entend par „soins de santé transfrontaliers” les „soins de santé fournis ou prescrits dans un État membre de l'UE autre que l'État membre d'affiliation”. Du point de vue de la compétence territoriale, cette réglementation ne couvre pas les services médicaux fournis sur le territoire de quelque État que ce soit. Elle s'applique aux soins de santé, y compris pour les médicaments qu'un assuré a personnellement payés sur le territoire d'un autre pays transfrontalier.
Le législateur roumain a jugé que cet éventuel remboursement de frais ne peut être effectué que si les exigences légales expressément mentionnées dans la Décision du Gouvernament no 304/2014 sont respectées.
Selon la requérante au pourvoi, la Cour d'appel n'a pas tenu compte du fait que la transposition correcte de la Directive 2011/24/UE dans les dispositions de la Décision du Gouvernament no. 304/2014 est confirmée par le fait que l'organe qui veille à la transposition de ces actes législatifs de l'Union européenne, à savoir la Commission européenne, n'a engagé aucune procédure contre la Roumanie pour non-respect des dispositions de la directive.
La Directive 2011/24/UE établit qu'un citoyen européen qui se fait soigner dans un pays de l'UE autre que celui dont il est ressortissant a le droit de demander à l'État dont il a la nationalité le remboursement du coût des services médicaux aux tarifs nationaux, à condition que certaines exigences soient respectées et la situation visée par la directive ne concerne pas le remboursement de soins de santé fournis sur la base des formulaires européens, mais des soins de santé demandés directement par le patient assuré auprès de l'unité de santé de son choix.
L'affaire nʼa pas été tranchée de manière légale, car on n'a pas tenu compte du fait que, par les dispositions de la Décision du Gouvernament no.304/2014, le législateur établit la procédure et les conditions dans lesquelles un citoyen roumain qui est traité dans un autre État de l'UE a le droit de demander le remboursement des frais à l'État d'affiliation. Le citoyen a droit au remboursement de ces dépenses au niveau des tarifs payés en Roumanie et à condition que les soins médicaux reçus à l'étranger fassent partie du paquet de base du système d'assurance maladie roumain.
La requérante au pourvoi a fait également valoir que les dispositions de lʼarticle 3 paragraphe (1), Chapitre II de lʼAnnexe à la Décision du Gouvernament no.304/2014, qui prévoient la procédure que l'assuré, un membre de sa famille ou une personne autorisée peut suivre pour obtenir le remboursement des soins de santé transfrontaliers dispensés sur le territoire d'un État membre de l'UE, nʼont pas été prises en compte. Lʼarticle 3 paragraphe (1), lettre b) a cherché à transposer lʼarticle 7 paragraphe (7) de la Directive 2011/24/UE. Le législateur a considéré qu'un assuré qui demande le remboursement de soins de santé transfrontaliers (dans le cas des services médicaux hospitaliers, des médicaments dans le cadre d'un traitement ambulatoire ou des dispositifs médicaux dans le cadre d'un traitement ambulatoire), doit passer par les mêmes étapes et remplir les mêmes conditions qui auraient été imposées si les services médicaux hospitaliers, les médicaments et les dispositifs médicaux avaient été accordés ou fournis en Roumanie.
L'obligation de vérifier le respect des exigences légales pour une décision favorable ou défavorable sur une demande de remboursement des frais engagés personnellement pour des soins de santé transfrontaliers dispensés sur le territoire d'un État membre de l'UE n'incombe à la caisse d'assurance maladie dont l'assuré est le patient, en l'occurrence à la Caisse d'Assurance Maladie d'Ilfov, seulement dans les conditions prévues par la loi.
Selon les dispositions de lʼarticle 3, Chapitre II de l'annexe à la Décision du Gouvernament n° 304/2014, il est nécessaire que l'assuré roumain qui a décidé de choisir un prestataire de soins de santé d'un État membre de l'UE, lorsqu'il demande le remboursement de ces services médicaux payés par ses propres ressources, fournisse la preuve qu'il a franchi les niveaux d'assistance médicale sur la base d'une prescription médicale / d'un ticket de référence / d'un ticket d'admission, selon le cas.
En l'espèce, la Cour d'appel n'a pas constaté et n'a pas vérifié à fond tous les aspects relatifs aux conditions que le requérant aurait dû remplir pour se voir rembourser les frais engagés pour des soins médicaux transfrontaliers dispensés en France.
Le deuxième moyen est tiré de ce que c'est de manière erronée que la Cour d'appel a omis de se référer aux dispositions légales en vigueur le 5 mai 2015, date à laquelle l'intimée - requérante s'est vue administrer le médicament Ad pour l'affection „hépatite virale chronique VHC avec fibrose 4 et virémie en stéatose élevée” à la clinique X. en France.
Compte tenu du fait qu'à la date de l'administration du médicament, le 5 mai 2015, et à la date du paiement des soins par le requérant, le 6 novembre 2015, le médicament ne figurait pas sur la liste des médicaments remboursables, approuvée par la Décision du Gouvernament no. 720 /2008, telle que modifiée et complétée, on nʼa pas respecté les exigences prévues à lʼarticle 231 de la Loi no. 95/2006, lʼarticle 3 paragraphe (3) de la Décision du Gouvernament no. 720 /2008, article 3 paragraphes (1) et (2) de l'Ordre du ministre de la Santé n° 1301/500/2008, lʼarticle 3 paragraphes (1) et (2), Chapitre II de l'Annexe à la Décision du Gouvernament n° 304/2014.
La requérante a fait valoir que l'intimée a été considérée à tort comme ayant droit au remboursement du coût du médicament en question, en se référant aux actes réglementaires entrés en vigueur en 2017, à savoir les actes réglementaires par lesquels le médicament Ad a été inscrit sur la liste approuvée par la Décision du Gouvernament n° 720/2008, avec les modifications et ajouts ultérieurs, à savoir: la Décision du Gouvernament n° 178/2017, sur la base dʼun contrat coût-volume-résultat, dans la sous-liste C, section CI, CODE MALADIE G7 – „Cirrhose du foie”; la Décision du Gouvernament n° 259/2017, sur la base dʼun contrat coût-volume-résultat, dans la sous-liste C, section CI, CODE MALADIE G4 – „Hépatite chronique d'étiologie virale B, C et D”.
La Cour d'appel n'a pas appliqué les dispositions de l'article 2 paragraphe (3) de la Décision du Gouvernament n° 304/2014, n'a pas analysé le mécanisme d'inscription sur la liste des médicaments, la situation du médicament Ad au 5 mai 2015, autorisé à la demande expresse du titulaire de l'autorisation de mise sur le marché du médicament, par la procédure centralisée de l'Agence européenne des médicaments, conformément au Règlement (CE) n° 726/2004, uniquement pour les indications thérapeutiques expressément prévues dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP); n'a pas analysé l'incidence des dispositions de l'article 3 paragraphes (1), (2) et (3) de l'Annexe à la Décision du Gouvernament n° 304/2014 et l'incidence de l'article 231 de la Loi n° 95/2006.
Ces dispositions prévoient le droit des assurés de bénéficier des médicaments avec ou sans une contribution personnelle, mais ce droit est conditionné par lʼexistence dʼune prescription médicale pour le médicament nécessaire, et ce médicament doit être inclu dans la liste de médicaments prévue à lʼarticle 232 de la loi précitée, à la date dʼadministration du médicament en question.
Lʼune des conditions essentielles et obligatoires pour la décompte des médicaments dans le système public dʼassurance maladie cʼest que les médicaments figurent dans la liste de médicaments, approuvée, condition qui nʼa pas été remplie dans cette affaire.
Par conséquent, la requérante au pourvoi considère que le raisonnement de la cour dʼappel nʼest pas conforme à la loi, vu que les médicaments fournis et pris en charge par le système dʼassurance sociale maladie sont inscrits dans la Liste des médicaments ramboursés „de manière explicite”, étant individualisés et expressément prévus avec leur denommination commune internationale (DCI).
Le troisième moyen est tiré du fait que la Cour d'appel n'a pas interprété et appliqué les dispositions spéciales, impératives et d'interprétation stricte du système public d'assurance maladie qui régissent la procédure d'inscription des médicaments sur la liste et sur le protocole d'administration des médicaments. Ainsi, bien que le cadre réglementaire applicable à l'affaire soit clairement et explicitement réglementé par le législateur, la Cour d'appel a retenu à tort la „faute processuelle”, en n'analysant pas toutes les dispositions légales applicables ou en les analysant de manière superficielle et erronée.
En outre, la requérante au pourvoi a souligné qu'on n'a pas compris que l'inscription des médicaments sur la liste et dans les protocoles thérapeutiques n'est effectuée que dans les conditions du respect des dispositions légales, européennes et nationales, quelles sont les étapes et les modalités de la procédure d'inscription des médicaments sur la liste annexée à la Décision du Gouvernament n° 720/2008,quelle est la procédure d'inscription du médicament Ad dans le protocole d'administration approuvé par l' Arrêté n° 1301/500/2008, de sorte que, erronément, la cour d'appel a constaté la „faute de procédure” des défendeurs.
De même, les dispositions de l'Arrêté du ministre de la Santé n° 861/2014, tel que modifié et complété ultérieurement, régissant une procédure nationale comme moyen de transposition de l'article 6 de la Directive 89/105/CEE, n'ont pas été prises en compte.
Selon la requérante, la cour a retenu erronément que la la procédure d'évaluation nationale du médicament a débuté à la date à laquelle Ad a été administré à la requérante (5 mai 2015); cette procédure a débuté au niveau national le 29 juin 2015, date à laquelle le titulaire de l'autorisation de mise sur le marché du médicament Ad a expressément demandé à l'ANMDMR d'évaluer le médicament; elle n'a pas analysé les pouvoirs de chacune des autorités publiques concernées; elle n'a pas analysé la compétence et le rôle du titulaire de l'autorisation de mise sur le marché, personne morale de droit privé, qui, selon l'article 704 paragraphe (3) de la Loi 95/2006, telle que modifiée et complétée ultérieurement, est responsable de la mise sur le marché du médicament et engage la procédure d'autorisation et la procédure d'évaluation du médicament en vue de son inscription sur la liste.
On ne peut pas parler, en l'espèce, de l'accomplissement/non-accomplissement des „certaines formalités”, dès lors que la procédure de négociation prévue par l'Arrêté n° 3/1/2015 du ministre de la Santé et du président de CNAS s'achève soit par la conclusion du contrat coût-volume/coût-résultat, suivie de l'inscription du médicament, soit par la non-conclusion du contrat coût-volume/coût-résultat, suivie de la conclusion d'un procès-verbal final de négociation signé par les parties, qui a pour effet de ne pas inscrire le médicament, ainsi qu'il ressort de l'article 12 paragraphe (1), dernière phrase, de l'Ordonnance dʼurgence du Gouvernement (OUG) n° 77/2011 et de l'article 5 paragraphe (2) de l'Arrêté du ministre de la Santé et du président de la CNAS n° 3/1/2015; en même temps, selon les dispositions de ce dernier arrêté, il ne découle pas l'obligation de conclure, après négociation, des contrats coût-volume/ coût-volume-résultat, étant donné que la conclusion de tels contrats requiert le consentement des titulaires d'autorisation de mise sur le marché des médicaments. Le quatrième moyen porte sur le fait que la Cour d'appel, dans sa décision, n'a pas examiné l'applicabilité des articles 217 et 218 de la Loi n° 95/2006. Les dispositions de l'article 217 paragraphe (1) de la Loi n° 95/2006, telle que modifiée et complétée ultérieurement, prévoient que les assurés ont droit à un ensemble de services de base, le législateur réglementant expressément, par le biais d'un contrat-cadre, les conditions de fourniture de l'assistance médicale dans le cadre du système d'assurance maladie sociale.
Les dispositions de l'article 218 paragraphe (1) de la Loi n° 95/2006, telle que modifiée et complétée ultérieurement, prévoient que „les assurés bénéficient du paquet de services de base en cas de maladie ou d'accident, à partir du premier jour de la maladie ou de la date de l'accident jusqu'à la guérison, dans les conditions prévues par la présente loi, le contrat-cadre et ses règles d'application”.
Il ressort clairement de ces règles de droit que le législateur roumain reconnaît aux assurés le droit de bénéficier du paquet de services de base seulement dans les conditions établies par la Loi n° 95/2006, le contrat-cadre et ses règles d'application.
En ce même sens, sʼappliquent les dispositions de lʼarticle 218 paragraphe (2), lettre d) de la Loi n° 95/2006, telle que modifiée et complétée ultérieurement, selon lesquelles „les assurés ont le droit de bénéficier du paquet de services de base de manière non discriminatoire, dans les conditions prévues par la loi ”.
En application de la Loi n° 95/2006, les actes réglementaires subséquents réglementent le contenu du paquet de services médicaux de base accordés aux différents niveaux d'assistance médicale, ainsi que les conditions d'octroi des services médicaux.
Les assurés ont accès aux soins de santé à différents niveaux de services médicaux pour la guérison de la maladie, pour la prévention de ses complications, pour la réhabilitation ou au moins pour le soulagement des souffrances, selon le cas, ainsi qu'aux services liés à l'acte médical, en fonction des nécessités, avec le respect des conditions de leur prestation, régies par la réglementation applicable au système social d'assurance maladie.
Le cinquième moyen est que la Cour d'appel n'a pas pleinement exercé son rôle de recherche de la vérité, en ce qu'elle n'a pas pris le temps de recueillir et d'examiner tous les preuves nécessaires pour établir pleinement les circonstances factuelles essentielles de l'affaire, n'a pas analysé les pièces versées au dossier par la CNAS et a présumé illégalement que la requérante avait été traitée avec les médicaments Ag Ab 2 A et Ribavirinum avant d'opter pour un déplacement et une admission à la clinique de Paris le 5 mai 2015 pour être traitée avec le médicament Ad.
Les médicaments susmentionnés sont prévus depuis 2008 et jusqu'à présent dans la Sous-liste C, Section CI, Sous-section G4 „Hépatites chroniques d'étiologie virale B, C et D” de l'Annexe à la Décision du Gouvernament n° 720/2008, telle que modifiée et complétée ultérieurement et les protocoles d'administration de ces médicaments sont prévus à l'Annexe 1 de l'Arrêté n° 1308/500/2008, tel que modifié et complété.
Ainsi, selon la requérante au pourvoi, il a été conclu à tort que l'intimée n'a pas suivi de façon efficace le traitement standard accordé et pris en charge par le système dʼassurance maladie sociale, ce qui est la conséquence du fait que seule une analyse sommaire des pièces versées au dossier a été faite le 17.04.2019, dont il ressort que la patiente n'a suivi aucun traitement accordé pour son affection dans la période 2014-05.05.2015.
Par conséquent, il est clair que les défendeurs ne peuvent pas être considérés comme fautifs ou comme ayant agi de manière abusive, puisqu'il n'existe aucun droit légitime de la requérante que les défendeurs auraient violé, ainsi qu'il ressort des preuves administrées et de l'interprétation des textes légaux pertinents.
En ce qui concerne les frais de justice de 8.207 lei, auxquels les défendeurs ont été obligés de payer, il a été souligné que le mandat de l'avocat dans l'affaire s'est limité à la rédaction de lʼacte introductif dʼinstance et de l'appel, activités qui ne justifient pas les frais accordés par la cour d'appel, en sollicitant ainsi la modification de l'arrêt attaqué, avec la conséquence que la demande de condamnation de la CNAS aux frais de justice soit rejetée comme non fondée.
7.2. La requérante au pourvoi - défenderesse la Caisse d'Assurance Maladie d'Ilfov a invoqué le motif d'annulation prévu à l'article 488, paragraphe (1), point 8 du Code de procédure civile et a demandé que le recours soit admis, avec la conséquence que le recours soit rejeté comme non fondé et illégal.
La défenderesse a critiqué la décision de la Cour d'appel en se fondant essentiellement sur les motifs suivants:
Faisant une application erronée des règles de droit matériel, la Cour d'appel a admis lʼappel dans le contexte du fait que la requérante n'a reçu aucun traitement dans le pays, ce qui ne permet pas d'établir si le traitement aurait pu être efficace pour traiter la maladie. Le 5 mai 2015, ainsi que le 7 novembre 2015, période pendant laquelle le requérant a suivi un traitement et l'a payé en France, l'Harvoni n'était pas inscrit sur la liste des médicaments remboursables accordés gratuitement aux assurés du système public d'assurance maladie, de sorte que la condition obligatoire prévue à l'article 231 de la Loi n° 95/2006 et à la Décision du Gouvernement n° 400/2014, selon laquelle les assurés bénéficient des médicaments inscrits sur la liste des médicaments remboursables accordés sur ordonnance, n'était pas remplie.
Une condition essentielle pour rambourser les médicaments, par rapport à lʼarticle 3 paragraphe (1), Chapitre II de lʼAnnexe 1 à la Décision du Gouvernement n° 304 / 2014, cʼest que le médicament en question se trouve dans la liste de médicaments approuvée par la Décision du Gouvernement n° 720/2008.
Selon l'art. 9 de l'Annexe 30 de l'Arrêté MS/ CNAS n° 619/360/2014, les caisses d'assurance maladie ne prennent en charge que les médicaments dont les noms commerciaux sont prévus dans la liste des médicaments, établie sur la base de la liste des dénominations communes internationales - DCI - des médicaments de la nomenclature des médicaments à usage humain qui sont à la disposition des assurés sur prescription médicale en traitement ambulatoire, avec ou sans contribution personnelle, approuvée par décision gouvernementale.
L'assistance médicale reçue par la requérante en France ne relève pas du type d'assistance médicale prévu au premier article de l'Annexe n° 1 de la Décision du Gouvernement n° 304/2014 et elle n'a pas prouvé qu'elle remplissait les critères pour lesquels le traitement pouvait être remboursé, sans y avoir aucune demande en ce sens.
Le fait que le médicament Ad ne figure pas sur la Liste des médicaments remboursables, approuvée par la Décision du Gouvernement n° 720/2008, ne peut pas être qualifié comme une violation grave du droit à la vie et à la santé au regard des dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme, dès lors que des alternatives thérapeutiques pour le diagnostic de la requérante figuraient sur cette liste.
À tort et sans aucune preuve écrite, la Cour d'appel a considéré que la requérante avait subi en Roumanie un traitement à l'Interféronum Alfa 2 A et au Ribavirinum sans résultats satisfaisants, de sorte que le traitement administré au patient n'était pas efficace pour traiter l'affection. Il a été prouvé que la requérante n'a pas subi un tel traitement dans le pays, mais la cour d'appel et l'expert ont ignoré les affirmations et les preuves de la défenderesse. En outre, l'expert a repris dans son rapport l'intégralité d'un certain nombre de déclarations non fondées faites par la requérante.
En même temps, les critères d'éligibilité prévus par la législation en vigueur n'ont pas été respectés, de sorte que la requérant n'a pas pu bénéficier du remboursement des frais engagés pour le traitement reçu en France.
Il ne ressort pas des pièces du dossier et de la consultation du Système Unique d'Information Intégré, système qui comprend tous les procédures médicalles, les médicaments et tout autre service médical que le bénéficiaire des services médicaux effectue dans un établissement public ou privé, sous contrat avec une caisse d'assurance maladie en Roumanie, que la requérante a suivi le traitement recommandé dans le pays pour l'affection dont elle souffrait, et, donc, on ne peut pas retenir que ce traitement a été inefficace.
Aussi, il nʼy a aucune preuve que la requéranta a entrepris des démarches pour obtenir les documents nécessaires au remboursement des montants en cause.
7.3. Le Ministère de la Santé, requérant au pourvoi–défendeur, a soulevé le motif d'annulation en vertu de l'article 488, paragraphe (1), point 8 du Code de procédure civile et a demandé que le pourvoi soit accueilli et que la décision attaquée, par laquelle la Cour dʼappel a annulé le jugement du Tribunal dans son intégralité, soit cassée.
Il a critiqué la décision de la Cour d'appel sur les points suivants:
Se référant aux dispositions de l'article 22 du Code de procédure civile, le requérant au pourvoi-défendeur a souligné que la nature juridique de l'action est celle d'une action en contentieux administratif, l'objet de la demande étant un refus de règlement de la requête, et à titre subsidiaire une demande de dommages-intérêts, conformément aux dispositions de l'article 8 paragraphe (1) et de l'article 18 paragraphe (3) de la Loi n° 554/2004. Afin de bénéficier d'un traitement à l'étranger, la requérante avait la possibilité de suivre deux procédures. D'une part, elle pouvait suivre la procédure prévue par l'Arrêté no 50/2004 du ministre de la Santé concernant la méthodologie pour envoyer certaines catégories de patients se faire soigner à l'étranger, procédure dont le ministère de la Santé est responsable. D'autre part, la requérante pouvait suivre la procédure prévue par l'Arrêté no 592/2008 du président de la Caisse Nationale d'Assurance Maladie pour l'approbation des règles méthodologiques concernant l'utilisation dans le système d'assurance maladie sociale roumain des formulaires émis en application du Règlement (CEE) no 574/72. 1.408/71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et du Règlement (CEE) n° 574/72 fixant les modalités d'application du Règlement (CEE) n° 1.408/71, dont la responsabilité incombe à la Caisse Nationale d'Assurance Maladie.
Le requérant au pourvoi–défendeur fait valoir que le Ministère de la Santé est un organe spécialisé de l'administration publique centrale selon les dispositions du code administratif et que la Caisse Nationale d'Assurance Maladie est, en vertu des dispositions de l'article 276 de la Loi no 95/2006, un établissement public autonome d'intérêt national doté de la personnalité juridique, un organe spécialisé de l'administration publique centrale qui administre et gère le système d'assurance maladie sociale. Par conséquent, le Ministère de la Santé gère les fonds du budget de l'État en application des dispositions de l'Arrêté du ministre de la santé n° 50/2004 et la Caisse Nationale dʼAssurance Maladie gère le Fond National Unique d'Assurance Maladie en application des dispositions de l'Arrêté du président de la CNAS n° 592/2008.
La distinction est essentielle car, si la requérante avait choisi de solliciter à CNAS l'obtention du formulaire E 112, conformément aux dispositions de l'article 43 de l'Arrêté n° 592/2008, le juge ne aurait pas pu obliger le Ministère de la Santé à payer solidairement avec le CNAS l'indemnité réclamée par la requérante. Si elle avait choisi d'être envoyée à l'étranger pour y être soignée conformément à l'Arrêté n° 50/2004 du ministre de la Santé, elle aurait dû demander au Ministère de la Santé d'approuver son départ à l'étranger pour y être soignée. Dans ce cas, la CNAS ne peut pas être tenue de payer une compensation conjointement et solidairement avec le Ministère de la Santé.
Donc, tel qu'il ressort des pièces du dossier, la requérante n'a pas prouvé qu'elle a accompli les étapes prévues par la loi pour bénéficier du traitement, puisqu'elle n'a présenté aucune requête ni à la Caisse d'Assurance Maladie d'Ilfov pour obtenir lʼutorisation de se rendre dans un État membre de l'Union européenne pour y recevoir un traitement médical, par le biais du formulaire E 112, conformément aux dispositions de l'article 43 paragraphe (1) de l'Arrêté du président de la CNAS n°592/2008, ni au Ministère de la Santé pour l'approbation de l'envoi à l'étranger pour traitement, conformément à l' l'Arrêté du ministre de la Santé n° 50/2004.
Dès lors, selon le requérant au pourvoi, une action en contentieux administratif a été introduite en lʼespèce, les conditions et les délais de la loi sur le contentieux administratif lui étant applicables, l'objet de lʼaction étant le refus de règlement de la requête.
Au vu de ces considérations, à savoir l'absence de toute requête relative à un droit ou à un intérêt légitime adressée à une autorité publique, le requérant au pourvoi considère comme non fondée lʼaction dont l'objet principal est le refus injustifié de l'autorité publique de règler une requête relative à un droit ou à un intérêt légitime et dont l'objet subsidiaire est lʼaction en dommages et intérêts pour les dommages matériels et moraux causés (article 18 paragraphe (3) de la Loi no 554/2004).
Des considérants de la Cour d'appel, selon lesquels la requérante a demandé aux défendeurs le remboursement du coût du médicament qui lui a été administré dans la clinique en France en raison du fait qu'elle ne pouvait pas bénéficier de ce médicament en Roumanie, puisque le médicament ne figurait pas sur la liste approuvée par la Décision du Gouvernement no. 720/2008, et si elle avait attendu l'inscription du médicament sur la liste, sa vie aurait été mise en danger, il n'apparaît pas que la requérante se serait adressée au Ministère de la Santé (selon l'Arrêté n° 50/2004 du ministre de la Santé) ou à la caisse d'assurance maladie auprès de laquelle elle était assurée (selon l'Arrêté n° 592/2008 du président de la CNAS) avec une demande relative à un droit ou un intérêt légitime.
La requête relative à un droit ou à un intérêt légitime est essentielle pour que le juge puisse constater un refus injustifié de l'autorité publique à laquelle elle a été adressée de la traiter.
Le caractère obligatoire de la demande ressort également de l'affaire C-1733/09 Ae Ak Ac // National Al Aa C Af, Bulgarie, invoquée par la Cour d'appel dans ses attendus. L'arrêt de la CJUE en faveur du ressortissant bulgare tient compte de la situation de fait selon laquelle il a précédemment sollicité à la Caisse Nationale de Santé de Bulgarie lʼoctroi du traitement.
La Cour d'appel a omis, dans les considérants qui ont conduit à la décision en appel, précisément cet élément essentiel qui découle tant de l'arrêt de la CJUE dans l'affaire C-173/09, que de la loi du contentieux administratif.
8. Les défenses soulevées dans l'affaire Le 18 août 2020, dans le délai prévu par la loi, la requérante au pourvoi – défenderesse la Caisse d'Assurance Maladie dʼIlfov a déposé un mémoire en défense aux recours déposés par les défendeurs le Ministère de la Santé et la Caisse Nationale d'Assurance Maladie, par lequel elle a demandé que les deux recours soient admis, avec la conséquence du rejet de lʼaction comme non fondée et illégale.
Le 25 août 2020, lʼintimée - requérante A. a déposé, dans le délai prévu par la loi, un mémoire en défense aux recours formés par les défendeurs, sollicitant principalement à faire constater la nullité des recours car les moyens de cassation sont soulevés pour des motifs purement formels et les critiques spécifiques portent sur le caractère mal - fondé de lʼaction. À titre subsidiaire, elle a demandé le rejet des recours comme non fondés et la confirmation de la décision de la Cour d'appel comme fondée et légale, en indiquant que la nature civile du litige a été définitivement clarifié dans les règles de compétence et que la critique concernant l'absence du rôle actif du tribunal dans la clarification de lʼaffaire ne peut pas être maintenue en appel.
Le 26 août 2020, dans le délai prévu par la loi, la requérante au pourvoi- défenderesse la Caisse Nationale d'Assurance Maladie a déposé un mémoire en défense au pourvoi interjeté par les défendeurs le Ministère de la Santé et la Caisse d'Assurance Maladie dʼIlfov, par lequel elle a demandé que les pourvois soient admis, que l'arrêt attaqué soit cassé et que, lors dʼun nouvel jugement, la demande soit rejetée comme non fondée.
Le 15 septembre 2020, la requérante au pourvoi- défenderesse, laCaisse nationale d'assurance maladie dʼIlfov, a déposé une réponse au mémoire en défense déposé par l'intimée-requérante A., par laquelle elle a demandé que les trois recours soient admis, avec la conséquence du rejet de lʼaction comme non fondée et illégale.
Le 17 septembre 2020, la requérante au pourvoi- défenderesse , la Caisse Nationale d'Assurance Maladie a déposé une réponse au mémoire de défense déposé par l'intimée-requérante A., demandant que son propre pourvoi soit admis.
Le 18 septembre 2020, le requérant au pourvoi- défendeur le Ministère de la Santé, a soumis une réponse au mémoire en défense déposé par l'intimée-requérante A.
6. La procédure de filtre Le rapport rédigé en l'espèce, conformément à l'article 493 paragraphe (2) et (3) du Code de procédure civile a été analysé dans le collège de filtrage, étant communiqué aux parties, et par le procès-verbal dʼaudition du 09 mars 2021, le collège de filtrage a admis en principe les pourvois formés par les défendeurs la Caisse Nationale d'Assurance Maladie, le Ministère de la Santé et la Caisse d'Assurance Maladie dʼIlfov contre la décision no. 674 A du 24 avril 2019, rendue par la Cour d'Appel de Bucarest – 4ème Chambre civile est a fixé le délai pour le jugement des pourvois au 06 avril 2021, en audience publique, avec la citation des parties.
II. La solution et les griefs de la Haute Cour de Cassation et de Justice En analysant la décision de la Cour dʼAppel, à la lumière des critiques formulées et par rapport aux pièces du dossier et aux dispositions légales applicables, la Haute Cour constate que les pourvois formés sont fondés, dans la limite et pour les raisons exposées ci-dessous.
La démarche judiciaire devant les juridictions ayant statué sur le fond soumet au présent contrôle de légalité un lien juridique fondé sur des soins de santé transfrontaliers (au sein de l'Union Européenne), dans la mesure où elle concerne le remboursement des frais d'un traitement médical dispensé à l'étranger, sans autorisation préalable.
La requérante – intimée a fait valoir un droit découlant de sa qualité d'assuré du système national d'assurance maladie obligatoire, en demandant la condamnation des gestionnaires du système national de santé - à savoir le Ministère de la Santé, en tant qu'autorité publique centrale, et les caisses nationales et locales d'assurance maladie - à rembourser la somme de 49.030,12 euros, représentant la contrepartie du médicament Ad administré dans une clinique en France, traitement médical qu'elle n'a pas pu recevoir en Roumanie, étant donné qu'il n'a été inscrit sur la liste des médicaments approuvée par la Décision du Gouvernement no 720/2008, telle que modifiée et complétée ultérieurement, qu'après l'administration du traitement et le paiement intégral du celui-ci, par la requérante.
La base juridique invoquée dans la requête est constituée par les articles 22 et 34 de la Constitution roumaine sur le droit à la vie, le droit à l'intégrité physique et mentale et le droit à la protection de la santé, l' article 210 lettre c) et 211 paragraphe (1) de la Loi n° 95/2006 sur la réforme du système de santé, relative au droit de l'assuré au paquet de soins de santé de base, l'article 2 point 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et la jurisprudence pertinente relative au droit à la vie, ainsi que la Directive 89/105/CEE et la décision préjudicielle de la CJUE dans l'affaire C-268/13, Elena Petru/ la Caisse Départementale d'Assurance Maladie Ah et la Caisse Nationale d'Assurance Maladie.
En reconnaissant à la requérante – appelante le droit de récupérer le préjudice pécuniaire constitué par la valeur du médicament qui lui a été administré dans un autre État de l'Union Européenne et en condamnant les défendeurs – intimés au paiement de l'intégralité des frais exposés à cet égard, la Cour d'appel a fait une application directe et contraignante du Règlement (CE) n° 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, en particulier de lʼarticle 20, au sens donné par la CJUE aux dispositions similaires du Règlement (CEE) n° 1408/71, comme en témoigne la décision préjudicielle rendue dans l'affaire C-173/09, Ae Ak A Aj Ai.
À ce stade, il convient de citer la règle du droit de l'Union Européenne et la réponse donnée par la CJUE aux questions préjudicielles concernant une autre disposition de contenu similaire dans un acte juridique dérivé du même type.
Ainsi, selon lʼarticle 20 paragraphes (1) et (2) du Règlement (CE) N° 883/2004: „(1) À moins que le présent règlement n'en dispose autrement, une personne assurée se rendant dans un autre État membre aux fins de bénéficier de prestations en nature pendant son séjour demande une autorisation à l'institution compétente. (2). La personne assurée qui est autorisée par l'institution compétente à se rendre dans un autre État membre aux fins d'y recevoir le traitement adapté à son état bénéficie des prestations en nature servies, pour le compte de l'institution compétente, par l'institution du lieu de séjour, selon les dispositions de la législation qu'elle applique, comme si elle était assurée en vertu de cette législation. L'autorisation est accordée lorsque les soins dont il s'agit figurent parmi les prestations prévues par la législation de l'État membre sur le territoire duquel réside l'intéressé et que ces soins ne peuvent lui être dispensés dans un délai acceptable sur le plan médical, compte tenu de son état actuel de santé et de l'évolution probable de la maladie..” Par la décision préjudicielle du 5 octobre 2010, rendue dans lʼaffaire C-173/09, CJUE a donné lʼinterprétation suivante: „ 2) Les articles 49 CE et 22 du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1992/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, s’opposent à une réglementation d’un État membre interprétée en ce sens qu’elle exclut, dans tous les cas, la prise en charge des soins hospitaliers dispensés sans autorisation préalable dans un autre État membre.
3) S’agissant de soins ne pouvant être dispensés dans l’État membre sur le territoire duquel réside l’assuré social, l’article 22, paragraphe 2, second alinéa, du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, tel que modifié par le règlement n° 1992/2006, doit être interprété en ce sens qu’une autorisation requise au titre du paragraphe 1, sous c), i), du même article ne peut être refusée:
– si, lorsque les prestations prévues par la législation nationale font l’objet d’une liste ne mentionnant pas expressément et précisément la méthode de traitement appliquée mais définissant des types de traitements pris en charge par l’institution compétente, il est établi, en application des principes d’interprétation usuels et à la suite d’un examen fondé sur des critères objectifs et non discriminatoires, prenant en considération tous les éléments médicaux pertinents et les données scientifiques disponibles, que cette méthode de traitement correspond à des types de traitements mentionnés dans cette liste, et – si un traitement alternatif présentant le même degré d’efficacité ne peut être prodigué en temps opportun dans l’État membre sur le territoire duquel réside l’assuré social.
Le même article s’oppose à ce que les organes nationaux appelés à se prononcer sur une demande d’autorisation préalable présument, lors de l’application de cette disposition, que les soins hospitaliers ne pouvant être dispensés dans l’État membre sur le territoire duquel réside l’assuré social ne figurent pas parmi les prestations dont la prise en charge est prévue par la législation de cet État et, inversement, que les soins hospitaliers figurant parmi ces prestations peuvent être prodigués dans ledit État membre.
4) Lorsqu’il est établi que le refus de délivrance d’une autorisation requise au titre de l’article 22, paragraphe 1, sous c), i), du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, tel que modifié par le règlement n° 1992/2006, n’était pas fondé, alors que les soins hospitaliers sont achevés et que les frais y afférents ont été exposés par l’assuré social, la juridiction nationale doit obliger l’institution compétente, selon les règles de procédure nationales, à rembourser audit assuré social le montant qui aurait normalement été acquitté par cette dernière si l’autorisation avait été dûment délivrée.
Ledit montant est égal à celui déterminé selon les dispositions de la législation à laquelle est soumise l’institution de l’État membre sur le territoire duquel ont été dispensés les soins hospitaliers. Si ce montant est inférieur à celui qui aurait résulté de l’application de la législation en vigueur dans l’État membre de résidence en cas d’hospitalisation dans ce dernier, il doit en outre être accordé à l’assuré social un remboursement complémentaire, à charge de l’institution compétente, correspondant à la différence entre ces ceux montants, dans la limite des frais réellement exposés.” Dans l'affaire en cours, la Cour d'appel a fondé sa décision sur les principes jurisprudentiels découlant de la décision préjudicielle précitée, dans laquelle la CJUE a jugé que les dispositions communautaires pertinentes „s’opposent à une réglementation d’un État membre interprétée en ce sens qu’elle exclut, dans tous les cas, la prise en charge des soins hospitaliers dispensés sans autorisation préalable dans un autre État membre.” atunci când se poate stabili „cette méthode de traitement correspond à des types de traitements mentionnés dans cette liste, et – si un traitement alternatif présentant le même degré d’efficacité ne peut être prodigué en temps opportun dans l’État membre sur le territoire duquel réside l’assuré social.” La Cour d'appel a rejeté comme non fondés les moyens de défense des défendeurs - intimés relatifs à l'obligation d'autorisation préalable et à l'inclusion explicite du traitement médical dans la liste approuvée par la Décision du Gouvernement n° 720/2008, telle que modifiée et complétée ultérieurement.
Ainsi, d'une part, elle a jugé que le traitement des maladies du foie dont souffrait la requérante était inclus dans la liste des traitements remboursables à 100 %, ce qui implique que l'État roumain a assumé la responsabilité de le prendre en charge dans le cadre du système public d'assurance maladie, en tant que priorité de santé publique. En outre, environ deux ans après l'administration qui a permis le rétablissement de la requérante, le médicament en question a été inscrit sur la liste, dans les mêmes conditions de paiement intégral par l'État, disposant d'une autorisation de mise sur le marché valable dans tous les pays de l'UE, le retard dans l'inscription sur la liste étant causé par le non-respect de certaines formalités d'approbation et de négociation.
En revanche, la Cour d'appel a considéré que la requérante ne pouvait pas obtenir en Roumanie, en temps utile, un traitement alternatif aussi efficace et qu'elle avait droit au remboursement du médicament qui nʼa pas pu être fourni dans le pays pour des raisons autres que celles retenues par la CJUE pour justifier l'exclusion d'un traitement du champ des médicaments qui ne sont pas remboursables dans le système public d'assurance maladie.
Le grief principal des requérants au pourvoi – défendeurs, commun aux trois actions introduites, concerne, en essence, d'une part, l'application erronée de la norme du Règlement (CE) n° 883/2004, telle qu'interprétée dans la décision préjudicielle, dans une affaire fondée sur une situation de fait différente de celle du litige en cours, en ce sens que le ressortissant bulgare avait précédemment demandé, sans succès, l'autorisation de suivre le traitement qui ne figurait pas parmi les prestations prévues par la législation bulgare et prises en charge par la caisse nationale d'assurance maladie.
D'autre part, les requérants au pourvoi – défendeurs soutiennent que c'est à tort que la Cour d'appel a omis d'examiner et de constater l'applicabilité à l'espèce de la Directive 2011/2014/UE relative à l’application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers, ainsi que de la législation nationale qui l'a transposée dans l'ordre juridique interne, à savoir la Loi n° 95/2006, la Décision du Gouvernement n° 304/2014 et l'Arrêté du ministre de la Santé et du président du CNAS n° 1301/500/2008, tous modifiés et complétés ultérieurement. Toutefois, édictée conformément au droit de l'Union européenne et pour son application, la réglementation interne met à la disposition du patient un certain nombre d'instruments et de mécanismes d'accès aux soins de santé transfrontaliers, dont l'autorisation préalable (par l'émission du formulaire 112, avec remboursement entre les caisses d'assurance nationales) ou le remboursement du coût du traitement après sa réalisation, dans le respect de la procédure et des conditions prescrites par la loi qui ne sont ni discriminatoires ni une entrave à la libre prestation des services, sans que la requérante -intimée ait eu recours à aucune de ces possibilités juridiques.
La critique est fondée, entraînant l'application du moyen de cassation prévu à l'article 488 paragraphe (2), point 8 du Code de procédure civile.
Comme indiqué ci-dessus, le droit en litige trouve son origine dans un lien juridique fondé sur les soins de santé transfrontaliers, à savoir le mécanisme juridique dont dispose le patient assuré pour le remboursement effectif du coût des traitements médicaux reçus à l'étranger.
À titre liminaire, la Haute Cour relève que, selon une jurisprudence constante de la CJUE, „les prestations médicales fournies contre rémunération relèvent du champ d’application des dispositions relatives à la libre prestation des services, y compris lorsque les soins sont dispensés dans un cadre hospitalier” (paragraphe 36 de l'arrêt du 5 octobre 2010, affaire C-173/09).
Toujours selon la jurisprudence de la même Cour européenne ,,soumettre à une autorisation préalable la prise en charge par le système de sécurité sociale obligatoire ou le système de santé national des coûts des soins de santé dispensés dans un autre État membre est une restriction à la libre circulation des services” (point 38 du Préambule de la Directive 2011/24/UE).
Sont également pertinents, pour la marge d'appréciation reconnue aux États membres, les principes généraux énoncés aux paragraphes 24 et 40 du Préambule de la directive européenne susmentionnée, selon lesquels :
(24) „Il y a lieu que les États membres veillent à ce que des mécanismes de protection des patients et de demande de réparation en cas de préjudice soient mis en place pour les soins de santé dispensés sur leur territoire et à ce qu’ils soient adaptés à la nature et à l’ampleur du risque. Il devrait toutefois incomber aux États membres de déterminer la nature et les modalités de tels mécanismes” (40) „Conformément à la jurisprudence constante de la Cour de justice, les États membres peuvent soumettre à une autorisation préalable la prise en charge par le système national des coûts de soins hospitaliers dispensés dans un autre État membre. La Cour de justice a estimé que cette exigence est à la fois nécessaire et raisonnable, puisque le nombre des infrastructures hospitalières, leur répartition géographique, leur aménagement et les équipements dont elles sont pourvues, ou encore la nature des services médicaux qu’elles sont à même d’offrir, doivent pouvoir faire l’objet d’une planification, laquelle répond, en règle générale, à diverses préoccupations. Pour la Cour de justice, cette planification poursuit l’objectif de garantir sur le territoire de l’État concerné une accessibilité suffisante et permanente à une gamme équilibrée de soins hospitaliers de qualité élevée. En outre, elle participe d’une volonté d’assurer une maîtrise des coûts et d’éviter, dans la mesure du possible, tout gaspillage de ressources financières, techniques et humaines. Selon la Cour de justice, un tel gaspillage s’avérerait d’autant plus dommageable qu’il est généralement admis que le secteur des soins hospitaliers engendre des coûts considérables et doit répondre à des besoins croissants, tandis que les ressources financières consacrées aux soins de santé ne sont, quel que soit le mode de financement utilisé, pas illimitées.” La Haute Cour relève que la transposition de la Directive 2011/24/UE dans l'ordre juridique national a été réalisée par la Loi n° 95/2006 sur la réforme des soins de santé, telle que modifiée et complétée ultérieurement, et au niveau du droit national dérivé, par la Décision du Gouvernement n° 304/2014 pour l'approbation des normes méthodologiques sur les soins de santé transfrontaliers, telle que modifiée et complétée ultérieurement, la Décision du Gouvernement n° 720/2008, telle que modifiée et complétée ultérieurement et l'Arrêté du ministre de la Santé et du président de la CNAS n° 1301/500/2008, tel que modifié et complété ultérieurement (ces derniers actes règlementaires concernant l'approbation de la liste des médicaments et des protocoles thérapeutiques pour la prescription de médicaments).
Le droit national a cependant été écarté sans un examen effectif dans le raisonnement juridique de la cour d'appel, qui a fondé sa décision exclusivement et mécaniquement sur l'effet direct des dispositions de l'article 20 du Règlement (CE) n° 883/2004, au sens donné par la CJUE aux dispositions correspondantes du Règlement (CEE) n° 1408/71. /71, telle que cette interprétation se reflète dans l'affaire C-137/09, en méconnaissant le fait que la situation de fait visée par les questions préjudicielles est non seulement similaire à celle en cause dans l'affaire en cours, mais qu'elle en diffère également sur le fond, y compris le fait que l'autorisation préalable pour les soins de santé transfrontaliers, qui a été refusée, avait été demandée par le ressortissant bulgare.
Le raisonnement du Tribunal est erroné car, tout d'abord, il n'établit pas la corrélation nécessaire entre les effets du règlement et de la directive en tant que sources de droit communautaire dérivé.
Il convient de rappeler, sous cette angle d'analyse, les dispositions de l'article 288, paragraphe (2) et (3) du TFUE, selon lesquelles „le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout État membre. 26.10.2012 Journal FR officiel de l’Union européenne C 326/171 La directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens.” La directive impose donc les résultats et laisse aux destinataires le choix de la forme et les moyens pour atteindre les résultats souhaités, dans les délais établis. Par conséquent, contrairement au règlement, qui est contraignant dans „tous ses éléments” (tant les objectifs fixés, que les moyens de les atteindre) et a un effet direct, la directive n'est contraignante qu'en ce qui concerne l'objectif final proposé.
En dʼautres termes, le règlement este une règle de résultat, mais aussi de moyens, alors que la directive est seulement une règle de résultat.
La Haute Cour tient compte du fait que, selon lʼarticle 2 lettre m) (la relation avec les autres actes règlementaires de lʼUE), la Directive 2011/24/UE sʼapplique sans porter atteinte au Règlement (CE) no 883/2004, une disposition légale similiaire étant consacrée dans lʼarticle 902 paragraphe (2) lettre c) de la Loi no 95/2006, selon laquelle le XIXème Titre (Soins de santé transfrontaliers) ne porte pas atteinte aux obligations de lʼÉtat roumain instituées dans le cadre du Règlement (CE) no 883/2004.
Toutefois, pour attendre le résultat final poursuivi - faciliter l'’accès à des soins de santé transfrontaliers sûrs et de qualité élevée, encourager la coopération et clarifier le lien avec le Règlement (CE) no 883/2004 (selon lʼarticle 1 paragraphe (1) de la Directive) – et en vertu de sa compétence nationale en matière dʼorganisation et de prestation des soins de santé et dʼassistance médicale, lʼÉtat roumain a règlementé en droit interne les procédures et les conditions légales rélatives aux soins de santé transfrontaliers, dans le domaine du remboursement effectif des coûts de soins de santé dispensés dans un autre État membre après que le patient a reçu un traitement, hypothèse quʼinteresse lʼaffaire en cours. On parle du IVème Chapitre – „ Le remboursement des coûts” – de la Loi no 95/2006, telle que modifiée et complétée, et du IIème Chapitre – „La méthodologie de remboursement des prix et des tarifs représentant la contrepartie des soins de santé transfrontaliers, y compris leur échelon” – dans le cadre des Normes méthodologiques approuvées par la Décision du Gouvernement no 304/2014, telle que modifiée et complétée, en liaison avec les autres normes de droit dérivé approuvant tant la liste des médicaments que leurs protocoles d'administration, comme mentionné ci-dessus.
Par conséquent, après avoir clarifié la relation entre le règlement et la directive tant au niveau de l'UE qu'au niveau du droit national, la Cour d'appel a omis à tort d'examiner, du point de vue du droit national, l'existence/non-existence d'un refus par les administrateurs du système national de santé de rembourser effectivement le coût du médicament supporté par le bénéficiaire du traitement.
En effet, seul un éventuel refus administratif, qui aurait eu pour effet de permettre au patient assuré de recourir aux instruments et aux mécanismes de fourniture de soins de santé transfrontaliers (sous la forme d'un remboursement du coût du traitement, dans le cadre de certaines procédures et conditions spécifiquement prescrites), aurait pu avoir la signification d'une restriction à la libre prestation des services qui, en vertu du principe de proportionnalité, remettrait en cause le test de nécessité et d'équilibre par rapport aux objectifs légitimes visés par le droit national.
En d'autres termes, pour que l'effet direct du règlement de l'UE soit applicable, la juridiction d'appel devait d'abord établir, d'une part, si et dans quelle mesure la législation nationale empêche l'accès du patient à un traitement médical à l'étranger et, d'autre part, si cette limitation ou restriction est causée par des actions/inactions de l'État ou, au contraire, par le comportement du patient qui n'a pas respecté les procédures établies dans le droit national, afin de vérifier si les conditions prévues sont remplies conformément à la marge d'appréciation accordée aux États membres par le droit de l'Union.
Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, la Haute Cour constate que la décision rendue en appel équivaut à un défaut de solution au fond de l'affaire, sanctionné par la cassation de la décision attaquée et le renvoi de l'affaire pour un nouveau jugement, l'examen des autres griefs des requérants – défendeurs étant superflu.
Par conséquent, sur la base de l'article 488 paragraphe (1) point 8, de l'article 496 et de l'article 497 du Code de procédure civile, afin d'assurer l'unicité du jugement, la Haute Cour va admettre les pourvois interjetés et va casser la décision avec renvoi à la même cour d'appel.
La cour de renvoi va se prononcer sur le rapport juridique en cause en tenant compte aussi des autres critiques griefs formulés par les requérants au pourvoi – défendeurs.
La juridiction de renvoi tiendra également compte, lors de l'examen de l'applicabilité de l'effet direct du Règlement (CE) n° 883/2004 et des principes jurisprudentiels découlant de la décision préjudicielle dans l'affaire C-173/09, non seulement des similitudes mais aussi des différences révélées par les circonstances factuelles sous-jacentes (notamment le fait qu'une autorisation préalable du traitement a été demandée).
La juridiction de renvoi va procéder également à la corrélation nécessaire et appropriée avec la Directive 2011/2014/UE et va examiner la loi nationale qui la transpose en droit interne sous l'angle de l'existence/non-existence du refus administratif de rembourser le coût réel du médicament et, le cas échéant, de son caractère justifié/injustifié, eu égard également au principe d'autonomie procédurale des États membres consacré par le droit de l'Union européenne. POUR CES RAISONS AU NOM DE LA LOI,
LA HAUTE COUR DÉCIDE: Admet les pourvois formés par les défendeurs Caisse Nationale dʼAssurance Maladie, le Ministère de la Santé et la Caisse dʼAssurance Maladie dʼIlfov contre la décision civile n° 674 A du 24 avril 2019, rendue par la Cour d’Appel Bucarest – 4 ème Chambre civile.
Casse la décision attaquée et la renvoit à la Cour d'appel Bucarest, pour un nouveau jugement.
Décision définitive.
Décision rendue en audience publique, aujourd’hui le 20 avril 2021.