A l'audience publique ordinaire du vingt sept juillet mil neuf cent quatre vingt
quatorze.ENTETE
Le sieur Ag A demeurant à Dakar mais ayant élu domicile en l'étude de
maître Massokhna KANE, Avocat à la Cour, |, avenue Aa Z, Dakar ;ENTRE Les Nouvelles Savonneries de l'Ouest Africain (N.S.O.A.) Km2, Bd du Centenaire de la Commune de Dakar ; ayant élu domicile en l'étude de Maîtres Doudou et Yérim THIAM,
avocats à la Cour, 68, rue Ab B, Dakar ;
VU la déclaration de pourvoi présentée par l'1lître l'11ssokhna KANE, avocat à la
Gour, au nom et pour le comte de sieur Ag A ;
LADITE déclaration enregistrée au greffe de la Cour de Cassation le 4 novembre 1992 et
tendant à ce qu'il plaise à la Cour casser l'arrêt n° 446 en date du 14 juillet 1992 Par lequel la Cour d'Appel irrégulièrement composée a confirmé le jugement du 29 décembre 1988 ;
CE faisant, attendu que l'arrêt attaqué manque de base légale, est insuffisamment motivé et a fait une inexacte appréciation des faits de la cause ;
VU l'arrêt attaqué ;
VU les piéces produites et jointes au dossier desquelles il résulte qu'il n'a pas été produit de mémoire en défense pour la N.S.O.A. ;
VU le Code du Travail ;
VU la loi organique n° 92-25 du 30 mai 1992 sur la Cour de Cassation
OUI Monsieur Amadou Makhtar SAM3, Président de Chambre, en son rapport ; OUI Me Massokhna KANE en ses observations orales ;
OUI Monsieur Af Y, Auditeur, représentant le Ministère Public en ses
conclusions ;
APRES EN AVOIR DELIBERE CONFORMEMENT A LA LOI
SUR le premier moyen tiré du manque de base légale
ATTENDU qu'il est fait grief à l'arrêt n° 446 du 14 juillet 1992 d'avoir manqué de base légale en ce que la Chambre Sociale de la Cour qui a rendu ledit arrêt n'était pas réguliérement
constituée puisque Ac C nommé Secrétaire Général de la Cour de Cassation, ne faisait plus partie de la Cour d'Appel à la date de la décision ; qu'il pouvait tout au plus
administrer les affaires courantes en attendant son remplacement et non rendre des décisions ;
MAIS attendu qu'il y a lieu de distinguer entre la nomination d'un magistrat et sa prise de
fonction effective ; qu'en tout état de cause, les constatations consignées dans les jugements notamment celles relatives à la régularité de la
composition des juridictions font foi jusqu'à inscription de faux qu'un plaideur n'est donc pas recevable à les contester en dehors de cette procédure: que le moyen n'est donc pas recevable ; SUR les deux moyens réunis tirés de l'insuffisance de motifs, d'une inexacte application des faits de la cause et de la violation de l'article 116 du Code du Travail ;
ATTENDU QU'en outre, il est fait grief à la Cour d'avoir fait siennes les motivations du
premier juge qui avait considéré que le sieur FALL n'avait pas rapporté la preuvre qu'il avait acquis le droit au rappel de salaires à la sui te d'une pratique constante, alors qu'au vu des
piéces produites, la preuve était largement rapportée que le droit au rappel était une pratique constante, puisque FALL a eu à en bénéficier pendant plusieurs années et que le rappel a
continué à être versé aux autres cadres après qu'il a été supprimé à FALL :
QU'-en déclarant par ailleurs que la production du registre des paiements n'est exigée que si l'employeur n'a pas délivré de bulletin de paie au travailleur, le demandeur soutient que la
Cour a manifestement violé l'article 116 du Code du Travail qui pose une présomption
irréfragable de non-paiement si l'empoyeur n'est pas en mesure de produire le registre de
paiement, dès lors qu'il n'est pas ici question de non-paiement de salaire, mais plutôt de
rappel” de salaire dont les bulletins de paie délivrés au-delà de l'année 1978 attestent du non- paiement: que par suite, selon le demandeur, la Cour a faussement interprété l'article 116 du Code du Travail ;
MAIS, attendu que FALL se borne à déclarer que la preuve du droit au rappel de salaire était une pratique constante et est largement rapportée au vu des piéces produites sans préciser
lesquelles, alors que dans ses conclusions en date du 31 mars 1987, il soutenait que le
Directeur Général des Nouvelles Savonneries de l'Ouest Africain (N.S.G.A.) après avoir
promis en fin 1972 à trois cadres dont Ag A, que désormais "il leur fera un" rappel" de salaire annuel" chaque fois que le taux d'augmentation du coût de la vie de l'année écoulée le justifie et qu'il n'en a bénéficié que trois fois dont la dernière en date a eu lieu le 31
décembre 1978, après quoi ce "rappel" a été supprimé en ce qui le concerne en 1979 :
ATTENDU en outre que "ce rappel annuel de salaire” s'apparente à une gratification, c'est-à- dire à un supplément de salaire alloué au travailleur en fin d'année et qui, en l'absence de
stipulation de la Convention Collective ou du contrat de travail individuel prévoyant son
octoi, doit être considérée comme une libéralité (dont le montant est laissé à la discrétion de l'employeur et peut varier d'un travailleur à un autre), sauf si elle correspond à une pratique
générale, constante et fixe que par suite, en l'espéce, il appartient au travailleur qui réclame le droit à cette gratification de le prouver conformément aux dispositions de l'article 9 du Code des Obligations Civiles et Commerciales (C.O.C.C.) en montrant que l'octroi de cette
gratification est général, constant et fixe ; qu'il résulte notamment des conclusions précitées de FALL et des bulletins de salaires produits que l'octroi de cette gratification ne présente pas
ces caractères que par suite, c'est à bon droit que la Cour d'Appel, adoptant les motifs du
premier juge, a pu déclarer que FALL n'a pas rapporté la preuve qu'il avait acquis le droit au «rappel de salaire » à la suite d'une pratique constante ;
QU'en ce qui concerne la prétendue violation de l'article 116 du Code du Travail, la Cour
d'Appel a relevé, par ailleurs, que FALL se contente d'exiger de l'employeur la production du registre de paiement et répondant à cette exigence, la Cour a fait observer que l'employeur
n'est obligé de produire le registre de paiement que s'il n'a pas délivré de bulletin de paie au travailleur, ce qu'il est pas le cas, en l'espéce ;
QU'il y a lieu de distinguer entre la preuve du paiement effectif d'une gratification et la preuve du droit à une gratification ; qu'effet, la production du registre des paiements ne peut rien
ajouter aux mentions figurant sur les bulletins de salaires déjà produits et qui révélent que
FALL a cessé de percevoir cette gratification fin 1978, ainsi qu'il le dit lui-même dans ses
conclusions; que par suite, le problème de la preuve du droit de FALL à la gratification reste entier ; qu'en tout état de cause, les faits souverainement appréciés par le juge du fond ne
sauraient être discutés à nouveau devant le juge de Cassation ; que par suite les deux moyens réunis ne sont pas fondés ;
REJETTE le pourvoi de Ag A contre l'arrêt n° 446 du 14 juillet 1992 de la Chambre Sociale de la Cour d'Appel de Dakar ;
DIT qu'à la diligence de Monsieur le Procureur Général près la Cour de Cassation le présent arrêt sera transcrit sur les registres de la Cour d'Appel en marge ou à la suite de l'arrêt
attaqué ;
AINSI fait, jugé et prononcé par la Cour de Cassation, Chambre
Sociale, en son audience publique ordinaire des jour, mois et an que dessus à laquelle
siégeaient : Messieurs :
Amadou Makhtar SAM3, Président de Chambre-rapporteur ;
Elias DOSSEH, Conseiller ;
Bassirou DIAKHATE, Conseiller ;
ET en présence de Monsieur Af Y, Auditeur, représentant le Ministère Public et avec l'assistance de Maître Abdou Razakh DABO, Greffier ;
ET ont signé le présent arrêt le Président-rapporteur, les conseillers et le
Greffier