rreT N° 76 DU 9 Juin 1993
DEMANDEUR :
Ad C - Bassirou DIAKHA
Conseillers
RAPPORTEUR :
M. X Aa Ah A
MINISTERE PUBLIC
AUDIENCE :
ILO.A. - TEL. 22.51.76 - DAKAR \ REPUBLIQUE DU SENEGAL
AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS,
LA COUR DE CASSATION
TROIS EEME-—— CHAMBRE …—STTATUANT EN MATIERE
SOCIALE
Mouf juin mil neuf cent quatre vingt treize;
Sénégalaise dite ( C.S.S.) ayant domicile élu en
l'étude de Maitre Kanjo . avocat à la Cour,66,
Boulevard de la République , Dakar -
D'UNE PART;
CAMARA, Ae B , ayant domicilié en
l'étude de Maitre Illam Niang, avocats à la
Cour à Dakar i-
D'AUTRE PART;
VU les déclarations de pourvois de
Me Bourgi et Kanjo, Avocats à la Cour, agis-
sant au nom et pour le compte de la C.S.S. et
tendant à ce qu'il plaise à la Cour casser et
annuler les arrêts n°s 147 du 13 Mars 1990,
47 du 5 février 1991 et 160 du 24 Mars 1992
de la Chambre sociale de la Cour d'Appel de
CE faisant attendu que les arrêts
attaqués ont - manqué de base légale pour avoir déclaré le procés verbal de -
- violé la loi en statuant ultra petita ; .
-violé l'article 64 de la loi organique sur la Cour Suprême;
-violé la loi pour avoir alloué des sommes d'argent a : des tra-
- violé le double degré de juridiction;
VU les arrêts attaqués . 7
VU les lettres du greffe en date des 7 Mai 1990,
7 Mars 1991 et 19 Mai 1992 portant notification des pourvois aux
VU le Code du Travail . ?
VU la loi n° 92-25 du 30 Mai 1992 portant loi
organique sur la Cour de Cassation . ?
LA COUR .
OUI Monsieur Amadou Makhtar Samb, Président de
Chambre , en son rapport . 7
OUI Monsieur Läîty KAMA, Avocat Général,
représentant le ministére public en ses conclusions;
APRES en avoir délibéré conformément à la loi
SUR LA JONCTION : :
ATTENDU que la Compagnie Ag Ac
(C.S.S.) s'est pourvue en cassation contre les arrêts n° 147 du
13 Mars 1990 , n ° 47 du 5 Février 1991 et n3° 160 du 24 Mars 1992
de la Chambre sociale de la Cour d'Appel . î
QUE les trois pourvois concernent les mêmes par-
ties et ont le même objet ( puisque les deux derniers arrêts ne
sont que des arrêts d'homologation de décomptes relatifs au pre-
mier arrêt n° 147 du 13 Mars 1990 qui a notamment écarté le pro-
cés verbal de conciliation du 13 Avril 1988 passé devant l'Inspec
teur du travail et qui a condamné la C.S.S. à payer aux travail- -leurs diverses indemnités ) ; qu'il y a lieu de les joindre
pour y être statué par une seule et même décision ;
ATTENDU qu'il est constant que le 2 Avril 1982
les délégués du personnel à la Compagnie Ag Ac
(C.S.S.), Momath Ciss , Aa Ab , Aa C et
Ae B furent licenciés aprés autorisation de l'inspec-
teur du travail ; que le Ministére chargé du travail ayant in-
firmé l'autorisation de licenciement , ceux-ci saisirent le
tribunal du travail qui par jugement en date du 26 JUillet 1
1984 ordonna la réintégration des travailleurs, condamna la
C.S.S. à payer à chacun une indemnité égale au salaire qu'il
aurait perçu s'il avait travaillé , débouté lesdits travailleurs
de l'indemnité supplémentaire prévue à l'article 188 bis du
Code du travail , ordonna la liquidation sur état des sommes à
payer ; que sur appel de la C.S.S., la Cour d'Appel confirma
le jugement du tribunal par arrêt en date du 28 Janvier 1986;
que le 2 JUillet 1987 saisi à nouveau par les travailleurs aux
fins de s'entendre allouer des indemnités de rupture , le tribu-
nal de Dakar ordonna la réintégration desdits travailleurs avec
paiement des salaires dûs du 30 Avril 1986 au 30 JUin 1987;
que sur appel de la C.S.S. et avant que la Cour d'Appel n'ait
statué sur l'affaire, les parties en cause convenaient d'un ré.
glement négocié , intervepu suivant procés verbal établi et si-.
gné par les parties devant l'Inspecteur du travail, le 13
Avril 1988 , aux termes duquel il était convenu notamment que
"pour mettre fin au contentieux de la réintégration qui les or-
pose depuis Avril 1982, les parttes ont * décidé de mettre
fin d'accord parties à leurs liens contractuels moyennant
paiement de diverses sommes d'argent à titre d'ipdemnités de rupture ; que la présente conciliation régle définitivement
et irrévocablement le contentieux opposant les parties; que
celles-ci renoncent à se prévaloir , à l'avenir , de la décision
de la Chambre sociale de la Cour d'Appel en date du 3 Mai(ou du
28 Janvier ), 1986 et de celle du tribunal du travail du 26
Juillet 1984 " ; que nonobstant cette conciliation , la Cour
d'Appel,par l'arrêt n° 147 du 13 Mars 1990, a confirmé le juge-
ment entrepris et déclaré que les travailleurs avaient remis
en cause devant la Cour la validité du procés verbal de conci-
liation en affirmant qu'ils avaient Sté induits enerreur par
leur mandataire syndical ; que la conciliation aurait dû inter-
venir devant le juge dés lors que les juridictions du travail
étaient saisies , ce qui a pour effet principal de dessaisir
l'Inspecteur du travail qui n'a plus qualité pour concilier
sur les chefs de réclamation dont le tribunal est saisi; que
ledit procés verbal qui n'est pas revêtu de la formule exécutoi-
re conformément à l'article 211 du Code du Travail, n'est pas oc
posable aux travailleurs ;
QUE saisie par les travailleurs d'une requête
aux fins d'homologation du décompte des sommes qui Leur sont
dues , la Cour d'Appel a , par arrêt n°47 du 5 Février 1991 et
en exécution de l'arrêt n° 147 du 13 Mars 1990 , homologué les
décomptes des sommes dues pour les périodes du ler Juillet 1987
au 30 Juin 1990 et du ler JUillet au 31 Décembre 1990, déduction
faite des primes de transport; et par arrêt n° 160 du 24 Mars
1992 les décomptes concernant la période du ler Janvier 1991 au
31 Décembre 1991 , aprés avoir rejeté comme mal fondées les ob-
jections soulevées par la C.S.S. pour faire échec à l'homologa-
tion ;
ATTENDU que l'article 188 bis aïnéa 3 du Code du
Travail dispose qu' en cas de licenciement prononcé par l'em, :
ployeur, sans que l'autorisation préalable de l'inspecteur ait
été demandée ou malgré le refus opposé par l'Inspecteur ou en
cas d'annulation par le Ministre de la décision de l'Inspecteur ’
autorisant le licenciement , le délégué du personnel ainsi li-
cencié est réintégré d'office avec paiement d'une indemnité égal
au salaire qu'il aurait perçu s'il avait travaillé.
-5
Si l'employeur ne réintégre pas le délégué du per-
sonnel 15 jours aprés la notification....., il est tenu de ver-
ser au délégué du personnel une indemnité supplémentaire égale à:
-12 mois de salaire brut lorsqu'il compte l à 5 ans
d'ancienneté dans l'entreprise ;
- 20 mois de salaire brut lorsqu'il compte 5 à 10
ans d'ancienneté ;,
- 2 mois de salaire brut par année de présence avec
un maximum de 36 mois lorsqu'il compte plus de 10 ans d'ancinneté
- Le versement de cette indemnité est sans influen.
ce sur la nullité du licenciement
QU'IL résulte de ces dispositions que la sanction
de la violation de l'article 188 bis est la nullité du licencie-
ment avec l'obligation de réintégration du délégué et paiement
d'une indemnité égale au salaire qu'il aurait perçu s'il avait
travaillé , conséquence logique de l'illégalité et de la nullité
du licenciement ;
QU'IL est prévu en outre , une indemnité supplé-
mentaire qui peut s'ajouter à l'indemnité représentative des sa-
laires dûs au cas où le délégué n'aurait pas été réintégré 15
jours aprés la nbtification de la décision de l'autorité adminis.
trative ; cette indemnité spéciale vise à accélérer l'exécution
de la réintégration et à décourager les employeurs récalcitrants;
ATTENDU que pour confirmer le jugement du tribu-
nal du travail qui a condamné la Compagnie Ag Ac
(C.S.S. ) à payer aux travailleurs les salaires dûs du 30.
Avril 1986 au 30 Juin 1987 à l'exclusion de l'indemnité supplé-
mentaire prévue à l'article 188 bis précité du Code du Travail
et pour déclarer , en outre que le procés-verbal de conciliation
du 13 Avril 1988 n'est pas opposable aux travailleurs, l'arrêt
attaqué en date du 13 Mars 1990 a fait valoir que les travail- —
leurs ont remis en cause devant la Cour d'Appel la validité
dudit procés-verbal en affirmant qu'ils avaient été induits
en erreur par le mandataire syndical et que la conciliation au-
rait dû intervenir devant le juge puisque la saisine des juridic
tions du travail a pour effet principal de déssaisir l'Inspecteur
du travail qui n'a plus aucune qualité pour concilier les par-
ties sur les chefs de réclamation dont le tribunal est saisi;
Qu'en tout état de cause , selon la Cour d'Appel, ledit
procés-verbal de conciliation n'est pas revêtu de la formu-
le exécutoire conformément à l' article 211 du Code du tra-
vail, et qu'un procés verbal de conciliation non rendu exé-
cutoire n'est pas opposable aux travailleurs ;
ATTENDU, qu'en l'espéce , la Cour d'Appel Aa,
à tort , omis de faire application stricte des dispositions
de l'article 188 bis prévoyant que si le délégué n'a pas
été réintégré 15 jours aprés la notification de la décision
de l'autorité administrative, l'employeur pourra être con
damné à verser une indemnité supplémentaire qui précisé-
ment vise à accélérer et à décourager les employe…urs
récalcitrants ;
QU' EN outre , aprés avoir ençaissé les sommes
arrêtées dans le procés verbal de conciliation pendant plus
d'un an, les travailleurs concernés qui sont tous délégués
du personnel, donc aussi avisés que leur mandataire syn-
dical, ne sauraient alléguer qu'ils étaient induits en er.
reur par leur mandataire ou que le procés verbal n'est pas
révêtu de la formule exécutoire, dès lors que la formule
exécutoire qui peut être apposée par le Président du
Tribunal du travail, d'aprés l'article 211 du Code du Tra-
vail, n'est pas une condition de validité du procés verbal
A de conciliation, mais permet simplement à ce document
administratif de pouvoir être exécuté comme une décision
de justice ; que par suite, la non-apposition de la formule
exécutoire ne saurait signifier, comme l'a affirmé la Cour
d'appel , l'inopposabilité dudit procés verbal; qu'il ne
résulte pas non plus de l'article 211 du Code du travail
évoqué dans l'arrêt attaqué, qu'une fois les duridictions _
sociales saisies, notamment lorsqu'une affaire est pendan-
te devant la Cour d'Appel, l'Inspecteur du travail ne
peut plus concilier, ainsi que l'affirme la Cour d'Appel;
que par suite , la conciliation peut intervenir à tout mo--
ment de la procédure ;
QU' EN l'espéce , le procés-verbal de concilia-
tion établi devant l'Inspecteur du travail dont ni la com- -pêt_-ence ni la qualité ne sont contestées et qui est dûment si-
gné par les travailleurs eux mêmes et par leur mandataire syndical
qui donc n'est entaché d'aucun vice dûment relevé, ne saurait être
déclaré inopposable aux travailleurs en vertu des dispositions de
l'article 211 du Code du Travail qui ne sont pas applicables pour
la seule raison que les travailleurs ont remis en cause la validité
dudit procés verbal alléguant qu'ils ont été induits en erreur par
leur mandataire syndical ;
QUE par suite , il y a lieu de déclarer que le pro-
cés-verbal de conciliation du 13 Avril 1988 met fin au litige qui
oppose les parties, et emporte renonciation définitive des parties
aux prétentions qu'elles avaient formulées.
PAR CES MOTIFS
CASSE sans renvoi les arrêts n° 147 du 13 Mars 1990,
n° 47 du 5 février 1991 et n° 160 du 24 Mars 1992 de la Chambre
sociale de la Cour d'Appel ;
DECLARE que le procés verbal du 13 Avril 1988 met fir
au litige opposant les parties ;
DIT qu'à la diligence de Monsieur le Procureur
Général prés la Cour de Cassation , le présent arrêt sera transcrit
sur les registres de la Cour d'Appel en marge ou à la suite de
l'arrêt attaqué .
AINSI fait , jugé et prononcé par la Cour de Ca«sa-
tion, chambre sociale, en son audience publique ordinaire des jour,
mois et an que dessus à laquelle siégeaient Messieurs:
Amadou Makhtar Samb, Président de Chambre , Président-Rapporteur;
Meïîssa DIOWF et Bassirou DIAKHATE , Conseillers;,
EN PRESENCE de Monsieur Laîty KAMA, Avocat Général
représentant le Ministére Public et avec l'assistance de Me Abdou
Razakh Dabo , Greffier;
Et ont signé le présent arrêt le Président - Rapporteur,
Les Conseiilers et le Greffier.
Le Président- Rapporteur Les Conseillers Le \Greffier
Aa Af A Ad C - Bassirou DIAKHATE Abdou R. DABO