REPUBLIQUE DU SENEGAL AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS ¤¤¤¤¤ COUR SUPREME CHAMBRE ADMINISTRATIVE ¤¤¤¤¤ AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU JEUDI VINGT SIX DECEMBRE DE L’AN DEUX MILLE DIX NEUF ¤¤¤¤¤ ENTRE :
Ad Ac, demeurant à Dakar, Km 4,8, Boulevard du Centenaire de la Commune de Dakar, Faisant élection de domicile en l’étude de Maître Guédel Ndiaye & associés, SCP d’avocats, 73, bis, Rue Ag Af Ac à Dakar ;
Demandeur ;
D’une part,
ET : L’État du Sénégal, pris en la personne de Monsieur l’Agent judiciaire de l’État, en ses bureaux sis au Ministère de l’Économie, des Finances et du Plan, building Peytavin, Avenue de la République x Carde à Dakar ;
Défendeur ;
D’autre part,
Vu la requête reçue le 23 avril 2018 au greffe central par laquelle Ad Ac, élisant domicile … l’étude de Maître Guédel Ndiaye et associés, avocats à la Cour, sollicite l’annulation du décret n°2014-276 du 3 mars 2014 du Président de la République prescrivant l’immatriculation au nom de l’Etat des assiettes foncières nécessaires au développement et à la mise en œuvre de projets économiques dans le secteur de Ah ; Vu la loi organique n°2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême ;
Vu la loi n°64-46 du 17 juin 1964 relative au Domaine national ;
Vu la loi n° 76-66 du 2 juillet 1966 portant Code du Domaine de l’Etat, modifié ;
Vu le décret n°81-557 du 21 mai 1981 portant application du Code du Domaine de l’Etat en ce qui concerne le domaine privé ;
Arrêt n°50 du 26 décembre 2019 ¤¤¤¤¤ Administratif ¤¤¤¤¤ Affaire n° J/147/RG/18 23/4/18 ¤¤¤¤¤
Ad Ac (Me Guédel Ndiaye & associés)
CONTRE Etat du Sénégal (Agent judiciaire de l’Etat) RAPPORTEUR Abdoulaye Ndiaye
PARQUET A Ousmane Diagne
AUDIENCE 26 décembre 2019
PRESENTS Abdoulaye Ndiaye, Président, Oumar Gaye, Adama Ndiaye,
Mbacké Fall Idrissa Sow, Conseillers,
Cheikh Diop, Greffier
MATIERE Administrative RECOURS Annulation Vu l’exploit du 27 avril 2018 de Maître Fatma Haris Diop, huissier de justice à Dakar, portant signification de la requête ;
Vu le mémoire en défense de l’Etat du Sénégal reçu le 26 juin 2018 au greffe ;
Vu le mémoire en réplique reçu le 24 août 2018 au greffe ;
Vu le décret attaqué ;
Vu le procès-verbal de transport sur les lieux, effectué le 14 mai 2019 par la Chambre administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Ouï Monsieur Abdoulaye Ndiaye, président de chambre, en son rapport ;
Ouï Monsieur Ousmane Diagne, avocat général, en ses conclusions tendant à l’annulation ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que le décret n°2014-276 du 3 mars 2014 a prescrit l’immatriculation au nom de l’Etat des assiettes foncières suivantes nécessaires au développement et à la mise en œuvre de projets économiques dans le secteur de Ah :
Zones d’activités de Ah : 125 ha Ah Sud : 113 ha Ah Ab B : 390 ha ;
Que le même décret a prononcé la désaffectation desdites assiettes foncières et précisé en son article 3 qu’« aucune indemnité n’est due pour la réalisation de cette opération, les assiettes foncières étant dans une zone libre d’occupation » ;
Qu’estimant que son terrain fait partie de l’assiette foncière désaffectée, Ad Ac sollicite l’annulation dudit décret en développant deux moyens tirés de l’inexactitude matérielle des faits et de la violation de la loi ;
Considérant que l’Etat du Sénégal soulève l’irrecevabilité du recours au motif que le requérant a eu connaissance du décret attaqué depuis le mois de juin 2016 et n’a déposé sa requête que le 28 avril 2018, soit au-delà du délai légal ;
Considérant que selon l’article 74-1 de la loi organique sur la Cour suprême, le délai de recours contre une décision administrative est de deux mois et court à compter de la publication ou de la notification de la décision attaquée, à moins qu’elle ne doive être signifiée, auquel cas, il court à compter de la date de la signification ;
Qu’au même titre que la publication et la notification, la connaissance acquise fait courir le délai du recours ;
Considérant que l’Etat du Sénégal n’a ni établi la connaissance acquise ni rapporté la publication du décret ; Qu’en revanche, il ressort de l’examen des pièces du dossier qu’une copie collationnée du décret attaqué a été délivrée le 21 février 2018 au requérant, sur sa demande, par le Conservateur de la Propriété foncière de Rufisque ;
Que le recours formé le 23 avril 2018, soit le dernier jour du délai franc de deux mois, est donc recevable ; Sur le premier moyen, en sa seconde branche, tiré de l’inexactitude matérielle des faits en ce que le décret attaqué prévoit, en son article 3, qu’aucune indemnité n’est due pour la réalisation de cette opération, les assiettes foncières étant dans une zone libre d’occupation alors que, d’une part, le rapport de la séance du 14 août 2014 de la Commission de Contrôle des Opérations domaniales fait état de la présence d’exploitants de petites fermes sur le site, de lotissements irréguliers en cours de réalisation et d’empiètement du nouveau tracé de l’autoroute à péage et, d’autre part, le bureau des domaines territorialement compétent savait, depuis sa première demande de régularisation déposée le 3 novembre 2009, qu’il occupait et exploitait un terrain de neuf (9) hectares situé à Aa Ae, en vertu de la délibération du 17 septembre 1993 du Conseil rural de Sébikotane ;
Et sans qu’il soit besoin de statuer sur le second moyen ;
Considérant que l’article 3 du décret attaqué prévoit qu’aucune indemnité n’est due pour la réalisation de cette opération, les assiettes foncières étant dans une zone libre d’occupation ;
Considérant cependant qu’il ressort de la délibération du 17 septembre 1993 du Conseil rural de Sébikotane qu’Ad Ac est attributaire d’un terrain du domaine national, à usage agricole, d’une superficie de sept (7) hectares, sis à Ponty Ouest ;
Que le procès-verbal de transport sur les lieux effectué par la Chambre administrative le 14 mai 2019 et les documents transmis par le Chef du Bureau des Domaines de Rufisque-Bargny établissent que le terrain attribué à Ad Ac se situe effectivement dans la zone d’activités de Ah d’une superficie de 125 hectares et que ce dernier l’a mis en valeur notamment par l’édification d’un bâtiment à usage avicole, la plantation d’arbres fruitiers et l’exploitation d’un périmètre maraicher ;
Que du reste, dans son rapport établi à l’issue de sa séance du 14 août 2014, la Commission de Contrôle des Opérations Domaniales (CCOD) a révèle la « présence de petites fermes » dans la zone ;
Qu’ainsi l’article 3 du décret attaqué pris sur le fondement d’un motif de fait matériellement inexact, doit être annulé ; Par ces motifs Annule, mais uniquement en son article 3, le décret n°2014-276 du 3 mars 2014 du Président de la République prescrivant l’immatriculation au nom de l’Etat des assiettes foncières nécessaires au développement et à la mise en œuvre de projets économiques dans le secteur de Ah ; Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre administrative de la Cour suprême, en son audience publique ordinaire tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents :
Abdoulaye Ndiaye, Président, Oumar Gaye, Adama Ndiaye,
Mbacké Fall Idrissa Sow, Conseillers,
Ousmane Diagne, Avocat général ;
Cheikh Diop, Greffier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, les conseillers et le greffier.
Le Président
Abdoulaye Ndiaye
Les Conseillers : Oumar Gaye Adama Ndiaye Mbacké Fall Idrissa Sow Le Greffier
Cheikh Diop