Bulletin des Arrêts n°s 21-22
COUR SUPRÊME
ARRÊT N° 44 DU 20 MAI 2020
Ae Ac Ag Af Aa LOGE
HUGUETTE MARIE ROBERTE ELSOCHT
ENFANCE — DROITS DE L’ENFANT — INTERDICTION D’ATTEINTES ILLÉ- GALES À SON HONNEUR ET À SA RÉPUTATION — PUBLICATION SUR INTERNET DE LA PHOTOGRAPHIE D’UN ENFANT À MOITIE NU — OF- FICE DU JUGE DES RÉFÉRÉS — INJONCTION DE RETRAIT DE LA PHOTOGRAPHIE
Selon l’article 16 alinéa premier de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant de 1989, nul enfant ne fera l’objet d’immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes illégales à son honneur et à sa réputation, et en vertu de l’article 248 du code de procédure civile, le juge des référés peut, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;
C’est à bon droit qu’une cour d'Appel, statuant en référé, a accueilli la demande d’une mère tendant à obtenir le retrait de la publication, sur internet, par le père de la pho- tographie de leur enfant mineur à moitié nu.
NOTA : ANONYMISEZ COMPLETEMENT CET ARRÊT POUR NE PAS POR- TER ATTEINTE A L’HONNEUR DE CET ENFANT
La Cour suprême,
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Ziguinchor, 13 février 2019, n° 05), statuant en référé, qu'après le divorce des époux LOGE, la garde de leur fille adoptive avait été confiée àX" C et un droit de visite le plus large accordé à M. LOGE ; qu’estimant que son ex-mari avait publié sur sa page Ad, dans son blog et dans son livre, l’image de leur fille torse nu, M"° ELSOCHT l’a assigné pour en obtenir le retrait ;
Sur les premier et second moyens réunis, tirés de l’insuffisance de motifs et du défaut de base légale :
Attendu que M. A fait grief à l’arrêt d’ordonner l’enlèvement de la photo, alors, selon le moyen :
1°/ que l'arrêt ne relève aucune intervention arbitraire ou immixtion dans l’intimité de l'enfant et qu’en l’espèce, la photo qu’il a prise et affichée dans son livre et sur sa page Ad ne porte aucun caractère ou indication sur des données génétiques, encore moins un commentaire à connotation raciale, ethnique ou régionale ;
2°/ qu’en ne précisant pas en quoi la publication de la photo par lui, père adoptif de l’enfant, pouvait constituer un trouble manifestement illicite au regard de l’article 40 de
82 Chambre civile et commerciale
Arrêts de la Cour suprême — Année judiciaire 2020
COUR SUPRÊME
la loi n° 2008-12 et 16 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant, la cour d’Appel a privé sa décision de base légale ;
Mais attendu que, pour statuer comme elle l’a fait, la cour d’Appel a énoncé qu’en vertu de l’article 248 du code de procédure civile le juge des référés peut, même en pré- sence d’une contestation sérieuse, prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;
Qu'elle a ensuite relevé que la photographie du buste dénudé de la jeune fille A. LOGE apparaissait tant sur le livre incriminé que la page Ad de M. A ;
Qu'elle a enfin retenu que la nudité de l’enfant ainsi mise en exergue constituait une violation des dispositions de l’article 16 de la convention internationale relative aux droits de l’enfant de 1989 qui stipule dans son alinéa 1“ que nul enfant ne fera l’objet d’immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes illégales à son honneur et à sa réputation et que le trouble manifestement illicite était plus que caractérisé par cette publicité [... ] d'autant que l’auteur des faits animait un blog dans lequel la pornographie et des critiques contre l’intimité des Africains étaient développées ;
Qu'en l’état de ces énonciations et constatations, la cour d’Appel a légalement justifié sa décision ;
Par ces motifs :
Rejette le pourvoi formé par Ae Ac Ag Af Aa LOGE contre l'arrêt n° 05 du 13 février 2019 rendu par la cour d’Appel de Ziguinchor ;
Le condamne aux dépens.
Dit que le présent arrêt sera imprimé, qu’il sera transcrit sur les registres de la cour d’Appel de Ziguinchor, en marge ou à la suite de la décision attaquée.
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, chambre civile et commerciale en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents Mes- sieurs :
PRÉSIDENT : EL HADJI MALICK SOW ; CONSEILLER-RAPPORTEUR : SEY- DINA ISSA SOW ; CONSEILLERS : B Ab, WALY FAYE, AMADOU LAMINE BATHILY ; AVOCAT GÉNÉRAL : OUMAR DIÈYE ; GREFFIER : MAÎTRE MAURICE DIOMA KAMA.
Chambre civile et commerciale 83