COUR SUPRÊME
LES
Bulletin des Arrêts n°s 21-22
ARRÊT N° 52 DU 03 JUIN 2020
C Z AG
HÉRITIERS DE X Y AG ET AUTRES
POURVOI — MOYENS IMPLIQUANT SUBSTANTIELLEMENT L’INTERPRÉTATION D’UN ACTE UNIFORME — RENVOI DEVANT LA CCJA
Ily a lieu de renvoyer l'affaire devant la CCJA lorsque le moyen, bien que reprochant formellement dans son intitulé au juge d'appel d’avoir méconnu le principe dispositif en introduisant des faits qui ne résultent pas des conclusions des parties en violation de 1-5 du CPC, substantiellement, conteste la nature ou la qualification de l'augmentation de capital qui a été retenue par le juge d'appel, puisque lui reprochant d’avoir consi- déré qu’il s'agissait d’une augmentation de capital par majoration du montant nomi- nal des actions, alors qu’il s’agit d’une augmentation de capital par création d'actions nouvelles ; son examen implique, en effet, l’interprétation et l’application de l’article 562 AUSCGIE qui précise les modalités de l'augmentation du capital.
La Cour suprême,
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique pris en ses deuxième et troisième branches réunies, tiré de la violation des articles 756 et 637 alinéa 1 du code de la famille :
Vu l’article 756 du code de la famille, ensemble l’article 10 de la loi n° 2014-26 du 03 novembre 2014 fixant l’organisation judiciaire ;
Attendu qu’aux termes du premier de ces textes, « toute aliénation volontaire, celle même par vente avec faculté de rachat, ou par échange, que fait le testateur de tout ou partie de la chose léguée, emporte la révocation tacite du legs pour tout ce qui a été aliéné, encore que l’aliénation postérieure soit nulle et que l’objet soit rentré dans la main du testateur » ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Dakar, 24 décembre 2018, n° 320), que X Y AG est décédé à Dakar, le 30 juin 2014, laissant comme habiles à lui succéder une veuve, trois garçons et deux filles ; qu’il avait établi, le 25 novembre 2006, un testament olographe, déposé au rang des minutes d’un notaire, dans lequel il avait déclaré avoir légué la propriété d’un tiers de l'immeuble immatriculé 11 608/DG à chacun de ses trois garçons ; que le 24 avril 2013, il avait fait donation du même immeuble à son fils dénommé Aa Ac AG, par un autre acte déposé en l’étude du même notaire ; qu’estimant que cette donation avait pour but de l’exclure de la succession, et qu’elle violait les règles de dévolution successorale de droit musulman, C Z AG a assigné ses cohéritiers en déclaration de nullité et de caducité du premier testament ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient que même s’il y a eu un acte de donation postérieur au testament du 25 novembre 2006, il ne peut être discuté qu’il ne
84 Chambre civile et commerciale
Arrêts de la Cour suprême — Année judiciaire 2020
COUR SUPRÊME
résulte nullement des dispositions susvisées que ladite donation entraîne la révocation du premier testament et relève qu’C Z AG n’a pas établi l’existence d’un des cas dans lesquels un testament est caduc, en application des articles 758 à 761 du code de la famille ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la donation de l'immeuble était l’expression d’une volonté révocatoire du testateur, la cour d’Appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ;
Et attendu qu’il y a lieu de faire application de l’article 53 alinéa 5 de la loi organique susvisée, la Cour est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par appli- cation de la règle de droit appropriée, en constatant la révocation du testament ;
Par ces motifs, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres branches du moyen :
Casse et annule en toutes ses dispositions l'arrêt n° 320 rendu le 24 décembre 2018 par la cour d’Appel de Dakar ;
Dit n’y avoir lieu à renvoi ;
Constate la révocation du testament du 25 novembre 2006 ;
Dit que le présent arrêt sera imprimé, qu’il sera transcrit sur les registres de la cour d’Appel de Dakar, en marge ou à la suite de la décision attaquée.
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, chambre civile et commerciale en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents Madame et Messieurs :
PRÉSIDENT : EL HADJI MALICK SOW ; CONSEILLER-RAPPORTEUR : LATYR NIANG ; CONSEILLERS : WALY FAYF, A B Ab, MOUSTA- PHA BA ; AVOCAT GÉNÉRAL : AHMETH DIOUF ; GREFFIER : MAÎTRE MAU- RICE DIOMA KAMA.
Chambre civile et commerciale 85