ARRET N° 50 Du 21 avril 2021 ……………. MATIÈRE : Civile et commerciale
N° AFFAIRE: J/170/RG/20
Ae X Pape M. C (Me Guédel NDIAYE et associés) C/ Société dite “SABLUX RETINA” (Me Mouhamadou Af DIENG) Rapporteur Latyr NIANG PARQUET GENERAL: Amadou Mbaye GUISSE AUDIENCE
Du 21 avril 2021 PRÉSENTS :
El Hadji Malick SOW Souleymane KANE Amadou Lamine BATHILY Kor SENE Latyr NIANG
GREFFIER : Mbacké LÔ RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL ----------- Un Peuple – Un But – Une Foi --------------- AU NOM DU PEUPLE SÉNÉGALAIS COUR SUPRÊME ----------------- CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE ------------- A L’AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU VINGT-ET-UN AVRIL DEUX MILLE VINGT-ET-UN
ENTRE :
Ae X, demeurant à Dakar, Almadies Zone Nord lot n° 10 à Dakar ;
Pape Ac C et en tant que de besoin M. Ag dit Ah C, demeurant à Dakar, Almadies Zone Nord lot n° 10 à Dakar ;
Ayant tous les deux pour conseils constitués l’étude de Maîtres Guédel NDIAYE & associés, SCP d’Avocats, 73 bis rue Amadou Assane Ndoye à Dakar ;
Demandeurs D’une part ;
ET La Société Civile dénommée « SABLUX RETINA », dont le siège est à Dakar, Point E rue 6 x C, prise en la personne de son représentant légal, ayant pour conseil Maître Mouhamadou Moustapha DIENG, avocat à la Cour, 128, Avenue Ab X A Ad B 5ème étage Appt 2435-2436 à Dakar ; Défenderesse ; D’autre part ;
Statuant sur le pourvoi formé suivant requête enregistrée au Greffe de la Cour suprême le 16 avril 2020 sous le numéro J/170/RG/20 par Maîtres Guédel NDIAYE et associés, avocats à la Cour, agissant au nom et pour le compte d’Ae X et de Pape Ac C, contre l’arrêt n° 01 du 2 janvier 2020 de la deuxième chambre civile de la Cour d’Appel de Dakar, dans la cause les opposant à la société « SABLUX RETINA » ;
Vu la quittance n° 510689 du 20 avril 2020 attestant la consignation de la somme devant garantir le paiement des droits de timbre et d'enregistrement ;
Vu la signification du pourvoi du 30 avril 2020 par exploit de Maître Fatma Haris DIOP, huissier de justice à Dakar ;
Vu le mémoire en défense du 9 décembre 2020, déposé par Maître Mouhamadou Moustapha DIENG, pour le compte de la société « SABLUX RETINA » ;
La Cour,
Ouï M. Latyr NIANG, Conseiller en son rapport ;
Vu les conclusions écrites du parquet général tendant au rejet du pourvoi ;
Vu la loi organique n° 2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur la recevabilité du pourvoi : Attendu que la société SABLUX RETINA conteste la recevabilité du pourvoi, au motif que l’exposé des faits sur quatre pages n’est pas sommaire ; Mais attendu que dès lors que la requête contient un exposé des faits, les requérants ont satisfait aux exigences de l’article 33 de la loi organique susvisée ; D’où il suit que l’irrecevabilité n’est pas encourue ; Attendu, selon l’arrêt attaqué (Dakar, 2 janvier 2020, n°1), que la société SABLUX RETINA, propriétaire du TF n°15695/NGA, a assigné MM. Gueye et C en expulsion et en destruction des constructions y édifiées ; que par jugement avant-dire droit du 1er février 2018, le Tribunal de grande Instance de Dakar a ordonné une expertise aux fins de déterminer les parcelles empiétant sur ce titre foncier et d’identifier leurs propriétaires ; que le chef du bureau du cadastre, dans son rapport a conclu à des empiétements ; que dans leurs conclusions d’appel, MM. Gueye et C ont demandé chacun 500 millions à titre de remboursement de la valeur des constructions ; Sur les premier et deuxième moyens réunis, tirés de la violation des articles 1-5 et 1-6 du Code de Procédure civile : Attendu que MM. Gueye et C font grief à l’arrêt de rejeter leur demande d’indemnisation fondée sur les dispositions de l’article 555 du Code civil, encore applicable au Sénégal, au motif que la bonne foi peut être définie comme la loyauté dans la conclusion et l’exécution des actes juridiques ou la croyance non fautive en l’existence d’un acte ou d’un fait juridique et que si les appelants peuvent prétendre à l’indemnisation prévue à l’article 555 du Code civil, en raison du décret foncier du 26 juillet 1932, y opérant renvoi, une telle réparation n’est due que lorsqu’il est fait la preuve que les occupations incriminées sont antérieures à l’abrogation dudit décret par la loi foncière de 2011, alors, selon le moyen : 1°/que la question de l’antériorité des constructions à la loi foncière de 2011 n’a jamais été dans le débat pour n’avoir jamais été discutée par la société SABLUX, le juge ne pouvant introduire dans le débat des faits qui ne résultent pas des conclusions des parties ;
2°/que la question de l’antériorité des constructions à la loi foncière de 2011 et celle de la prétendue abrogation de cette loi n’ont jamais été dans le débat pour n’avoir jamais été discutés par la société SABLUX ; que le juge ne pouvait soulever d’office ce moyen sans provoquer les explications des parties ; Mais attendu que saisie d’une demande de remboursement fondée sur l’article 555 du Code civil français, la cour d’appel, qui doit trancher le litige conformément aux règles de droit en vigueur, avait l’obligation de rechercher si cet article était encore applicable au litige à la suite de l’intervention de la loi n°2011-07 du 30 mars 2011 portant régime de la Propriété foncière ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; Sur le troisième moyen tiré de la violation de l’article 96 de la loi n° 2011-07 du 30 mars 2011 portant régime de la Propriété foncière : Attendu que MM. Gueye et C font grief à l’arrêt de rejeter leur demande d’indemnisation fondée sur l’article 555 du Code civil, encore applicable au Sénégal, alors, selon le moyen, que la loi de 2011 n’abroge que les dispositions contraires du décret de 1932 et que celles qui renvoient au Code civil n’ont rien de contraire à ladite loi et lui sont simplement complémentaires ; Mais attendu qu’ayant retenu que la loi n°2011-07 du 30 mars 2011 portant régime de la Propriété foncière a abrogé le décret du 26 juillet 1932 portant réorganisation du régime de la Propriété foncière en Afrique occidentale française qui prévoyait un renvoi aux dispositions du Code civil français, la cour d’appel en a exactement déduit que l’article 555 dudit Code n’était applicable que si les constructions étaient antérieures à l’abrogation dudit décret, ce qui n’était pas le cas en l’espèce;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; Sur les quatrième, cinquième et sixième moyens réunis, tirés de la violation de l’article 10 du Code des Obligations civiles et commerciales (COCC), de l’insuffisance de motifs constitutive de défaut de base légale et de la contradiction de motifs : Attendu que MM. Gueye et C font grief à l’arrêt de rejeter leur demande d’indemnisation fondée sur l’article 555 du Code civil français, encore applicable au Sénégal, alors, selon le moyen : 1°/que l’article 10 du COCC prévoit qu’en toute hypothèse, la bonne foi est présumée et c'est à celui qui allègue la mauvaise foi de la prouver ; que la cour d’appel a ainsi renversé la charge de la preuve de la bonne foi ; 2°/qu’ils ont précisé dans leurs conclusions récapitulatives avoir acquis ces terrains de Aa Y qui a justifié d’une attestation de propriété sur le terrain litigieux au prix de 23 millions et 25 millions délivrée par l’Agence Immobilière AKI et qu’un géomètre agrée s’est rendu sur les lieux et leur a confirmé que les terrains vendus étaient bien sur l’assiette du TF n°23135/DG et étaient identifiés sous les lots 17 A et 17 B, ainsi, ces éléments établissent que c’est sur la base de la croyance en l’existence du droit de M. Y qu’ils ont conclu les ventes et édifié des constructions […] ; 3°/que la cour d’appel ne pouvait retenir d’une part, que la loyauté dans la conclusion et l’exécution des actes juridiques ou la croyance non fautive en l’existence d’un acte ou d’un fait juridique suffisent à caractériser la bonne foi et ,d’autre part, que la bonne foi, dans le cas d’espèce s’apprécie au regard des circonstances dans lesquelles l’acquisition , génératrice de l’occupation, a lieu, elle ne peut s’établir par le biais d’actes ou d’opérations bien postérieurs et distincts, comme l’édification de constructions ; Mais attendu qu’ayant relevé que les constructeurs n’avaient produit aucun titre de propriété pour établir leur bonne foi, la cour d’appel a, par des motifs exempts de contradiction et sans renverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision ;
Par ces motifs :
Rejette le pourvoi formé par Ae X et Pape Ac C contre l’arrêt n°01 du 2 janvier 2020 rendu par la Cour d’Appel de Dakar ;
Les condamne aux dépens ; Dit que le présent arrêt sera imprimé, qu’il sera transcrit sur les registres de la Cour d’Appel de Dakar, en marge ou à la suite de la décision attaquée ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, chambre civile et commerciale en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents Messieurs :
El Hadji Malick SOW, Président ;
Latyr NIANG, Conseiller-rapporteur ;
Souleymane KANE ;
Amadou Lamine BATHILY ;
Kor SENE, Conseillers ; En présence de Monsieur Amadou Mbaye GUISSE, Avocat général, représentant le Parquet Général et avec l'assistance de Maître Mbacké LÔ, Greffier.
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président, le Conseiller-rapporteur, les Conseillers et le Greffier.
Le Président Le Conseiller-rapporteur
El Hadji Malick SOW Latyr NIANG Les Conseillers Souleymane KANE Amadou Lamine BATHILY Kor SENE Le Greffier Mbacké LÔ