ARRET N° 63 Du 2 juin 2021 ……………. MATIÈRE : Civile et commerciale
N° AFFAIRE : J/171/RG/20
El Aa B (Me Demba Ciré BATHILY & associés) C/ Mor B (Mes KANE & SAMBE) Rapporteur Kor SENE PARQUET GENERAL: Amadou Mbaye GUISSE AUDIENCE
Du 2 juin 2021 PRÉSENTS :
El Hadji Malick SOW Mamadou DEME Amadou Lamine BATHILY Moustapha BA Kor SENE
GREFFIER : Mbacké LÔ
RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL ----------- Un Peuple – Un But – Une Foi --------------- AU NOM DU PEUPLE SÉNÉGALAIS COUR SUPRÊME ----------------- CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE ------------- A L’AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT-ET-UN
ENTRE :
El Aa B, demeurant à la Résidence Minerve, 02, Rue D’Anvers, 54500 Vandoeuvre, Ae Ai, faisant élection de domicile en l’Etude de Maîtres Demba Ciré BATHILY & associés, avocats à la Cour, Avenue Fahd Ben Ac Ad X Autoroute, Immeuble EMG à Dakar ;
Demandeur D’une part ;
ET Mor B, demeurant à Hann Maristes Immeuble M10 en face Immeuble des Lionnes à Dakar, faisant élection de domicile en l’Etude de Maîtres KANE & SAMBE, avocats à la Cour, Avenue Ah A Af Ab, Immeuble BICIS, 1er étage à droite à Dakar ;
Défendeur D’une part ; Statuant sur le pourvoi formé suivant requête enregistrée au Greffe de la Cour suprême le 16 avril 2020 sous le numéro J/171/RG/20 par Maître Demba Ciré BATHILY et associés, avocats à la Cour, agissant au nom et pour le compte d’El Aa B, contre l’arrêt n° 285 du 16 décembre 2019 de la Cour d’Appel de Dakar, dans la cause l’opposant à Mor B ;
Vu la quittance n° 510731 du 21 avril 2020 attestant la consignation de la somme devant garantir le paiement des droits de timbre et d'enregistrement ;
Vu la signification du pourvoi du 23 avril 2020 par exploit de Maître Mame Gnagna Seck SEYE, huissier de justice à Dakar ; La Cour,
Ouï M. Kor SENE, Conseiller en son rapport ;
Vu les conclusions écrites du parquet général tendant au rejet du pourvoi ; Vu le mémoire en défense du 23 juin 2020, déposé par Maîtres KANE & SAMBE, avocats à la Cour, pour le compte de Mor B ;
Vu la loi organique n° 2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Ag, 16 décembre 2019, n° 285), qu’El Aa B, estimant avoir versé la somme de 40.000.000 FCFA pour la réhabilitation de la maison familiale, l’achat d’un four et l’exploitation de la boulangerie, avait initié une procédure correctionnelle contre son frère Mor B, pour abus de confiance ;qu’ après la relaxe de ce dernier et le rejet de sa demande en réparation, par jugement du 24 juillet 2009, El Aa B a intenté une nouvelle procédure correctionnelle, pour abus de confiance, sur le fondement d’un rapport d’expertise du 21 mars 2014 ; que par jugement du 21 juillet 2016, le juge correctionnel, se fondant sur le principe « non bis idem » qui interdit de juger deux fois une personne pour les mêmes faits matériels, a déclaré éteinte l’action publique par la chose jugée ; que c’est ainsi qu’El Aa B a assigné Mor B, devant le juge civil, en responsabilité et en paiement de la somme de 80.000.000 FCFA à titre de réparation; Sur le premier moyen, en ses trois branches, et le second moyen réunis, tirés de l’insuffisance de motifs constitutive d’un défaut de base légale et de la violation de la loi pour fausse application de l’article 1-2 du Code de Procédure civile:
Attendu qu’El Aa B fait grief à l’arrêt attaqué de déclarer son action éteinte pour autorité de la chose jugée, alors, selon le moyen :
1°/ que d’une part, c’est sur le fondement du rapport de l’expert que maître Madické Mbodji a été nommé par jugement civil n° 1133 du 13 avril 2010, à la suite de la demande de dissolution de la société de fait créée entre les parties, et d’autre part, que ce jugement de désignation d’expert est intervenu postérieurement au jugement de flagrant délit du 24 juillet 2009 sur lequel Mor B s’est appuyé pour soulever l’irrecevabilité de son action ;
2°/ que la décision du juge correctionnel qui se limite à juger que l’action publique est éteinte pour cause d’autorité de la chose jugée, ne peut s’imposer au juge civil pour n’avoir pas statué sur le fond ;
3°/ que le jugement du 24 juillet 2009 rendu en matière de flagrant délit, qui est dépourvu de toutes motivations, ne pouvait permettre aux juges du fond d’exercer leur office sur le contrôle d’un précédent jugement sur les faits ayant abouti à la responsabilité et à la condamnation de Mor B ;
4°/ que le jugement correctionnel du 21 juillet 2016 n’a pas statué au fond sur les mérites du rapport d’expertise du 27 janvier 2014 qui a été rendu à la suite du jugement civil n° 1133 du 13 avril 2010 ordonnant la liquidation de la société de fait à la demande de Mor B ce, après le jugement de flagrant délit n° 3311 du 24 janvier 2009 ; Mais attendu que la cour d’appel a relevé d’abord, d’une part, que par jugement du 24 juillet 2009 Mor B, poursuivi pour des faits d’abus de confiance, a été relaxé et la partie civile déboutée de sa demande en réparation, et d’autre part, que les faits résultant du rapport d’expertise du 27 janvier 2014 sont les mêmes que ceux relatés dans le procès-verbal du 05 juin 2009; Qu’elle a relevé ensuite que les deux procédures pénale et civile ont opposé les mêmes parties et que les faits rapportés dans la plainte du 21 mars 2014 sont identiques à ceux relatés dans l’assignation du 10 décembre 2017 ; Qu’elle a enfin retenu d’une part, qu’il y a identité de causes dès lors qu’El Aa B a invoqué les sommes remises à Mor B que celui-ci aurait dissipé pour asseoir ses poursuites pénales et que c’est le même fait juridique qui fonde la réclamation du premier nommé aussi bien devant le juge pénal que le juge civil, et d’autre part, qu’il y a identité d’objets dès lors qu’El Aa B poursuivait, devant le juge pénal, la réparation de son préjudice qui résulterait du détournement des sommes consenties à Mor B, et devant le juge civil, se fondant sur le rapport d’expertise déjà invoqué au pénal, il sollicite le montant de 80.000.000 de francs à titre de réparation de son préjudice ; Qu’en l’état de ces constatations, c’est à bon droit, que la cour d’appel a décidé que les décisions pénales, ayant définitivement tranché le fond du litige sur la réparation du préjudice d’ El Aa B, l’autorité de la chose jugée constitue un obstacle de droit pour ce dernier de saisir le juge civil d’une action en responsabilité et en paiement de dommages et intérêts ; Par ces motifs :
Rejette le pourvoi formé par El Aa B contre l’arrêt n°285 du 16 décembre 2019 rendu par la Cour d’Appel de Dakar ; Le condamne aux dépens. Dit que le présent arrêt sera imprimé, qu’il sera transcrit sur les registres de la Cour d’Appel de Dakar, en marge ou à la suite de la décision attaquée ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, chambre civile et commerciale en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents Messieurs :
El Hadji Malick SOW, Président ;
Kor SENE, Conseiller-rapporteur ;
Mamadou DEME ;
Amadou Lamine BATHILY ;
Moustapha BA, Conseillers ; En présence de Monsieur Amadou Mbaye GUISSE, Avocat général, représentant le Parquet Général et avec l'assistance de Maître Mbacké LÔ, Greffier.
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président, le Conseiller-rapporteur, les Conseillers et le Greffier.
Le Président Le Conseiller-rapporteur
El Hadji Malick SOW Kor SENE Les Conseillers Mamadou DEME Amadou Lamine BATHILY Moustapha BA Le Greffier Mbacké LÔ