ORDONNANCE
n°10
du 10/6/21
Référé administratif
Affaire:
n° J/145/RG/21
19/4/21
-Mamadou Diop,
exploitant l’Entreprise
individuelle dénommée
Af Ad Ah (Me Guédel Ndiaye & associés) CONTRE
-Ministre des Finances et du Budget
-Direction général des Impôts et Domaines (Son Directeur)
-Chef de Bureau des
Domaines de Ac Aa
-Gouverneur de la Région de Dakar
-Commune de Ac Aa (son maire)
- Etat du Sénégal
(agent judiciaire de l’Etat)
PRÉSIDENT :
Abdoulaye Ndiaye
PARQUET GENERAL : Ousmane Diagne
GREFFIER:
Cheikh Diop
MATIÈRE:
Administrative
RECOURS:
Référé suspension REPUBLIQUE DU SENEGAL
AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS
COUR SUPREME
LE PRESIDENT DE LA CHAMBRE
ADMINISTRATIVE DÉSIGNÉ EN QUALITÉ
DE JUGE DES RÉFÉRÉS
SUR LA PROCEDURE DE REFERE
ADMINISTRATIF
A L’AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE
DE REFERE DU DIX JUIN DEUX MILLE
VINGT UN
ENTRE :
e Ad Ah, exploitant l’Entreprise individuelle dénommée Af
Ad Ah, sis à Dakar, VDN Ouest Foire derrière la Station Elton, villa n°4, élisant domicile … l’étude de Maître Guédel Ndiaye & assoçiés, avocats à la Cour, 73, bis, Rue Ad … … … … ;
DEMANDEUR, D’une part, ET
Le Ministre des Finances et du Budget, en ses bureaux à Dakar ;
La Direction général des Impôts et Domaines, prise en la personne de son Directeur sis au bloc fiscal à la rue de Thiong à Dakar ;
Le Chef de Bureau des Domaines de Ac Aa au bloc fiscal à la rue de Thiong à Dakar ;
Le Gouverneur de la Région de Dakar, en ses bureaux à la Gouvernance de Dakar ;
La Commune de Ac Aa, prise en la personne du maire sis en ses bureaux à Dakar, Avenue Ab x Raffenel, élisant domicile … l’étude de Maître Baboucar Cissé, avocat à la Cour, Point F, rue de Louga x PE-29, Immeuble résidence Héléne, 6" étage à Dakar ;
e L’État du Sénégal pris en la personne de Monsieur l’agent judiciaire de l’État, en ses bureaux sis au Ministère de l’Économie et des Finances, building Peytavin, Avenue de la République x Avenue Carde à Dakar ;
DEFENDEURS: D’autre part,
Le Président de la Chambre administrative, statuant en qualité de juge des référés ;
Vu la requête reçue le 19 avril 2021 au greffe central, Ad Ah, es- qualité, exploitant l’Entreprise industrielle dénommée Af Ad Ah, sollicite l’annulation de l’arrêté n° 0286600 du 31/12/2020 du Ministre des Finances et du Budget portant annulation du bail approuvé le 8 juillet 2020 au profit de l’Af Ad Ah sur un terrain d’une superficie de 314 m° à distraire du TF n° 3113/DK situé à Dakar, à la Cité cap-verdienne ;
Vu la requête reçue le 10 mars 2021 au greffe par laquelle les requérants ont introduit un recours en annulation contre la décision susvisée ;
Vu la loi organique n°2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême ;
Vu l’exploit du 21 avril 2021 de Maître Fatma Haris Diop, Huissier de justice à Dakar, portant signification de la requête au Ministre des Finances et du Budget, au Directeur général des Impôts et Domaines, au chef du Bureau des Domaines de Ac Aa, au Gouverneur de la Région de Dakar, au Maire de la commune de Ac Aa, à l’Etat du Sénégal ;
Vu le mémoire en défense de l’État du Sénégal reçu le 6 juillet 2020 2020 au greffe ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Ouï Monsieur Abdoulaye Ndiaye, Président de chambre, en son rapport ;
Ouï Monsieur Ousmane Diagne, Procureur général, en ses conclusions tendant à l’annulation ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que par acte du 4 mai 2020, approuvé le 8 juillet 2020, l’Etat du Sénégal a concédé un bail à l’Af Ad Ah sur le terrain d’une superficie de 314 m? à distraire du TF n°3113/DK, situé à Dakar à la Cité capverdienne ;
Que par l’arrêté attaqué, le Ministre des Finances et du Budget a annulé l’acte administratif susvisé, approuvé le 8/7/2020 portant bail au profit de l’Af Ad Ah pour des raisons d’ordre public ;
Que Ad Ah sollicite la suspension de l’exécution de cet arrêté en faisant valoir l’urgence et des moyens propres à créer un doute sérieux quant à la légalité ;
Sur l’urgence
Considérant que l’exploit d’huissier du 23 mars 2021, selon le requérant, révèle que des constructions sont en cours d’édification sur le terrain litigieux en violation flagrante de ses droits ;
Que par conséquent, il y a urgence à ordonner la suspension de l’exécution de l’arrêté attaqué qui lui cause un préjudice irréparable ;
Sur les moyens propres à créer un doute sérieux quant à la légalité
Le premier moyen est tiré de l’irrégularité du motif invoqué, constitutive d’un défaut de base légale en ce que l’autorité invoque un motif d’ordre public sans indiquer ou spécifier en quoi l’ordre public est en cause ; Il n’est pas établi l’existence des raisons d’ordre public, or, l’exactitude matérielle des faits est un élément d’appréciation de la légalité de l’acte ;
Que le requérant fait valoir également la violation des articles 24, 45 et 46 du Code du Domaine de l’Etat et l’article 381 du COCC ;
Le deuxième moyen est tiré du détournement de procédure en ce que l’autorité administrative n’a pas utilisé la procédure prévue lorsqu’un acte doit être pris pour des raisons d’ordre public en l’occurrence les dispositions des articles 45 et 46.
Que le requérant soutient qu’il y’a détourmement par l’utilisation d’une procédure à des fins différentes de celles pour lesquelles elle est normalement prévue et ce, dans le but de reprendre le terrain à lui donné en bail sans bourse délier ;
Le troisième moyen en ses deux branches tirées de la violation des dispositions des articles 381 du COCC, 24 alinéa 2 du décret n° 81-557 du 21 mai 1981 portant application du Code du Domaine de l’Etat et des dispositions combinées des articles 45 et 46 de la loi n°76-66 du 02 juillet 1976 portant Code du Domaine de l’Etat.
La première branche du moyen est tirée de la violation des dispositions combinées des articles 381 COCC et 24 alinéa 2 du décret portant application du Code du Domaine de l’Etat en ce que l’autorité administrative a pris l’arrêté portant annulation de son bail alors que les textes visés au moyen consacrent le caractère définitif du bail emphytéotique dès son approbation par le Ministre chargé des Domaines, son enregistrement et sa publication au livre foncier ;
La seconde branche du moyen est tirée de la violation des dispositions combinées des articles 45 et 46 du Code du Domaine de l’Etat en ce que l’autorité administrative a pris l’arrêté attaqué alors qu’elle est titulaire d’un droit réel et la reprise du terrain ne peut avoir lieu que dans les formes déterminées en matière d’expropriation moyennant une indemnité (.…) ;
Que le requérant invoque, en outre, l’article 12 de la Constitution ;
Le quatrième moyen tiré de l’incompétence de l’autorité en ce que le Ministre des Finances et du Budget n’est pas habilité à annuler le bail, aucune disposition du décret relatif à ses attributions ne lui donne compétence à annuler un contrat signé par l’Etat du Sénégal représenté par le Gouverneur ;
Que le requérant fait valoir que seul le Président de la République est habilité à prendre un décret déclarant cessible le terrain objet du bail en vertu de l’article 3 de la loi n°76-67 du 02 juillet 1976 relative à l’expropriation pour cause d’utilité publique ;
Considérant que l’Etat du Sénégal conclut au rejet de la requête comme mal fondée ;
Considérant qu’aux termes de l’article 84, « Quand une décision
administrative fait l’objet d’une requête en annulation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette
décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux
quant à la légalité de la décision.
Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en annulation
de la décision dans les meilleurs délais » ;
Qu’il résulte de cette disposition que la suspension de l’exécution de la décision administrative est subordonnée à deux conditions cumulatives à savoir l’urgence et l’existence d’un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu’il y a urgence, dès lors, que la décision attaquée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre ;
Considérant qu’en l’espèce l’urgence est justifiée par le fait qu’il y’a des travaux visant la construction d’un immeuble sur le terrain objet d’un bail consenti au requérant qui change sa situation ;
Considérant qu’en l’état de l’instruction, le requérant justifie non seulement de l’urgence de nature à faire prononcer la suspension de ladite décision compte tenu des circonstances de l’espèce mais soulève également des moyens propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ;
Que dès lors la décision encourt la suspension ;
Par ces motifs
Ordonne la suspension de l’exécution de l’arrêté n°0286600 du 31 décembre 2020 du Ministre des Finances et du Budget portant annulation du bail approuvé le 8 juillet 2020 au profit de l’Af Ad Ah sur un terrain d’une superficie de 314 m? à distraire du TF n°3113/DK situé à Dakar, à la Cité cap- verdienne ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par le président de la chambre administrative, désigné en qualité de juge des référés, en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents :
Abdoulaye Ndiaye, président,
Ousmane Diagne, avocat général ;
Cheikh Diop, greffier ;
En foi de quoi la présente ordonnance a été signée par le président, et le greffier.
Le président Le greffier
Abdoulaye Ndiaye Cheikh Diop