AU REPUBLIQUE DU SENEGAL
NOM DU PEUPLE SENEGALAIS
COUR SUPREME
CHAMBRE PENALE Arrêt n°48 du 17 novembre 2022
Procureur général près la Cour d’Appel de Saint-Louis
C/
Ad Ac Aa dit Ab
(Maître Mohamedou Makhtar Diop)
La Cour,
Ouï Madame Fatou Faye Lecor Diop, Conseillère, en son rapport ;
Ouï Monsieur Salobé Gningue, Avocat général, en ses conclusions tendant au rejet ;
Vu la loi organique n° 2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême, modifiée par la loi organique n°2022-16 du 23 mai 2022 ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que par une décision du 2 décembre 2021, la Chambre d’Accusation de la Cour d’Appel de Saint-Louis a annulé le procès-verbal n°22 du 28 juillet 2021 de la Section de Recherches de la gendarmerie de la localité ainsi que tous les actes subséquents notamment le réquisitoire introductif, le procès- verbal de première comparution et le mandat de dépôt décerné contre Ad Ac Aa dit Ab, inculpé d’escroquerie et d’abus de confiance au préjudice de Papa Diop ; que par correspondance du 10 février 2022, le Procureur de la République près le Tribunal de grande Instance de Saint-Louis a donné instruction aux gendarmes enquêteurs de procéder à la reprise de la procédure sur la base de la lettre plainte du 2 juillet 2022 et des documents qui lui sont annexés ; qu’ainsi, le mis en cause a été interpellé chez lui et conduit dans les locaux de la gendarmerie le 26 avril 2022 où les enquêteurs lui ont notifié, à 12 heures 30 minutes, qu’il y était retenu pour les nécessités de l’enquête avant d’être déféré au parquet le 29 avril 2022 à 12 heures ; que saisie d’une requête aux fins d’annulation de la procédure suivie contre l’inculpé Ad Ac Aa dit Ab, la Chambre d’Accusation a, par l’arrêt attaqué, annulé le procès- verbal n°13 du 12 février 2022 de la Section de Recherches ainsi que des actes subséquents notamment le réquisitoire introductif, le procès-verbal de première comparution et le mandat de dépôt du 5 mai 2022 décerné contre lui puis ordonné sa main levée ;
Sur le moyen tiré de la violation de la loi en ce que l’arrêt attaqué a annulé la procédure suivie contre Ad Ac Aa dit Ab et ordonné la main levée du mandat de dépôt décerné contre lui au motif qu’il a été gardé dans les locaux de la gendarmerie pendant 72 heures donc au-delà du délai légal de garde à vue qui, sauf prolongation, est de 48 heures alors que le législateur sénégalais à travers les articles 53, 54 et 55 du Code de Procédure pénale a aménagé deux régimes distincts de garde à vue permettant à l’officier de police judiciaire de recourir, contre le même mis en cause, à une succession de gardes à vue pour vérification d’identité puis pour nécessité d’enquête;
Mais attendu que si au cours d’une enquête, une personne fait l’objet de mesures de garde à vue successives sur le fondement des articles 53 et 55 du CPP, elle ne peut être retenue pour une période excédant quarante huit heures ;
Attendu qu’ayant relevé « qu’il ressort des pièces de la procédure que l’inculpé qui a fait l’objet d’une plainte dans laquelle il a été nommément désigné et identifié, a été cueilli chez lui le 26 avril 2022 à 12 heures 30 minutes par les gendarmes et placé en garde à vue dans les locaux de la Section de Recherches du 26 au 27 avril 2022 pour nécessité d'enquête puis du 27 avril à 12 heures 30 minutes au 29 avril 2022 à 12 heures (...) ; que le délai de garde à vue qui a commencé le 26 avril 2022 à 12 heures 30 minutes, a duré 72 heures » et retenu « qu’en l’absence d’une autorisation de prolongation, la durée de la garde à vue a dépassé le délai légal de 48 heures prévu par l’article 55 du CPP et porté atteinte aux droits de la personne concernée », la cour d’Appel, qui a annulé le procès-verbal d’enquête et ordonné la mainlevée du mandat de dépôt décerné contre Ad Ac Aa dit Ab a fait l’exacte application de la loi ;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi formé le Procureur général près la Cour d’Appel de Saint- Louis contre l’arrêt n°53 du 25 aout 2022 ;
Met les dépens à la charge du Trésor public ;
Dit que le présent arrêt sera imprimé et qu’il sera transcrit sur les registres de la Cour d’Appel de Saint-Louis en marge ou à la suite de la décision attaquée ;
Ordonne l’exécution du présent arrêt à la diligence du Procureur général près la Cour suprême ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, chambre criminelle, en son audience ordinaire tenue les jour, mois et an ci-dessus et à laquelle siégeaient Messieurs :
Adama Ndiaye, conseiller doyen faisant fonction de Président,
Mbacké Fall, Mamadou Diakhaté, Babacar Diallo et Fatou Faye Lecor Diop, Conseillers,
En présence de Salobé Gningue, Avocat général ;
Et avec l’assistance de Maître Serigne Ibrahima Diémé, Greffier ;