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05/09/2006 | TOGO | N°0132/06

Togo | Togo, Cour d'appel de lomé, 05 septembre 2006, 0132/06


Texte (pseudonymisé)
Un locataire reste devoir plus de treize mois de loyers malgré sa mise en demeure de payer restée vaine. Il prétend que le loyer est trop élevé. Or, le contrat prévoit que le non-paiement d’un seul terme de loyer justifie la résiliation du contrat sans même recourir à la justice. Le bailleur a sollicité et obtenu du premier juge, la résiliation du contrat. Le locataire interjette appel. La Cour, se fondant sur les dispositions de l’article 95-1 de l’Acte uniforme de l’OHADA portant sur le droit commercial général, retient que le non paiement du loyer qui est une des obliga

tions essentielles du locataire est sanctionné par la résiliation du...

Un locataire reste devoir plus de treize mois de loyers malgré sa mise en demeure de payer restée vaine. Il prétend que le loyer est trop élevé. Or, le contrat prévoit que le non-paiement d’un seul terme de loyer justifie la résiliation du contrat sans même recourir à la justice. Le bailleur a sollicité et obtenu du premier juge, la résiliation du contrat. Le locataire interjette appel. La Cour, se fondant sur les dispositions de l’article 95-1 de l’Acte uniforme de l’OHADA portant sur le droit commercial général, retient que le non paiement du loyer qui est une des obligations essentielles du locataire est sanctionné par la résiliation du bail ; c’est donc à bon droit que le premier juge, après avoir constaté plus de treize (13) ans de loyers impayés et une mise en demeure infructueuse, a prononcé la résiliation du contrat de bail (1) ; Il revient au locataire qui estime que le loyer qu’il paye est trop élevé de s’adresser au bailleur pour obtenir la réduction du montant du bail ; le preneur ne peut dès lors se refugier derrière l’occupation par le bailleur d’une partie des locaux loués et la non détermination d’un nouveau loyer suite à cette occupation pour justifier son non-paiement (2).
ARTICLE 95-1 AUDCG
Cour d’appel de Lomé, arrêt n° 0132/06 du 05 septembre 2006, Sté d’Initiative Technique Ad Ac YC) SARL / EGLISE NOUVELLE VIE.
LA COUR
Oui les Conseils des parties en leurs conclusions respectives ; Le Ministère Public entendu ; Vu le jugement N°575/04 rendu le 26 mars 2004 par le Tribunal de Première Instance de Première Classe de Lomé ; Vu l’appel interjeté, ensemble avec les pièces du dossier de la procédure ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu que par exploit en date du 28 mai 2006 de Maître AMEGBO Ablamvi, huissier de justice à Lomé, la Société d’Initiative Technique Af Ac (SINITECTOA Sarl) assistée de Maître DOGBEAVOU, Avocat à la cour à Lomé, a relevé appel du jugement N° 575/04 rendu le 26 mars 2006 par le Tribunal de Première Instance de Lomé statuant en matière civile ;
En la forme
Attendu que l’appel interjeté le 28 mai 2004 par la société d’Initiative Technique Ad Ac Y C SARL) contre le jugement N°575/04 rendu le 26 mars 2004 par le Tribunal de Première Instance de Lomé ; que ce jugement non signifié est recevable pour avoir été relevé dans les forme et délai légaux ;
Au Fond
Attendu que l’appelante fait grief au jugement entrepris d’avoir d’une part prononcé la résiliation du contrat de bail notarié en date du 29 décembre 1980 à elle consenti par dame Ae A épouse B pour non paiement de loyers ; que ce jugement a ordonné son expulsion ainsi que tous occupants de son chef des lieux sous astreinte de 25000 francs par jour de résistance ; qu’elle a été déboutée de toutes ses demandes , fins et conclusions et condamnée à payer à l’intimée les arriérés de loyers échus d’autre part ;
Attendu que pour soutenir son action, l’appelant expose par la plume de son Conseil Maître DOGBEAVOU, Avocat à la Cour, que suivant contrat passé par-devant Maître ADJETEY, notaire à Lomé, en date du 29 décembre 1980, elle a pris à bail auprès de dame Ae épouse B, une parcelle de terrain non bâtie, sise à Lomé quartier Nyékonakpoè d’une contenance de 28a 54ca ; qu’il a été prévu audit contrat qui prenait effet pour compter du 1er janvier 1981 pour arriver à expiration le 31 décembre 2000 ; qu’elle érigerait des constructions sur une partie des lieux loués aux fins d’abriter son siège social ; que le restant devait lui servir de garage pour ses véhicules et autres ;
Attendu qu’elle précise que dès l’entrée en vigueur du contrat, elle a érigé sur une partie de la parcelle louée des constructions et débuté ses activités ; que curieusement et alors que le contrat n’était pas encore arrivé à expiration, elle a eu à constater que l’intimée au motif qu’elle avait acquis les lieux, a fait dégager la parcelle lui servant de garage et l’a occupée ; que cette occupation la privait de la jouissance entière des lieux loués ; qu’avant même qu’elle ne réagisse à cette occupation des lieux par l’intimée, cette dernière a saisi le Tribunal de Lomé aux fins de résilier le contrat bail du 29 décembre 1980 au motif qu’elle ne payait pas ses loyers ;
Attendu qu’elle fait valoir en dépit de ses observations devant le 1er juge et qui relevaient le manque de base légale de cette demande de l’intimée en espèce, le Tribunal a prononcé la résiliation du contrat bail du 29 décembre 1980 pour non paiement de loyers et ordonné son expulsion au motif que l’Eglise Nouvelle Vie (intimée en l’espèce) a acquis l’immeuble querellé par voie d’achat; que dès lors, l’accord de l’appelante n’était pas une condition essentielle ou préalable à une transaction entre le propriétaire bailleur et le tiers acquéreur ; que d’autre part la SINITECTOA SARL (appelante) en dépit de sa mise en demeure n’a pas cru devoir s’acquitter de ses arriérés de loyers ;
Attendu que l’appelante fait observer qu’en statuant comme il l’a fait, le 1er juge a violé les dispositions de l’article 78 de l’Acte Uniforme portant sur le droit commercial général ; qu’en effet aux termes de cet article, « le bail ne prend pas fin par la vente des locaux donnés à bail. En cas de mutation du droit de propriété sur l’immeuble dans lequel se trouvent les locaux donnés à bail, l’acquéreur est de plein droit substitué dans les obligations du bailleur et droit poursuivre l’exécution de bail » ; qu’elle conclut que dans ces conditions, le 1er juge en prononçant la résiliation du bail s’est mépris ;
Attendu que l’appelante soutient en outre que le second motif du 1er juge tiré de son non paiement de loyers pour ordonner son expulsion n’est pas justifiée dans la mesure où après l’occupation par l’intimée des ¾ des locaux loués, il n’y a pas eu entre les parties une nouvelle détermination du loyer ; que pour qu’elle rende coupable du non paiement de loyers, il aurait fallu une nouvelle détermination de loyer d’accord partie ; que c’est au cas où elle se serait rendue coupable du non paiement de ce nouveau montant que la procédure d’expulsion
pouvait légalement être initiée contre elle,
Attendu qu’elle souligne qu’elle a, aux termes du bail du 29 décembre 1980, mis d’énormes sommes dans l’assainissement et la construction de locaux ; qu’elle avait pris un terrain nu qu’elle a clôturé et aménagé ; que le bail du 29 décembre 1980 était un bail commercial soumis à l’Acte Uniforme portant sur le droit commercial général et faisait obligation à tout acquéreur d’en poursuivre l’exécution ou d’y mettre fin dans l’hypothèse où il entend s’opposer au renouvellement du bail de servir l’indemnité d’éviction dont le paiement est préalable à toute éviction ; qu’aucune indemnité ne lui ayant été versée, c’est par méprise que le Tribunal a ordonné son expulsion, qu’elle sollicite qu’il plaise à la Cour condamner l’intimée à lui payer la somme de 13 000 000 000 F CFA au cas où cette dernière maintient son intention de résiliation du bail ;
Attendu que l’intimée par la plume de son Conseil Maître TOBLE, Avocat à la Cour résiste à l’action de l’appelante et fait valoir qu’elle est propriétaire de l’immeuble litigieux ; qu’elle l’a acquis par voie d’achat en 1993 de dame Ab Aa X ; que la vente à elle faite a été portée à la connaissance de l’appelante en l’espèce qui occupe les lieux depuis 1981 en vertu d’un bail à elle consenti pour une durée de 20 ans par la feu mère de dame Ab Aa X ;
Attendu qu’elle fait observer que le contrat bail consenti à l’appelante arrivait à expiration le 31 décembre 2000 ; que ce contrat prévoyait que le non paiement d’un seul terme de loyer justifiait la résiliation du contrat sans même recourir à la justice ; que depuis 1993 l’appelante n’a plus payé de loyer à l’Eglise Nouvelle Vie (intimée en l’espèce), qui devenue depuis lors propriétaire, substituait le bailleur dans ses droits et obligations ;
Attendu que l’intimée précise que toutes ses démarches amiables en vue d’amener l’appelante à respecter les termes du contrat du 31 décembre 1980 sont restées vaines ; que face à la résistance de l’appelante, elle s’est obligée de mettre cette dernière en demeure de payer par exploit d’huissier en date du 23 mai 2002 ; que malgré cette mise en demeure, l’appelante ne s’est jamais exécutée, que c’est dans ces conditions qu’elle a saisi le Tribunal de Lomé et a obtenu la résiliation du contrat bail et l’expulsion de l’appelante des lieux ;
Attendu que l’intimée souligne que l’argument de l’appelante selon lequel son non payement de loyers résulterait de l’occupation d’une partie de l’immeuble donné à bail et la non réduction du loyer ne saurait prospérer ; qu’en effet l’appelante n’a jamais demandé cette réduction, que si elle l’avait fait en vain, elle devait saisir la juridiction compétente conformément aux dispositions de l’articles 85 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général ; Attendu que l’intimée soutient que le refus de s’acquitter du loyer malgré la mise en demeure est une violation par l’appelante du contrat bail dont elle se prévaut ; que le défaut de paiement de loyer ouvre au bailleur le droit de demander à la juridiction compétente la résiliation du contrat et l’expulsion du preneur,
Attendu que l’intimée fait remarquer que l’appelante n’exerce plus d’activités commerciales depuis des années, qu’elle occupe abusivement les lieux par l’immobilisation des camions et voitures hors d’usage ; que mieux, le contrat dont se prévaut l’appelante est arrivé à terme à depuis décembre 2000 ;
Attendu que l’intimée conclut que la SINITECTOA SARL est déchue de son droit conformément à l’article 92 de l’acte uniforme ; qu’elle sollicite qu’il plaise à la Cour confirmer le jugement entrepris ; qu’il faut débouter l’appelante de sa demande de dommages et intérêts et la condamner reconventionnellement à lui payer la somme de 2 000 000 F CFA pour appel dilatoire, abusif et vexatoire ;
Attendu que l’appelante soutient que le 1er juge s’est mépris en prononçant la résiliation de son contrat bail conclut le 31 décembre 1980 ; que le bail ne prend pas fin par la vente des locaux donnés en bail ;
Attendu que le 1er juge n’a pas fondé sa décision sur la vente des locaux donnés en bail ; qu’il résulte du jugement versé au dossier que le 1er juge a fondé sa décision sur la violation par l’appelante de l’une des obligations substantielles du contrat bail qui est le paiement des loyers par le locataire ;
Attendu qu’en l’espèce, des éléments du dossier et des conclusions mêmes du dossier prouvent que depuis 1993, elle n’a plus payé les loyers ; que pour l’amener à payer ses impayés de loyers, elle a été mise en demeure par l’intimée, que nonobstant cette mise en demeure, elle ne s’est pas exécutée ;
Attendu qu’il résulte des termes de l’article 95-1 de l’Acte informe portant sur le droit commercial général que le non paiement du loyer qui est une des obligations substantielles du locataire est sanctionné par la résiliation du bail ;
Attendu en l’espèce qu’il est constant et non contesté que l’appelante n’a pas payé ses loyers depuis 1993 soit plus de 13 ans de loyers échus, alors que le contrat du 31 décembre 1980 dont elle se prévaut prévoyait que le non paiement d’un seul terme de loyer justifiait la résiliation du contrat sans même recourir à la justice ;
Attendu qu’il résulte de ce qui précède que contrairement aux allégations de l’appelante, le 1er juge en prononçant la résiliation du contrat bail du décembre 1980 ne s’est pas mépris ; qu’au contraire, il a fait une saine application de l’article 95-1 précité ;
Attendu que d’autre part, l’appelante tente de justifier son non paiement de loyers par l’occupation par l’intimée d’une partie des locaux loués et la non détermination d’un nouveau loyer résultant de cette occupation ;
Attendu que cet argument ne saurait prospérer dans la mesure où elle ne s’est jamais adressée au bailleur pour obtenir la réduction du montant du bail ;
Attendu qu’il revient au locataire qui estime que le loyer qu’il paye est trop élevé de s’adresser au bailleur pour obtenir la réduction du montant du bail ;
Attendu en l’espèce que malgré le fait qu’elle continue d’occuper les locaux loués sans payer le moindre loyer et malgré sa mise en demeure de payer ses loyers, l’appelante non seulement a opposé une résistance, mais encore n’a jamais sollicité de l’intimée la réduction ou la détermination d’un nouveau loyer avant d’essuyer son refus ; qu’il suit que l’appelante ne peut donc se fonder sur la non détermination du nouveau loyer qu’elle n’a jamais sollicité pour justifier plus de 13 ans d’impayés de loyers bien que payer son loyer est une obligation
du locataire ;
Attendu que l’appelante sollicite 13 000 000 000 FCFA de dommages et intérêts ;
Attendu que cette demande n’est ni justifiée dans son principe ni dans son quantum ; que la Cour entend l’en débouter ;
Attendu que l’intimée sollicite reconventionnellement qu’il plaise à la Cour condamner l’appelant à lui payer 2 000 000 F CFA pour procédure abusive, dilatoire et vexatoire ;
Attendu que l’appelante n’a pas payé de loyers depuis 1993 ; que tous les efforts de l’intimée pour l’amener à la raison et à s’exécuter en payant ses loyers ont été vains ;
Attendu que la présente procédure vise à retarder l’expulsion de l’appelante, qu’il s’agit d’un appel qui n’a pour but que de priver l’intimée, que la cour entend condamner l’appelante à lui payer 1 000 000 pour procédure abusive ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement en matière civile immobilière et en appel ;
En la forme
Reçoit appel ;
Au fond
Le dit mal fondé ;
Confirme en ses termes et teneurs le jugement entrepris ;
Déboute l’appelante de sa demande de 13 000 000 000 F CFA et la condamne reconventionnellement à payer à l’intimée 1 000 000 FCFA pour appel abusif ;
Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision nonobstant toute voie de recours ;
Condamne l’appelant aux dépens.
Et ont signé le Président et le greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de lomé
Numéro d'arrêt : 0132/06
Date de la décision : 05/09/2006

Analyses

DROIT COMMERCIAL GENERAL - BAIL COMMERCIAL - VENTE DE L'IMMEUBLE - MAINTIEN DANS LES LIEUX - LOYERS - NON PAIEMENT - CAUSE DE RESILIATION - ARTICLE 95-1 AUDCG - APPLICATION (OUI)


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;tg;cour.appel.lome;arret;2006-09-05;0132.06 ?
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