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10/03/2009 | TOGO | N°39/09

Togo | Togo, Cour d'appel de lomé, 10 mars 2009, 39/09


Texte (pseudonymisé)
A la suite d’une saisie-attribution, le débiteur saisi conteste la validité de la saisie en arguant, d’une part, que celle-ci a été effectuée sur la base d’une expédition d’un jugement et, d’autre part, que la Cour suprême a ordonné le sursis à exécution. La Cour d’appel, en réponse, estime d’une part, que l’expédition de jugement assorti de l’exécution provisoire constitue un titre exécutoire par provision.
D’autre part, après avoir rappelé le contenu de l’article 15 du traité de l’OHADA, elle estime que les Cours de cassation des Etats-parties à

l’OHADA ne peuvent, à la limite, que servir de courroie de transmission des dossiers de pour...

A la suite d’une saisie-attribution, le débiteur saisi conteste la validité de la saisie en arguant, d’une part, que celle-ci a été effectuée sur la base d’une expédition d’un jugement et, d’autre part, que la Cour suprême a ordonné le sursis à exécution. La Cour d’appel, en réponse, estime d’une part, que l’expédition de jugement assorti de l’exécution provisoire constitue un titre exécutoire par provision.
D’autre part, après avoir rappelé le contenu de l’article 15 du traité de l’OHADA, elle estime que les Cours de cassation des Etats-parties à l’OHADA ne peuvent, à la limite, que servir de courroie de transmission des dossiers de pourvoi à la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ; elles ne sont compétentes, ni pour statuer sur les mérites de ces pourvois, ni pour accorder des sursis à l’exécution des décisions frappées de pourvoi. Elle a donc confirmé la décision du premier juge sur l’ensemble des moyens.
ARTICLE 32 AUPSRVE ARTICLE 15 TRAITE OHADA
Cour d’appel de Lomé, arrêt n° 39/09 du 10 mars 2009, Société TOGO et Aa C/ AH Ag, Y Ae, AG Af, AMETEPE Yawo et autres
La Cour ;
Ouï les conseils des parties en leurs conclusions respectives ; Le Ministre Public entendu ;
Vu l’ordonnance N°0901/2005 du 28 Novembre 2005, rendue par le Tribunal de Lomé ;
Vu l’ordonnance N° 1863 /2008 du 07 Octobre 2008 rendue par le Président de la Cour d’Appel ;
Vu l’appel interjeté ensemble avec les pièces du dossier ;
Et après en avoir délibéré ;
EN LA FORME ;
Attendu que suivant exploit de Maître Michel KLUTSE, Huissier de Justice à Lomé en date du 30 Novembre 2005, la Société TOGO et SHELL SA ayant son siège social à
Lomé route d’Aného représentée par son Directeur Général assistée de Maître Alexis Coffi AQUEREBURU, Avocat à la Cour à Lomé, a déclaré aux sieurs AH Ag et 37 autres, tous demeurant et domiciliés à Lomé assistés de Maître DOSSOU Kodjovi, Avocat à la Cour qu’elle interjette appel de l’ordonnance N° 901/2005 rendue le 28 Novembre 2005 par le Président du Tribunal de Première Instance de Lomé.
Attendu qu’après avoir présenté des observations au fond, Maître DOSSOU Kodjovi a dans ses notes en cours de délibéré en date du 02 Janvier 2009, sollicité qu’il plaise à la Cour déclarer l’appel caduc et l’instance périmée au motif que l’appelante n’a pas déposé sa requête d’appel dans un délai de deux (02) ans à compter de son appel ; qu’en application de l’article 148 du code de Procédure civile elle doit être sanctionnée.
Mais attendu qu’il ressort des pièces du dossier que les intimés ont conclu au fond avant de soulever cette exception de caducité de l’appel ; qu’il est de principe qu’en procédure, les exceptions doivent être soulevées « in limine litis », c’est-à-dire avant tout débat au fond ; qu’ayant déjà conclu au fond, les intimés ne peuvent plus être recevables à soulever cette exception de caducité ; qu’il échet donc de la rejeter.
Attendu que l’Ordonnance querellée a été rendue le 28 Novembre 2005, qu’appel en a été relevé le 30 Novembre 2005 soit dans le délai de 15 jours prescrit par l’article 49 alinéa 2 de l’ Acte Uniforme de l’OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution ; qu’il échet de le déclarer recevable ;
AU FOND
Attendu que l’appelante fait grief à la juridiction présidentielle d’avoir ordonné le décaissement de la somme objet de la saisie attribution au profil des requis alors d’une part que certains d’entre ceux-ci ne sont plus en vie et que d’autre part cette saisie a été pratiquée sur la base d’une simple expédition d’un jugement ; que l’appelante sollicite qu’il plaise à la Cour :
déclarer nulle l’ordonnance déférée et renvoyer les parties devant le premier Juge pour une reprise de la procédure ou par extraordinaire infirmer purement et simplement l’ordonnance N° 901/05 rendue le 28 Novembre 2005 ;
Attendu qu’au soutien de son action, la Société TOGO et SHELL expose que par jugement N° 1275/05 rendue le 05 Août 2005, le Tribunal de Lomé l’a condamnée à payer au sieur AH Ag et consorts la somme totale de quatre-vingt neuf millions cent quarante huit mille huit cent quatre-vingt trois virgule quatre cent quatre vingt et onze francs ( 89.148.883,491 F) CFA décomposée comme suit :
Intérêts de droit du 07 Septembre 1993 au 31 Décembre 2004 ---soixante quinze millions sept cent quarante- deux mille quatre cent soixante six virgule huit cent quatre- vingt sept francs ( 75.742.466,887 F) CFA ;
Frais de recouvrement ----onze millions quatre cent soixante et un mille trois cent soixante dix virgule zéro vingt huit francs ( 11.461.370,028 F) CFA ;
TVA sur frais de recouvrement --- deux millions zéro quarante cinq mille zéro
quarante six virgule six cent cinq francs ( 2.045 .046, 605 F) CFA ; que muni de l’expédition dudit jugement le sieur AH Ag et consorts ont fait pratiquer une saisie – attribution sur ses comptes ; que contre cette saisie elle a fait une contestation ; que c’est cette procédure de contestation qui a conduit à l’ordonnance entreprise ; qu’ en réalité cette ordonnance a été rendue au moment où le sieur AH Ag et certains de ses collègues ne sont plus en vie ; que le sieur C Ac est décédé le 05 Juin 2004 ; que le sieur X Ad est mort en Juillet 2002, A Ab le 30 Juillet 2004 ; ADEGNON Koffi le 21 Août 2004 et le sieur AH courant année 2004 ; que c’est pour cette raison qu’il a pu rendre une telle décision ;
Attendu que l’appelante conclut que dès lors, l’infirmation du jugement sus-visé s’impose ; qu’elle sollicite en conséquence qu’il plaise à la Cour prononcer la nullité de cette décision et renvoyer les parties devant le premier Juge pour une reprise d’instance ;
Que si par extraordinaire la Cour déclarait régulière l’ordonnance entreprise, il y a lieu de l’infirmer au fond parce que la saisie attribution contestée a été pratiquée sur la base d’une simple expédition du jugement N° 1275/05 du 05 Août 2005 et non sur la base d’un titre exécutoire au sens de l’article 157 alinéa 2 de l’Acte Uniforme de l’OHADA portant procédures simplifiées de recouvrement de créance et des voies d’exécution ;
Attendu qu’en réponse aux allégations de l’appelante, Maître DOSSOU Kodjovi, Conseil des intimés déclare qu’en réalité, le principal de la créance a déjà été payé par l’appelante à ses clients ; qu’il ne s’agit que du recouvrement des accessoires ; que certes six (6) personnes sur les trente huit (38) intimés sont décédés en cours de procédure ; que s’agissant de plusieurs défendeurs, le décès d’une minorité n’entame en rien la procédure ;
Qu’en outre, le jugement dont l’expédition a servi de base à la saisie-attribution querellée est assorti de l’exécution provisoire ; qu’il pouvait donc valablement servir de base à une saisie-attribution ;
Qu’enfin, il s’agit d’une décision rendue en matière sociale ; qu’on n’a pas donc besoin de payer des frais avant de pouvoir l’exécuter ; qu’il sollicite qu’il plaise à la Cour rejeter les prétentions de l’appelante et confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Attendu que dans ses notes en cours de délibéré en date du 29 Octobre 2008, Maître AQUEREBURU, Conseil de l’appelante a relevé entre autre que :
1- Le Président de la Cour de céans est incompétent pour connaître en premier ressort des incidents de la saisie forcée ; que cette compétence est dévolue au Président du Tribunal de Première Instance ou au magistrat délégué par lui aux termes de l’article 49 de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur le recouvrement de créance ; que c’est donc à tort que les intimés ont demandé au Président de la Cour de céans de déclarer abusif le refus de décaissement par la requérante des sommes objets de la saisie ;
2- Qu’il y a litispendance et connexité dans la mesure où après avoir saisi le Président de la Cour d’appel, les requis ont également saisi le Président du Tribunal de la même demande ; qu’il y a lieu pour la Cour de surseoir à statuer ;
3- Que la demande des intimés est irrecevable dans la mesure où le Président du Tribunal de Première Instance a par ordonnance N° 1863/2008 en date du 07 Octobre 2008 ordonné à l’appelante de consigner la somme querellée sur le compte séquestre CARPA ; que cette ordonnance a été exécutée ; que mieux par ordonnance N° 64 rendue le 17 Octobre 2008 par le Président de la Cour Suprême du Togo a ordonné le sursis à l’exécution de l’ordonnance de référé N° 237/2008 du 1er Octobre 2008 rendue par le Président de la Cour d’Appel de céans et qui autorisait l’exécution du jugement N° 1275/05 ainsi que de l’ordonnance N° 901/05 du 05 août 2005 ; que dans ces conditions, la Cour doit au principal se déclarer incompétente ou par impossible ;
Constater la litispendance et surseoir à statuer ou en cas de rejet de cette demande , constater que les demandes des intimés sont sans objet et les rejeter tout en les condamnant aux dépens ;
Attendu que dans ses autres conclusions en cours de délibéré cette fois datées du 02 Janvier 2009, Maître DOSSOU Kodjovi a fait les observations suivantes suite aux prétentions de l’appelante :
1- La Société TOGO et SHELL a relevé appel de l’ordonnance entreprise depuis le 30 Novembre 2005 ; qu’elle avait au plus deux (2) ans pour déposer sa requête d’appel selon les dispositions de l’article 148 du Code de Procédure Civile ; qu’en l’espèce elle n’ a déposé ladite requête que courant le mois de décembre 2008 soit trois ans après ; qu’il sollicite qu’il plaise à la Cour déclarer comme il l’avait sollicité plus haut cet appel caduc et l’instance périmée ;
2- La Société TOGO et SHELL allègue que les créanciers seraient décédés sans en apporter la preuve ; qu’en réalité seuls six sur la quarantaine de créanciers sont décédés ; que les ayants-droit de ces derniers ont produit leur liste qui a été communiquée au conseil de l’appelante ; que ce moyen n’est donc pas fondé et qu’il sollicite son rejet par la Cour ;
3- La saisie –attribution a été pratiquée sur la base de l’ordonnance N°901/05 du 8 Novembre 2005, ordonnance assortie de l’exécution provisoire ; qu’il s’agit donc d’un titre exécutoire par provision prévu par l’article 32 de l’Acte Uniforme de l’OHADA portant sur l’organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution ; que ce moyen n’est pas fondé non plus et sollicite son rejet et demande qu’il plaise à la Cour confirmer l’ordonnance entreprise pour toutes ses raisons ;
DISCUSSION
Attendu que la Cour de céans a été saisie sur l’appel interjeté par la Société TOGO et SHELL de l’ordonnance N° 901/2005, rendue le 28 Novembre 2005 par le Président du Tribunal de Première Instance de Lomé ; qu’il convient de statuer uniquement sur les moyens soulevés par les parties au soutien ou au rejet de cet appel et d’écarter de la présente procédure les autres arguments qui lui sont étrangers ;
Ainsi et sur le moyen principal tiré du décès de certains intimés
Attendu qu’il est certes vrai que les intimés notamment C Ac ; X Ad ; A Ab ; Z Af et AH Ag
étaient décédés au moment où l’ordonnance entreprise était rendue ; que néanmoins, il ressort des faits du dossier que cette ordonnance n’est que la phase finale d’un long procès ayant opposé la Société TOGO et SHELL et le sieur AH Ag et 37 autres ;
Attendu qu’il s’agit d’un procès dans lequel il y a une pluralité d’intimés assistés par un même conseil (Avocat) ; que le décès de quelques uns des intimés au surplus minoritaires en l’espèce n’entame en rien la procédure dans la mesure où les intimés survivants sont majoritaires ; que mieux aucun des ayants-droit des intimés décédés n’a soulevé l’irrégularité de l’ordonnance entreprise ; qu’il convient donc de rejeter ce moyen comme non fondé ;
Sur le moyen tiré du défaut du titre exécutoire ayant servi de base légale à la saisie litigieuse
Attendu qu’il est incontestable que c’est sur la base d’une expédition du jugement N° 1275/05 rendu le 05 Août 2005 que la saisie attribution querellée a été pratiquée ;
Attendu que ce jugement n’a pas été revêtu de la formule exécutoire ;
Mais attendu qu’il a été assorti de l’exécution provisoire ; qu’il constitue dès lors un titre exécutoire par provision ;
Attendu en effet qu’aux termes de l’article 161 du code de Procédure Civile, « les ordonnances de référé sont exécutoires par provision, sans caution à moins que le président n’ait ordonné qu’il en serait fourni une ; qu’en cas de nécessité, le Président peut ordonner l’exécution de son ordonnance sur minute » ;
Attendu qu’il résulte de ce texte que les ordonnances de référé sont assorties de plein droit de l’exécution provisoire par le législateur ; qu’ainsi, lorsqu’une ordonnance de référé a été déclarée exécutoire sur minute , le fait que cette minute n’ait pas été revêtue de la formule exécutoire ne permet pas à la partie perdante en l’espèce de demander l’annulation de la saisie ;
Attendu en outre que l’ordonnance du Juge des référés assortie de l’exécution provisoire vaut condamnation de payer ; qu’elle constitue un titre constatant une créance liquide et exigible permettant l’exercice d’une mesure d’ une exécution forcée ; qu’il suit que c’est donc à tort que l’appelante en l’espèce demande l’infirmation de l’ordonnance attaquée ;
Sur l’existence de l’ordonnance N°64 de la Cour Suprême portant sursis à exécution
Attendu qu’il ressort de l’article 15 du traité de l’OHADA que « les pourvois en cassation portant sur l’application des Actes Uniformes de l’ OHADA sont portés devant la Cour commune de Justice et d’Arbitrage soit directement par l’une des parties à l’instance, soit sur renvoi d’une juridiction nationale statuant en cassation…. » ; qu’il découle de cet article que les Cours de cassation des Etats parties à l’OHADA ne peuvent à la limite que servir de courroie de transmission des dossiers de pourvoi à la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ; qu’elles ne sont compétentes pour statuer sur les mérites de ses pourvois ; pas plus que d’ailleurs accorder des sursis à l’exécution des décisions frappées de pourvoi ; que c’est donc en violation des dispositions de l’article précité et par conséquent irrégulièrement que ce sursis a été sollicité et obtenu ; qu’il convient donc de rejeter aussi ce moyen ;
Attendu qu’il résulte de tout ce qui précède que l’ensemble des moyens soulevés par l’appelante n’est pas fondé ; qu’il échet de la dire mal fondée en son appel et de confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en appel ;
EN LA FORME
Reçoit l’appel ;
AU FOND
Le déclare mal fondé ;
En conséquence, confirme en ses dispositions et teneur l’ordonnance N° 901/05 rendue le 28 Novembre 2005 par le Président du Tribunal de Lomé ;
Condamne l’appelante aux dépens ;
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel de Lomé, Chambre Civile, les jour, mois et an que dessus ;
Et ont signé le Président et le Greffier./-


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de lomé
Numéro d'arrêt : 39/09
Date de la décision : 10/03/2009

Analyses

VOIES D'EXECUTION - SAISIE-ATTRIBUTION - VALIDITE DE LA SAISIE - EXPEDITION DE JUGEMENT ASSORTI DE L'EXECUTION PROVIVOIRE - TITRE EXECUTOIRE PAR PROVISION (OUI) - ARTICLE 32 AUPSRVE TRAITE - COUR DE CASSATION NATIONALE - COMPETENCE - ARTICLE 15 TRAITE OHADA


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;tg;cour.appel.lome;arret;2009-03-10;39.09 ?
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