COUR SUPREME DU TOGO
CHAMBRE JUDICIAIRE
ARRET N°044/16 DU 21 AVRIL 2016
Audience publique ordinaire du jeudi 21 avril 2016
Pourvoi : n°83/RS/10 du 16 septembre 2010
Affaire : Dame B Ab
contre
Y Aa
Le juge d’appel, en n’énumérant pas les pièces du dossier desquelles il a tiré la preuve du droit de propriété du défendeur au pourvoi, alors même qu’il n’a pas ordonné les mesures d’instruction sollicitées par le demandeur relativement à certaines pièces, ne motive pas sa décision telle que l’exige l’article 9 de l’ordonnance n°78-35 du 07 septembre 1978 portant organisation judiciaire.
A l’audience publique ordinaire de la chambre judiciaire de la Cour suprême, tenue au siège de la Cour à Lomé, le vingt et un avril deux mille seize, est intervenu l’arrêt suivant :
Etaient présents :
Messieurs
ABDOULAYE
PRESIDENT
KODA
ADI-KPAKPABIA
MEMBRES
A
X
C
M. P.
Et Maître
ADDI
GREFFIER
LA COUR
Sur le rapport de monsieur Badjona SAMTA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême ;
Vu l’arrêt n°53/10 du 29 avril 2010 rendu en matière civile par la Cour d’appel de Lomé ;
Vu la requête à fin de pourvoi de maître Gagnon TOBLE, conseil de la demanderesse au pourvoi ;
Vu le mémoire en réponse de maître Kodjo Joseph ALONYO, conseil du défendeur au pourvoi ;
Vu les conclusions écrites de madame le premier avocat général près la Cour suprême ;
Vu les autres pièces de la procédure ;
Vu la loi organique n°97-05 du 06 mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour suprême et le décret n°82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile ;
Ouï le conseiller Badjona SAMTA en son rapport ;
Ouï maître AZIBLI, substituant maître TOBLE, conseil de la demanderesse au pourvoi ;
Nul pour maître ALONYO, absent et non représenté, conseil du défendeur au pourvoi ;
Le Ministère public entendu ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant en matière civile et en état de cassation sur le pourvoi formé le 16 septembre 2010 par maître TOBLE, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de dame Ab B contre l’arrêt n°53/010 rendu le 29 avril 2010 par la Cour d’appel de Lomé dans le différend qui oppose sa cliente au nommé Y Aa ;
EN LA FORME
Attendu que le pourvoi a été fait dans les forme et délai de la loi ; que par conséquent, il est, en la forme, recevable ;
AU FOND
Sur le premier moyen pris en sa première branche
Vu l’article 9 de l’ordonnance n°78-35 du 07 septembre 1978 portant organisation judiciaire ;
Attendu qu’il ressort de l’arrêt confirmatif déféré que 25 ans après que la demanderesse a acquis une parcelle de terrain et le prix entièrement libéré entre les mains du vendeur d’alors, Y Ad le neveu de celui-ci, défendeur au pourvoi, Y Aa a assigné celle-ci pour s’entendre confirmer son droit de propriété sur la parcelle ;
Attendu que l’arrêt dont pourvoi a purement et simplement confirmé la décision du premier juge qui, pour faire droit aux prétentions de Aa Y a, entre autres, affirmé que dame B, en s’opposant à une demande d’enquête en cabinet sur les mérites du procès-verbal de réunion, était de mauvaise foi et aussi qu’en s’opposant à une expertise graphologique des signatures sur le reçu de vente par elle produit, elle manquait d’arguments, pour finir par conclure « qu’il est constant ainsi qu’il ressort des pièces du dossier que la parcelle vendue à dame B par le sieur Y Ad n’est pas la propriété de ce dernier » ;
Attendu que suivant l’article 9 de l’ordonnance n°78-35 du 07 septembre 1978 portant organisation judiciaire, « les jugements et arrêts doivent être motivés à peine de nullité » ;
Attendu que par le moyen susvisé, il est reproché aux juges de fond de s’être contentés de dire « qu’il est constant ainsi qu’il ressort des pièces versées au dossier que la parcelle vendue à dame Ab B par Y Ad n’est pas la propriété de ce dernier » alors qu’ils n’indiquent pas les pièces versées au dossier à partir desquelles la preuve du droit de propriété est faite au profit du défendeur au pourvoi ;
Attendu que la motivation de l’arrêt critiqué tient à ce qu’il ressort des pièces versées au dossier que la parcelle vendue par Y Ad n’est pas la propriété de ce dernier ;
Qu’en statuant ainsi qu’il n’a été nullement énuméré les pièces versées au dossier encore qu’il est constant que des mesures d’instruction sollicitées relativement à certaines pièces n’ont pu être ordonnées, la Cour ne saurait, à bon droit, tirer de celles-ci la preuve du droit de propriété d’une des parties sans subir le reproche de manque de motifs ; qu’il suit que la première branche du moyen est fondée et l’arrêt encourt cassation sur ce point ;
Attendu qu’aux termes de l’article 234 alinéa 2 du code de procédure civile, si la Cour retient l’un des moyens invoqués, elle n’a pas à statuer sur les autres dès lors que le moyen retenu entraîne la cassation ; qu’en l’espèce il n’y a pas lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen et sur le second moyen ;
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, publiquement en matière civile et en état de cassation ;
EN LA FORME
Reçoit le pourvoi ;
AU FOND
Casse et annule l’arrêt n°053/010 du 29 avril 2010 rendu par la Cour d’appel de Lomé ;
Renvoie cause et parties devant la même Cour autrement composée pour y être statué conformément à la loi ;
Ordonne la restitution de la taxe de pourvoi ;
Condamne la défenderesse au pourvoi aux dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt soit faite en marge ou au pied de la décision critiquée ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre judiciaire de la Cour suprême, en son audience publique ordinaire du jeudi 21 avril 2016, à laquelle siégeaient :
Monsieur ABDOULAYEYaya, président de la chambre judiciaire de la Cour suprême, PRESIDENT ;
Messieurs Koffi KODA, Essozinam ADI-KPAKPABIA, Badjona SAMTA et Koffi BLAMCK, tous quatre, conseillers à ladite chambre, MEMBRES ;
En présence de monsieur Ac C, troisième avocat général près la Cour suprême ;
Et avec l’assistance de maître ADDI Kokou Lakpaye, greffier à ladite chambre, GREFFIER ;
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le président et le greffier./.