COUR SUPREME DU TOGO
CHAMBRE JUDICIAIRE
ARRET N°053/16 DU 19 MAI 2016
Audience publique ordinaire du jeudi 19 mai 2016
Pourvoi : n°93/RS/12 du 10 mai 2012
Affaire : A Ac
contre
A Ad
Viole le principe du contradictoire posé à l’article 50 du code de procédure civile, le juge d’appel qui rend une décision de partage de biens litigieux dans les proportions de deux tiers pour A Ad, fils aîné, et un tiers pour A Ac, sans préalablement inviter les parties à lui faire part de leurs observations.
A l’audience publique ordinaire de la chambre judiciaire de la Cour suprême du Togo, tenue au siège de ladite Cour, le jeudi dix-neuf mai deux mille seize, est intervenu l’arrêt suivant :
Etaient présents :
Messieurs
BASSAH
PRESIDENT
ADI-KPAKPABIA
SAMTA
MEMBRES
C
X
B
M. P.
Et Maître
AGBEMADON
GREFFIER
LA COUR
Sur le rapport de monsieur Koffi BLAMCK, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême;
Vu l’arrêt n°65/11 rendu le 9 août 2011 par la Cour d’appel de Aa ;
Vu la requête à fin de pourvoi de maître Yobé SAMBIANI, conseil du demandeur au pourvoi ;
Vu le mémoire en réponse de maître Paul LARE, conseil du défendeur au pourvoi ;
Vu les conclusions écrites de madame le premier avocat général près la Cour suprême ;
Vu les autres pièces de la procédure ;
Vu la loi organique n°97-05 du 06 mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour suprême et le décret n°82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile ;
Ouï le conseiller BLAMCK en son rapport ;
Ouï les conseils des parties ;
Le Ministère public entendu ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant en matière civile sur le pourvoi formé le 10 mai 2012 par maître Yobé SAMBIANI, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de TCHIMBIADJA Monoïbe, contre l’arrêt n°65/2011 rendu le 9 août 2011 par la Cour d’appel de Aa qui a confirmé, après avoir déclaré l’appel partiellement fondé et infirmé le jugement entrepris en ce qu’il a ordonné le partage en deux parts égales des biens querellés entre les parties, a dit que l’ensemble des biens dont s’agit sera réparti dans les proportions des deux tiers pour A Ad et d’un tiers pour TCHIMBIADJA Monoïbe, puis confirmé le jugement attaqué en ses autres points non contraires ;
EN LA FORME
Attendu qu’il ressort des éléments du dossier que le pourvoi a été fait dans les forme et délai de la loi ; qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Sur le moyen tiré du défaut de base légale ;
Vu l’article 50 du code de procédure civile ;
Attendu que cet article dispose : « Le juge doit, en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office ou sur les explications complémentaires qu’il a demandées, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations » ;
Attendu qu’il ressort des énonciations de l’arrêt infirmatif attaqué et des éléments du dossier que le 6 juin 2009, A Ad a attrait son frère consanguin et cadet A Ac par-devant le tribunal de première instance de Dapaong pour s’entendre ordonner le partage des biens meubles et immeubles acquis en travaillant ensemble ; que par jugement n°30/2010 du 22 mars 2010, le tribunal, après avoir déclaré lesdits biens communs, a ordonné leur partage en deux parts égales ainsi qu’un inventaire de tous les autres biens aux motifs que les biens querellés constituent la copropriété des deux frères qui les ont acquis ensemble de leurs revenus des champs et du commerce cogérés ;
Attendu que pour justifier le partage des biens querellés dans les proportions des deux tiers pour A Ad et d’un tiers pour A Ac, la Cour retient qu’au surplus, quand bien même l’intimé aurait commencé à travailler au même moment que son grand frère pour la constitution du patrimoine dont il s’agit, il ne devra honnêtement s’attendre à se voir attribuer en cas de partage, une part égale des biens composant ledit patrimoine dès lors qu’il n’ignore pas que selon les usages, tout partage entre frères se fait avec un léger avantage au fils aîné ; que l’équité recherchée évoque l’idée d’une bonne justice et implique que chacune des parties au procès puisse soutenir sa cause dans les conditions qui ne la désavantagent pas substantiellement à la partie adverse ; qu’en se bornant à relever d’office les usages et pratiques ayant constitué le fondement de sa décision sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, la Cour d’appel n’a pas mis le juridiction de cassation en mesure d’exercer son contrôle, privant ainsi sa décision de base légale ; qu’il y a lieu de casser et d’annuler l’arrêt attaqué sans renvoi et de dire que le jugement ayant ordonné le partage en deux parts égales des biens querellés emporte ses pleins et entiers effets ;
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, publiquement en matière civile et en état de cassation ;
EN LA FORME
Reçoit le pourvoi ;
AU FOND
Casse et annule sans renvoi l’arrêt n°65/2011 rendu le 9 août 2011 par la Cour d’appel de Aa ;
Dit que e jugement n°30/2010 du tribunal de première instance de Dapaong emporte ses pleins et entiers effets ;
Ordonne la restitution de la taxe de pourvoi ;
Condamne le défendeur au pourvoi aux dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt soit faite en marge ou au pied de la décision critiquée ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre judiciaire de la Cour suprême, en son audience publique ordinaire du jeudi dix-neuf mai deux mille seize, à laquelle siégeaient :
Monsieur Koffi Agbenyo BASSAH, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême, PRESIDENT ;
Messieurs Essozinam ADI-KPAKPABIA, Badjona SAMTA, Koffi DEGBOVI et Koffi BLAMCK, tous quatre, conseillers à ladite chambre, MEMBRES ;
En présence de monsieur Ab B, troisième avocat général près la Cour suprême ;
Et avec l’assistance de maître Sassougan AGBEMADON-SEKPLA, greffier à la Cour suprême, GREFFIER ;
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le président et le greffier./.