COUR SUPREME DU TOGO
CHAMBRE JUDICIAIRE ARRET N°157/21 du 16 décembre 2021 _________ Pourvoi N°137/RS/18 du 3 septembre 2018 AFFAIRE
Madame X Aaa
C/
Y Ab Ae B: MM KODA : PRESIDENT SAMTA ABBEY-KOUNTE MEMBRES AMOUSSOU-KOUETETE* AYEVA
KANTCHIL-LARRE : M.P. BISSETI-MARDJA : GREFFIER
REPUBLIQUE-TOGOLAISE Travail-Liberté-Patrie
« AU NOM DU PEUPLE TOGOLAIS »
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU JEUDI SEIZE DECEMBRE DEUX MILLE VINGT ET UN (16-12-21)
A l’audience de la chambre judiciaire de la Cour suprême, tenue au siège de ladite Cour, le jeudi seize décembre deux mille vingt et un, est intervenu l’arrêt suivant : LA COUR, Sur le rapport de monsieur Anani AMOUSSOU-KOUETETE, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême ; Vu l’arrêt n°103/18 en date du 22 Février 2018 rendu par la Cour d’appel de Lomé ; Vu la requête à fin de pourvoi de maître Ahlin KOMLAN, avocat au barreau du Togo, conseil de la demanderesse au pourvoi ; Vu le mémoire en réponse de maîtres Mathias A. LATEVI et Christophe BISSARI, tous avocats au barreau du Togo, conseil des défendeurs au pourvoi ; Vu les conclusions écrites de monsieur Ad C, 4ème avocat général près la Cour suprême ; Vu les autres pièces de la procédure ; Vu la loi organique n°97-05 du 06 mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour suprême et le décret n°82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile ; Ouï monsieur Anani AMOUSSOU-KOUETETE en son rapport ; Nul pour maître Ahlin KOMLAN, conseil de la demanderesse au pourvoi, absent et non représenté ; Nul pour maître Christophe BISSARI, conseil du défendeur au pourvoi, absent et non représenté ;
Ouï maître Matthias LATEVI, conseil du défendeur au pourvoi ;
Le ministère public entendu ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Statuant en matière civile et en état de cassation sur le pourvoi formé le 3 septembre 2018 par maître Ahlin KOMLAN, avocat au barreau du Togo, agissant au nom et pour le compte de dame X Aa, contre l’arrêt N°103/2018 rendu le 22 février 2018 par la Cour d’appel de Lomé, lequel arrêt a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et condamné l’appelante aux dépens ; En la forme Attendu que l’arrêt dont pourvoi a été rendu le 22 février 2018 et signifié le 2 juillet 2018 ; que le pourvoi ayant été formé le 3 septembre 2018, le défendeur au pourvoi demande qu’il soit déclaré irrecevable pour avoir été fait hors délai en violation de l’article 222 du code de procédure civile qui a prévu un délai de deux (02) mois pour le faire ; Attendu que le 2 septembre 2020, date d’expiration du délai de pourvoi étant tombé sur un dimanche, jour non ouvrable, il y a lieu de faire application de l’article 63 alinéa 2 du code de procédure civile, lequel dispose que « le délai qui expirerait un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant », pour dire que c’est à bon droit que le pourvoi a été formé le lundi 3 septembre 2020 ; qu’il suit que le présent pourvoi doit être déclaré recevable pour avoir été fait dans les forme et délai de la loi ; Au fond
Sur les premier et deuxième moyens réunis
Vu les articles 497 alinéa 4 ancien du code des personnes et de la famille et 1988 du code civil applicable au Togo ;
Attendu qu’aux termes desdits articles « le gérant ne peut aliéner les biens qu’avec le consentement unanime des indivisaires lorsque cette aliénation aurait pour effet de mettre fin à l’indivision » (article 497 alinéa 4) et « le mandat conçu en termes généraux n’embrasse que les actes d’administration. S’il s’agit d’aliéner ou d’hypothéquer, ou quelques autres actes de propriété, le mandat doit être exprès » (article 1988) ; Attendu qu’il ressort des énonciations de l’arrêt confirmatif attaqué et des éléments du dossier que suivant exploit d’huissier en date du 1er juin 2006, le sieur Y Ab Ae a fait donner assignation à dame X Aa pour s’entendre confirmer son droit de propriété sur une parcelle de terrain d’une contenance de deux (02) ares soixante-sept (67) centiares, sise à Lomé, quartier Attikpa ; qu’il prétend avoir acquis ladite portion suivant reçu de vente en date du 8 janvier 1984, ce que conteste la requise qui soutient que la parcelle en cause lui a été attribuée après partage du domaine successoral et que la vente à lui concédée est inopposable à la succession ; que suivant jugement N°1524/09 du 29 mai 2009, le Tribunal de Lomé a déclaré bonne et parfaite la vente dont s’agit et confirmé le droit de propriété du requérant sur l’immeuble ; que sur appel de la requise, la Cour d’appel de Lomé a, après avoir déclaré l’appel mal fondé, confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions suivant arrêt N°103/18 du 22 février 2018 dont pourvoi ;
Attendu que pour décider comme elle l’a fait, la Cour d’appel a relevé que « la vente étant translative de droit de propriété, la parcelle vendue par le mandataire de la collectivité ATTIKPA-KAGUNU est sortie du patrimoine de cette collectivité avant le jugement de partage dont se prévaut l’appelante » ; Attendu qu’en statuant ainsi, la Cour d’appel a omis de s’assurer que ladite vente avait recueilli le consentement de tous les indivisaires, ou, à défaut, que le mandataire vendeur avait, du fait d’un mandat exprès, les pleins pouvoirs pour la consentir ; que la Cour de céans, juge de droit qui contrôle la conformité des décisions aux normes légales, n’étant pas un troisième degré de juridiction pour apprécier les faits et en tirer argument, c’est en vain que le défendeur au pourvoi, dont l’analyse n’est d’ailleurs pas celle de la Cour d’appel, se fonde sur l’assignation en partage faite en 1985 par la demanderesse au pourvoi pour déduire des termes de celle-ci qu’il y a eu mandat exprès ; que dans l’impossibilité d’apporter la preuve du consentement unanime des indivisaires ou de l’existence au dossier d’un mandat exprès, l’arrêt attaqué a donc violé les articles 497 et 1988 visés aux moyens ; qu’il suit que les deux moyens réunis sont fondés et que l’arrêt attaqué doit encourir cassation de ces chefs ; Attendu que conformément aux dispositions de l’article 234 alinéa 2 du code de procédure civile, point n’est besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi, ceux retenus ayant entraîné la cassation de l’arrêt attaqué ;
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, publiquement, en matière civile et en état de cassation ; En la forme
Reçoit le pourvoi ; Au fond
Casse et annule l’arrêt N°103/2018 rendu le 22 février 2018 par la Cour d’appel de Lomé ; Renvoie cause et parties devant la même cour autrement composée pour qu’il soit, par elle, statué à nouveau conformément à la loi ; Ordonne la restitution de la taxe de pourvoi ; Condamne le défendeur au pourvoi aux dépens ; Ordonne que mention du présent arrêt soit faite en marge ou au pied de la décision critiquée ; Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre judiciaire de la Cour suprême, en son audience publique ordinaire du jeudi seize décembre deux mille vingt et un et à laquelle siégeaient : Monsieur Koffi KODA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême, PRESIDENT ; Monsieur Badjona SAMTA, madame Kayi ABBEY-KOUNTE, messieurs Anani AMOUSSOU-KOUETETE et Tcha-Tchibara AYEVA, tous quatre, conseillers à la chambre judiciaire de la Cour suprême, MEMBRES ;
En présence de monsieur Af A, 2ème avocat général près la Cour suprême ; Et avec l’assistance de maître Tilate BISSETI-MARDJA, greffier à la Cour suprême, GREFFIER ; En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier. /.